Tax Havens Research Papers - Academia.edu (original) (raw)

Les développements qui suivent sont un résumé de ma thèse, sous la direction d’Alberto ALEMANNO, défendue le 25 février 2014 à HEC Paris. L’objectif de notre travail était double. D’abord démontrer la pertinence économique, puis, dans... more

Les développements qui suivent sont un résumé de ma thèse, sous la direction d’Alberto ALEMANNO, défendue le 25 février 2014 à HEC Paris.

L’objectif de notre travail était double. D’abord démontrer la pertinence économique, puis, dans un second temps, l’impertinence juridique d’un contrôle de l’ingénierie offshore dans la perspective d’une sortie de crise.
Ce sujet académique souhaitant apporter un éclairage au monde professionnel - cabinets d’avocats comme directions juridiques - s’est attaché à donner des réponses à ce paradoxe qui semblait, à première vue, ne pas en avoir. De la théorie à la pratique, nous identifions ainsi en dernière partie certains dispositifs pouvant inspirer une appréhension de l’offshore - sans réduire aveuglément cette lutte à l’endroit des multinationales mais objectivement en une appréhension plus juste de la richesse qu’elles génèrent malgré tout. Laissant ainsi espérer la résilience avec la crise, nous en concluons que la pertinence économique d’un contrôle de l’offshore aurait raison de son impertinence juridique.

A la recherche de l’inévitable et mythique synthèse, reprenons notre raisonnement.

La pertinence économique d’un contrôle de l’offshore dans la perspective d’une sortie de crise s’illustre tout d’abord par une estimation chiffrée. La proportion représentée par cette économie parallèle sur la dette publique est telle que son appréhension permettrait le recouvrement nécessaire au respect de la stabilité budgétaire – celle-ci constituant le plus grand enjeu de demain.
Cette influence de l’offshore sur l’économie mondiale s’explique par le droit. Tout d’abord le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, fondement du principe de souveraineté, autorisant chaque Etat à établir le régime fiscal de son choix. Conjugué à l’influence de l’Ecole de Chicago des années 1980, puis la financiarisation de l’économie des années 2000, cette autodétermination, disposée au rang le plus élevé de la hiérarchie des normes, permit d’instituer un chevauchement accru des législations à l’origine de l’élimination de la double imposition internationale.
Une analyse purement juridique nous permet alors d’expliquer l’érosion des bases fiscales comme les notions de « territorialité », de « mondialité » et d’ « établissement stable », conduisant à une imposition artificielle des bénéfices dans les territoires à faible fiscalité et une déduction tout aussi artificielle des pertes de source étrangère dans les pays à forte fiscalité.

Une appréhension de ces zones économiquement agressives s’avère donc indispensable pour plusieurs raisons.
Contrôler ces juridictions ne rendrait plus possible une externalisation du risque qui conduirait à un nouveau chaos économique, financier et social.
Plus encore, appréhender l’offshore permettrait de répondre aux conséquences dramatiques qu’a eu cette première crise subprime sur la seconde crise budgétaire. En effet, un contrôle des prix de transfert - qui représentent 60% du commerce mondial - dans les secteurs où leur manipulation est la plus dommageable comme l’économie numérique assurerait une plus juste répartition de l’impôt.
Ce nouveau paradigme permettrait alors une réduction des inégalités de richesses (entre les personnes morales elles-mêmes, FMN/PME) et de développements (entre les pays du Nord et le Tiers-Monde, stimulant l’émergence de l’Afrique).

L’impertinence juridique d’un contrôle de l’offshore dans la perspective d’une sortie de crise s’illustre par une analyse approfondie de l’efficience exceptionnelle de la Common law en droit offshore et, à première vue, l’absence de dispositifs capables de l’appréhender.
Il est prouvé que la recrudescence du système anglo-saxon s’illustre dans les faits par des territoires majoritairement américains ou britanniques - qu’il s’agisse d’Etats à part entière comme les IVB ou les Caïmans ; d’Etats fédéraux américains comme le Delaware ou la Floride ; voire d’Etats simplement sous ascendance étasunienne comme le Panama. Plus encore, la recrudescence de la Common law s’illustre par l’Euromarket abrité à la City et régit par ses principes ; ainsi que l’usage d’entités d’interposition également sous tutelle de la Common law telles ques l’IBC, la holding, la fondation ou le contrat prête-nom, tous autorisant le contribuable à écrire la loi par la situation qu’il construit par ces mécanismes juridiques.
Le trust, auquel nous avons porté une attention particulière, cristallise cette recrudescence de la Common law aux dépends de la fiducie et des véhicules juridiques de droit continental en général. Le dédoublement de propriété dont il dispose assure une telle opacité entre le détenteur légal d’un actif et son bénéficiaire réel qu’il remplacerait aujourd’hui le secret bancaire mis à mal par la communauté internationale.
La fiducie, cette entité tripartite propre à la Civil law, est donc distancée par le trust constituant pour les législations de droit continental, un patrimoine sans propriétaire auquel il est complètement étranger. Contraint, le législateur romano-germanique tente d’opérer un legal transplant du mécanisme anglo-saxon, mais en vain.

Le paradoxe que renferme notre thèse apporte néanmoins une réponse qui se veut exhaustive et dynamique pour gérer cette insolence des mécanismes juridiques abusivement légaux. Conformément aux dispositions qui pourraient être prises par le prochain G20 de Brisbane en novembre 2014, en réponse au « projet BEPS » de l’été 2013, nos dispositions s’organisent autour de trois leviers de court, moyen et long termes.
A savoir, d’ici la fin de l’année, prévenir les délocalisations et inciter au rapatriement de façon à (re)territorialiser un maximum de richesse sur le territoire national; mais encore renforcer le pouvoir des autorités de contrôle, et ne pas s’en contenter. Exiger ainsi des multinationales françaises un « reporting » pays par pays, voire filiales par filiales, de façon à rendre aux transactions intragroupes toute leur réalité, et enfin calquer, sur le modèle américain, un « FATCA national ». Disposées au PLF 2015, ces mesures redonneraient de son éclat au leadership français pour inciter les Etats membres à agir dans le même sens.
A moyen terme, d’ici fin 2015, établir un prélèvement automatique des avoirs dans le cadre d’accords « Rubik » généralisés à l’ensemble de l’Union européenne. Combiner ainsi le « FATCA français » à ce « Rubik européen » pour impulser un « FATCA européen ».
Cette dernière partie assure qu’il serait ainsi possible de tendre progressivement, à long terme d’ici 2020, vers un « FATCA mondial » d’échange automatique d’informations - unique dispositif susceptible de mettre un terme définitif aux pratiques fiscalement dommageables.