Irriguer la Mésopotamie, quand l'eau rugit entre le Tigre et l'Euphrate : épisode 1/3 du podcast Histoires d'eau (original) (raw)

La Mésopotamie n’a rien d’une terre fertile. Son climat aride et ses sols calcaires en font au contraire une terre difficile à cultiver. Paradoxalement, ce sont ces contraintes qui ont permis, au cinquième millénaire avant notre ère, le développement de l’irrigation…

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Le Tigre et l'Euphrate, des fleuves qui invitent aux rêves et à l'imagination, des cités aussi, Sumer, Uruk, Mari, Babylone… et des millénaires d'histoires avec quelques notions à discuter : Croissant fertile, empire hydraulique... et pourquoi pas "paradis", longtemps imaginé en Mésopotamie.

La Mésopotamie, une région propice à la vie ?

Bordée par deux fleuves, le Tigre et l’Euphrate, la Mésopotamie est le berceau de l’agriculture. L’aridité du climat et la nature calcaire des sols rendent nécessaire un ensemble d’innovations techniques, comme l’irrigation. L'assyriologue et historien Bertrand Lafont nous décrit cette région : "Les montagnes du Croissant fertile qui composent la région sont de véritables châteaux d'eau qui jouent un rôle fondamental dans la région. Seulement, dès qu'on s'en éloigne, on arrive dans une zone extrêmement aride jusqu'au flanc sud vers le désert d'Arabie. Si la diagonale, qui fait couler le Tigre et l'Euphrate, imaginée par les hommes n'existait pas, la région entière ne serait que désert".

Dès le cinquième millénaire avant notre ère, des canaux sont creusés dans la plaine de basse Mésopotamie. Les techniques se perfectionnent peu à peu : il ne s’agit pas seulement d’acheminer l’eau vers les champs, mais aussi d’apprendre à la stocker, à drainer les sols, à prévenir les pénuries et les inondations. Des barrages, réservoirs, digues et vannes d’irrigation accompagnent ce développement agraire et technique sans précédent.

Aménagement, gestion et entretien : apprivoiser les fleuves

L’aménagement, la garde et l’entretien des canaux d’irrigation incombent aux dirigeants : toute négligence peut entraîner la ruine de la cité entière, ce qui fait de l’eau un enjeu politique et idéologique majeur. Pour l'assyriologue Dominique Charpin, "la relation des Mésopotamiens avec l'eau est ambivalente. Les populations en ont autant besoin qu'ils la redoutent (...). S'il est primordial d'amener l'eau pour les villes et les cultures, la contrôler est tout aussi important afin d'échapper aux crues et aux inondations".

L’importance cruciale de la gestion de l’eau se traduit à travers divers phénomènes : si les "noms d’années", typiques du monde mésopotamien, portent le plus souvent des noms de batailles ou de grands événements politiques, ils font parfois référence à de grands travaux, notamment aux percements de nouveaux canaux. Certains canaux sont eux-mêmes pourvus d’un nom qui rend le plus souvent hommage au roi, tandis que le creusement des réseaux d’irrigation fait l’objet d’inscriptions commémoratives.

Comment les innovations techniques relatives à l’acheminement, au stockage et à la gestion de l’eau ont-elles permis de faire de la Mésopotamie le berceau de l’agriculture ? Comment l’eau est-elle devenue une donnée politique majeure du monde mésopotamien, jusqu’à devenir, parfois, une arme de guerre ou un casus belli lourd de conséquences ?

🎧 Pour en savoir plus, écoutez l'émission…

Le Pourquoi du comment : l'histoire

Toutes les chroniques de Gérard Noiriel sont à écouter ici.

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