Les religieuses, le cloître et la ville (XIIIe-XVe siècles). L'exemple des moniales dominicaines (Aix-en-Provence, Montpellier) (original) (raw)

2009, Moines et religieux dans la ville, XIIe-XVe siècles. Actes du 44e colloque de Fanjeaux, p. 495-516

Les religieuses, le cloître et la ville (XIII e -XV e siècle). L'exemple des moniales dominicaines (Aix-en-Provence, Montpellier)* Le monachisme féminin, contrairement peut-être au monachisme masculin toujours en quête de « désert », ne s'oppose pas a priori à la vie urbaine. Il tire en effet son origine autant des premières expériences monastiques des Pères du désert que de la vie consacrée des vierges et veuves au sein des cités antiques. Ces religieuses, mentionnées dans les écrits des Pères de l'Eglise, se regroupent en communautés, au moins à partir du IV e siècle, de préférence en ville ou à proximité de centres urbains 1 . Elles sont aussi bien la preuve du dynamisme des femmes dans l'Eglise dès les premiers siècles que celle du poids des schémas patriarcaux qui pèseront toujours sur elles (elles sont appelées « vierges » ou « veuves ») et qui interdisent d'étudier le monachisme féminin comme un simple parallèle du monachisme masculin. Le sud de la Gaule n'est pas exempt de ce phénomène, puisque saint Césaire fonde à Arles au début du VI e siècle l'un des plus anciens monastères féminins connus, le monastère Saint-Jean 2 . Force est de remarquer que la longue période de dépérissement des villes qui suit le VI e siècle et perdure jusqu'au XI e siècle n'est guère favorable aux vocations religieuses féminines. Les exemples d'établissements de moniales ou de chanoinesses sont rares et souvent totalement dépendants des faveurs de l'aristocratie 3 . Le retour progressif des villes sur le devant de la scène, accompagné dès la fin du XII e siècle par un fort « mouvement religieux féminin » auquel tenteront de répondre les ordres mendiants conduit à de très nombreuses fondations de monastères féminins à proximité des centres urbains au XIII e siècle. A la fin du XIV e siècle, à cause de l'accroissement considérable des dangers en rase campagne, les établissements féminins sont massivement rapatriés (ou directement fondés) à l'intérieur des villes ou à proximité immédiate des murailles 4 . Pour autant, la présence en ville d'établissements à caractère monastique (nous ne traiterons pas ici spécifiquement des maisons de béguines ou de tertiaires) reste un paradoxe : si la ville présente un aspect protecteur qui semble présider au choix d'implantation des monastères féminins, elle est aussi porteuse de menaces pour la « pureté » de la vie des religieuses, et conduit les communautés ou du moins leurs responsables à adopter le principe d'une stricte clôture. Césaire d'Arles, déjà, insistait dans sa règle sur le respect de la clôture Sylvie Duval : « Les religieuses, le cloître et la ville » in Moines et religieux dans la ville (XII e -XV e siècle), Cahiers de Fanjeaux 44, Toulouse, 2009, p. 495-516