Clichés de campagne (8/10) : 2007, le renouvellement (original) (raw)

EN IMAGES - Une nouvelle génération de candidats se présente à l'élection présidentielle de 2007. Innovant en matière de communication politique, ils parviennent à intéresser les Français à cette campagne.

ÉPISODE 8/10. Quelles images resteront de la campagne électorale de 2022 pour la présidentielle ? Meetings, déplacement, débat télévisé...En politique, convaincre c'est séduire, et tout particulièrement en période électorale. Qu'on le veuille ou non, la bataille de l'image reste primordiale. Comment les candidats construisent leur image et parviennent (ou non) à s'imposer. Retour sur la campagne électorale de 2007.


Comme un nouveau souffle. En 2007, un air de renouveau souffle sur la campagne électorale. Pour succéder à Jacques Chirac, depuis douze ans à l'Élysée, une nouvelle génération de candidats se présente. Les principaux sont nés dans les années 50' : Nicolas Sarkozy, candidat de l'UMP pour la droite, Ségolène Royal à gauche pour le PS, ou encore François Bayrou au centre, pour le Modem. Les deux favoris - Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal - se lancent dans la bataille des présidentielles pour la première fois. Pour la première fois encore, une femme est en situation d'être éligible. Ces candidats se posent en candidat de la rupture, du renouveau. Entre eux, la compétition est féroce pour susciter l'intérêt, capter l'attention des médias et donc des électeurs.

Le renouveau de cette campagne passe aussi par une nouvelle stratégie de communication. Les candidats adoptent la stratégie du «_news management_». Leurs équipes organisent des pseudo-évènements pour attirer l'attention des médias et diffuser un message. Si possible, tous les jours. À cet exercice, Nicolas Sarkozy, conseillé par le communicant Franck Louvrier, (qui deviendra président de Publicis Event), excelle, faisant siennes les recettes d'Alastair Campbell, ancien conseiller en communication du premier ministre britannique Tony Blair (1997-2007). «_Dans nos sociétés modernes, (...) l'hyper-visibilité est devenue une nécessité. Une façon de maintenir le lien avec un public plus détaché et en même temps plus exigeant. Sarkozy utilise assez bien ces moments médiatiques pour renforcer son message principal_», confiait-il dans un entretien au Monde .

Le résultat est palpable. Les Français s'intéressent à cette campagne. Les meetings font le plein. À la télévision, les émissions politiques – sur le ton « les vrais gens parlent aux vrais candidats » - cartonnent. Les hebdomadaires avec en unes les personnalités en photo se vendent bien.

Une surenchère d'images

Durant cette campagne, en enchaînant les déplacements prétextes, Nicolas Sarkozy parvient à capter l'attention.

Le 5 janvier 2007, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur et candidat à l'élection présidentielle lors d'une visite à Sainte-Lucie en Corse. Paul Delort/ Le Figaro

Le 15 janvier 2007, Nicolas Sarkozy, lors d'une visite au Mont Saint-Michel. Paul Delort / Le Figaro

Le 15 janvier 2007, Nicolas Sarkozy, lors de sa visite au Mont Saint-Michel. Paul Delort / Le Figaro

Le 19 janvier 2007. Nicolas Sarkozy, en visite au Viaduc de Millau. François Bouchon / Le Figaro

Verdun, le 21 février 2007. Nicolas Sarkozy lors d'une visite au mémorial de Douaumont. Paul Delort/ Le Figaro

«Verdun, le Mont Saint-Michel, le Viaduc de Millau, _une bergerie Corse...c'était très codifié. Il a fait les endroits qui lui paraissaient importants, il a posé dans des lieux symboliques qui résonnent dans l'imaginaire des Français. Il se présentait en même temps comme le candidat du peuple_» se souvient le photographe Paul Delort, qui a suivi cette campagne pour le Figaro.

Le paroxysme de cette stratégie de l'image, c'est peut-être ce déplacement en Camargue le 20 avril 2007, deux jours avant le 1er tour de la présidentielle.

Saintes-Maries-de-la-Mer le 20 avril 2007. Le candidat de l'UMP à l'élection présidentielle devant les objectifs et les caméras, lors d'une promenade à cheval au mas Lou Rayas. Paul Delort/ Le Figaro

Paul Delort y était pour Le Figaro. Il raconte : «_On avait tous rendez-vous en Camargue. Un bus nous conduit dans une exploitation agricole. À notre grande surprise, on voit Nicolas Sarkozy à cheval, avec des lunettes, une chemise à carreaux. Il est accompagné de Nathalie Kosciusko-Morizet, réputée bonne cavalière. Tout à coup, une charrette arrive pour que nous, journalistes, puissions les suivre dans la propriété, au milieu des vaches et des taureaux camarguais. C'était clairement organisé pour l'image_».

La stratégie fonctionne. Nicolas Sarkozy parvient à capter l'attention. «_Pendant cette campagne, les médias sont fascinés par ce candidat qui est capable de créer un rapport particulier avec chaque journaliste, de lui demander des nouvelles de sa femme, de ses enfants, dont il a retenu les prénoms_», ajoute Christian Delporte, historien spécialiste de l'histoire des médias et de la communication politique.

Royal aussi se met en scène

De son côté, Ségolène Royal joue aussi la carte de la proximité et multiplie les déplacements médiatiques. De la Chine à son village d'enfance, dans cette bataille de l'image, la candidate socialiste donne elle aussi à voir. Et veut se montrer proche des gens.

Le 6 janvier 2007, la candidate socialiste Ségolène Royal, pour trois jours en Chine, visite la Grande Muraille de Chine, au nord de Pékin. Bertrand GUAY / AFP

Début janvier, elle entame une visite de trois jours en Chine par un passage éclair sur la Grande Muraille. Coiffée d'un châle de laine blanc, Ségolène Royal n'est restée qu'une dizaine de minutes sur le site, ensoleillé, mais balayé par un vent glacial. Elle a tout de même eu le temps de prononcer ce proverbe chinois : «_Qui vient sur la Grande Muraille conquiert la bravitude_» (au lieu du mot «_bravoure_»). Un néologisme qui lui vaudra quelques railleries.

Le 12 avril 2007. Ségolène Royal en visite dans le village de son enfance à Chamagne dans les Vosges avec son frère Antoine et son ancienne nounou Marie Thérèse. Martine ARCHAMBAULT/ Le Figaro

Ségolène Royal, pourtant favorite des sondages au début du mois de janvier, multiplie les erreurs de communication et tombe dans une spirale médiatique négative qu'elle ne parviendra pas à inverser. «_Entre les critiques fusant dans son propre camp, des déclarations maladroites en matière de politique étrangère, sur le Québec libre notamment ou sur la Corse, elle laisse penser qu'elle n'a pas le leadership et ses compétences en matière de politique étrangère et intérieure sont mises en doute_», analyse Christophe Piar, enseignant à Sciences Po et spécialiste de la communication politique. Le débat d'entre-deux tours, face à Nicolas Sarkozy, où elle s'énerve, ne fera que renforcer cette image dégradée.

Le 2 mai 2007. Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy lors du traditionnel duel télévisé d'entre-deux-tours animé par les journalistes Arlette Chabot et Patrick Poivre d'Arvor. Photo by FRANCE 2 / AFP

Nicolas Sarkozy l'emporte au second tour avec 53,06% des suffrages, contre 46,94% pour Ségolène Royal. Après les résultats, quelque 30.000 de partisans se rassemblent place de la Concorde à Paris. Avant de les rejoindre, Nicolas Sarkozy fait une halte au Fouquet's, restaurant chic des Champs, où il finira la soirée. Cette image lui vaudra le sobriquet de «_président des riches_».

Nicolas Sarkozy élu Président de la République se rend au Fouquet's le soir de son élection. Une image qui lui sera reprochée. Delort-Bouchon-Marmara / Le Figaro

Place de la Concorde, il est accompagné de Cécilia Sarkozy. Mireille Mathieu chante la Marseillaise et le président lance à ses supporteurs : «_Nous allons écrire une nouvelle page de l'histoire de notre pays. Je ne vous trahirai pas. Je ne vous mentirai pas. Je ne vous décevrai pas._»

Le 6 mai 2007. Nicolas Sarkozy entouré de sa femme Cécilia et de Michèle Alliot-Marie, place de la Concorde, à Paris DELORT-BOUCHON-MARMARA / Le Figaro