Hersart de la Villemarqué : portrait d’une famille de la noblesse bretonne au début du XIXe siècle (original) (raw)

2016, Le Centre pour la Communication Scientifique Directe - HAL - SHS

Cet article s'appuie en grande partie sur des documents manuscrits ou imprimés du fonds d'archives de Théodore Hersart de La Villemarqué (1815-1895) conservés aux Archives Départementales du Finistère (263J) et sont visualisables sur la collection « Fonds La Villemarqué » de la Bibliothèque Numérique du Centre de Recherche Bretonne et Celtique : bibnumcrbc.huma-num.fr Pour comprendre les faits et gestes d'un individu, l'historien peut examiner les textes, les oeuvres qu'il a produits, les diverses traces de son action dans les archives les plus variées, les récits que cet individu a lui-même laissés justifiant ou expliquant ses actes. Il peut (ou doit) aussi tenter de reconstituer ce que fut son environnement, les conditions économiques, sociales, culturelles, politiques qui ont fait ou contribué à faire ce que cet individu est devenu. C'est un peu ce que l'on a tenté de faire ici, bien modestement, en s'efforçant de reconstituer ce qu'a pu être l'univers, l'ancrage et l'histoire familiale du jeune Théodore Hersart de la Villemarqué (1815-1895). Au travers de la reconstitution familiale, la question est de savoir en quoi le monde et le cadre familial dans lequel Théodore a grandi sont caractéristiques de son époque, d'un milieu et d'une façon de penser. Il y a bien sûr dans cette tentative de l'incertitude, voire de la naïveté, mais cela mérite néanmoins d'être fait, sans la prétention d'apporter plus qu'un petit éclairage supplémentaire sur les conditions de création d'une oeuvre littéraire singulière. Cette étude n'est qu'une ébauche qu'il faudrait également compléter par un regard plus attentif sur les documents que possédait la famille au XIX e siècle. On s'est simplement appuyé ici sur quelques pièces des archives de Théodore Hersart lui-même mais on pourrait très certainement aller beaucoup plus loin dans les confrontations de sources avec d'autres documents issus des nombreux parents de la famille La Villemarqué. Par nature, nombre de pistes ne sont donc que des pistes d'étude brièvement évoquées mais insuffisamment développées. Ce que l'on propose ici s'articule en trois temps. Il s'agira d'abord de présenter une reconstitution généalogique simple, étendue principalement sur quatre générations (soit le XVIII e siècle) sans pour autant ignorer les strates plus anciennes. Dans un second temps, nous tenterons de savoir ce qui était connu dans la famille à l'époque de la jeunesse de Théodore, c'est-à-dire que nous essaierons de reconstituer ce dont lui-même avait pu entendre parler, ce que lui-même pouvait savoir ou penser et puis, dans un troisième temps, nous nous efforcerons de replacer cette famille dans le contexte du premier XIX e siècle pour interroger sa banalité ou sa singularité. Une reconstitution généalogique Commençons donc par un simple regard sur les ancêtres de Théodore Hersart de La Villemarqué. Nous nous arrêterons ici à quatre générations, aux arrières grands-parents de l'écrivain, c'est-à-dire que globalement l'observation du passé familial couvre tout le XVIII e siècle et remonte parfois jusqu'à la fin du XVII e siècle. Quatre générations, c'est généralement le temps de conservation directe de la plupart des mémoires familiales, c'est aussi le temps de la possibilité de l'interconnaissance réelle entre les individus. Le cas de Théodore est un peu particulier puisqu'il n'a connu directement aucun de ses quatre grands-parents 1 mais il a vécu au milieu de ceux qui les ont connus et ont pu lui en parler. Dans la noblesse, on le sait, cette mémoire familiale est souvent beaucoup plus longue mais elle passe alors majoritairement par l'écrit, qu'il s'agisse de l'usage de documents conservés dans la famille, d'écrits extérieurs ou de récits rapportés mais dont plus personne n'a été le témoin direct 2. Il s'agit principalement d'une mémoire rapportée, indirecte et reconstruite, pas moins intéressante, pas moins vraie, pas moins importante mais néanmoins différente par sa nature 3. Chez les Hersart, on retrouve sur ces quatre générations des situations contrastées. 24 Marie-Catherine Talhouët-Grationnaye (1776-1866) est une nièce de la grand-mère de Théodore de La Villemarqué. Les Maillard de La Gournerie, famille de son époux, font partie des relations familiales solides des La Villemarqué au XIX e siècle et constituent l'un des pivots de leur réseau nantais.