L'ŒIL DE L'INA - Marcel Amont, hommage au lutin de la chanson française (original) (raw)

Publié le 11 mars 2023 à 08h00

Même dans les moments plus difficiles de sa très longue carrière, le fantaisiste n'a jamais perdu un éternel sourire d'enfant et un esprit devenus sa marque de fabrique. - / AFP

Le chanteur nous a quittés cette semaine, à l'âge de 93 ans. Madelen vous propose de découvrir, ou de redécouvrir son parcours personnel raconté dans l'émission de 1971, À bout portant.

En 1960, de passage à New York, Marcel Amont monte à bord d'un taxi dont la radio diffuse une chanson. C'est ainsi qu'il découvre True Happiness. Dès l'écoute des premières notes, il comprend qu'il tient là une mélodie à sa mesure. De retour en France, il adapte le texte et l'enregistre sous le titre Bleu, blanc, blond. En quelques semaines, les ventes du 45 tours dépassent les 400.000 exemplaires.

Cette chanson, que vous allez découvrir ou redécouvrir ci-dessous, s'ajoute à d'autres, proposées par Madelen. Dans l'émission «À bout portant» de 1971 le plus célèbre des Béarnais raconte un parcours que beaucoup plus tard, à l'aube de ses 90 printemps, il a ainsi résumé : «Je suis tellement heureux que j'en ai presque honte !»

Même dans les moments plus difficiles de sa très longue carrière, le fantaisiste n'a jamais perdu un éternel sourire d'enfant et un esprit devenus sa marque de fabrique. Pourquoi en serait-il autrement ? Contre l'avis d'un père qui rêvait de le voir devenir avocat, il a quitté Bordeaux et connu le temps de la vache enragée, avant une émission de télévision qui a tout changé. Repéré par Jean Nohain, pionnier des divertissements, il crée l'événement en 1956, en faisant le poirier tout au long de l'interprétation de sa chanson. Physiquement, cela ne lui pose aucun problème. Sportif accompli, il a été, entre autres, champion universitaire du 400 mètres. Intellectuellement, c'est autre chose. Le réalisateur de l'émission est convaincu que le public ne lui pardonnera pas cette fantaisie. Autrement dit, pour lui, c'est terminé, il n'a plus qu'à prendre le premier train pour la capitale girondine. C'est exactement le contraire qui se produit. Le lendemain, dans les familles, on ne parle que de cet inconnu, si original et si drôle.

Le «Danny Kaye français»

C'est ainsi que débute la carrière de celui que l'on a surnommé «le lutin de la chanson», ou le «Danny Kaye français» en référence au chanteur et danseur américain très populaire à l'époque. Entre deux chansons largement diffusées sur les ondes comme Le Mexicain, Po po po dis ou Le chapeau de Mireille, signée Brassens, il donne des concerts sans jamais se contenter de rester debout derrière le micro.

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Au mois d'octobre 1962, il donne , à Bobino, un récital de 135 minutes pendant lequel, tout en chantant, il bondit, se désarticule et saute par-dessus une table. Il joue à guichets fermés pendant plus de 100 soirs ! À l'Olympia, au début des années 1970, il danse, entouré d'une douzaine de girls. Sur le petit écran, il réalise, au milieu des années 60, une autre performance physique : dans l'émission de Raymond Marcillac, Les coulisses de l'exploit, accroché à des anneaux, il fait un numéro d'acrobatie qu'un artiste de cirque ne désavouerait pas.

Il devient également une tête d'affiche du music-hall en Allemagne, en Italie, en Hollande, au Japon, au Canada et en URSS. En 1966, il donne dix-huit récitals entre Moscou, Leningrad et Yalta . Les Izvestia, le grand quotidien russe lui consacre une pleine page. «J'ai un cœur qui bat lentement et un souffle particulièrement puissant», disait-il pour expliquer des performances dont la précision nécessitait des semaines de répétition, devant une glace.

Une règle qu'il s'était fixée après avoir assisté, à la fin de l'adolescence, à Bordeaux, à un récital d'Yves Montand. Ce soir-là, l'interprète des Feuilles mortes est devenu son modèle, l'exemple à suivre. En quittant la salle, il s'est dit : «Si un jour, je parviens à en faire autant, je ne serai pas une cloche.» Une formule qui lui est venue à l'esprit sans doute parce qu'il était un peu sonné.