"(Af)filiation littéraire et (dé)possession identitaire dans Shuni (2019) de Naomi Fontaine", congrès du CIÉF (en ligne), 2021. (original) (raw)

Le mouvement de « résurgence des cultures, des langues et des langages des peuples premiers » qui a stimulé la montée des voix autochtones au Canada depuis quelques décennies, vise en partie à la réparation de cette blessure épistémologique originelle, notamment par le biais de la littérature. L’auteure innue Naomi Fontaine, après Kuessipan (2011), récemment porté sur le grand écran, et le succès de Manikanetish (2017), publie Shuni (2019), sous-titré Ce que tu dois savoir, Julie, puisqu’il participe de ce mouvement de revitalisation des savoirs traditionnels autochtones. Dans cet écrit polémique, l’auteure met en récit une correspondance fictive qu’elle adresse sur le mode de la confession à son amie d’enfance Julie, fille du pasteur missionnaire de la réserve de Uashat, où elles ont toutes les deux grandi. Monologue épistolaire, ce troisième roman s’attaque aux représentations erronées véhiculées à l’intérieur et à l’extérieur de la réserve, et entame une réflexion quelque peu philosophique sur le rapport entre Innu.e.s et Blanc.he.s. Fontaine évoque différentes facettes de la réalité innue (alcoolisme, suicides, grossesses chez les adolescentes), mais prend également un certain recul par rapport aux discours préformatés, qui s’appuient sur les statistiques gouvernementales, considérées comme un outil de marginalisation à la fois réelle et symbolique : « Julie, je te raconterai tout ce que les chiffres ne disent pas. »