Robyn Orlin And so you see... Une performance multicolore avec Albert Khoza (original) (raw)
Caen, 30 janvier 2018, par Alain Lambert ——
Une vache noire de dos fait face à un zébu blanc aux cornes circulaires sur l'écran du fond. Une table, une caméra vidéo, un opérateur et plus près de nous un fauteuil, tourné, et pas vraiment vide. L'image initiale s'en va, la vidéo prend le relais, nous montrant que ce fauteuil est bien occupé par une sorte de momie plastifiée enfouie sous du tissu. L'opérateur vidéo va venir la libérer en partie avant de faire un gros plan sur une face à cheveux bleus, androgyne, chantant dans un orifice du plastique, plus ou moins justement, comme le ferait une diva dans son bain, en s'amusant, sur le Requiem de Mozart qui retentit dans l'espace environnant.
Nous sommes au centre chorégraphique national, en attente d'un spectacle de danse sur les pêchés capitaux, au moins au nombre de sept, comme les jours de la semaine, selon saint Thomas: la paresse spirituelle, l'orgueil, la gourmandise, la luxure, l'avarice, la colère et l'envie.
Et nous nous retrouvons spectateurs ébahis d'une performance incroyable et transgressive dans laquelle on peut essayer d'y retrouver, ou pas, la paresse et la luxure dans le fauteuil au début, la gourmandise en se bâfrant d'oranges, en gros plan vidéo dégoulinant, avec un couteau effrayant, l'avarice et la colère en se faisant laver gratos par deux spectateurs esclaves tout en s'en moquant gentiment, et en anglais, l'envie en nous faisant jalouser une collection de bagues de grandes stars et l'orgueil en dansant zoulou avec Poutine en plein jerk, lui, tout en lui balançant que c'est mieux que vendre des armes (?), ou en faisant le paon en ombres chinoises multicolores... Toujours, avec des pauses, le « requiem pour l'humanité » comme dit la chorégraphe, plus ou moins surchanté, ou accompagné d'une cloche de vache, ou joui, grogné, aboyé, miaulé, bêlé... avec en interlude aussi la chanson Baleka de Nono Nkoane.
Tout se termine par un blues incroyable a cappella tout pendant que le performeur se recouvre de bleu, puis quitte son trône alors que l'opérateur projette, sur son corps, ensuite sur l'écran la simple image d'un enfant soldat, armé d'un fusil, dans des bottes d'adulte, avec des ailes de papillon sur le dos, comme un angelot ambivalent.
Un réquisitoire allégorique et mordant contre les violences et pour les libertés dans son pays de la Sud Africaine Robyn Orlin qui a construit avec son partenaire asymétrique Albert Khoza, noir, jeune, homosexuel, shamane, danseur façon sumo, acteur, chanteur... un spectacle créé en « collaboration étroite et tumultueuse », dit-il dans Libération en novembre 2016.
À voir encore le 16 février à Douai, les 23 et 24 mars à Poitiers et du 29 mars au 4 avril à Toulouse.
De Robin Orlin au théâtre de Caen les 29 et 30 mai : Oh Louis...
En attendant la création de Fix Me, d'Alban Richard, son directeur, en octobre au Cargo sur la musique électro d'Arnaud Rebotini, le compositeur de la BO de 120 battements de coeur par minute_,_ en répétition publique le 19 juillet, le CCN de Caen reçoit des danseurs en résidence et des spectacles : MDLSX de la compagnie Motus, les 15 et 16 février, T, de Jordi Gall, les 10 et 11 avril, ou Inaudible de Thomas Hauert les 5 et 6 juin.
Alain Lambert 30 janvier 2018
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Samedi 9 Novembre, 2024