Patrimoine Immatériel et identité culturelle. Le repas gastronomique des Français reconnu par l'UNESCO (original) (raw)

Retour d’anthropologie : « le Repas gastronomique des Français ». Éléments d’ethnographie d’une distinction patrimoniale

ethnographiques.org, 2012

L’inscription du « repas gastronomique des Français » sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, en novembre 2010, a été un événement qui a suscité de nombreux commentaires. Dans la presse française, bien sûr, qui a poussé un « cocorico » triomphal, voyant dans cette distinction le signe de reconnaissance de l’excellence française. Mais aussi des commentaires et des débats au sein des instances de l’Unesco en charge du suivi de la convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. La restitution du processus d’une candidature affichée comme émanant de la volonté présidentielle montre une redéfinition de l’objet pour qu’il s’accorde avec l’esprit de la convention : c’est un repas festif et ritualisé qui a été inscrit et non la gastronomie française, comme cela était envisagé au départ. Pourtant, au final, c’est bien cette dernière qui apparaît avoir été reconnue, de même que l’inscription est bien assimilée à un label d’excellence. Qu’est-ce à dire ? Si la catégorie du patrimoine culturel immatériel a contribué à mettre en crise la notion européo-centrée de patrimoine, le cas montre que celle-ci n’a pas dit son dernier mot. En fait la situation est paradoxale : c’est au bénéfice d’une sorte de « retour d’anthropologie » – au sens de retour de manivelle – que la communauté des Français se voit distinguée et identifiée à ses pratiques alimentaires. Mais en identifiant un tel patrimoine à une communauté nationale, l’inscription fait de la France une patrie du patrimoine. La convention de 2003 contribuerait-elle à la renationalisation du patrimoine ? Anthropology’s boomerang and the « gastronomic meal of the French » : elements for an ethnography of patrimonial distinction. The inscription of the “gastronomic meal of the French” on the Representative List of the Intangible Cultural Heritage of Humanity in November 2010 has been generating many comments — in the French press, of course, which let out a triumphant “cock-a-doodle-doo”, seeing this distinction as the sign of French excellence, but also amongst UNESCO authorities responsible for the Convention for the Safeguarding of ICH. The history of the creation of this application file – a project officially announced by the President of the Republic – reveals a redefinition of its object so as to make it acceptable under UNESCO norms. What has been inscribed, in the end, is a festive and ritualized meal, but not French gastronomy as it was envisaged at the start. Nonetheless, in the end, it is the latter that is considered to have been recognized, just as registration is regarded as a label of excellence. What does this example tell us ? This article argues while it has been said that the new category of ICH contributes to reversing Eurocentric notions of heritage, this case shows that we have not heard the last of Eurocentrism. The French are distinguished and identified by their eating practices through a kind of anthropological boomerang effect that identifies such heritage with a national community. Thus we witness one of the principal and paradoxical effects of the 2003 ICH Convention : re-nationalizing heritage.

Le goût des nôtres: gastronomie et sentiment national en France

Raisons politiques, 2010

"Au carrefour de l'Etat, du marché et de la société civile, de l'intime et de la sphère publique, du national et du local, la gastronomie est l'un des aspects incontournables de l'identité culturelle française. Cet article analyse la gastronomie comme une forme de nationalisme ordinaire en interne, mais aussi comme un nationalisme culturel en externe. Au plan national, la gastronomie permet en effet de « rappeler » la nation dans la vie quotidienne des gens ordinaires. Mais dans la mondialisation, elle nourrit aussi un nationalisme culturel basé sur les vertus d'un savoir-vivre français vis-à-vis des autres nations. Dans ce processus, l'Etat joue un rôle intermittent, souvent marginal, dans la définition et la valorisation d'une cuisine nationale. At the crossroads between the state, the market and civil society, the personal and the public spheres, the national and the local, gastronomy is one of the central features of contemporary French cultural identity. This article argues that gastronomy can be analysed both as a form of banal nationalism within the country and a manifestation of cultural nationalism abroad. Inside France, gastronomy "flags" the nation in the daily lives of ordinary people. But in the global world, it also feeds a form of cultural nationalism based on the alleged virtues of French savoir-vivre vis-à-vis other nations. The article also reflects on the intermittent, ailing role of the French state in the definition and promotion of a national cuisine."

« Retour d’anthropologie : le "Repas gastronomique des Français". Éléments d’ethnographie d’une distinction patrimoniale », Ethnographiques.org, n° 24, 2012

Ethnographiques.org, 2012

L’inscription du « repas gastronomique des Français » sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, en novembre 2010, a été un événement qui a suscité de nombreux commentaires. Dans la presse française, bien sûr, qui a poussé un « cocorico » triomphal, voyant dans cette distinction le signe de reconnaissance de l’excellence française. Mais aussi des commentaires et des débats au sein des instances de l’Unesco en charge du suivi de la convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. La restitution du processus d’une candidature affichée comme émanant de la volonté présidentielle montre une redéfinition de l’objet pour qu’il s’accorde avec l’esprit de la convention : c’est un repas festif et ritualisé qui a été inscrit et non la gastronomie française, comme cela était envisagé au départ. Pourtant, au final, c’est bien cette dernière qui apparaît avoir été reconnue, de même que l’inscription est bien assimilée à un label d’excellence. Qu’est-ce à dire ? Si la catégorie du patrimoine culturel immatériel a contribué à mettre en crise la notion eurocentrée de patrimoine, le cas montre que celle-ci n’a pas dit son dernier mot. En fait la situation est paradoxale : c’est au bénéfice d’une sorte de « retour d’anthropologie » – au sens de retour de manivelle – que la communauté des Français se voit distinguée et identifiée à ses pratiques alimentaires. Mais en identifiant un tel patrimoine à une communauté nationale, l’inscription fait de la France une patrie du patrimoine. La convention de 2003 contribuerait-elle à la renationalisation du patrimoine ? Anthropology’s boomerang and the « gastronomic meal of the French » : elements for an ethnography of patrimonial distinction. The inscription of the “gastronomic meal of the French” on the Representative List of the Intangible Cultural Heritage of Humanity in November 2010 has been generating many comments — in the French press, of course, which let out a triumphant “cock-a-doodle-doo”, seeing this distinction as the sign of French excellence, but also amongst UNESCO authorities responsible for the Convention for the Safeguarding of ICH. The history of the creation of this application file – a project officially announced by the President of the Republic – reveals a redefinition of its object so as to make it acceptable under UNESCO norms. What has been inscribed, in the end, is a festive and ritualized meal, but not French gastronomy as it was envisaged at the start. Nonetheless, in the end, it is the latter that is considered to have been recognized, just as registration is regarded as a label of excellence. What does this example tell us ? This article argues while it has been said that the new category of ICH contributes to reversing Eurocentric notions of heritage, this case shows that we have not heard the last of Eurocentrism. The French are distinguished and identified by their eating practices through a kind of anthropological boomerang effect that identifies such heritage with a national community. Thus we witness one of the principal and paradoxical effects of the 2003 ICH Convention : re-nationalizing heritage.

Manger en Europe. Patrimoines, échanges, identités

2012

"Si les institutions communautaires de l'Europe permettent aujourd'hui d'identifier un espace politique et économique, qu'en est-il du sentiment d'appartenance des Européens à une civilisation partagée ? En dépit de nombreux traits d'union, leurs identités et leurs cultures matérielles demeurent multiples. Ce premier livre de la collection « L'Europe alimentaire » s'inscrit dans une dynamique croissante de l'intérêt porté par des publics divers et nombreux aux pratiques de l'alimentation. Il réunit les positions de spécialistes des cultures alimentaires sur la notion, très complexe à définir, des identités alimentaires. Cet ouvrage croise l'analyse de l'anthropologie et de l'histoire pour présenter la formation des patrimoines gastronomiques, les processus d'échanges culinaires et l'émergence, à différentes époques et dans plusieurs pays de recettes, de produits ou de manières de manger. Il s'en dégage que les Européens ont su à la fois développer des traditions locales très marquées et faire confluer leurs goûts par la circulation des marchandises, des hommes et des idées. La stratégie contemporaine, et capitale pour l'Europe, de valorisation par la qualité de ses produits considérés comme typiques, trouve dans ce récit les sources originelles d'un patrimoine commun aux Européens."

Se nourrir en Méditerranée: héritages partagés, héritages contestés?

Table ronde avec Sophie Bouffier, Estelle Herrscher, Jean-François Landrier, Mohamed Oubahli, animée par Thierry Fabre, Festival du Jeu de l’Oie - Festival des Sciences et des Arts d’Aix*Marseille Université (15 et 16 septembre 2023, Auditorium MUCEM, Marseille)., 2023

Variations autour de la diète méditerranéenne ou/et du « régime crétois », des interdits alimentaires et des alimentations en Méditerranée sur le temps long de l’histoire. Découvertes des produits d’ailleurs, de l’art de cuisiner et de partager des repas, des voyages du blé et du couscous. Explorations des enjeux alimentaires les plus contemporains qui touchent aussi bien à la santé publique qu’aux défis climatiques.

Le symbolisme dans la gastronomie française et indonésienne : Revue interculturelle

2020

Gastronomy is an inseparable element of human life. It has its own cosmology that ties into the culture of a nation. Comparing two different cultures towards gastronomy opens up a new paradigm of thinking to gather a point of view on the world since it is about intercultural communication which brings students to life skills side by side. This study therefore attempts to analyze interculturality in order to solve the problems of cultural understanding from culinary terms in French and Indonesian as well as the values understood. The research is conducted using the descriptive-qualitative method, observing the data linguistically and culturally. As the data come from different cultures, there are therefore comparative measures. Research results show that gastronomy includes symbols and that it takes a relevant position in cultural conception, especially in the formation of stereotypes. This finding of the analysis is only a simple copy of the intercultural study which still has possi...