POUR UNE ÉTUDE DE L'APOSTROPHE INJURIEUSE (original) (raw)
2007, Autour des langues et du langage : perspective pluridisciplinaire, Universitatea din Grenoble, 2007, Presses Universitaires de Grenoble, pp. 71-78.
Through a comparison of the insulting vocative to other possible examples of vocatives (titles, tender words or denotative nouns in vocative) we'll try to study the functioning of insulting nouns as well as the semantic restrictions concerning the vocative construction itself. 1. Introduction Malgré la relativisation de la définition des injures par les pragmaticiens, qui mettent l'accent sur leur effet perlocutoire, sur leur réception qui les confirmerait comme telles ou les infirmerait, nous considérons que leur formulation et le matériau langagier (lexical, syntaxique) utilisé dans ce sens n'en sont pas moins importants. En fait, l'effet d'injure est le résultat de l'interaction de plusieurs composantes, dont certaines proprement linguistiques, d'autres extra-ou paralinguistiques. Dans ce qui suit, nous allons analyser le rôle de chacune de ces composantes et surtout une des constructions syntactico-énonciatives qui servent l'injure, à savoir l'apostrophe, considérée dans deux de ses réalisations: comme apostrophe neutre vs injurieuse. A travers une comparaison d'apostrophes construites sur un N titre, sur un N insultant ou hypocoristique ainsi que sur des N dénotatifs modifiés ou non, nous étudierons tant le fonctionnement d'un type particulier de N (les N insultants) que les contraintes sémantiques qui pèsent sur la construction même de l'apostrophe. 2. La composante lexicale La composante lexicale ne suffit pas-comme on pourrait le conclure du fait que le terme injure désigne couramment toute une série de mots offensants, recueillis dans des dictionnaires d'injures-à définir une injure. Aussi parle-ton plutôt d'une classe ouverte, mal définie de N insultants, qui comporte un fonds stable de N − les «Noms de qualité»(NQ) (J. CL. MILNER, 1978) − appelés ainsi d'après leur valeur axiologique (le plus souvent négative), et des créations plus ou moins inédites, de nature métaphorique ou métonymique, reconnues comme insultantes grâce à leur inadéquation référentielle autant qu'à l'intonation et à des indices paralinguistiques (mimogestualité) et extralinguistiques (situation conflictuelle). Inadéquation référentielle, mais pas situationnelle, car généralement cet écart de langage et de conduite n'est qu'une sanction par laquelle l'injurieur essaye de corriger une attitude de l'injurié qui lui crée du désagrément. Issues d'un vif mouvement affectif, les injures sont de véritables mises en scène, où la parole n'est qu'un des moyens d'expression. Ainsi peut-on expliquer le fonctionnement comme injures de termes sans aucun contenu appréciatif, des N ordinaires, qui sous le coup d'une énonciation particulière, acquièrent une signification nouvelle: de marques de rejet. C'est là une conséquence de la recherche d'expressivité caractéristique de tout discours affectif. La contrepartie des injures, les termes caressifs (hypocoristiques/mots tendres) sont tout aussi nombreux, car la relation intime qu'ils sont censés traduire et renforcer dispense en