De mémoire vulnérable : le massacre des Sioux dans Tristesse de la terre d’Éric Vuillard (original) (raw)
Pour peu qu’on la déplace sur le plan de la mémoire collective, la notion de vulnérabilité s’avère particulièrement efficace pour évoquer le danger d’effacement qui pèse sur les meurtres de masse des Sioux dans Tristesse de la terre. Ce récit historique d’Éric Vuillard suit de manière critique l’ascension et le déclin du Wild West show, spectacle crée en 1883 par Buffalo Bill Cody qui proposait aux spectateurs d’assister à une mise en scène de la conquête de l’Ouest. De ce divertissement, le récit dit qu’il équivaut à un gommage instantané qui substitue un grand récit de conquête glorieuse au souvenir des massacres des Amérindiens. Dans une perspective sociocritique, cet article se demande donc comment les effacements, les réécritures et les mises en scène spectaculaires que raconte Tristesse de la terre constituent une vulnérabilité au carré : ciblant les vulnérables qui ont déjà été victimes de massacres de masse, l’amnésie collective y fait peser la menace d’une annihilation mémorielle de grande envergure qui redouble l’extermination collective par son engloutissement dans l’oubli.
Related papers
L’Enfant-bois d’Audrey Pulvar : écriture d’une mémoire traumatique
Premier roman d’Audrey Pulvar, L’Enfant-bois s’inscrit dans une généalogie littéraire tracée par les écrivains de la créolité mais également dans la tradition de romans publiés par des femmes de la diaspora noire, qu’elles écrivent de la Caraïbe ou des États-Unis. Cet article vise donc à souligner les influences de ces écrivains sur le roman de Pulvar et à analyser le thème du traumatisme individuel et collectif qui hante le roman de Pulvar et donne au texte un style particulier, faisant du roman une lente confession d’un passé douloureux.
Éric Vuillard. La guerre des pauvres Éd. Actes Sud, 2019
revue Quart-monde, 2019
La structure sociale en trois ordres, theorisee des le 8e siecle, s’affirme au cours des siecles suivants pour devenir inattaquable aux 15e et 16e siecles. Toute remise en cause est un « crime de nouvellete », condamne et puni. La societe est figee dans ce carcan. Les inegalites s’accroissent car le fosse se creuse entre riches et pauvres d’autant que les trois etats ne comprennent que la noblesse, le clerge et les bourgeois. « Ceux qui peinent la bise au cul » selon l’expression de Georges Duby, sont meprises et laisses hors de la structure sociale, si ce n’est au travers de la charite. Le Livre de Sydrac (avant 1300), tres lu jusqu’au 16e siecle, affirme qu’il ne convient pas que les pauvres se melent aux puissants car leur sort « est celui des moutons qui en l’eau se bousculent, des grenouilles qui s’ecrasent les pieds parce qu’elles sont petites » et que le pauvre doit s’effacer devant le riche « excepte dans les batailles ». Une grande part de la litterature medievale se fait l...
« L’Acacia de Claude Simon. L’écriture à l’épreuve du tragique »
in Cristina Alvares et al., D’un Nobel l’autre. De Claude Simon à Jean-Marie Le Clézio: reconnaissance, parcours & mutations, Carnets, numéro spécial automne-hiver , 2010
Devant les fils intriqués de la mémoire, comment mettre en scène le "cadavre noir de l'Histoire" avec toujours le spectre de la guerre et son cortège de deuils et de séparations en toile de fond?
Loading Preview
Sorry, preview is currently unavailable. You can download the paper by clicking the button above.