Protestantismes et culture dans l’Europe moderne (xvie‑xviiie siècles) (original) (raw)

2012, École pratique des hautes études. Section des sciences religieuses

Conférences de M. Hubert Bost Directeur d'études Protestantismes et culture dans l'Europe moderne (xvi e-xviii e siècles) Dans la Requête en faveur des protestans qu'il dresse en 1763, l'écrivain La Beaumelle (1726-1773) se fait le porte-parole de ses coreligionnaires. Ce texte, soumis par la suite au synode national de 1763 par le pasteur Paul Rabaut, n'y est pas adopté en raison de son audace : les représentants du synode n'osent endosser des thèses qui, bien qu'apparemment déférentes, mettent en cause la politique royale de Louis XIV… et de Louis XV. De son côté, La Beaumelle, exilé en Languedoc après deux séjours à la Bastille, ne peut envisager de le publier sous son nom sans compromettre ses chances de retour à Paris 1. Personne ne veut signer ce texte dérangeant, foison nant et passion nant, qui restera manuscrit et quasiment inconnu. L'année a été consacrée à en étudier la première partie dans le cadre d'un projet d'édition critique et annotée. L'étude de ce cahier de 186 pages (dont il existe plusieurs états), qui a déjà fait l'objet de différentes publications 2 , passe préalablement par l'établissement du texte (saisie et annotation provisoire). Elle requiert une exégèse attentive qui implique une enquête sur son contexte historique, sur sa genèse, sur ses sources et sur son élaboration littéraire. La décision de rédiger cette Requête et la volonté de la faire ratifier par le synode sont nées d'un diagnostic théologico-politique : au lendemain des affaires Rochette et Calas (1761), La Beaumelle est convaincu que les Églises protestantes clandestines (Églises « du Désert » ou « sous la Croix ») se fourvoient lorsqu'elles s'en tiennent au registre de la plainte (au sens à la fois juridique et affectif). Il considère que l'avantage qu'aurait la France à autoriser le culte des « non conformistes »-pour « séculariser » son propos, La Beaumelle désigne ainsi les protestants, et parle du catholicisme comme du « culte national »-peut