Retraduire ou le corps changeant de la connaissance Sur l’historicité de la traduction (original) (raw)

La retraduction, une constante variable dans l’histoire de la traduction (Arras 2016, colloque Hommage à M. Ballard)

Dans le bilan que Michel Ballard dresse de l’histoire de la traduction dans son dernier ouvrage, il identifie comme constat majeur la présence, constante, de la retraduction. La pratique de traduire à nouveau des classiques déjà traduits – sujet qu’il avait abordé dans une étude de 2000 sur trois traductions anglaises de L’Étranger – trouve dans son ouvrage historiographique une place prépondérante, devenant un « terrain de choix » pour l’observation de l’approche de la traduction qu’ont chaque époque et pays. Loin d’être immuable, cette constante de la retraduction est soumise à plusieurs conditionnements et assume par conséquent des formes variables et difficilement prévisibles.

La Retraduction, manifestation de la subjectivité du traducteur

2007

Dans Les lettres persanes de Montesquieu, nous lisons le dialogue suivant entre un traducteur et un géomètre : […] Il y a vingt ans que je m'occupe de faire des traductions.-Quoi? Monsieur, dit le géomètre, il y a vingt ans que vous ne pensez pas? Vous parlez pour les autres, et ils pensent pour vous ?-Monsieur, dit le savant, croyez-vous que je n'aie pas rendu un grand service au public, de lui rendre la lecture des bons auteurs familière ?-Je ne dis pas tout à fait cela: j'estime autant qu'un autre les sublimes génies que vous travertissez. Mais vous ne leur ressemblerez point : car, si vous traduisez toujours, on ne vous traduira jamais. 1 Le narrateur de Sodome et Gomorrhe de Marcel Proust se pose des questions sur la façon dont réagirait sa grand-mère face à une nouvelle traduction des Mille et une Nuits : Or si une Odyssée d'où étaient absents les noms d'Ulysse et de Minerve n'était plus pour elle l'Odyssée , qu'aurait-elle dit en voyant déjà déformé sur la couverture le titre de ses Mille et une Nuits , en ne retrouvant plus, exactement transcrits comme elle avait été de tous temps habituée à le dire, les noms immortellement familiers de Shéhérazade, de Dinarzade, où, débaptisés euxmêmes, si l'on ose employer le mot pour des contes musulmans, le charmant Calife et les puissants Génies se reconnaissaient à peine, étant appelés l'un le « Khalifat », les autres les « Gennis » ? 2 Les deux fragments ouvrent plusieurs voies à la réflexion sur la traduction et le traducteur. 3 Dans le texte de Montesquieu, une phrase attire doletiana 1 subjecte i traducció

La traduction littéraire ou l’art de "faire refleurir les déserts du sens"

Literary translation is essentially a creative process of rewriting. The translator is the author of the translation text, even if he is not the author of the original text. A translation is never a clone of the original. In translating, we do not say the same thing differently, we say something else differently, as Henri Meschonnic put it. Concepts borrowed from the field of history of translation, like historicism, historicity, passive retranslation and active retranslation are used to go against those who still erroneously think that the meaning of a literary text lies only in its words, and claim that "we translate words because there is nothing else to translate". Against this linguistic and literalist approach, the poetics approach takes into account the fact that, between the author and the reader, the translator is an active and creative agent in the process. Translating is always a "ménage à trois".

Une page d’histoire à demi oubliée: Jules Legras sur l’art de traduire

Cahiers du Centre de Linguistique et des Sciences du Langage

Cet article a pour but d’analyser l’œuvre du linguiste et ethnologue français Jules Legras (1866-1939) consacrée à l’art de traduire. Durant le processus de traduction, selon les idées de l’auteur, il est indispensable de tenir compte de plusieurs paramètres. Le traducteur, quant à lui, doit non seulement posséder les compétences nécessaires, mais jouer également un bon rôle, celui du "guide" qui "fait traverser" le texte d’une langue vers une autre et "s’inquiète du chemin à choisir". Le dernier texte de Jules Legras, intitulé "Réflexions sur l’art de traduire" (1939), propose une méthode pour traduire en français des textes anglais, allemands et russes. Le but du présent article est d’analyser la méthode proposée pour la langue russe. L’analyse est faite sous le prisme des idées de l’auteur concernant le russe, la Russie et le peuple russe. Puisque, selon l’auteur, la langue russe et le peuple russe sont "archaïques", il est indisp...

La Bible Chouraqui : genèse d’une traduction et de ses retraductions au regard des archives

Continents manuscrits [Online], n°21 , 2023

André Chouraqui was born on the 11th of August 1917 into a Jewish family with roots in Algeria dating back to the 14th century. Benefiting from a multilingual culture and a French education from kindergarten to high school, he studied law in Paris, combining it with Hebrew studies at the Sorbonne and the Central Rabbinical School of France. An active member of the French Jewish Resistance during the war and a doctor of law, he served as a judge in Algeria before becoming René Cassin’s first deputy at the Alliance Israélite Universelle from 1947 to 1982. He wrote the first studies on the history of North African Jews (1950-1952). His love for the poetic texts of the Bible and his move to Jerusalem in 1958 redirected his career. At the request of the publisher Desclée de Brouwer, he became a translator of the Hebrew Bible, then of the New Testament (1974-1977), before translating the Koran (1990). For forty-two years he devoted himself to translating and retranslating the Bible, refining his method for a wide range of readers. This study reconstructs the genesis of these translations, using in particular the Chouraqui collection deposited at the Central Zionist Archives in Jerusalem. André Chouraqui naît le 11 août 1917, dans une famille juive enracinée en Algérie depuis le 14ᵉ siècle. Bénéficiant d’une culture multilingue et d’une éducation française dès le jardin d’enfants et le lycée, il part à Paris faire des études de droit, qu’il combine avec des études d’hébreu à la Sorbonne et à l’École rabbinique de France. Grand résistant pendant la guerre (Réseau Garel), docteur en droit, il est juge en Algérie avant de devenir l’adjoint de René Cassin à l’Alliance Israélite Universelle (AIU, de 1947 à 1982). Il écrit les premières études sur l’histoire des Juifs du Maghreb dès 1950-1952. Son amour des textes poétiques de la Bible et son installation à Jérusalem en 1958 réorientent sa carrière. Par suite d’une commande des éditions Desclée de Brouwer, il devient traducteur de la Bible hébraïque puis du Nouveau Testament (1974-1977), avant de traduire le Coran (1990). Pendant quarante-deux ans, il se consacre à traduire et retraduire la Bible, affinant sa méthode pour des lectorats divers. Cette étude reconstitue la genèse de ces traductions en utilisant, notamment, le fonds Chouraqui, déposé au Central Zionist Archives de Jérusalem.

Histoire et historiographie de la traduction

La main de Thôt, 2014

Histoire et historiographie de la traduction – Compte-rendu de la première séance du séminaire "La traduction. Pratiques, enjeux, défis " tenu le 24 janvier 2014-à la Casa Velázquez de Madrid.Rédigé par R o c í o S U B Í A S M A R T Í N E Z ( r o c i o. s u b i a s @ f r e e. fr).