Les terres cuites votives du Thesmophorion. De l'atelier au sanctuaire. Volume 1 : texte (1996) (original) (raw)

1996

Le Thesmophorion de Thasos a livré, au début des années 60, une grande quantité de fragments de figurines de terre cuite (environ 10 000, totalisant 273 kg). Le nombre, le très mauvais état de conservation ainsi que l'homogénéité thématique et chronologique — les femmes debout drapées de la fin du Ve au IIe siècle représentent près de 90 % du total — ont imposé l'élaboration d'une méthode d'étude et de présentation originale, adaptée au double intérêt de ces trouvailles, comme produit artisanal, comme témoignage de la piété féminine : il s'agit en effet pour une très large part d'une production spécifique destinée à la clientèle des femmes qui fréquentaient le sanctuaire de Déméter Thesmophoros. Pour la première fois dans ce type de situation a ainsi été élaborée une méthode rigoureuse qui permet de surmonter l’état très fragmentaire des trouvailles (reconstitution des types à partir des superpositions de fragments d’exemplaires tirés du même moule), qui tient compte des procédés de fabrication en masse (établissement de « séries » de surmoulages successifs, identification des versions), et qui rend compte de la totalité des fragments à travers un choix pertinent (dénombrements par NMI = nombre minimum d’individus selon les procédés utilisés en archéo-zoologie), à l’opposé des choix aléatoires généralement pratiqués. J’ai ainsi pu décrire le fonctionnement d’un artisanat très moderne où interviennent sculpteurs et surtout potiers et tâcherons, qui avec la plus grande économie de moyens et en adaptant des types existants répondent aux demandes précises de la clientèle. D’autre part, cette méthode a permis de dégager l’offrande majoritaire – l’orante péplophore couronnée – et d’en proposer une nouvelle interprétation : loin de représenter les divinités dédicataires, Déméter et Korè comme admis jusqu’alors, j’ai démontré qu’il s’agissait des images conventionnelles des dédicantes qui, en rappelant leur participation à la fête, se plaçaient de façon pérenne sous la protection de la divinité. Cet ouvrage, distingué par deux prix, a fait l’objet d’une dizaine de comptes-rendus dans des revues françaises et étrangères (références sous Travaux A5) : tous ont souligné le renouvellement méthodologique dans l’approche d’un objet qui passait pour « ringard » et l’intérêt des résultats obtenus. La recension de B. SCHMALTZ est particulièrement significative de ce point de vue (Gnomon 72 [2000], p. 633-637). J’ai ensuite consacré plusieurs travaux à l’artisanat de la coroplathie (Travaux, rubrique A passim) et à l’artisanat grec en général, thèmes sur lesquels j’ai organisé plusieurs colloques (Travaux, rubrique B).