Ghost stories Research Papers - Academia.edu (original) (raw)
Comment expliquer les affinités électives entre le cinéma et le monde de l’au-delà ? Pourquoi insister sur le caractère spectral des images filmiques ? En vertu de quels critères le cinéma devient-il un vecteur de fantasmes liés à la... more
Comment expliquer les affinités électives entre le cinéma et le monde de l’au-delà ? Pourquoi insister sur le caractère spectral des images filmiques ? En vertu de quels critères le cinéma devient-il un vecteur de fantasmes liés à la communication avec les esprits ?
Le médium (au) cinéma entend répondre à ces questions en prenant comme point de départ, non pas tant la figure du fantôme que celle du médium spirite vu comme un média. L’étymologie du terme « médium » permet en effet d’envisager cette figure à la fois comme un intermédiaire ultrasensible entre le monde des vivants et des morts, et comme un appareil d’inscription et de transmission de données. Au cinéma, cette idée est transposée dans des films où le médium spirite opère tel un dispositif audiovisuel, une « machine-cinéma » capable d’intercepter des ondes invisibles, d’effacer les distances, de superposer les temporalités, de contourner la déchéance des corps et des choses. À l’occasion, le médium spirite devient le point d’origine d’un spectacle « multimédia » autour duquel gravitent quelques personnages récurrents (croyants et sceptiques, fantômes justiciers ou vengeurs, esprits maléfiques, parapsychologues exégètes). C’est pourquoi du médium (spirite) au média (technologique), il n’y a qu’un pas que les films contemporains franchissent volontiers, quitte à faire disparaître le médium au profit du média. Car bien que les technologies de (télé)communication aient toujours été investies de propriétés spectrales, le développement des cultures numériques contribue sans aucun doute à amplifier l’imaginaire du fantôme dans la machine, comme en attestent La Mort en ligne (2004), Pulse (2006) ou la franchise « The Ring ».
À partir d’une réflexion sur la polysémie du terme « médium », ainsi que d’une histoire croisée du cinéma et du spiritisme, cet ouvrage propose d’analyser la manière dont l’imaginaire spirite fait l’objet de représentations filmiques nourries par des discours (implicites ou explicites) sur les technologies d’enregistrement et de reproduction, et en particulier sur le cinéma qui devient, sous cet angle, une machine à fantômes particulièrement efficace.
Les études de cas sont tirées de films populaires qui se situent le plus souvent à l’intersection du merveilleux, de l’horreur et du mélodrame, et s’inscrivent sur un axe historique qui conduit du cinéma premier à l’époque contemporaine : Supernatural (1933), The Devil Commands (1941), Rendez-vous avec la peur (1957), 13 Fantômes (1960), Furie (1978), Ghost (1990), Sixième Sens (1999), Hypnose (1999), Intuitions (2000), Les Autres (2001), La Voix des morts (2005), L’Orphelinat (2006), Paranormal Activity (2007) ou Insidious (2010).
******Sommaire*******
Préface de Tom Gunning
Introduction. Média/médium (au) au cinéma
• Le spiritisme moderne, entre science et superstition
• Le médium, un média (cinématographique)
• Fantômes et médiums au cinéma
• Corpus et structure de l’ouvrage
Chapitre 1. État de la question
• Le fantôme dans les études cinématographiques
• Le Spectral Turn
• Du fantôme… au médium (spirite)
Chapitre 2. Du médium (spirite) au média (technologique)
• Le concept de « médium » (spirite)
• Un corps-machine (essentiellement) féminin
• Médium vs média
• Contacter les morts : The Devil Commands (1941)
Chapitre 3. Une histoire croisée du cinéma et du spiritisme
• La fantasmagorie
• Les machines magnétiques
• Les méthodes graphiques d’Étienne-Jules Marey
• La « cinématographie ectoplasmique »
• De la séance spirite à la séance de cinéma
Chapitre 4. Le spiritisme au cinéma entre 1895 et 1950
• Spectres et médiums dans le cinéma muet
• Charlatans et prophètes des années 1930
• Le surnaturel, entre superstition et scepticisme
• La science à l’épreuve de l’occulte : Rendez-vous avec la peur (1957)
• Le médium spirite parodié : L’Esprit s’amuse (1945)
• Le film de fantôme sérieux : La Falaise mystérieuse (1944)
Chapitre 5. Machines à fantômes et médiums-médias
• Le gimmick film : 13 Fantômes (1960)
• Un cinéaste-parapsychologue : L’Esprit de la mort (1972)
• Médiums-visionnaires et télépathes : Furie (1978) et Suspect Zero (2004)
• Médiums-médias de la comédie romantique : Ghost (1990)
• Médiums-enquêteurs : Hypnose (1999) et Intuitions (2000)
• Médiums-médias du film d’horreur et du mélodrame : L’Orphelinat (2007) et Le Dernier Rite (2009)
Chapitre 6. Maisons hantées, chasses aux fantômes et spiritisme appareillé
• Le médium originel : la maison hantée
• Savants contre médiums : La Maison des damnés (1973)
• Parapsychologues contre fantômes : La Maison des ombres (2011)
• Des fantômes qui s’ignorent : Sixième Sens (1999) et Les Autres (2001)
• La maison médiumnisée : Paranormal Activity (2007) et Insidious (2010)
• Sons et voix d’outre-tombe
Conclusion
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English decription
Forword by Tom Gunning
How can we explain the affinities between cinema and the world of the beyond? Why insist on the spectral dimension of filmic images? How does the cinema become a vehicle of fantasies linked to spirit communication?
Le medium (au) cinéma intends to answer these questions by taking as a starting point, not so much the figure of the ghost as that of the spiritualist medium seen as a medium. The etymology of the term "medium" allows us to consider this figure as an ultra-sensitive intermediary between the world of the living and the dead, and as a device for data inscription and transmission. This idea is transposed into films in which the spiritualist medium operates as an audiovisual device, a "machine-cinema" capable of intercepting invisible waves, erasing distances, superimposing temporality, and bypassing the decay of bodies and matter.
Therefore, there is only one step from the (spiritualist) medium to the (technological) media, which contemporary films willingly take – even if it means making the medium disappear in favor of the media. For although (tele)communication technologies have always been invested with spectral properties, the development of digital cultures undoubtedly contributes to amplifying the imaginary of the ghost in the machine.
Based on a reflection on the polysemy of the term "medium", as well as on a cross history of cinema and spiritualism, this book examines how the spiritualist imaginary becomes the object of filmic representations nourished by discourses (implicit or explicit) on recording and reproduction technologies, and on the cinema, which becomes, from this angle, a particularly effective ghost machine.
Case studies are drawn from popular films that are most often situated at the intersection of the marvelous, the horrific and the melodramatic, and are situated on a historical axis that leads from early cinema to the contemporary era: Supernatural (1933), The Devil Commands (1941), Night of the Demon (1957), 13 Ghosts (1960), Fury (1978), Ghost (1990), Sixth Sense (1999), Stir of Echoes (1999), The Gift (2000), The Others (2001), White Noise (2005), The Orphanage (2006), Paranormal Activity (2007) or Insidious (2010).
The author
Mireille Berton is a senior lecturer and researcher at the department of Film Studies of the University of Lausanne. Her research mainly focuses on the relationship between cinema and mind sciences (psychoanalysis, psychiatry, parapsychology) and on the cultural history of spectatorship. She is the author of Le corps nerveux des spectateurs. Cinéma et sciences du psychisme autour de 1900 (L’Âge d’Homme, 2015), and currently principal investigator of an SNFS project “Cinéma et (neuro)psychiatrie en Suisse: autour de la collection Waldau (1920–1990)” that highlights the major role played by the Waldau Hospital in the use of the filmic medium for research and education during the twentieth century.