Jacques Besançon, Bernard Geyer, Sultan Muhesen, Note préliminaire sur le quaternaire dans la vallée du nahr 'Afrin (Syrie) (original) (raw)
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in B. Geyer et J.-Y. Monchambert (éds), La basse vallée de l'Euphrate syrien du Néolithique à l'avènement de l'islam : géographie, archéologie et histoire, 2003
L’histoire de la vallée de l’Euphrate, dans la région comprise entre Deir ez Zor et Abu Kemal, est encore mal connue. Quelques coups de projecteur, dus en grande partie aux résultats de fouilles, ont apporté un éclairage particulier sur certaines périodes, parfois de façon précise, comme c’est notamment le cas pour le début du XVIIIe s. av. J.-C. à Mari, à l’époque du roi Zimri-Lim. Certaines tranches d’histoire sont en revanche quasi inconnues, si ce n’est par quelques mentions de sites dans des textes d’auteurs grecs et latins. Ces informations, diffuses, ne fournissent qu’imparfaitement les éléments permettant de reconstituer continûment l’histoire de cette région. Nous tenterons ci-dessous d’évoquer, dans la mesure du possible, et par grandes périodes, les principaux événements qui ont marqué la région et de retracer l’évolution de l’occupation du sol et de la mise en valeur depuis les premières installations sédentaires, au Néolithique, jusqu’à l’avènement de l’islam.
Y. Calvet et B. Geyer, Barrages antiques de Syrie
Collection de la Maison de l'Orient méditerranéen n° 21, 1992
La Syrie est depuis toujours une terre de contact entre la Méditerranée et le Proche-Orient. Autant la Syrie méditerranéenne a toujours été privilégiée, permettant une agriculture sans irrigation, grâce à des ressources hydrauliques permanentes et abondantes, autant la Syrie intérieure, steppique, ne pouvait être exploitée d'un point de vue agricole sans l'apport d'une eau fécondante. Un des moyens les plus efficaces mis en œuvre pour disposer de ressources hydrauliques supplémentaires a consisté à barrer les cours d'eau, temporaires ou permanents, afin de constituer des réserves disponibles pendant la saison sèche. Les exemples de barrages choisis, satés, quand il est possible de le faire, de l'âge du Bronze (XIIe siècle avant J.-C.) à l'époque médiévale, et pris sur différents cours d'eau syriens, témoignent de la façon dont les hommes ont su judicieusement utiliser la ressource dont ils disposaient.
Syria, 1995
La dépression du Rug, petite plaine enclavée dans les chaînons calcaires de la Syrie du Nord, est un vaste poljé1, aujourd'hui artificiellement drainé et cultivé grâce au percement d'un tunnel sous le (Sebel Wastâni, en direction de l'Oronte (dépliant A). Cet aménagement tout récent (MAZLOUM 1954) a mis fin au régime d'inondation semipermanent qui affectait le centre de la dépression où subsistait jusqu'à la fin de l'été, un lac (El Bal'a, ca 28 km2) qu'entourait une large auréole marécageuse. Les lenteurs de la vidange étaient dues au colmatage de l'exutoire naturel (ponor2) et des conduits kars tiques souterrains par des argiles provenant du décapage des sols du bassin-versant. La conséquence en était l'impossibilité de s'implanter durablement aux abords immédiats du lac qui connaissait des variations annuelles de niveau et donc d'extension.
Syria, 2013
The arid margins of northern Syria, a region of dry steppe located to the south-east of Aleppo, evidenced a great number of archaeological sites. The distribution of these sites is mainly dictated by a major constraint, climatic aridity, which is increasing from west towards the east. Other elements also intervene however in this distribution. The local relief, the quality of soils, resources in water, are changing according to places, and generate a mosaic of micro-environments offering different potential and diversified land use through time. From the Kebarian to the final PPNB, the human land use thus evolved, according to strategies of subsistence. The latter showed to rely on very diversified water ressources, as through exploitation of permanent artesian springs for instance, or even arrangement of articifial water collecting puddles or pools.
Paléorient, 1996
At the beginning of the Holocene, the Euphrates valley experienced its last cycle of geomorphological evolution whose origin was mainly climatic. An alluvial formation filled up the bottom of the valley, basically modifying the possibilities for human occupation and land exploitation. The evolution of land use and human settlement may be observed in major phases, from the earliest Neolithic settlements of the 9th millennium along the edges of the valley, to the Chalcolithic villages built on the banks of the river. Gradually agricultural development could - or should - leave the narrow beds of the tributary wadis to spread for a more durable period to the Holocene floor, made accessible by the cutting of the river across the alluvial formation. Absolute dating for the stages of occupation of the valley floor are still lacking, but archaeological data have led to definition of the main outlines.
in B. Geyer et J.-Y. Monchambert (éds), La basse vallée de l'Euphrate syrien du Néolithique à l'avènement de l'islam : géographie, archéologie et histoire, 2003
La quasi-totalité des activités dans la vallée de l'Euphrate est commandée par le fleuve. Il représente simultanément l'unique ressource en eau douce pérenne et l'agent essentiel de la morphogenèse. Dispensateur de richesses et cause de désastres, il convenait donc, dans la mesure du possible, de le domestiquer. Il fallait en tout cas composer avec lui, se mettre à l'abri de ses fureurs et profiter ainsi au mieux de ses bienfaits. Durant certaines époques — l'âge du Bronze, l'époque néo-assyrienne ou encore l'époque islamique — l'homme a su remodeler la vallée de telle manière qu'elle put être mise en valeur sur une grande échelle : on peut, pour ces périodes fastes et dans le cadre spécifique de la vallée, évoquer la notion de « monde plein ». Alimentation en eau, irrigation, navigation et transport, telles ont été les principales contributions du fleuve. L'essentiel des aménagements repérés dans la vallée et ses abords apparaissent destinés à l'irrigation. À partir de quand celle-ci y fut-elle pratiquée ? Les premières tentatives pourraient avoir été faites dès l'époque de Halaf , mais il ne s'agissait probablement que de petite irrigation, pratiquée avec des moyens limités qui n'ont laissé ni traces, ni vestiges. La grande irrigation, qui nécessite des techniques élaborées et des moyens importants, ne peut guère avoir été mise en oeuvre avant les débuts de l'âge du Bronze lorsque se constituèrent des « cités-États » et que se développa, notamment, le royaume de Mari. Petite et grande irrigations ont certainement coexisté, au moins temporairement. La première, facile à mettre en oeuvre par l'intermédiaire d'aménagements hydro-agricoles légers (chadouf, nasba, gharraf, etc.) n'a probablement jamais totalement disparu, puisqu'elle a été pratiquée, non seulement par les sédentaires, mais également par les nomades , lesquels se procuraient ainsi un complément de produits alimentaires indispensable à leur survie. Les traces que ces aménagements auraient pu laisser ont été totalement effacées de la surface du sol. La pratique de la petite irrigation n'est donc guère détectable dans le cadre d'une prospection : nous ne l'aborderons pas ici. En revanche, la grande irrigation et, de manière plus générale, la mise en valeur agricole à grande échelle laissent des traces multiformes qui sont souvent encore interprétables. Cependant, les conditions de la mise en valeur en rive gauche et en rive droite ne sont pas identiques. La première se révèle par nature propice à la petite irrigation, avec des terroirs souvent fractionnés par des pointements de la formation Q II et une largeur généralement restreinte, facteurs qui ont pour conséquences d'assurer un drainage plus efficace qu'en rive droite et donc de diminuer les risques de salinisation des sols. C'est sur cette rive orientale que se concentra l'essentiel du peuplement durant les époques de moindre occupation ou lorsque ne furent pas mis en oeuvre de très gros aménagements hydro-agricoles, a priori mieux adaptés aux larges terrasses de la rive droite. Seules les périodes ayant connu des efforts de mise en valeur exceptionnels, comme le Bronze ancien, le Bronze moyen ou l'époque islamique ont vu le peuplement se répartir de manière plus équilibrée dans l'ensemble de la vallée. Nous évoquerons, dans ce chapitre, les différents types d'aménagements que nous avons pu rencontrer, des plus imposants — les canaux — aux plus discrets — les norias ou les qanats —, en passant par les plus fréquemment décrits — les barrages.
Bernard Geyer, Yves Calvet, Le « pont-barrage » du Nahr ed-Delbé (Ras Shamra – Ougarit, Syrie)
Études ougaritiques III, 2013
From 1986 to 2009, a unique “bridge-dam” was gradually uncovered in the bed of a river that runs south of the site Ras Shamra. It is built of carved rectangular blocks of ramleh. Two phases of activity have been identified, separated by a period of abandonment and partial destruction. The dam function is clearly attested during the first phase and the structure’s use as a bridge is also probable at this time. During the second phase, radiocarbon dated to the Roman period, only the bridge function is attested. By contrast, the chronology of the first phase is more uncertain, with evidence suggesting it was used during the Late Bronze Age or Hellenistic period. A Late Bronze origin seems most likely, given the location of the structure south of Ugarit, and the importance of the structure that could only have been built in the context of a powerful local political authority. De 1986 à 2009 a été peu à peu dégagé, dans le lit d’un cours d’eau qui longe au sud le site de Ras Shamra, un aménagement unique en son genre – un « pont-barrage » –, construit pour l’essentiel en beaux blocs taillés, parallélépipédiques, de ramleh. Deux phases de fonctionnement, séparées par une période d’abandon et de destruction partielle, ont pu être mises en évidence. Pour la première phase sont attestées avec certitude la fonction de barrage et, avec une très forte probabilité, celle de pont. Seule la fonction de pont est attestée pour la seconde phase. Cette dernière est d’ailleurs la seule à être datée avec précision, au radiocarbone, de l’époque romaine. La datation est plus incertaine pour la première phase, puisque des éléments permettent de proposer, pour sa mise en oeuvre ou, du moins, son utilisation, tant l’époque du Bronze récent que l’époque hellénistique. Une datation remontant au Bronze récent nous semble la plus probable, eu égard à la position de l’ouvrage, aux portes sud d’Ougarit, et à l’importance de l’aménagement qui ne saurait avoir vu le jour que dans le contexte d’une autorité politique locale puissante.