Dois-je vraiment demander l’asile politique en Suède ? (original) (raw)
Publié le 4 août 2024 à 17h00, mis à jour le 27 août 2024 à 15h12
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De retour de vacances, notre journaliste porte sur le pays de Bergman un regard plus mitigé
Dois-je vraiment demander l’asile politique en Suède ? La question se pose car j’ai très mal vécu les dernières élections législatives. Depuis plusieurs mois, je sentais monter en moi une forme de fébrilité. Nos dirigeants me semblaient paver la voie à une arrivée au pouvoir du RN, tout en prétendant le combattre. Et je ne comprenais pas que l’on ne s’en émeuve pas davantage. Ce sentiment était un phénomène nouveau pour moi. D’une nature rétive à l’anxiété, j’ai longtemps relativisé le vote RN, y voyant davantage une mise en garde pour notre République qu’un danger pour ses fondements.
Avec 40 % d’électeurs d’extrême-droite parmi mes concitoyens, ce n’est plus la même histoire. Ma détestation du zemmouro-hanouno-bollorisme est devenue épidermique. Et, j’ai commencé à m’énerver sur notre grande nation, si prompte à discourir sur les valeurs de la République mais trop défiante vis-à-vis d’elle-même pour les traduire en actes.
Sur ces entrefaites, je suis parti le 4 juillet en Suède, trois jours avant le second tour. Ce choix – justifié à l’origine par un besoin de grands espaces – s’avérait judicieux pour un éventuel exil. Si Camus, citant son père, écrivait qu’« un homme, ça s’empêche », le Suédois est assurément humain. Boire une petite bière tout en prenant le volant : détour assuré par la case prison. Aménager des ronds-points tous les kilomètres au lieu de s’occuper des pauvres et des orphelins : il n’en est pas question. Tous les Suédois semblent égaux, raisonnablement solidaires. Et, en plus, ils ont bon goût.
A force de m’entendre maugréer contre nos hypocrisies collectives, mon fils aîné a commencé à s’inquiéter : allions-nous vraiment rentrer en France ? Une rencontre avec une expatriée française m’a remis les idées en place. Alors que je faisais part des regards noirs que je m’attirais dans les cafés quand j’avais le malheur de hausser le ton avec ma progéniture, celle-ci me faisait remarquer que les petits Suédois, contrairement aux pays latins, sont très peu présents dans les espaces publics. Et, pour cause, subissant une éducation plus laxiste que réellement « positive », ils seraient parfaitement ingérables à moins d’être collés à leur écran.
Dans ce pays tout numérique, où il est impossible de vivre au quotidien sans smartphone, 82 % des enfants de 9 ans ont un portable et 25 % des ados dorment avec (quand ils parviennent à dormir), notait récemment la correspondante du Monde, Anne-Françoise Hivert, dans un article terrifiant. D’un point de vue français, évidemment.