9. Les syndicats de communes d’une France en morceaux ou comment réformer sans supprimer (1890-1970) (original) (raw)
2012, Réformer l'intercommunalité
PRÉSENTATION : Depuis la fin du XIXe siècle, les municipalités françaises coopèrent entre elles. Les origines de l'intercommunalité consacrée par loi du 22 mars 1890, comme celles de la « charte des municipalités » du 5 avril 1884, restent peu connues. Leur connaissance est pourtant utile pour saisir les ressorts de la résistance du parcellaire communal à toutes les tentatives de fusion de fusions des communes. En inventant l'intercommunalité, née dans la France des villes, la République a scellé un compromis politique avec ces territoires afin d'engager avec eux l'électrification, l'adduction en eau et l'assainissement des campagnes et des villes de France. Les syndicats de communes d'une France en morceaux ou comment réformer sans supprimer (1890-1970) L'histoire de l'intercommunalité prend racine sous la III e République avec l'avènement de la charte communale du 5 avril 1884 1. Un esprit libéral souffle sur les institutions de la République. Des libertés nouvelles, individuelles et collectives, la reconnaissance des syndicats, la liberté de réunion, de la presse, de l'enseignement supérieur, du divorce, des funérailles sont consacrées par la République 2. En matière d'administration des territoires, l'heure est à la célébration des libertés municipales et de son représentant tutélaire et protecteur, le maire des communes de France. Cette France édilitaire incarne selon Maurice Agulhon et Olivier Ihl une « familiarité sympathique » et une « territorialité républicaine », honorées en grande pompe le 14 juillet 1889 et le 22 septembre 1900 lors des gigantesques banquets républicains exaltant l'universalisme de la France et de sa Grande Révolution 3. À défaut de s'attaquer frontalement au patriotisme communal des 38 000 clochers de France, le régime républicain opte pour la raison d'État et choisit de composer avec le pouvoir municipal, grand ordonnateur de la République des mairies 4. Rayer de la carte administrative des communes, trop nombreuses, aurait fragilisé l'assise politique de la III e République qui n'entend pas renverser cette France des petites communes si tenaces car si « chéries » 5. Ses représentants préfèrent s'accorder sur la nécessité de rationaliser tout en préservant l'administration locale représentée par des magistrats élus depuis l'adoption de la loi du 28 mars 1882. 1 Je tiens à remercier vivement Marie-Ange Gregory et Rémy Le Saout qui m'ont apporté, dans le cadre de cette recherche collective sur la réforme intercommunale, de nombreuses références bibliographiques.