Entre l’esquive et la mise à plat : traduire l’intertextualité chez James Thurber (original) (raw)
Il y a quelque temps déjà, j'ai tenté de répondre à la question de savoir si le dictionnaire était un conservatoire de clichés et mon propos était alors la représentation en lexicographie bilingue des clichés 1. Parmi ceux-ci, j'avais évoqué les citations usées, et, ce faisant, avais abordé ce que j'appellerais de l'intertextualité consignable, en reconnaissant bien vite les limites auxquelles les dictionnaires bilingues se trouvent confrontés, puisqu'ils ne peuvent d'une part enregistrer tout des deux cultures qu'ils représentent, d'autre part, prévoir ou prédire ce qui sera cité, pastiché, détourné, utilisé en allusion, etc., tout ce qui aura une charge ou une épaisseur intertextuelle dans chacune des cultures-laissant donc aux dictionnaires de citations, unilingues, le soin de répertorier ce qui est, ou peut être, mis à contribution par d'autres, dans d'autres textes, à d'autres fins, voire sous d'autres formes. Au dictionnaire bilingue, donc, le soin d'enregistrer les citations usées à force de « traîner partout », tellement clichés qu'elles n'ont plus grande valeur culturelle ni effet intertextuel au-delà de l'identification de leur auteur et du texte dont elles sont tirées, éventuellement. 2 C'est une préoccupation similaire qui m'a entraîné à me pencher aussi, ailleurs, sur la traduction des titres de presse, dans lesquels se cristallisent, me semble-t-il, les problèmes liés au non-dit à traduire et à l'allusion culturelle. En effet, le titre de presse anglo-saxon, dans sa grande tradition, le titre jeu de mots ou le titre clin d'oeil, est typiquement un texte qui en cache, plus ou moins, un autre, qui est la clé du décodage et de l'appréciation du titre. Le titre de presse entraîne le lecteur à opérer des rapprochements avec des éléments culturels aussi divers qu'oeuvres littéraires (par allusion à leur titre ou citation), films, chansons, discours connus, mais aussi dictons ou proverbes, slogans, etc. Le lecteur est donc amené à décoder la référence, selon le degré d'enfouissement de celle-ci, et ensuite à en apprécier la justesse et l'adéquation au fur et à Entre l'esquive et la mise à plat : traduire l'intertextualité chez James Thu...