Facteurs de variabilité des systèmes techniques lithiques au Mésolithique récent et final dans l’ouest de la France (original) (raw)
"Le territoire belge est constitué de régions naturelles aux caractéristiques géologiques, topographiques et hydrographiques contrastées. Apposées les unes aux autres, elles constituent un territoire « en mosaïque » contractant sur un espace restreint des environnements naturels assez différents les uns des autres (de Heinzelin, 1984 ; Di Modica, 2011 ce volume). Des Hauts Plateaux ardennais aux plaines limonosableuses de Moyenne et Basse Belgique en passant par les vallées encaissées du Bassin mosan, les environnements sont changeants en termes non seulement de relief, mais aussi de faune, de flore et — dans une moindre mesure — de climat ; autant de facteurs qui influencent les activités humaines pratiquées. Ces différences — perceptibles actuellement et pour les périodes les plus récentes — se marquaient déjà durant le Paléolithique. Elles nous échappent cependant en très grande partie aujourd’hui en raison de leur archivage partiel et de mauvaise qualité pour des périodes aussi anciennes que le Paléolithique inférieur et moyen. Pour l’essentiel, elles ne sont désormais plus décelables qu’au travers de certains paramètres immuables, liés au monde minéral. Bien que de manière incomplète, ceux-ci permettent de poser un regard sur la relation entretenue par l’Homme avec son milieu naturel. Les 442 points de découverte s’y distribuent inégalement en fonction de paramètres liés à leur conservation et leur mise au jour d’une part, mais aussi en fonction de caractéristiques propres à chacune de ces régions (Di Modica, 2011 ce volume). L’examen des cartes de répartition des implantations moustériennes indique que deux types d’environnements ont été privilégiés : les affleurements crétacés de Moyenne Belgique, riches en silex, et les grottes développées dans les calcaires paléozoïques du Bassin mosan. Deux cas de figure opposés existent : les implantations de plein air bénéficiant d’un sous-sol riche en nodules de silex de qualité (Hesbaye et Bassin de Mons) et celles en grotte dans des régions totalement dépourvues de silex (Haute-Meuse, Lesse). Ces situations très contrastées en termes d’approvisionnement en matière première (présence/absence de silex localement) et de type de site (plein air/grotte) présentent la particularité d’être localisées à peu de distance les unes des autres. Parfois séparées de quelques kilomètres à peine, leur écartementmaximal est d’environ 70 km si l’on tient compte de la distance séparant les sites du Bassin de Mons de ceux du Bassin de la Haute-Meuse. Dans certaines régions, la situation est plus nuancée. Les Néandertaliens ont parfois pu bénéficier de cavités bordées d’affleurements de silex, comme dans les vallées de la Vesdre et de la Mehaigne, ou non loin de cailloutis les remaniant comme aux grottes de la Betche aux Rotches à Spy, de la terrasse à Goyet et Scladina (couche 1A) à Sclayn. Ils se sont aussi parfois implantés en plein air, là où le silex manquait (Neufvilles−Le Clypot) ou alors n’était disponible que sous forme d’épandages de galets aux dimensions réduites"
2006
La problématique du colloque « Normes techniques et pratiques sociales : de la simplicité des outillages pré-et protohistoriques » nous a permis de tester la pertinence d'une opposition binaire « débitage simple » versus « débitage complexe » durant le Moustérien. Notre évaluation se base sur les degrés d'élaboration de plusieurs systèmes de débitage du Paléolithique moyen (Levallois et non-Levallois) établis à partir d'une série de critères caractérisant la prédétermination à différents stades de la chaîne opératoire. Par ailleurs, nous avons fondé notre analyse sur les modes de gestion de ces industries au sein des territoires de subsistance, en définissant les matrices (volumes potentiellement exploitables soit pour des actions de débitage, soit pour leur utilisation directe -supports bruts -ou après retouche) qui circulent entre un territoire habité et un territoire parcouru. L'organisation de la production et les comportements qui lui sont liés montrent que l'opposition simple/ complexe est une notion non pertinente pour la compréhension des systèmes technoéconomiques du Paléolithique moyen.
2011
From the beginning of the second to last interglacial period (Eemian), lithic industries show a proliferation of production conceptions, methods and techniques: Levallois, Discoid and SSDA debitage, laminar debitage, anvil debitage, and the shaping of pieces that were unique or adhered to a techno-type. This diversity of lithic production conceptions sometimes appears in archaeological assemblages in which distinct flaking and shaping chaînes opératoires coexist; for example, a combined production conception associating flaking and shaping on the same matrix (raw material volume) has been observed in several assemblages. This work addresses the question of inter- and intra site variability and its behavioral significance through a techno-economic analysis of lithic industries and an experimental procedure. For nine lithic assemblages from three sites in the Bergeracois region, Cantalouette 1, Combre Brune 2 and Combe Brune 3, each of the production methods was analyzed based on a quantitative evaluation of all the operational phases present from the procurement of lithic raw materials to the use of the products. The role of experimentation in this procedure is to create specific reference bases that can be compared with the lithic assemblages in order to obtain a better estimation of their techno-economic representivity. The ultimate objective of this research is to propose coherent models of the functioning of human occupations at the beginning of the Middle Paleolithic in relation to their locations and potential complementarity within and across a single subsistence territory. The respective occupation types illustrated by the three sites studied are thus modeled and compared to other sites in the Dordogne and other regions. Keywords : Early Middle Paleolithic, lithic production’s economy, lithic experimentation, shaping, debitage, combined production, subsistence territory, Occupation type , southwestern France.
1999
"L’objectif de ce travail est la caractérisation technologique et typologique des industries lithiques taillées dans l’ouest de la France (Bretagne, Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes, Aquitaine) durant la néolithisation. Le corpus comprend 22 sites, mais leurs degrés divers de conservation et de fouilles imposent l’usage d’une large gamme d’analyse, de la compréhension systémique de la production à un simple inventaire typologique. Le souci principal est de comprendre tous les biais des industries, avec une insistance particulière sur les liens entre terrain et collection archéologique. Les études lithiques doivent s’adapter au potentiel informatif du site : les ensembles de référence (Beg-er-Vil, la Gilardière pour le Mésolithique ; le Haut-Mée, Port-aux-ânes, la Bajoulière, les Ouchettes, pour le Néolithique) sont secondés par des ensembles d’appoint et les informations triées (sites « mélangés »). Afin de saisir l’intégralité du processus de néolithisation, l’étude a balayé un large spectre chronologique, incluant toute la phase à trapèzes (Mésolithique récent et final), le Néolithique ancien et le début du Néolithique moyen. Une synthèse sur les méthodes de débitage du Mésolithique de l’ouest de la France est proposée. N’étant apparemment pas lié à un strict impératif technique ou écologique, le développement du phénomène des lames et lamelles larges dans les stades récents et finaux peut être qualifié de mode, véhiculée lors de déplacements de groupes ou des contacts de proche en proche. En effet dans les premières phases (Gildasien de l’embouchure de la Loire), l’adoption des nouvelles normes semble se faire suivant les méthodes en vigueur auparavant. Par la suite, au Mésolithique final, l’exploitation des volumes pour les séquences laminaires et lamellaires devient résolument frontale, avec diverses préparations du plan de frappe suivant les cultures, et l’usage de la percussion indirecte. En outre pour le Retzien (Mésolithique final du Centre-Ouest), un débitage d’éclats par des méthodes bifaciales se distingue, alors que d’ordinaire, les méthodes sont simplifiées à l’extrême, avec une prédétermination à court terme. Du point de vue de la typologie des armatures, il est possible de distinguer dans la moitié occidentale de la France trois grandes entités culturelles : le Tardenoisien du Bassin parisien, le groupe du Bassin aquitain et le groupe armoricain. Ce dernier se divise en deux branches au VI millénaire avant J.-C. : le Téviecien en Bretagne (sans armature à retouches inverses rasantes) et le Retzien en Pays-de-la-Loire. L’impact de la civilisation néolithique est fortement suspecté à cause de l’adoption de certains types d’outils allochtones dans les industries mésolithiques, et notamment dans le domaine des armes de jet. La grande diversité d’influences techniques perceptible dans la partie orientale de la péninsule armoricaine pourrait également être liée aux pressions directes et indirectes exercées par ces groupes néolithiques, avec des affirmations identitaires particulièrement marquées. Au Néolithique, l’arrivée de nouveaux paradigmes, et de nouveaux groupes humains, changent l’organisation et les caractères des systèmes techniques. Pour le Néolithique ancien du sud de la Loire, l’étude circonstanciée, d’une part du phénomène de dispersion d’armatures évoluées néolithiques, d’autre part de l’assemblage Ouchettes - Bellefonds, permet de proposer une construction simple en deux parties pour l’industrie lithique. La diffusion des armatures symétriques (type Montclus/Jean-Cros et Bétey) des Pyrénées au Marais poitevin laisse supposer l’extension d’une vaste entité fortement liée au domaine méditerranéen. Le second ensemble, que l’on peut appréhender plus profondément grâce à des sites fouillés, apparaît comme nettement plus récent : débitage et outillage ont perdu l’essentiel de la spécificité du Néolithique ancien méditerranéen (hormis peut-être la prépondérance du groupe des bords abattus), pour s’engager dans les normes du Néolithique moyen II de l’ouest de la France. Il est daté du milieu du V ème millénaire avant-J.-C. Pour le nord de la Loire, l’habitat du Haut-Mée est une des manifestations d’un front de colonisation par implantation de pionniers, dont les racines les plus évidentes se trouvent en Normandie. Les éléments de datation absolue sont en nombre restreint, mais la céramique à décors plastiques, d’ailleurs proches de celle du niveau « Augy » de la Bajoulière, ainsi que les bracelets en schiste, placeraient l’occupation de cette station dans une phase récente du Villeneuve-Saint-Germain, dans la première moitié du V ème millénaire avant J.-C. L’évolution technique ultérieure, lors du Néolithique moyen I et l’horizon Cerny, va vers une simplification des processus de fabrication. Les cultures dites de transition sont examinées successivement : « Roucadourien » du sud du Massif central, ensembles mésolithiques à céramique de l’embouchure de la Loire, et stations néolithiques à microlithes de la vallée de la Loire. Dans tous les cas, les bases archéologiques des modèles sont fortement défaillantes et nous conduisent à rejeter totalement ces constructions. Ce travail démontre l’existence d’une réelle césure entre les sphères culturelles mésolithiques et néolithiques, du seul point de vue des industries lithiques. Cependant, des passages ponctuels entre les deux mondes, lors de contacts, furent suffisamment longs pour s’inscrire durablement dans les systèmes techniques du Mésolithique (transformation de concepts d’outil). Ainsi, l’impact du Néolithique ancien d’obédience méditerranéenne est manifeste sur le Mésolithique final du Massif armoricain, davantage en Centre-Ouest atlantique (Retzien) qu’en Bretagne (Téviecien). L’identification d’os d’animaux domestiques sur les amas coquilliers bretons ne peut en revanche être retenue, au vu des preuves disponibles. Les traces de l’héritage mésolithique au sein des mondes néolithiques sont plus ténues, une fois écartées les pseudo-continuités (« Roucadourien »,...) ; peut-être faudra-t-il plutôt les chercher dans le domaine symbolique ? Un modèle de changement progressif est proposé qui prend en compte toutes les observations archéologiques actuelles. Il intègre l’hypothèse de groupes mésolithiques côtiers à organisation sociale complexe, avec de forts indices de sédentarité en Bretagne (structures pérennes, large spectre faunique), dont la mutation sous l’effet de la néolithisation et d’une compétition pour le prestige permet à terme l’émergence du phénomène mégalithique. "