Religions du monde syro-mésopotamien (original) (raw)
École pratique des hautes études. Section des sciences religieuses
Religions du monde syro-mésopotamien I. La mythologie mésopotamienne de l'âge du Fer : le poème d'Erra et Ishum Le « Poème d'Erra et Ishum » est sans doute une des compositions épiques appartenant à la longue tradition mythologique cunéiforme, mésopotamienne et akkadienne qui a été le plus largement appréciée et exaltée par la critique assyriologique, et souvent évoquée comme modèle pour d'autres cultures procheorientales anciennes, en particulier pour les livres prophétiques de la Bible. De par ses caractéristiques stylistiques et poétiques, ainsi que par la richesse et la complexité de ses contenus, ce texte est considéré comme un chef d'oeuvre et presque le point culminant d'une production intellectuelle et littéraire désormais arrivée à sa maturité. Documenté essentiellement par des textes retrouvés dans la bibliothèque royale de Ninive, à Assur et à Sultantepe, le poème est habituellement daté du ix e ou du viii e siècle av. J.-C., à partir de l'interprétation de quelques références à des événements ou à des situations historiques qui semblent correspondre à l'époque de l'infiltration des « semi-nomades » araméens dans la société babylonienne. Cette période est représentée comme absolument chaotique, marquée par la violence aveugle des affrontements, surtout dans le contexte des centres urbains les plus importants de Mésopotamie. Le poème présente ces épisodes terrifiants de guerre et de destruction comme l'effet de la vengeance du dieu Erra, une épiclèse du dieu Nergal, seigneur de la mort et des Enfers, qui veut punir l'humanité de sa prétendue arrogance, d'une mauvaise observance du culte et d'un manque de respect pour les dieux. Afin de réaliser l'anéantissement du monde, Erra essaie d'éloigner le dieu Marduk-roi du panthéon et de l'univers-de sa place au centre du cosmos, à Babylone, là où sa présence garantit l'équilibre des forces et la pérennité du réel. Mais le succès de son entreprise n'est que partiel : Marduk récupère rapidement sa position et le contrôle du panthéon, mettant fin au pouvoir de son remplaçant. Erra, furieux, rentré dans sa ville et son temple de Cutha, prononce un long discours par lequel il affirme sa volonté de destruction du monde, énumérant heurts, conflits, batailles et guerres qui doivent détruire la culture, les institutions et les traditions babyloniennes, employant parfois les populations rurales comme son bras séculier. Le dieu Ishum, qui accompagne Erra comme conseiller et chef de son armée, intervient alors pour calmer son maître et, montrant sa pitié