Public international law of Cultural heritage Research Papers (original) (raw)

Si la pratique de la collection est ancienne, celle des circulations et transferts de biens culturels l'est aussi, notamment grâce au développement de la pratique archéologique. Au début du XX e siècle, les fouilles se multiplient et un... more

Si la pratique de la collection est ancienne, celle des circulations et transferts de biens culturels l'est aussi, notamment grâce au développement de la pratique archéologique. Au début du XX e siècle, les fouilles se multiplient et un traitement scientifique des découvertes et des données émerge. Les empires coloniaux euro-péens se partagent de grandes aires géographiques riches en patrimoine qu'ils exploitent en quête de vestiges des civilisations antiques et de biens qui font l'objet d'un intérêt nouveau comme les arts de l'Islam. Si les voyageurs s'étaient intéressés depuis longtemps aux pays d'Islam, leur intérêt archéologique se développe. Ainsi, en Iraq, les archéologues se pressent. Le pays est sous domination ottomane et les archéologues eu-ropéens connaissent les civilisations millénaires de la Mésopotamie mais découvrent également les vestiges abbassides de l'Islam médiévale. C'est le cas de la capitale éphémère de l'empire abbasside, Samarra, lieu connu des voyageurs européens depuis le XIX e siècle et site archéologique dès le début du XX e siècle. La capitale oubliée, construite entre 836 et 892, devient l'enjeu d'une bataille entre Français et Allemands qui revendiquent l'exclusivité de la fouille aux autorités ottomanes. Si le français Henry Viollet est le premier à fouiller en 1909, l'équipe allemande d'Ernst Herzfeld et Friedrich Sarre remporte les droits dès 1910. Le palais califal somptueux révèle des trésors d'arts décoratifs : peintures, stucs, nacres, verres, bois… Les artefacts révélés sont stockés en Iraq, certains partent pour l'Allemagne tandis qu'une partie est prélevée par les autorités ottomanes sur place. Mais la première guerre mondiale se déclenche après plusieurs campagnes de fouilles fructueuses et les biens sont saisis par les Britanniques qui prennent le contrôle de l'Iraq. Les caisses sont acheminées à Basra puis partent pour Londres. Des caisses sont perdues, égarées, oubliées… les autres arrivent dans la capitale britannique après la guerre. Les biens sont considérés comme des saisies des biens allemands. La question se pose de leur devenir et c'est finalement le gouvernement qui prendra la décision de répartir ces biens dans les grandes collections occidentales. Dans le jeu des relations géopolitiques et de ses bouleversements au lendemain de la grande guerre, les collections occidentales se répartissent les biens saisis par le biais de dons et d'échange de pièces. Si cette répartition est encore problématique quant à ses termes exacts, la seconde guerre mondiale rebat les cartes et brouille encore la dispersion de cette collection, puis la guerre froide achève de perdre la trace de certaines pièces. En effet, les mouvements politiques et les guerres qui ont affecté le monde et les grandes puissances européennes au cours de la première moitié du XX e siècle essentiellement ont transformé le visage des collections. Les collections ont été échangées, dispersées, perdues… De leur création à leurs fouilles et à leurs lieux actuels d'exposition, l'histoire est mouvementée. Cette communication proposera d'étudier la constitution de cette collection présente dans de nombreux pays aujourd'hui dans des quantités et des qualités très aléatoires et qui expose les enjeux de la collection publique et ses fortunes historiques et politiques. Elle est à la fois représentative des débuts de l'archéologie mais aussi de la naissance des collections constituées au début du XX e siècle et de leur nouveau visage dans la seconde moitié du XX e siècle. Cette collection est aussi le récit d'une histoire, celle des arts décoratifs palatiaux en Islam, et permet aujourd'hui leur étude et leur compréhension.