Eroticism Research Papers - Academia.edu (original) (raw)
De la « femme enfant » (André Breton) et la « femme nature » (Xavière Gauthier), à travers la muse et la « séductrice perfide » (Alain Jouffroy) jusqu’à un type de femme étrange et angoissante, les surréalistes font toujours... more
De la « femme enfant » (André Breton) et la « femme nature » (Xavière Gauthier), à travers la muse et la « séductrice perfide » (Alain Jouffroy) jusqu’à un type de femme étrange et angoissante, les surréalistes font toujours montre de leur fascination pour la femme et le corps féminin. Un genre en particulier de ces différentes images féminines est au centre de leurs préoccupations : la femme hystérique. Prise entre fascination et appréhension, André Breton & Cie. ne semblent capables à échapper ce type de femme étrange qui se présente effrayant mais également sensuel.
L’hystérie s’inscrit dans la recherche surréaliste d’un dépassement des limites qu’imposa une société détestée. Elle est un langage expressif du corps et les postures qui se manifestent pendant une crise sont libératrices. La femme hystérique devient donc, pour les surréalistes, un médium universel, permettant de libérer l’individu de carcans et de mécanismes d’oppression issus d’une bourgeoisie autoritaire. Mais en même temps, étant donné la rage psychique qui se déchaine pendant une crise, la femme hystérique devient terrifiante. Elle se transforme en symbole d’angoisse, car elle nous présente notre « soi intérieur » (Hélène Vanel) – complètement hors de notre contrôle.
Aucun exemple de ce genre de représentation surréaliste n’est aussi marquant que la performance intitulée Acte manqué, la caricature théâtrale d’une crise d’hystérie mise en scène pour l’Exposition internationale du surréalisme à la galerie des Beaux-arts de Georges Wildenstein en 1938. Hélène Vanel, une danseuse française, donna l’impression d’une « sorcière hirsute, cassante, cassée, spectre en charpie » . En faisant entendre des râles hystériques, elle se fraya un chemin entre des spectateurs, sauta sur un lit et s’y roula et se contorsionna « […] comme un tourbillon dans un mouvement inouï qui entraina toute l’assistance dans un délire démentiel […] » . En oscillation perpétuelle entre souffrance et extase, entre agression et gestes sexuels, Vanel, l’hystérique, éveille simultanément le désir et l’angoisse. Comme femme fatale surréaliste (belle mais dangereuse, sensuelle mais effrayante), elle incarne le portrait, d’un corps chargé d’une rage psychique – un rage qui ne se laisse plus contenir, qui devient dangereux, une rage qui peut faire « tomber une civilisation » (Don LaCoss).
Une confrontation à la société, une enquête de la liberté, mais également symbole d’angoisse, ce spectacle agresso-sexuel semble prédestiné pour un colloque qui cherche à étudier les origines de la « femme fatale » et ses métamorphoses diverses. Je propose donc une étude détaillée de Vanel dans l’Acte manqué – en tant qu’hystérique, en tant que femme fatale selon l’image surréaliste.