François Fillon remporte sa première manche judiciaire (original) (raw)

Publié le 28 septembre 2023 à 18h33, mis à jour à 18h33

François Fillon et son épouse Penelope, lors de son arrivée, le premier jour de son procès, le 24 février 2020, au tribunal de Paris. François BOUCHON/Le Figaro

Le Conseil constitutionnel ouvre la voie à un second procès en appel, après la requête de l’ex-premier ministre.

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Pour la première fois depuis 2017, François Fillon obtient une victoire judiciaire. Jeudi après-midi, le Conseil constitutionnel a donné gain de cause à l’ex-premier ministre. Sabré en pleine campagne présidentielle de 2017 par des accusations de détournement de fonds publics, complicité et recel d’abus de biens sociaux, François Fillon avait été sévèrement jugé par deux fois, dont le 9 mai 2022 en appel. Par la voix de son avocat, Me François-Henri Briard, il interrogeait alors, via une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), la légalité de l’article 385 du code de procédure pénale, qui organise le régime des nullités. Ces dernières permettent à un mis en examen d’invalider un acte juridique ou même la totalité d’une procédure dans un délai restreint, avant l’ordonnance de renvoi des juges d’instruction. Pour une bonne administration de la justice, il n’est plus possible de les soulever après ce délai.

Or «_aucune dérogation au principe de la purge des nullités n’est prévue concernant des moyens de nullité dont le prévenu ne pouvait avoir connaissance avant la clôture de l’instruction_», a défendu en substance François-Henri Briard lors de l’audience, il y a une semaine. En jeu: les déclarations d’Éliane Houlette, alors encore procureur national financier, lors du procès en première instance de François Fillon. La magistrate évoquait «_des pressions et des demandes incessantes de remontées d’information de sa hiérarchie_», lors de l’enquête préliminaire expresse, déclenchée en janvier 2017 et réalisée en deux mois. Avant une mise en examen tout aussi diligente. Ses propos, qu’elle a par la suite tempérés, avaient cependant de quoi remettre en cause l’impartialité de la justice ou du moins son apparence. Ce qui a une valeur quasi équivalente.

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Dans une décision concise de six pages, les Sages du Conseil constitutionnel reconnaissent qu’aucune disposition du code de procédure pénale ne prévoit effectivement «d’exception à la purge des nullités dans le cas où le prévenu n’aurait pu avoir connaissance de l’irrégularité éventuelle d’un acte ou d’un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l’instruction». Il en est déduit que «les dispositions contestées méconnaissent le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense. Il les déclare donc contraires à la Constitution».

Conformément à sa jurisprudence - en l’occurrence celle du 23 avril 2021 -, le Conseil précise par ailleurs que «la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances en cours ou à venir lorsque la purge des nullités a été ou est opposée à un moyen de nullité qui n’a pu être connu avant la clôture de l’instruction». Et donc avant même le changement de la loi, qui doit impérativement évoluer avant le 1er octobre 2024.

L’affaire va revenir devant la Cour de cassation qui va sans doute casser l’arrêt d’appel de mai 2022

Me François-Henri Briard

Autrement dit, l’ex-premier ministre, mais aussi Nicolas Sarkozy, qui ont tous deux déposé des pourvois contre des décisions de justice devant la Cour de cassation, pourront s’en prévaloir devant cette dernière. «L’affaire va revenir devant la Cour de cassation qui va sans doute casser l’arrêt d’appel de mai 2022 ; la cour d’appel de Paris, autrement composée, devra alors dire si François Fillon est fondé à soutenir que les indices accablants qui sont apparus au fil de la procédure (célérité extrême de l’enquête et de l’instruction pendant la campagne présidentielle, pressions et demandes incessantes sur la procureur financière de l’époque, désignation d’un juge d’instruction ad hoc, etc.) caractérisent un manquement aux principes d’impartialité objective et d’indépendance de la justice pénale, dont tout justiciable européen, quelles que soient son histoire personnelle et sa condition sociale, doit pouvoir bénéficier», précise Me François-Henri Briard.

Concevant que ces dossiers restent toujours particulièrement inflammables, le Conseil constitutionnel a bien pris soin de préciser «_expressément_» que sa décision du jour «ne préjuge (…) nullement par elle-même de l’incidence de la présente déclaration d’inconstitutionnalité sur les procédures pénales en cours».

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