Foucault/Badiou : d’un événement à l’autre (original) (raw)
2022, Materiali Foucaultiani
Lors du décès de Michel Foucault, Alain Badiou soulignait la subjectivation comme l’un des problèmes philosophiques qu’il partagea avec son ancien collègue de Vincennes. Certes, Badiou ne poursuivra pas l’exploration de ce concept par l’étalement des longues durées dans lesquelles cette instance fondatrice de la philosophie aurait pris corps pour se former par le biais de la constitution d’une série de règles. Pour Badiou, l’aboutissement, même partiel, de ses recherches sur la subjectivation se situe plutôt dans la thèse discontinue des « conditions » de la philosophie, dont le champ dispersé est traversé par des ruptures événementielles. Sa systématisation se fait par une nouvelle ontologie du multiple, celle-ci se schématisant par la théorie des ensembles. Ainsi se démontre que la régularité de la subjectivation procède moins par des règles que par des axiomes et des théorèmes, ceux-ci inscrits en l’être en tant qu’être. Quant au registre de l’événement, c’est Foucault qui réussit à articuler une séparation, capitale pour la philosophie, entre faits et ruptures. Or, Badiou s’en servira lorsqu’il met en place une plongée du champ de l’ontologie dans l’immanence des processus génériques. Un retour à la longue durée lui fournit aussi leur fondation historique, mais plutôt par une dispersion des conditions que par une reprise, soit-elle révolutionnaire, de l’historiographie. Dans le présent article nous approfondirons ces observations pour établir les bases d’un comparativisme en torsion, le seul, nous semble-t-il, capable de rendre raison de leurs perspectives sur la subjectivation. Nous montrerons, à partir de l’intervalle concernant la fragilisation de la philosophie pendant les années 1980, les variations, permutations et différentiations entre la thèse des épistémès chez Foucault et celle des conditions chez Badiou surtout afin de mieux relever ce que chacun aura contribué à cartographier le sujet dans le plan théorique du post-humanisme.