« Deux bouchées de silence » : une lecture de Paul Celan (original) (raw)

La traduction mélancolique (sur Paul Celan)

TTR : traduction, terminologie, rédaction, 1998

Résumé La traduction mélancolique (sur Paul Celan) — Dans l'oeuvre de Paul Celan, poèmes et traductions (en majorité des poèmes, du XVIe au XXe siècles, à partir de sept langues) participent d'une même poétique dont la fonction est de retrouver une langue atteinte par la ténèbre du nazisme et d'opérer un travail de deuil. La stratégie scripturaire des traductions, cependant, est spécifique en ce qu'elle permet un dire affrontant le trauma. À l'aide de notions freudiennes, notamment le transfert et la mélancolie, nous étudions ce processus à travers la traduction du commentaire de Jean Cayrol écrit pour le film Nuit et brouillard.

Mémoire et survie : une lecture de Paul Celan

Études françaises, 1998

Résumé La mémoire de la Shoah est-elle assimilable aux autres mémoires de guerres ? Échappe-t-elle à cette typologie ou, au contraire, en incarne-t-elle le principe ? Sur le fond de cette question, le présent article interroge l'oeuvre de Paul Celan, hantée par la mort nazie, pour y lire une poétique énonçant un travail mémoriel spécifique, répondant aux besoins d'une temporalité et d'un ethos inédits, dictés par la condition du survivant.

Les parfums du silence et La lecture de Jean-Marc T. Pambrun : le refus du second rôle

Disparu en ce début d’année de l’Outre Mer, Jean-Marc Tera’ituatini Pambrun laisse une œuvre éclectique extrêmement riche. Il a une conscience aiguë du mythe de l’éden océanien tel que l’ont peint Bougainville, Loti, Gauguin, et bien d’autres. Il perçoit avec finesse les filtres – antiques, bibliques puis littéraires – que les écrivains-voyageurs ont toujours insérés entre la perception du territoire et sa transcription littéraire. Il en décrit les mécanismes, critique les motifs du mythe et joue à déconstruire ce fantasme romanesque. Jean-Marc Pambrun utilise toute la puissance du théâtre pour mettre au centre de la scène les Polynésiens trop souvent cantonnés aux seconds rôles, pour affirmer la réalité de la vie ma’ohi trop souvent déformée par les textes, par les clichés touristiques et pour donner voix aux mythes traditionnels de l’Océanie trop souvent écrasés sous le poids des livres métropolitains. Réappropriation thématique et linguistique, focalisation et réécriture, ces outils littéraires sont maniés par l’auteur afin de confier l’écriture d’un territoire à la plume et à la voix polynésiennes.

Dans la ruine de Babel : poésie et traduction chez Paul Celan

TTR : traduction, terminologie, rédaction, 1996

Résumé Dans la ruine de Babel : poésie et traduction chez Paul Celan — Paul Celan, l'un des plus grands poètes de langue allemande du XXe siècle, en est aussi l'un des plus grands traducteurs. Sur les cinq tomes de ses Oeuvres complètes chez Suhrkamp, deux volumes sont consacrés à ses traductions, en majorité de la poésie, couvrant sept langues et près d'une cinquantaine d'auteurs. Le présent article tente de montrer qu'une même poétique anime les deux gestes d'écriture et de traduction et qu'une telle entreprise doit se comprendre par sa dimension éthique. Il s'agit pour Celan de recréer un langage humain, ouvert à l'altérité, répondant à cette sombre historicité qui est de vivre après Auschwitz.

Alcools. Lecture du poème « Port » (« Hafen ») de Paul Celan

Nur dort vermag Erkenntnis zu erweitern, wo sie beim Einzelnen so verharrt, daß über der Insistenz seine Isoliertheit zerfällt  . ( eodor W. Adorno, Minima Moralia) . « La connaissance ne peut apporter un élargissement des perspectives que là où elle s'attache à l'individuel avec une telle insistance qu'elle fi nit par le dégager de son isolement. » (Trad. fr. de E. Kaufholz et J.-R. Ladmiral, Paris, , p. .) . J. B, « Paul Celan sur la langue. Le poème 'Sprachgitter' et ses interprétations, in Martine Broda (éd.), Contre-jour. Études sur Paul Celan, Paris, , p. -. Ce texte a été repris sous le titre « Le ballet des signes » dans J. B, Poésie contre poésie. Celan et la littérature, Paris, , p. -. Au moment de la traduction allemande et espagnole de ce livre, le texte a été encore revu et élargi. Bollack.indd 385 Bollack.indd 385

Un silence bruyant, parlant et créateur : « Sur la lecture »

Quaderni Proustiani, 2023

Dans « Sur la lecture », les occurrences du terme « silence » sont nombreuses, et elles semblent résumer maintes caractéristiques que Proust accorde au phénomène : l’ab- sence de parole (taceo) se manifeste dans une pratique du livre qui hésite entre lecture muette et lecture murmurée ; le silence environnemental (sileo), fondé sur la différen- tialité, montre la contigüité de l’expérience sensible pour Proust et devient générateur d’une locution métaphorisante qui est étudiée à partir de la théorie de Prandi. Enfin, une troisième typologie du phénomène, le silence créateur, propose une interprétation de l’influence de Maeterlinck sur l’auteur de la Recherche.

Recension de l'ouvrage Penser le silence dirigé par Stéphane Breton

2023

Recension de l'ouvrage dirigé par Stéphane Breton : Penser le silence, Paris, ed.de l'Aube, 2022. Cet ouvrage collectif regroupe des philosophes, moines, psychanalystes, écrivains et artistes qui ont non seulement « pensé le silence » mais qui l'ont aussi défini à leur manière. Le silence devient ici le sujet principal qui attire l'attention ; il est le protagoniste de l'oeuvre au centre de toutes les convoitises, l'objet central d'un débat qui ne connaît pas de fin. En effet, cet ouvrage s'apparente à un labyrinthe où Li Chevalier, « silence dévoilé », la nuit transfigurée II, 2021.

Intimité de Jean-Victor Pellerin, ou à la recherche du « théâtre du silence »

Tomasz Kaczmarek, Quêtes littéraires nº 7, 2017 : Le silence en mots, les mots en silence

Jean-Victor Pellerin was a representative author of the „school of silence” or, as some called it, „art of unexpressed”, in which emotions are implied in gestures, fragments of speach, and silence. In his first drama Intimacy (1922) the French playwrighter presents a bourgeois marriage living a monotonous life. The characters discuss trivial things of everyday life, they talk to each other, but there is no communication between them, because each of them is closed in their own world. Nobody is listening one another and words are spoken only in order to fill their existential emptiness. The writer is focused on the dialogue between the characters in the context of what they hide and what they do not want to tell themselves. People who appear to them are not flesh and blood human beings but they are the reflection of their own disturbed personality only. In this manner the writer focuses on the inner life of his solitary, their nostalgia for youth or even their hidden sexual motives. This is why the silence grows into the main element of the drama. Intimacy is one of the finest examples of „intimist aesthectic” developed by the avant-garde theater creator Gaston Baty who rejected the predominance of the word for discovering the mysterious world of the spiritual man.

La judéité blasphématoire de Paul Celan

Études Germaniques

c'est-à-dire non publiée par Celan, dans le contexte de ses travaux préparatoires pour le Méridien viendra illustrer sous forme condensée sa relation complexe avec le judaïsme. Le poème, le Juif Celan, au cours de ses travaux préparatoires pour le Méridien, fait une remarque complexe mais infiniment significative : « On peut devenir juif tout comme on peut devenir homme ; on peut s'enjuiver, et j'aimerais ajouter par expérience : en allemand aujourd'hui encore mieux… Verjuden. On peut s'enjuiver. Pourquoi ne pas le reconnaître ?-j'avoue que cela est difficile et j'avoue également que tous les juifs n'y sont pas parvenus ; cela me paraît donc d'autant plus recommandable… S'enjuiver : c'est le devenir autre... Ce n'est pas en parlant d'outrage, mais en restant inébranlablement lui-même, que le poème devient un outrage-il devient le Juif de la littérature-Le poète est le Juif de la littérature. On peut s'enjuiver ; cela arrive rarement mais se produit malgré tout de temps en temps. » 4 Ces lignes de Celan qui mettent le judaïsme et le poème en corrélation, sont de toute évidence truffées de contradictions. Elles invoquent sans équivoque un état particulier, « le Juif », pour décrire un état universellement accessible, le « devenir-autre ». Toutefois, cet « Anderswerden » ne porterait-il pas préjudice à l'identité singulière présupposée du terme « verjuden » au moment où se déroule le processus qu'il nomme ? Mais ce n'est pas tout : « On peut devenir juif tout comme on peut devenir homme » : peut-on vraiment « devenir homme » ? Et si oui, comment cet universel peut-il se situer dans un rapport analogue au « devenir juif » particulier ? Et de manière encore plus contradictoire : comment le poème peut-il être célébré, alors que tout comme le Juif voulant « rester inébranlablement lui-même », il incarne simultanément un « devenirautre » ?