Économie régionale au Canada (original) (raw)
Répartition de l’activité économique
On analyse habituellement l’économie canadienne sous l’angle de la géographie du pays. (Voir Régionalisme.) Depuis l’arrivée des premiers colons, le développement économique est fortement influencé par les caractéristiques physiques de chacune des régions, notamment en matière d’accès (ou d’absence d’accès) à des voies navigables, des ressources naturelles, des terres agricoles, du gibier sauvage, et leur proximité avec les marchés et de disponibilité de technologies permettant d’exploiter ces avantages ou de surmonter ces difficultés. Depuis peu, les économistes accordent également une importance croissante au capital humain. C’est ainsi que la production économique d’une région est fortement corrélée avec sa population et avec le niveau de scolarité de cette population.
Provinces de l’Atlantique
Durant les dernières décennies, les contributions par personne des quatre provinces de l’Atlantique (Terre‑Neuve‑et‑Labrador, Nouveau‑Brunswick, Île‑du‑Prince‑Édouard et Nouvelle‑Écosse) à l’économie canadienne ont été inférieures en moyenne. En 2018, elles représentent 123 milliards de dollars, soit environ 5,5 % du produit intérieur brut (PIB) du Canada. Bien que, globalement, ce pourcentage soit inchangé depuis 20 ans, sa composition a fortement évolué.
Terre‑Neuve‑et‑Labrador, qui était dans le passé la province la moins développée économiquement de la région de l’Atlantique, a profité, ces dernières années, de l’exploitation de ses précieuses ressources minérales, hydroélectriques et hydrocarbures extracôtiers, et est désormais considérée comme ayant des performances supérieures à la moyenne sur le plan du PIB par habitant. En dépit de l’arrêt dramatique, en 1992, de la pêche de la morue du Nord (le plus important licenciement de l’histoire canadienne), la pêche et la transformation du poisson demeurent des activités économiques majeures dans la région de l’Atlantique. (Voir Moratoire sur la pêche de la morue de 1992.) Le port d’Halifax et, dans une moindre mesure, ceux de Saint John au Nouveau‑Brunswick et de St. John’s à Terre‑Neuve-et-Labrador apportent également d’importantes contributions à l’économie de la région.
L’absence de croissance démographique et le vieillissement rapide de la population constituent deux des difficultés récurrentes les plus sérieuses auxquelles la région doit faire face. (Voir aussi Histoire économique du Canada atlantique.)
Québec
En 2018, le PIB du Québec s’établit à 441,4 milliards de dollars, soit environ 20 % du PIB canadien. La province, qui détenait dans le passé la position économique aujourd’hui occupée par l’Ontario, a régressé durant la deuxième moitié du 20e siècle quant à sa contribution relative au PIB national. Trois facteurs ont joué un rôle majeur dans cette basse. L’achèvement de la voie maritime du Saint‑Laurent au début des années 1950, permettant aux navires de contourner Montréal et réduisant par là même de façon drastique le rôle de la ville en tant que port de premier plan, représente l’une des causes majeures de cette tendance.
Ceci est également exacerbé par une instabilité politique et la législation exclusivement rédigée en français. (Voir Crise d’octobre, Référendum du Québec de 1980 et Référendum du Québec de 1995.) Depuis les années 1960, cette instabilité a réduit de façon significative l’incitatif pour plusieurs compagnies internationales de s’établir au Québec. De plus, le rythme de développement économique a été supérieur dans d’autres régions canadiennes, ce qui a également influencé le déclin relatif de la province. En dépit de ces facteurs, les secteurs manufacturier et agricole québécois tirent profit de la libéralisation des échanges avec les États‑Unis.
Au 21e siècle, le Québec redevient une destination d’affaires et il abrite une industrie technologique florissante. La province connaît également une augmentation importante de son taux d’emploi depuis les années 1990. Cette croissance est due en partie au programme de garderies subventionnées du Québec. Grâce à cette politique, l’écart entre les hommes et les femmes sur le marché du travail a diminué au Québec plus que dans toute autre province. Montréal demeure la deuxième métropole la plus importante au Canada et le deuxième centre économique du pays. (Voir aussi Histoire économique du Canada central.)
Ontario
Avec 39 % de la population canadienne, l’Ontario reste le moteur économique du pays. En 2018, le PIB provincial s’établit à 859,1 milliards de dollars, soit 38 % du PIB national. Une grande partie des activités manufacturières canadiennes, notamment l’automobile, l’agroalimentaire et les produits métalliques, sont concentrées en Ontario et, au sein même de la province, essentiellement au sud entre Windsor et Oshawa. En dépit de ce rôle de premier plan dans le secteur industriel, la province a opéré, dans les dernières années, une mutation vers une économie axée sur les services : les activités de services représentent 76,8 % du PIB ontarien en 2018, alors que le secteur manufacturier n’en représente plus que 12,4 %.
Une grande partie du succès de l’Ontario s’explique par sa position géographique centrale au Canada, par sa proximité avec les marchés américains et par l’accès à des voies d’eau navigables facilitant l’importation de matières premières et le transport de biens manufacturés à destination d’autres ports canadiens et des marchés internationaux. Deux villes ontariennes, Ottawa, la capitale fédérale, dotée de très nombreux emplois dans le secteur public, et Toronto, qui est aujourd’hui devenue l’une des places financières mondiales les plus importantes, constituent des moteurs essentiels de la croissance économique de la province. (Voir aussi Histoire économique du Canada central.)
Ouest canadien
En 2018, les quatre provinces de l’Ouest — Manitoba, Saskatchewan, Alberta et Colombie‑Britannique — contribuent pour 795,8 milliards de dollars, ou environ 36 %, du PIB national. Cette région connaît la croissance économique, construite sur l’exploitation des ressources, la plus rapide de toutes les régions canadiennes. Le gouvernement de l’Alberta, après avoir consenti de lourds investissements dans les sables bitumineux, particulièrement dans la région de Fort McMurray, voit l’emploi décoller et engrange des recettes supplémentaires de plusieurs milliards de dollars. La Saskatchewan profite largement de l’excellence de ses terres agricoles et de l’exploitation de ses ressources, notamment en uranium, en potasse et en huile de schiste, qui sont parmi les plus attractives au monde. Cependant, l’Alberta comme la Saskatchewan restent trop dépendantes vis‑à‑vis des matières premières, ce qui les rend particulièrement vulnérables en cas de baisse des prix sur les marchés mondiaux des hydrocarbures et des autres matières premières.
La Colombie‑Britannique, une province également bien dotée en ressources naturelles, continue à profiter d’un secteur immobilier exceptionnellement solide sur lequel la demande est dynamisée par un afflux conséquent de riches investisseurs asiatiques. Vancouver constitue une plaque tournante majeure pour le transport dans le Pacifique et Calgary, qui accueille de nombreuses entreprises, est également une place financière d’importance. (Voir aussi Histoire économique de l’Ouest canadien.)
Nord du Canada
Le Nord du Canada est une région économique à part entière. Le Yukon, les Territoires du Nord‑Ouest et le Nunavut sont souvent négligés dans l’analyse économique traditionnelle en raison de la faible densité de population et de leur influence politique. On s’attend toutefois à ce que le Nord, qui est d’ores et déjà une région d’exploitation minière majeure, voie son importance s’accroître durant les décennies à venir consécutivement à la fonte de la calotte polaire glaciaire qui devrait un jour libérer le passage du Nord‑Ouest, révolutionnant le transport maritime international et offrant un accès à une impressionnante richesse supposée en matière de ressources pétrolières et minérales.
Disparités régionales en matière de revenus
L’écart persistant entre le Canada atlantique et les régions plus prospères du pays, particulièrement l’Ontario et certaines parties de l’Ouest, ainsi que les disparités au sein même des différentes régions, par exemple entre le nord et le sud de l’Ontario ou entre les zones urbaines et les zones rurales de la Saskatchewan, constituent les principaux problèmes de l’économie régionale du Canada.
Au cours des années 1980, le revenu des particuliers par habitant (mesuré en tant que PIB par habitant) dans les quatre provinces de l’Atlantique varie de 60 % de la moyenne nationale à l’Île-du-Prince-Édouard à environ 75 % en Nouvelle‑Écosse. Dès 2016, ces pourcentages au Canada Atlantique varient de 75 à 81 % de la moyenne nationale, hormis à Terre‑Neuve-et-Labrador, qui dépasse la moyenne nationale.
Le revenu par habitant au Québec s’établit également, de façon systématique, en dessous de la moyenne nationale, bien que les écarts soient moins importants que dans les provinces de l’Atlantique. Durant les années 1980, le revenu par habitant au Québec se situe aux environs de 90 % de la moyenne nationale. En 2016, ce pourcentage chute légèrement pour atteindre 85 %. L’économie québécoise est sujette à des forces contraires. La dénatalité spectaculaire depuis les années 1960, la présence croissante des femmes dans la population active, la hausse du niveau de formation de la population et l’apparition d’une nouvelle classe de gens d’affaires francophones contribuent positivement à la croissance du revenu par habitant. En contrepartie, la menace récurrente de séparation politique induit des coûts économiques qui se manifestent notamment lors de l’exode d’une grande partie de la vieille élite économique anglophone dans les années 1970 et 1980, entraînant le déclin de Montréal comme centre d’activité économique au Canada.
Le revenu par habitant en Ontario a toujours été plus élevé que la moyenne nationale, atteignant 114 % de celle‑ci à la fin des années 1980. Ce chiffre tombe à 101 % en 2016, dans un contexte où les activités manufacturières de base de la province, particulièrement l’industrie automobile, connaissent un important tassement. (Voir Récession de 2008-2009 au Canada.)
Les disparités de revenus entre les provinces des Prairies et le reste du Canada se caractérisent par des variations importantes du revenu par habitant dues à une activité économique surtout axée sur le secteur primaire (blé, pétrole, gaz naturel et potasse) et à demande, souvent déterminée par des facteurs naturels ou internationaux incontrôlables. Le revenu par habitant de la Saskatchewan connaît des variations erratiques, passant de 59 % de la moyenne nationale en 1941 à 87 % en 1951, pour retomber à 117 % en 2016. Au Manitoba, ce chiffre est de 92 % en 2016. Durant ces dernières décennies, c’est en Alberta que le revenu par habitant est le plus élevé au Canada, s’établissant, en 2016, à 132 % de la moyenne nationale.
Au cours de la même période, ce paramètre reste proche de la moyenne nationale en Colombie‑Britannique, se situant à 99 % en 2016.
Impacts du pétrole et du gaz
Le revenu généré dans une région ou une province économiquement riche, souvent appelée province « nantie », peut se diffuser vers une région ou une province plus pauvre, appelée province « moins bien nantie », sous la forme de paiements de transfert fédéraux comme les paiements de péréquation, de prestations d’assurance‑chômage, d’intérêts ainsi que de dividendes et de profits empochés par des investisseurs de l’extérieur de la région. (Voir Finances intergouvernementales.)
Les revenus élevés des provinces productrices de pétrole créent des disparités de richesse substantielles avec les provinces non productrices. La poussée des revenus liés au pétrole en Alberta dans les années 1970 remet en cause l’équilibre traditionnel entre les régions selon lequel c’est l’Ontario qui joue le rôle de province « nantie » et qui est la principale contributrice des régimes de transfert fédéraux. Au 21e siècle, l’Alberta demeure la principale région productrice de pétrole et de gaz au Canada; toutefois, la Colombie‑Britannique, la Saskatchewan, Terre‑Neuve‑et‑Labrador et, dans une moindre mesure, la Nouvelle‑Écosse tirent également des revenus de l’extraction pétrolière.
Les prix mondiaux du pétrole, à l’image de ceux des autres ressources naturelles, peuvent connaître des fluctuations brutales. Dans les années 1980 ainsi qu’en 2014 et en 2015, ce phénomène réduit considérablement les revenus pétroliers des provinces productrices tandis que les autres provinces sont épargnées. La « pétroéconomie » du Canada se caractérise donc non seulement par des avantages et des difficultés économiques inégalement répartis entre les régions, mais également par des retournements brutaux et de forte ampleur en la matière. (Voir Récessions régionales au Canada.)
Causes des disparités de revenu entre les régions
Emploi et salaires
Des variations du taux d’emploi, des niveaux de salaire, des revenus de placement ou des revenus de transferts gouvernementaux peuvent, en permanence, être à l’origine d’une évolution du revenu par habitant dans une région donnée. Au Canada, où environ 70 % du revenu des particuliers provient des salaires et d’autres revenus du travail, le taux d’emploi et le niveau des salaires sont par conséquent, de loin, les facteurs les plus importants dans ce domaine.
Trois indicateurs servent, au Canada, à mesurer les inégalités en matière de répartition territoriale des emplois (par rapport à la population) : le taux de la population en âge de travailler, c’est‑à‑dire âgée de 15 à 64 ans, le pourcentage de cette tranche d’âge appartenant à la population active et le taux de chômage. Dans les provinces de l’Atlantique, ces trois paramètres sont défavorables : les personnes en âge de travailler forment traditionnellement une proportion plus faible de la population que dans le reste du pays, notamment en raison de l’émigration, la part de la population active parmi les personnes âgées de 16 à 64 ans demeure faible par rapport à la moyenne nationale et les taux de chômage restent plus élevés qu’ailleurs au pays.
Les différences régionales de niveaux de salaire peuvent être causées par des écarts de productivité du travail ou de structure industrielle. Le revenu par habitant généralement élevé en Colombie‑Britannique s’explique en grande partie par le niveau important des salaires. Toutefois, des influences comme la syndicalisation, la mobilité de la main‑d’œuvre, la législation sociale et l’importance de l’emploi dans la fonction publique créent une tendance nationale à l’égalisation des salaires. Durant les années 1990, les niveaux de salaire au Québec et en Ontario sont, par exemple, à peu près équivalents.
Avantages géographiques
Les disparités régionales au chapitre de l’emploi et des salaires peuvent également être partiellement attribuées aux avantages géographiques comparatifs. Les régions qui se sont développées sur le plan économique les premières en raison d’avantages naturels ou historiques poursuivent souvent leur croissance à mesure que des marchés, des institutions et des infrastructures se mettent en place. La vallée du Saint‑Laurent prend son essor, à l’origine, grâce à ses avantages uniques en matière de transport et à son potentiel agricole. En construisant des canaux, des routes et d’autres infrastructures, les colons renforcent cet avantage naturel. Avant la Confédération, la population totale du Québec et de l’Ontario est déjà bien plus importante que celle des Maritimes.
Le marché interne du Canada est petit à l’échelle mondiale et il suffit souvent d’une usine ou d’un bureau pour desservir tout le pays. Le sud de l’Ontario et le sud‑ouest du Québec sont au centre de ce marché. Les industries des provinces maritimes et des Prairies sont moins bien situées pour desservir efficacement le marché canadien. De nos jours, les activités industrielles et les activités de bureau ont souvent besoin de s’appuyer sur des services, des compétences et des infrastructures qu’on ne trouve que dans les grandes villes. À cet égard, les provinces atlantiques ne possèdent aucun grand centre urbain. À l’échelle mondiale, Halifax est une petite ville. Dans les Prairies, l’absence de voies navigables rend plus difficile l’accès aux marchés principaux, constituant une entrave supplémentaire au développement industriel. (Voir Industrie au Canada.)
Relations économiques avec l’étranger
La montée en puissance des États‑Unis en tant que principal partenaire commercial du Canada et en tant que première source d’investissements étrangers depuis la Deuxième Guerre mondiale s’avère plus bénéfique pour certaines régions que pour d’autres. Le sud de l’Ontario tire profit non seulement de son accès aux Grands Lacs, mais aussi de la proximité des régions industrielles du Middle West américain dont il est devenu le prolongement à bien des égards, le développement de l’industrie automobile à Windsor, face à Detroit, en offrant un exemple évident. Les investissements américains sont fortement concentrés en Ontario et la plupart des sièges sociaux de sociétés américaines se trouvent à Toronto. L’intégration du Canada à l’économie nord‑américaine contribue à la marginalisation géographique des provinces de l’Atlantique dont l’économie entretient traditionnellement de solides relations avec la Grande‑Bretagne. Durant les dernières décennies, la croissance économique des pays et États côtiers du Pacifique (Japon, Chine, Californie) profite surtout à la Colombie‑Britannique et, dans une certaine mesure, à l’Alberta.
Capital humain
Le facteur humain est l’aspect le plus difficile à cerner du développement régional. Les flux migratoires produisent, par exemple, un impact déterminant sur la qualité des ressources humaines dans une région. Les régions canadiennes à faible revenu sont souvent prises dans un engrenage de déclin, conséquence de l’émigration continue des personnes en âge de travailler, souvent les plus dynamiques et les plus instruites.
Les ressources de la Colombie‑Britannique et de l’Alberta jouent un rôle dans leur croissance. Les salaires élevés et la forte productivité de la Colombie‑Britannique sont attribuables, en partie, à ses ressources forestières, mais aussi à sa situation géographique avantageuse, à sa population active qualifiée et au rôle de Vancouver comme métropole émergente. Les provinces de l’Atlantique sont non seulement freinées par le manque de ressources naturelles disponibles à des prix concurrentiels, mais aussi par leur situation géographique peu favorable et par une tradition d’émigration. Cependant, l’exploitation des ressources naturelles, en dépit de ses avantages à court terme, constitue rarement une base suffisante pour une croissance économique pérenne sur le long terme. Aujourd’hui, au Canada, comme dans d’autres pays industrialisés, ce sont les lieux d’implantation des industries manufacturières et de services qui déterminent l’apparition et le maintien des disparités régionales de revenu.
Politiques économiques régionales
Depuis la Confédération, la politique économique canadienne est influencée par des considérations régionales. Les politiques nationales ont d’importantes répercussions, intentionnelles ou non, à l’échelon régional, créant souvent des tensions à la fois entre les provinces et le gouvernement fédéral et entre les provinces elles‑mêmes. (Voir Relations fédérales-provinciales.)
Échanges commerciaux internationaux
Par le passé, la structure protectionniste des tarifs douaniers du Canada, héritage de la politique nationale du premier ministre John A. Macdonald conçue pour encourager l’industrialisation du pays, a surtout profité aux régions manufacturières du Québec et de l’Ontario en leur assurant un marché national captif. Les politiques douanières du Canada ont, de tout temps, constitué une source de récriminations des provinces de l’Atlantique et de l’Ouest où les consommateurs ont l’impression qu’elles reviennent à subventionner les industries protégées du Canada central, tout en entravant le développement de leur propre région. Toutefois, avec la signature de l’Accord de libre‑échange Canada–États‑Unis en 1989 et de l’Accord de libre‑échange nord-américain (ALENA) en 1993 et dans le contexte des réductions de tarifs douaniers consécutives aux négociations de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) des années 1980 et 1990, la politique douanière du Canada a cessé d’être une préoccupation majeure pour les provinces. (Voir Libre‑échange.)
Subventions au secteur des transports
La Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces maritimes de 1927 prévoit des subventions pour réduire les tarifs de transport ferroviaire des marchandises vers le reste du Canada à partir d’endroits situés à l’est de Lévis au Québec. Ultérieurement, ces subventions sont augmentées et étendues au camionnage. Depuis le début du 20e siècle, les tarifs de transport du grain expédié à partir des Prairies sont artificiellement maintenus à un bas niveau aux termes de la Convention du nid‑de‑corbeau. De multiples régimes de subventions et la Commission canadienne du blé, établie à Winnipeg, aident les producteurs de blé des Prairies à expédier et à commercialiser leur production. Toutefois, depuis les années 1980, le gouvernement fédéral élimine graduellement la plupart des subventions d’aide au transport.
Énergie
Les incidences régionales de la politique énergétique ont souvent été un sujet de controverse. Avant la crise pétrolière de 1972‑1974, la politique énergétique favorise les provinces productrices de pétrole par l’intermédiaire de ce qu’on appelle la ligne Borden, établie en 1961, qui divise le Canada en deux zones de commercialisation du pétrole séparées par la frontière entre l’Ontario et le Québec. À l’ouest de cette ligne, il est impossible de raffiner et de vendre du pétrole importé, le pétrole étranger et ses sous‑produits n’ayant donc accès qu’au marché situé à l’est. Cette politique garantit au pétrole de l’Ouest, alors plus coûteux, un marché captif incluant l’Ontario. En revanche, elle entrave l’essor de l’industrie du raffinage du pétrole et de la pétrochimie située à Montréal et dans les provinces de l’Atlantique, en imposant à son marché la limite artificielle de la frontière entre le Québec et l’Ontario. De 1973 jusqu’au milieu des années 1980, le Programme énergétique national a tendance à favoriser les provinces consommatrices de pétrole en maintenant les prix intérieurs du pétrole sous le niveau des prix internationaux et en redistribuant une part importante des redevances pétrolières de l’Ouest. Vers la fin de 1984, le gouvernement du premier ministre Brian Mulroney permet aux prix intérieurs du pétrole de suivre les prix internationaux, les deux ayant depuis convergé. (Voir aussi Politique pétrolière et gazière au Canada, 1947 à 1980.)
Transferts et développement régional
Les programmes relativement généreux de paiements de transfert du Canada comprenant des transferts aux autres gouvernements et aux particuliers (prestations de chômage, allocations familiales, pensions) représentent normalement quelque 50 % du budget fédéral, réduisant ainsi les disparités de revenus entre les régions.
Des programmes fédéraux de développement régional (PDR) visant expressément les régions à faible revenu existent depuis les années 1960. Ciblant à l’origine les régions rurales en proie au marasme, leur champ d’application a depuis été étendu. Le gouvernement fédéral gère les organismes suivants : l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, l’Agence fédérale de développement économique pour le sud de l’Ontario, l’Initiative fédérale de développement économique pour le nord de l’Ontario, l’Agence canadienne de développement économique du Nord et Diversification de l’économie de l’Ouest Canada. Ces organismes travaillent à promouvoir l’industrie grâce à diverses mesures de soutien financier aux entreprises et aux entrepreneurs locaux. Ils ont également hérité de plusieurs programmes d’anciens ministères fédéraux.
Les PDR englobent un vaste éventail de politiques, y compris des subventions, des provisions spéciales pour amortissement et des prêts destinés à encourager les entreprises à s’établir dans des régions désignées. Les ministères et organismes fédéraux concluent également avec les provinces des ententes générales de développement qui peuvent notamment inclure des programmes d’infrastructures, des projets d’exploration minérale, des mesures d’encouragement à la restructuration industrielle et des programmes de développement rural. L’impact des PDR se fait surtout sentir dans des petites régions, notamment dans les zones défavorisées des provinces de l’Atlantique. Toutefois, les économistes s’entendent généralement pour dire que les PDR visant des régions déterminées, comme ceux mis en œuvre dans les années 1970 et 1980, n’ont pas réussi à modifier fondamentalement le schéma de l’évolution régionale de l’économie canadienne.
Autres disparités
Les problématiques liées aux disparités entre l’échelon national et les différentes provinces ou régions du pays et les politiques mises en œuvre pour y faire face se retrouvent, presque à l’identique dans pratiquement chaque province, transposées à l’échelon de ses propres régions. En Ontario, les disparités d’emploi et de revenu par habitant entre le sud industrialisé et le nord moins développé sont souvent tout aussi fortes que les disparités entre provinces. Au Québec, le niveau d’emploi et le revenu par habitant sont systématiquement plus bas en Gaspésie que dans la région métropolitaine de Montréal. En Nouvelle‑Écosse, la région de Halifax est relativement prospère, tandis que l’île du Cap‑Breton connaît un marasme économique.
Dans la plupart des provinces, mais peut‑être de façon plus marquée dans l’Ouest, il existe une nette différence économique entre les Canadiens autochtones et non autochtones. La question du développement économique local des collectivités autochtones est devenue un enjeu majeur dans de nombreuses provinces. (Voir Autochtones : conditions économiques.) La plupart des provinces ont élaboré leurs propres politiques et leurs propres objectifs, souvent indépendamment du gouvernement fédéral.