Holbach Research Papers - Academia.edu (original) (raw)

Le baron d'Holbach est bel et bien l'un des radicaux du siècle des Lumières. Pour comprendre sa contribution à cette mouvance, dans la lignée de Spinoza, Bayle, et Diderot, il importe d'abord de comprendre la thèse de Jonathan Israel comme une thèse politique ; c'est à dire comme une interprétation des Lumières en tant que champs de bataille d'idées sur le paysage politique gauche-droite. Même si, comme ce chapitre le démontrera, la pensée du baron est plus subtile qu'il paraît, elle finit par défendre les trois idéaux cardinaux des Lumières radicales selon Israel : la démocratie, l'égalité, et l'universalité. Mais c'est en terme d'utilité et de justice sociale qu'il faut comprendre les idéaux du baron, et son matérialisme scientifique est bel et bien complété par un matérialisme historique et social, qu'il nomme l'éthocratie. Ce républicanisme radical permettra ensuite de comprendre la critique de Rousseau que le baron propose, et de placer d'Holbach dans la lignée d'un matérialisme pré-Marxiste, radical et engagé, soucieux des inégalités sociales. Paul-Henri Thiry, baron d'Holbach, est indubitablement l'un des penseurs les plus radicaux des Lumières. D'Holbach, ou le baron, comme l'appelle parfois Diderot dans sa correspondance, est bien connu pour son athéisme et sa pensée de système1, et pour son salon philosophique, la « coterie d'holbachique » où radicaux et modérés se côtoyaient librement2. Si son athéisme est bel et bien radical, ce n'est pas l'objet de ce chapitre. Jonathan Israel a proposé une nouvelle interprétation des Lumières, divisées en ses versions radicales et modérées. Sa thèse est avant tout politique, c'est-à-dire une division entre les philosophes de gauche (radicaux), et les philosophes de droite (modérés). Il faudra en premier lieu évaluer cette thèse, et voir si d'Holbach et bien un radical comme les décrits Israel, défendant les idéaux d'égalité, de démocratie, et d'universalité. Nous verrons qu'il faudra bien qualifier ces concepts pour comprendre la contribution du baron. Nous verrons ensuite, dans un second temps, qu'il fait partie de la tradition du contrat social, et que sa version reflète le radicalisme de sa pensée politique. C'est, en troisième lieu, le rôle de l'utilité qui faudra analyser. Elle est la fondation de l'éthique du baron, de ses conséquences politiques dans ce que d'Holbach appelle l'éthocratie, ou le gouvernement éthique. C'est par ses sources épicuriennes, modifiées par le baron, que la philosophie utilitaire s'élabore en système social, qui finit par défendre une justice sociale et un 1 1 Voir l'étude suivante pour un excellent résumé de la philosophie du baron. Alain Sandrier, Le style philosophique du baron d'Holbach. Conditions et contraintes du prosélytisme athée en France dans la seconde moitié du XVIIIe siècle,