"Langues de bois, de pierre et de verre" reviewed by Carlo Tedeschi (original) (raw)

2018, Cahiers de civilisation médiévale

Le livre d’Estelle Ingrand-Varenne offre à tous les spécialistes de culture écrite médiévale – sans se limiter aux épigraphistes – de nouvelles occasions de réflexion. Cet imposant volume – 500 p. environ – mérite une lecture attentive et minutieuse, se permettant, en raison des nombreux renvois internes, de fréquents retours en arrière. Il est structuré en cinq parties : L’épigraphie médiévale au regard de la linguistique moderne, Les codes du discours épigraphique, Rhétorique du discours épigraphique, Les langues des inscriptions et enfin Espaces et langues, avec des subdivisions internes facilitant l’approche de concepts qui ne sont pas toujours familiers aux spécialistes d’épigraphie. Une ample bibliographie divisée en trois parties (sources, sciences historiques et sciences du langage) enrichit le volume. Comme le laissent entendre le titre général de l’oeuvre et celui de certaines sections, l’a. adopte, pour observer le phénomène épigraphique, un point de vue linguistique ; mais il faut préciser que, malgré cet intérêt dominant, les thèmes affrontés dépassent largement les questions strictement linguistiques et touchent au sens même de la communication épigraphique au Moyen Âge, qui a joué un rôle important dans la construction de la culture européenne...

Book Review Pierre Vendassi Les Chretiens de Chine

Dans son livre «Les Chrétiens de Chine », Pierre Vendassi présente les résultats de sa recherche en sociologie qui porte sur la conversion religieuse. L'auteur étudie les Chinois qui se tournent vers une forme ou l' autre du christianisme. Son approche ne se limite pas à la question du « pourquoi» mais fait porter son effort sur les mécanismes – les « comment » – qui soutiennent une telle démarche. Les données collectées sont essentiellement des entretiens semi-directifs avec 73 convertis, rencontrés principalement à Shanghai mais aussi à Bordeaux. A travers ces discours, le lecteur découvre huit communautés chré-tiennes de Shanghaï – en grande partie des Églises-maisons, c' est-à-dire des communautés non-déclarées auprès des autorités gouvernementales et qui se réunissent de fait plus discrètement. L'ouvrage se divise en six chapitres qui progressivement proposent d' expliciter comment la conversion religieuse s'articule autour de trois types de processus: affiliation, conversion et confession. Il ne s'agit pas de trois étapes successives au cours d' un parcours linéaire mais de trois dynamiques conceptuellement distinctes, réversibles, fluctuantes et asynchroniques. Pour Pierre Vendassi, la conversion s' alimente de ces trois dynamiques tout en demeurant au fond une quête de sens. L' auteur montre que les personnes rencontrées deviennent chrétiennes en apprenant à recon-naître, sacraliser puis transcender des modèles sociaux non spécifiquement chrétiens, ni radicalement nouveaux mais déjà présents dans leur environne-ment. La notion de famille est en cela largement explorée au cours de l' ouvrage. Ce travail a pour première qualité d' être pionnier parmi les contributions académiques d'envergure en langue française sur le christianisme en Chine. Il a pour grand mérite de ne pas réduire la « question chrétienne » à une question politique et le coeur de la recherche demeure les personnes engagées dans des processus de conversion. Plus encore, l' analyse théorique propose de manière très pertinente un modèle dynamique de la conversion, qui en plus de se pencher sur des mécanismes concrets et comparables, montre combien affiliation et conversion, à la jonction de plusieurs facteurs, peuvent être par-tielles voire réversibles. Ensuite, la qualité des observations et l' analyse qui en est faite, permettent d'illustrer en quoi le développement du christianisme en Chine se situe dans un entre-deux, alliant continuité et rupture par rapport au contexte socioreligieux chinois. En présentant les témoignages directs de nom-breux convertis, Pierre Vendassi permet au lecteur d' entrevoir à quel point ces nouveaux chrétiens ne sont ni dans un strict rejet de leur environnement (poli-tique, religieux et économique), ni dans une simple réincarnation de la religion chinoise populaire.

[FRENCH] De la pierre à la plume. Errances littéraires des diamants de Charles le Téméraire, duc de Bourgogne (Medieval History)

2021

À la suite de sa déroute à Grandson face aux Confédérés suisses (le 2 mars 1476), le camp du dernier duc de Bourgogne est abondamment pillé de ses richesses. Parmi les luxueuses marchandises perdues, trois gros diamants qui, tout au long de l’époque moderne font de la réputation de ces pierres – si ce n’est la légende – les joyaux perdus de Charles le Téméraire. Au xixe siècle, ces diamants deviennent un topos historique et littéraire récurrent chez les écrivains suisses et français et qui, chez quelques auteurs helvétiques et francophones, contribuent à la mise en prose d’une sorte de « roman national suisse ». En outre, l’origine même de ces diamants est littéraire. Mais entre les lignes des lapidaires du xive siècle et des encyclopédies médiévales, se lit une ascendance tangible de la provenance de ces diamants : c’est en Inde, à l’heure où les voies d’accès pour y parvenir sont toujours closes aux Européens, que se poursuit l’acheminement de pierres précieuses, de perles et de diamants jusqu’en Bourgogne. Cet intérêt, cet attrait pour la richesse orientale, reste révélatrice en un sens d’un goût pour le monde. L’objet de cette communication est d’abord d’étudier, à travers une brève compilation de textes antiques et médiévaux, l’origine géographique et historique de ces pierres ; et d’en suivre ensuite l’itinéraire, à la lumière d’une littérature nationalisante, de la Bourgogne médiévale à la Suisse contemporaine. La finalité de cet exercice réside d’abord dans la confrontation de sources historiques et littéraires. Il permettra de souligner les bénéfices de cette pluridisciplinarité et d’en saisir les apports, les aspérités et les limites dans la construction du discours historique.

Fortier, "Les arbres et les signes: recension de Comment pensent les forêts d'Eduardo Kohn" [2018]

Recension de : Eduardo Kohn, Comment pensent les forêts : Vers une anthropologie au-delà de l’humain, trad. Grégory Delaplace, Paris, Zones Sensibles, 2017. Lien en ligne : http://www.laviedesidees.fr/Les-arbres-et-les-signes.html Les anthropologues étudient traditionnellement les différentes manières dont les humains se représentent le monde. Ce faisant, ils supposent qu’il ne puisse exister d’anthropologie que des humains puisque seuls ces derniers sont capables de former des représentations. L’ouvrage d’Eduardo Kohn entend en finir avec ce type d’anthropologie. À rebours de la tradition, il soutient que la faculté de représentation n’est en rien le propre de l’humain ; une anthropologie au-delà de l’humain est donc non seulement possible, mais également souhaitable. Il s’inspire pour ce faire de son expérience de terrain chez les Runa d’Ávila (Amazonie équatorienne). L’ouvrage détonnant de Kohn – initialement publié en 2013 sous le titre de How forests think (2013) – se trouve à présent disponible en français grâce au beau travail des éditions Zones Sensibles et à la remarquable traduction de Grégory Delaplace.

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