Analogies d’analogies botaniques : épiclèses divines et métaphores du développement humain (original) (raw)
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2024
De l’Iliade et l’Odyssée jusqu’à la tragédie attique, les textes poétiques grecs de l’époque archaïque et classique ont souvent eu recours à des métaphores décrivant la vie humaine à travers le monde des plantes. Certaines de ces images – par exemple, la fleur comme métaphore de la jeunesse ou de la beauté – sont si fréquentes que l’on est tenté d’y voir de simples clichés, d’autant plus qu’à travers la poésie latine, puis médiévale, elles sont entrées dans le langage commun des littératures européennes. D’autres, toutefois, continuent d’interroger les commentateurs : pourquoi les larmes des héros homériques sont-elles dites « florissantes » ? Que veut dire au juste le vers de Sappho « je suis plus verte que l’herbe » ? En quel sens le héraut de l’Agamemnon d’Eschyle annonce-t-il avoir vu la mer Égée « fleurir de cadavres » ? Le double caractère, familier et dépaysant, des métaphores botaniques grecques est au centre de cet ouvrage. En reconstruisant les pans de l’encyclopédie culturelle grecque qui donnaient un sens à ces images, cette étude retrouve une manière particulière, propre à la poésie grecque archaïque et classique, d’envisager le règne végétal. Les textes poétiques mettent en exergue les modifications qui s’opèrent sur la sève des plantes, les qualités sensorielles de la végétation, la relation complexe entre la plante et ses parties. Cette « botanique sauvage » de la poésie archaïque et classique a servi à construire de nombreuses métaphores, concernant le rôle des humeurs dans la vie des êtres humains, le passage entre les âges, les modifications de l’aspect visible d’une personne, l’alternance de la santé et de la maladie, le surgissement des émotions, mais aussi les relations entre les enfants et leurs parents, entre les descendants d’un lignage et leurs ancêtres ou entre une société et le territoire qu’elle occupe. S’inspirant à la fois de la théorie cognitive de la métaphore et des approches anthropologiques des textes anciens, ce livre défend l’idée que les images végétales des textes grecs participent à la construction de véritables modèles culturels, c’est-à-dire des schémas de la pensée qui utilisent le savoir botanique pour bâtir des représentations partagées du fonctionnement du corps humain et des rapports de parenté. De tels modèles sont d’ailleurs bien attestés au-delà des frontières, poreuses, de la poésie archaïque et classique. Ils trouvent leur place en philosophie et en médecine, dans des représentations religieuses et des spéculations étymologiques, et peuvent même fournir le fil de récits répétés tout au long de l’Antiquité grecque et romaine. En définitive, les métaphores botaniques grecques témoignent d’une manière, propre à la culture grecque antique, de « penser les humains à travers les plantes ».
Alkemie. Revue de litterature et philosophie, 2007
S'il nous fallait suivre l'exemple de Kant, il faudrait croire que l'art des jardins, entendu comme l'une des modalités d'expression esthétique des idées par l'intermédiaire d'intuitions sensibles, n'est ni plus ni moins qu'une sorte de peinture. Pour le dire simplement, contempler un jardin ou se promener dans ses allées, ce serait comme naviguer au sens propre dans les profondeurs et dans l'ampleur d'un tableau, avec le privilège d'en savourer les vues en trois dimensions, d'en percevoir l'esthétique sonore, olfactive, et tactile, et surtout en essayant d'en distinguer, dans cette succession, dans ce tressage, le sens. Là où la peinture proprement dite ne peut offrir qu'une copie de la réalité (quelle que soit cette réalité), voici que le jardin « kantien » ouvre au spectateur l'extension corporelle dans sa réalité. Une réalité attentivement défrichée, composée d'éléments, de formes, naturels, libérés des sangles rudimentaires du hasard taciturne, et assorties les uns aux autres, de telle sorte qu'ils s'accroissent, volubiles, en vénusté, sous le regard et au pas du promeneur, vers une bien fondée taxodicée. 2 Bien sûr, Kant ne parle nulle part de «taxodicée»; de fait, qui a entendu parler d'une chose pareille ? Peut-être seulement le jardinier, qui sait si bien que la végétation de l'Eden, abandonnée par le péché des premiers aînés à l'empire du nécessaire naturel, croît dans le chaos, inesthétique, donc sans la liberté de réaliser l'impératif de compréhensibilité. Mais, semble-t-il, la beauté picturale du jardin tient précisément de ce qu'il quitte l'état naturel, sauvage, des éléments végétaux qui le composent, elle tient de leur disposition dans un nouvel ordre, dans lequel chacun séparément et tous ensemble peuvent communiquer. 3 Cette transformation, véritable traduction de l'état végétal muet, dans celui de l'élément doué de sens, semble n'être possible que par l'intermédiaire d'une certaine ingéniosité, au terme de laquelle la nature sauvage est domesticisée, adoucie, sans être artificialisée-comme le remarque justement Rosario Assunto 4. Dans une telle perspective, l'art des jardins donne l'impression de rencontrer, quelque part aux niveaux souterrains, des sèves nourrissantes, une certaine stratégie discursive, par l'intermédiaire de laquelle-comme le montre
Revue d'éthique et de théologie morale, 2015
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Métaphysique divine et théologie naturelle
Discusiones Filosóficas
El reconocimiento de Dios a partir del conocimiento de las verdades matemáticas explica la presencia, en la totalidad de la obra filosófica de Marin Mersenne (1588-1648), de un discurso científico sobre la divinidad o de su representación a través de las ciencias matemáticas. Fácilmente, es posible encontrar, en los escritos del Mínimo, innumerables imágenes, comparaciones, analogías y expresiones que ilustran la concepción de un Dios matemático; experto no sólo en las ciencias puras, sino también en las matemáticas mixtas o subalternas. Por esta razón, Mersenne se refiere a Dios como el Gran director del concierto cósmico o al Gran arquitecto del mundo, del unísono como la unión de las tres personas divinas, del Sol como fuente de la creación, del centro de la circunferencia… Este artículo tienecomo objetivo principal, en primer lugar, determinar si existe una asociación entre este discurso matemático sobre Dios y la teología natural. En segundo lugar, se pretende discutir si la hi...
Les missionnaires et la botanique : l’exemple du père Urbain Faurie en Extrême-Orient
Moussons, 2005
Depuis plusieurs siècles, au cours de leur périple évangélisateur, les missionnaires ont arpenté le grand jardin du monde et emprunté nombre de chemins difficiles et inconnus à travers jungles et forêts peu fréquentées, sur lesquels ils n'ont pas manqué de remarquer l'extraordinaire richesse de la flore locale, souvent méconnue dans leur pays d'origine. Ils ont remarqué des plantes qu'ils n'avaient jamais vues auparavant, ont commencé à les collecter, à les étudier, puis à les classer et à les nommer, attirant dès lors l'attention des scientifiques européens sur leurs trouvailles (voir Fournier 1932). Dès 1585, ce sont les jésuites qui font connaître en Europe le litchi (Nephelium litchi) et, en 1656, paraît la Flora sinensis du père Michel Boym (1612-1659), qui fait notamment connaître l'ananas, la goyave, le dourion et l'acajou. Aux XVII e et XVIII e siècles, dans leurs Lettres édifiantes, les jésuites présentent de nombreuses plantes chinoises, dont le ginseng, et le père du Halde, en 1735, consacre plusieurs chapitres à la flore chinoise, introduisant l'olive, le thé, le mûrier à papier (Broussonetia papyrifera), et signalant les céréales, plantes économiques, industrielles ou officinales les plus remarquables (voir Esquirol 1923). Le père d'Incarville (1706-1757) introduisit l'indigo, la reine-marguerite et le jujubier, et le jésuite portugais Loureiro (1715-1794), qui passa 36 ans en Annam, élabora une Flora cochinchinensis, parue en
Revue De Philologie De Litterature Et D Histoire Anciennes, 2007
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