Mouvement originaire et mouvement imaginaire dans la philosophie de Merleau-Ponty (original) (raw)

Maurice Merleau-Ponty, une esthétique du mouvement

Archives de philosophie, 69, 2006

La réception de l’esthétique de Maurice Merleau-Ponty est marquée par ses travaux sur la peinture et ce que cet art enseigne sur le rapport du corps et du monde. Or, en lisant les notes préparatoires de son premier cours du Collège de France intitulé « Le monde sensible et le monde de l’expres- sion » 1, on s’aperçoit que le cinéma joue un rôle essentiel également. Le pré- sent texte porte sur la phénoménologie merleau-pontienne du mouvement, ses rapports avec le cinéma, ce qui m’amènera au rapport de Jean-Luc Godard à la phénoménologie et à indiquer les prémisses d’un dialogue avec l’approche deleuzienne du cinéma. J’espère ainsi mettre en évidence les fon- dements d’une esthétique qui puisse entrer en dialogue avec les tendances principales de la réflexion esthétique contemporaine. Je défends la thèse que Merleau-Ponty avait une approche cinématographique des arts visuels en général et que si la peinture est bien le langage qui manifeste la genèse de notre rapport au monde, le cinéma est celui qui rend visible l’invisible de nos rapports avec autrui.

Questionner ce qui ne parle pas : Merleau-Ponty et la phénoménologie du « silence originaire

Phares , 2021

Cet article questionne la méthodologie phénoménologique qu'emprunte Merleau-Ponty dans son second ouvrage Phénoménologie de la perception. Nous y défendons la thèse selon laquelle la « conversion » vers la phénoménologie à laquelle l'auteur se livre est nécessitée par un intérêt philosophique spécifique, à savoir l'investigation du versant « silencieux » de l'expérience. Inspiré par Husserl, Merleau-Ponty tente de mettre sur pied une philosophie de l'expérience « antéprédicative », c'est-à-dire de l'expérience telle qu'elle se donne avant d'être conquise par le regard théorique. Il s'agit, à contre-courant des postures philosophiques traditionnelles de l'empirisme et de l'intellectualisme, d'une manière de donner authentiquement droit à ce qui a lieu avant le jugement. Ces deux postures, selon Merleau-Ponty, sont aveugles à la vie primordiale pré-objective qui sous-tend et rend possible les instances qu'elles posent comme fondatrices de toute expérience (un monde objectif déterminé, un sujet constituant). La phénoménologie, quant à elle, est apte à se frayer un passage authentique vers la pré-objectivité.

Penser et vivre au-delà des catégories du réel et de l’irréel : Merleau-Ponty et l’imaginaire opérant

Penser et vivre au-delà des catégories du réel et de l'irréel : Merleau-Ponty et l'imaginaire opérant « la philosophie n'est pas un hôpital. Si les gens ont le vertige et veulent prendre des médicaments contre le vertige, je ne les empêche pas, mais je dis : ce sont des médicaments » 1 La philosophie de Merleau-Ponty trouve l'un de ses motifs fondamentaux dans les cahots violents et les traumatismes de la crise de la rationalité. Merleau-Ponty signale que ce mouvement de désenchantement et de doute profond, à la marge du nihilisme, surgit -ou ressurgit car il a toujours hanté la philosophie occidentale -au XIX e avec Schopenhauer 2 . Il devient de plus en plus manifeste au début du XX e siècle que les cadres théoriques et pratiques idéaux sont, sinon détruits, du moins fortement ébranlés et que nous ne pourrons, peut-être, les rétablir qu'après avoir consenti à affronter l'existence dans sa dimension d'inachèvement, d'obscurité et de violence intrinsèque. C'est avec une radicalité extrême que Merleau-Ponty accomplit cette immersion dissolvante dans les profondeurs chaotiques de l'existence. On peut décrire le programme de sa philosophie comme dynamitage des normes positives, déconstruction de l'illusion de domination d'un monde ordonné s'étalant devant nos yeux avec la distante tranquillité des paysages représentés dans l'art classique de la Renaissance, et retour à un Etre explosif, à une proximité entre moi et les choses qui met dramatiquement à l'épreuve mon équilibre et mes certitudes, jusqu'à ma possibilité d'avoir des certitudes, d'accéder à une vérité. La réflexion merleau-pontienne sur l'imaginaire nous semble d'un grand intérêt dans ce cadre précisément parce qu'elle ne se réduit nullement à l'analyse d'un champ particulier de notre vie psychique. Sa fonction et sa portée sont beaucoup plus profondes puisqu'elle conduit à défaire, ou, en tout cas, à subvertir, l'une des distinctions positivistes ultimes : l'opposition entre réel et imaginaire. Notre intention dans cet article sera de nous interroger sur l'enjeu exact d'une telle entreprise de déstabilisation radicale. S'agit-il d'exiger la lucidité pour une philosophie qui devra désormais accepter une irréductible dimension de confusion, d'erreur, d'aliénation et de culpabilité ? La citation placée en exergue de cet article semble l'affirmer. Merleau-Ponty montre la même dureté dans Partout et nulle part : « Une philosophie concrète n'est pas une philosophie heureuse » 3 . La comparaison avec le stoïcisme, l'une des morales antiques les plus opérantes, est à cet égard riche d'enseignement : la description d'un homme entièrement réductible à sa volonté rationnelle, à son hégémonique, est certainement inexacte, mais elle institue un mouvement de sculpture de soi dont chacun peut expérimenter les réels bienfaits. Faut-il en déduire que, détruisant les illusions idéalistes, Merleau-Ponty renonce à soigner l'ek-sistant toujours douloureusement hors de soi ? Le rôle clef joué par l'imaginaire dans cette philosophie permet de voir se dessiner une dimension éthique en fait indissociable de la découverte "lucide" des affres de l'existence. Certes il ne pourra s'agir d'une éthique en un quelconque sens déjà connu : aucun impératif, aucune règle, aucune authenticité 4 ne peut être défini, l'on ne peut chercher à entrer en accord avec un soi-même ou une nature dont Merleau-Ponty montre justement qu'ils sont rongés par l'altérité et la distance à soi. Toutefois en l'absence de norme positive et de véritécorrespondance, connaître et inventer, contempler et agir, cessent de s'opposer. Si l'être "est", par-delà la distinction entre le réel et l'imaginaire, un inépuisable foisonnement onirique, anonyme et ambigu, alors sa découverte, certes douloureuse, frustrante et déstabilisante, est indissociable d'une inspiration qui s'empare de nous et nous suggère mille pistes d'interprétation d'un sens naissant en même temps qu'elle nous laisse libres et créateurs dans l'invention de ces interprétations. Un Etre inachevé et rêveur

Esquisse et pulsion. Le regard selon Merleau-Ponty

Chiasmi International, 2012

Esquisse et pulsion. Le regard selon Merleau-Ponty Sketch and Drive. The Gaze in Merleau-Ponty In Seminar XI (The Four Fundamental Concepts of Psychoanalysis), Jacques Lacan interrupts the first session, which was to be devoted to the Freudian notion of the drive, in order to consider not this fundamental concept of psychoanalysis, but the way in which Maurice Merleau-Ponty, in his posthumous book, The Visible and the Invisible, approaches the idea of the subject and how he points to the divergence between the eye and the gaze. Lacan sees in Merleau-Ponty’s thesis concerning the gaze, a certain analogy with what Freud called the death drive. But, concerning voyance, Lacan wonders if Merleau-Ponty does not fall back into a Platonic imaginary of an ultra-gaze from which each body would issue. But or task now is to show that Merleau-Ponty remained faithful to the fact that the gaze cannot really be explained and that his philosophy of the flesh has not reduced the diverse dimension of experience to a central power of constitution. In order to apprehend better the notion of the flesh, we shall bring into play Merleau-Ponty’s theory of the Gestalt, which will allow us to show how, for Merleau-Ponty, the drive is always an irreducible alterity that stops the indivision of the whole from being able to be experienced as a synthesis. Adombramento e pulsione. Lo sguardo in Merleau-Ponty Nel seminario XI (I quattro concetti della psicoanalisi), Jacques Lacan sospende la prima seduta dedicata alla discussione della nozione freudiana di pulsione, per esaminare non il concetto fondamentale della psicoanalisi ma la maniera in cui Maurice Merleau-Ponty, nel suo libro postumo Il visibile e l’invisibile, affronta il tema e mostra lo scarto che esiste tra occhio e sguardo. Lacan scorge nella tesi di Merleau-Ponty concernente lo sguardo una certa analogia con ciò che Freud ha chiamato pulsione di morte. Ma, a proposito della voyance, Lacan si chiede se Merleau-Ponty non ricada in fondo nell’immaginario platonico di un ultra-sguardo dal quale dovrebbe provenire ogni corpo. Il nostro intento è quindi mostrare che Merleau-Ponty è rimasto fedele alla concezione dell’inesplicabilità dello sguardo estraneo e che allo stesso modo la sua filosofia della carne non ha ridotto le diverse dimensioni dell’esperienza ad un potere centrale di costituzione. Per meglio comprendere la nozione di carne faremo appello alla teoria merleau-pontiana della Gestalt, la quale ci permetterà di mostrare come, per il filosofo, la pulsione sia sempre un’alterità irreducibile tale da impedire che l’indivisione del tutto possa talvolta essere vissuta come sintesi.

L'originaire et l'immédiat. Remarques sur Heidegger et le dernier Merleau-Ponty

La publication des notes du cours professé par Merleau-Ponty en 1959 permet d'aborder à nouveaux frais la question de ses rapports à Heidegger. En reliant l'explication avec Heidegger au rejet de l'ontologie directe formulé dans le Visible et l'invisible, l'A. essaie de dénouer le lien ontologico-spéculatif de l'originaire et de l'immédiat. L' «éclatement» de l'originaire analysé par Merleau-Ponty permet de dénoncer la nostalgie régressive de l'origine qui anime la pensée heideggerienne et de poser le détour par le symbolique comme une dimension essentielle de l'avènement même de l'Être. Abstract The recent publication of the lecture-notes used by Merleau-Ponty in 1959 makes it possible to approach again the question of his relationship to Heidegger. By associating the explanation with Heidegger with the rejection of the direct ontology expressed in The Visible and the Invisible, the A. attempts to uncover the ontological-speculative link between the originary and the immediate. The «explosion» of the originary analysed by Merleau-Ponty makes it possible to denounce the regressive nostalgia of the origin which animates Heidegger's thought and to posit the detour via the symbolic as an essential dimension of the very arrival of Being. (Transl. by J. Dudley).

Imaginaire, Vie et Hysterie Chez Merleau-Ponty

Kriterion: Revista de Filosofia, 2018

RESUME Dans cet article, j’aborde la perspective idéaliste de la « Phénoménologie de la perception » pour montrer que, dans cet ouvrage, l’expérience du corps propre est décrite à partir de la vision du cogito. Pour expliciter cet idéalisme, j’analyse la principale voix donnée au corps au début de la pensée de Merleau-Ponty: la voix pathologique. Les troubles de Schneider rendent explicite son impuissance symbolique, et cette impuissance est vraiment l’impuissance du corps. Le sujet malade est un être soumis à la normativité immédiate de la vie, raison par laquelle il peut découvrir à chaque moment la finitude et la fragilité de l’existence. J’évoque par contre les notes du cours au Collège de France, de 1954-1955, sur la passivité et les cours sur la Nature, de 1957-1958, lorsque Merleau-Ponty examine la vie et la naissance du sens à partir d’une perspective tout à fait différente. J’analyse aussi la lecture qu’il a faite du « cas Dora » pour montrer que le philosophe trouve dans l...

Le langage et la pensée chez Maurice Merleau-Ponty

2015

La thèse de l'auteur est que la pensée peut revêtir deux formes différentes : une pensée constituée qu'il appelle la "pensée pensée" et une pensée constituante qu'il appelle la "pensée pensante". Son argumentation repose sur l'analogie entre le langage articulé et la création artistique et sur l'acquisition du langage chez l'enfant.