Être homme » pour faire jouer sa pièce à Paris quand on est femme (1789-1914 (original) (raw)
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Performer un mauvais genre : la demi-mondaine au XIXe siècle
Alors que le désir sexuel masculin est essentialisé et normalisé, se développe au cours du XIXe siècle tout un discours sur les prostituées qui va de la caricature méprisante à la pathologisation. La demi-mondaine, dont la définition oscille donc entre la prostituée de luxe et la maîtresse richement entretenue, échappe partiellement à ces représentations stigmatisantes. Elle constitue même, à partir de la Monarchie de Juillet, une figure érotique incontournable de la production littéraire, théâtrale et picturale des plaisirs de Paris. Afin de mettre en lumière le rôle des pratiques dans l’élaboration de la subjectivité des individus, cet article analyse les éléments qui caractérisent la demi-mondaine et favorisent l’ascension sociale des individus au sein de la hiérarchie vénale. La façon dont les demi-mondaines se doivent de performer un « mauvais genre » féminin pour exercer leur activité est ensuite mis en perspective avec l’écriture autobiographique que certaines mènent à la fin de leur vie. During the Nineteenth Century, while male sexual desire is normalized, criminalization and pathologization of prostitutes grows. The “demi-mondaine”, whose definition fluctuates between the luxury prostitute and the well-kept mistress, avoided to be identified with such infamous representations. Since the July Monarchy, the demi-mondaine as an archetype, even became a main erotic figure within the cultural representation of Paris' world of pleasures. In order to take practices as a relevant element in the emergence of individual subjectivities In order to bring practises’ part into individual subjectivity elaboration process out, this article analyses the different elements which are distinctive of the demi-mondaines and the individual's social rise inside the venal hierarchy. We would like to put into perspective the way in which demi-mondaines played the part of a licentious kind of women in order to exercise their activity with their autobiographical writing at the end of their lifes.
Masculinités et jeux de mémoire dans la pièce Bailar en hombre
Recherches en danse, 2019
La farruca est une danse flamenca qui a été chorégraphiée pour la première fois par le danseur sévillan Faíco El Viejo autour de 1905 1. Malgré l'énorme succès rencontré auprès des jeunes danseuses de l'époque, la farruca n'est entrée dans l'imaginaire du « masculin 2 » qu'à partir des années 1960, notamment grâce à la version d'Antonio Gades (1936-2004) diffusée à la télévision espagnole. Cette danse, devenue symbole de la masculinité en danse flamenca (même quand elle a de nouveau été dansée par des femmes dans les années 2000 3), constitue le fil conducteur de Bailar en hombre (« Danser en homme »), que j'ai créée en 2015, en même temps que j'écrivais mon mémoire de Master 2 4. La pièce n'a pas seulement été créée « en même temps » que je menais ce travail universitaire, mais-aussi et surtout-en interaction avec les résultats d'une recherche qui portait à la fois sur l'évolution de la farruca et la codification de la masculinité en danse flamenca. Masculinités et jeux de mémoire dans la pièce Bailar en hombre Recherches en danse, 7 | 2019
"Faire l’homme" ou "être un homme" en danse : la mixité à l’épreuve de l’hégémonie masculine
Ayral Sylvie et Raibaud Yves, Pour en finir avec la fabrique des garçons. Vol. II Loisirs, sport, culture, Bordeaux, Maison des Sciences de l’Homme de l’Aquitaine, pp. 95-109., 2014
Les relations à l'intérieur d'un couple de danse offrent un contexte privilégié pour observer la construction des genres 1 à travers un rapport non verbal et sensuel à l'autre 2 . Formalisé à la fin du xix e siècle en Europe, le couple dansant sur la scène publique du bal affirme de façon nette les dissemblances entre les sexes, à une époque où un ensemble de distinctions (vêtements et sousvêtements, pilosité, désignation de l'orientation sexuelle) tend à prendre de l'importance Révenin 2007). Traversé depuis 1945 par plusieurs mutations, le système des danses de couple se traduit toujours par une pluralité de scènes (thé dansant, dancing, soirée salsa, bal tango, bal trad…) où le genre est vécu 1. Plusieurs recherches récentes soulignent que la danse met en jeu des questions qui gravitent autour de la thématique du genre, entendu selon la perspective relationnelle où le féminin et le masculin sont le produit d'un rapport social
Masculinités et jeux de mémoire dans la pièce "Bailar en hombre" (2015)
Recherches en Danse, 7 , 2019
La farruca est une danse flamenca qui a été chorégraphiée pour la première fois par le danseur sévillan Faíco El Viejo autour de 19051. Malgré l’énorme succès rencontré auprès des jeunes danseuses de l’époque, la farruca n’est entrée dans l’imaginaire du « masculin2 » qu’à partir des années 1960, notamment grâce à la version d’Antonio Gades (1936-2004) diffusée à la télévision espagnole. Cette danse, devenue symbole de la masculinité en danse flamenca (même quand elle a de nouveau été dansée par des femmes dans les années 20003), constitue le fil conducteur de Bailar en hombre (« Danser en homme »), que j’ai créée en 2015, en même temps que j’écrivais mon mémoire de Master 24. La pièce n’a pas seulement été créée « en même temps » que je menais ce travail universitaire, mais – aussi et surtout – en interaction avec les résultats d’une recherche qui portait à la fois sur l’évolution de la farruca et la codification de la masculinité en danse flamenca. Je propose ici de parcourir les différentes scènes de Bailar en hombre, en essayant de rendre visibles les « jeux de mémoire » qui articulent sur le plateau récit historique et vécu personnel, en utilisant des textes de différente nature (morceaux de journal intime, fragments de textes journalistiques, juridiques et artistiques), des citations chorégraphiques et des rituels dansés. Par « citation chorégraphique », et suivant les travaux d’Isabelle Launay sur la question5, j’entends l’opération de reprise gestuelle de danses complètes (comme la farruca du Meunier d’Antonio Ruiz Soler) ou de morceaux de danses extraits de leurs contextes d’origine. Contrairement à cette notion de citation, le terme de « rituel dansé » n’est pas utilisé de manière technique mais il reprend plutôt le nom que, en tant qu’artiste, j’ai donné à certains passages dans lesquels je me suis servi d’une danse pour travailler, depuis le corps et de manière symbolique, mon rapport avec certaines situations de ma biographie et ainsi modifier l’influence qu’elles pouvaient continuer à avoir sur moi.
Comment parler, au théâtre, en 1864, des relations érotiques entre femmes?
How to present erotic relations between women in theatre in 1864? This article attempts at answering the question by analyzing Henry Monnier's play Deux gougnottes. It allows the author to distinguish four types of conditions that a homoerotic play had to follow in the 19th century. Namely, those conditions were editorial, genre-related, cultural as well as institutional. The obligation to meet those conditions made Deux gougnottes a play reflecting many stereotypical views on women and same-sex relationships. Nonetheless, it remains one of the very few 19th-century works trying to consider the special nature of women's erotic needs.
Lorsque l’on interroge les bases de données recensant les archives parlementaires de la période entre 1789 et 1793, on constate que le terme « viril » est très peu présent, contrairement à celui de « paternel » ou de « fraternel » (il apparaît 28 fois, contre 612 et 615 fois pour les deux autres). Si cette dichotomie confirme que la masculinité se définit davantage dans et par le cercle familial que par référence aux attributs de la « puissance » et à « la capacité d’engendrer » (Dictionnaire de l’Académie française, 1762 et 1798), ce qui n’a rien de surprenant, au regard des travaux sur la force de cette catégorie cognitive dans les représentations politiques de la Révolution (Hunt, 1992 ; Heuer, 2005 ; Verjus, 2010), elle ne dit rien des différentes modalités de cette masculinité de type familial. « Fraternel » qualifie, dans les dictionnaires de la période, l’amitié, l’amour, l’affection, l’union, voire la charité. « Paternel » n’est pas très loin de ce champ lexical, qui accompagne, dans les mêmes dictionnaires, les sentiments, les entrailles, les soins, la tendresse, l’amour, l’affection ; l’autorité aussi, mais non la puissance (qui réapparaîtra dans le Dictionnaire de l’Académie de 1835). Qu’en est-il, parmi les discours prononcés dans l’enceinte parlementaire, des usages de ces deux termes lorsqu’ils qualifient la relation ou les gestes du sujet politique ? Y retrouve-t-on la même assignation des qualificatifs au lien et au sentiment, et un même éloignement vis à vis des figures de la puissance virile ? Si cela est le cas, que signifie cette masculinité, et en quoi la situer dans le champ lexical de la famille plutôt que du genre change-t-il notre compréhension du phénomène représentatif ? Nous travaillons, pour proposer un début de réponse à ces questions, sur le corpus des Archives parlementaires numérisées par la Bibliothèque nationale de France et Stanford University, limité à la période juillet 1789-décembre 1793.
2018. Masculinité et Théâtre. Paris: Garnier.
In "Masculinités: États des lieux", Daniel Welzer-Lang and Chantal Zaouche Gaudron stress that men and masculinity are often ignored or underestimated in continental studies, even though important sociological and historical works have been published in France since the 2000s, such as "Hommes et masculinités de 1789 à nos jours" edited by Régis Revenin and more recently "Histoire de la virilité" edited by Georges Vigarello (t. 1), Alain Corbin (t. 2) and Jean-Jacques Courtine (t. 3). According to Raewyn Connell, masculinity and femininity are inherently relational concepts, which highlight cultural oppositions and social functions. [5] Hence masculinity is ‘masculinity-in-relation’. Moreover, the theories of masculinity suggest that it is a recent historical product linked to culture and class. Multiple criteria can give a better understanding of masculinities (age, body, education, status, lifestyle, sexual orientation, ethnicity, work, places and cultural norms, cultures or sub-cultures).Works on British and American literature and theatre opened new pathways in gender studies but masculinity in European Theatre remains an overlooked topic. "Masculinity and Theatre" aims therefore to assess the way in which masculinity is defined in plays and performed on stage in European theatre over the centuries. How are manliness, male rituals, and norms staged or highlighted by playwrights, actors or stage directors? Are theatrical genres, theatricality and staging gendered, and if so, what can be identified as masculine or what may be masculinized? When did barriers between masculinity and femininity fade in the history of theatre (cf. ‘crying’ heroes in French tragedies in the 1660s or ‘viragos’ in comedies)?
Barbarie(s) en représentations : le cas français (1914-1918)
2015
The purpose of this paper is to review the multiple meanings of the terms "barbarian" and "barbarity" during World War I in France. The atrocities perpetrated by the German armies in late Summer 1914 contributed to portray the Germans as "barbarians". This widely circulated image was increasingly used by wartime propaganda. This paper also shows how the term was used by the French themselves to describe their own barbarity and to question brutal forms of warfare. This paper also shows how the term was used to describe one's own barbarity and to question brutal forms of warfare. Key words : First World War; Image of Enemy; Barbarian; Brutalization; Cruelty. Résumé : Cet article s’intéresse aux différentes acceptions des termes « barbare » et « barbarie » en Grande Guerre, et notamment dans le cas de (...) lire la suite In English Cet article s’intéresse aux différentes acceptions des termes « barbare » et « barbarie » en Grande Guerre, et notamment dans le cas de la France. Il montre que le barbare est une image de l’ennemi très répandue et utilisée qui se radicalise encore entre 1914 et 1918, notamment du fait des atrocités allemandes du début de la guerre qui permettent d’accuser l’ennemi de « barbarie ». Mais il montre aussi que le terme est parfois employé pour évoquer sa barbarie propre en interrogeant les pratiques de violence sur le champ de bataille. Mots clés : Première Guerre mondiale ; image de l’ennemi ; barbare ; brutalisation ; cruauté.
« Vous n’avez pas besoin de jouer, il vous suffit d’être ». Le théâtre après la Révolution russe
Après la Révolution d'octobre 1917 il existe en Russie une véritable effervescence théâtrale. « Chaque soviet, chaque commissariat du peuple, chaque comité, chaque section qui se respecte, raffole de la politique théâtrale et se sent appelé à créer une scène à son idée[1] ». Bien que le nouveau gouvernement ait à affronter une situation politique et économique très compliquée et que la guerre civile se poursuive pendant plusieurs années, le théâtre n'est pas laissé sur la touche, en l'attente d'une situation plus propice à son épanouissement, loin s'en faut. Les différents travaux portant sur les pratiques artistiques et notamment le théâtre dans la jeune Russie soviétique s'entendent pour souligner son incroyable vitalité. Non seulement on fait, partout, du théâtre, mais c'est aussi un objet de vives querelles politiques et d'intenses débats théoriques. Le critique d'art Pierre Kogan écrit à ce propos, en 1921 : « Il n'est pas un domaine de l'art où la Révolution d'octobre ait produit des batailles semblables à celles qui se déroulent dans le domaine théâtral[2]. » Il est frappant de constater que dans ce contexte, la question théâtrale n'est jamais pensée en dehors de la place qu'occupe — ou que devrait – occuper le théâtre dans le processus révolutionnaire. Par ailleurs, celle-ci s'inscrit dans une réflexion plus large sur la culture comme élément central de la construction des bases de la nouvelle société. Les enjeux théâtraux sont par conséquent des enjeux politiques et les débats sur l'esthétique, le statut des artistes, le répertoire, etc., sont loin de faire consensus, y compris dans les rangs des partisans de la Révolution. Parmi les acteurs de ces débats et initiateurs des politiques théâtrales — et plus largement culturelles et éducatives — se trouvent principalement le Proletkult[3] en tant qu'organisation artistique et littéraire, dirigée par Bogdanov, Kerjentsev et Pletnev, et le Narkompros (Commissariat du peuple à l'éducation) dirigé par Anatoli Lounatcharsky — lui-même dramaturge et fervent amateur de théâtre. Les mouvements avant-gardistes comme le futurisme et le constructivisme ont également participé de cette dynamique politique, esthétique et théorique. Aborder l'ensemble des bouleversements qu'a connu le théâtre comme pratique, mais aussi comme structure, comme institution, sans parler des avant-gardes esthétiques, nécessiterait bien plus qu'un article, c'est pourquoi la réflexion sera ici recentrée autour d'un aspect spécifique ayant profondément fait débat, à savoir le statut de l'artiste de théâtre en tant que professionnel, que spécialiste et sa remise en question au profit d'un idéal dans lequel l'artiste ne serait plus un homme « à part », le peuple devenant acteur de ses propres représentations théâtrales. Un idéal dans lequel on entend bien sûr résonner la critique émise par Marx et Engels concernant « la concentration exclusive du talent artistique chez quelques individualités, et corrélativement son étouffement dans la grande masse des gens, [qui] est une conséquence de la division du travail », à laquelle s'est opposée l'idée que « dans une société communiste, il n'y aura plus de peintres, mais tout au plus des gens qui, entre autres choses, feront de la peinture[4]. » Il sera ici question des débats, mais aussi politiques mises en oeuvre par le Narkompros et le Proletkult, autour des problématiques soulevées par le statut professionnel (ou non) de l'artiste, entre octobre 1917[5] et l'instauration de la Nouvelle politique économique (NEP) en 1921, en nous focalisant principalement sur la pratique théâtrale telle qu'elle s'est développée en dehors des institutions théâtrales et théâtres d'État[6].