Aleksandra Kurzak : L’héritage de Cornélie Falcon (original) (raw)
19 octobre 2024— Frédéric Norac
L’héritage de Cornélie Falcon, Aleksandra Kurzak (soprano), Morphing Chamber Orchestra, sous la direction de Bassem Akiki, airs de Mozart, Beethoven, Spontini, Halévy, Meyerbeer, Rossini, Berlioz, Weber, Aparté 2024 (AP353).
Enregistré à Vienne du 19 au 24 octobre 2023.
Parmi les voix légendaires du xixe siècle — Maria Malibran, Giuditta Pasta, Pauline Viardot, pour ne citer que les femmes — Cornélie Falcon est la seule à avoir laissé son nom à un type vocal, désormais usité pour caractériser une voix large entre mezzo et soprano dramatique à la tessiture étendue, du si grave au contre-ré. Cette chanteuse à la trajectoire brisée avait commencé sa carrière à dix-huit ans dans une reprise de Robert Le Diable de Meyerbeer et fut la créatrice de nombreux grands rôles des années 1830-1840 : Rachel dans La Juive de Halévy, Valentine dans Les Huguenots et Léonor dans Stradella de Louis Niedermeyer. Mais elle perdit sa voix dix ans plus tard et lui survécut tragiquement jusqu’à l’âge de quatre-vingt-trois ans. Alexandra Kurzak (Mme Roberto Alagna à la ville) a choisi de lui rendre hommage dans un CD qui parcourt tout son répertoire, des créations déjà citées aux reprises où elle s’illustra. Le disque commence donc par un splendide air de Donna Anna dans le Don Giovanni de Mozart, se poursuit par « Ah perfido ! » de Beethoven un remarquablement expressif, air de concert composé à l’attention de Josepha Duschek, propose la grande scène de Julie dans La Vestale de Spontini et enchaîne les trois rôles déjà cités. Il leur fait suivre l’air d’entrée de la Comtesse de Formoutiers dans Le Comte Ory de Rossini et se conclue avec Le Jeune Pâtre breton de Berlioz et le grand air d’Agathe du Freischütz de Weber que sans doute Cornélie Falcon avait du aborder en version française dans l’adaptation de Berlioz en 1841.
Partout, Aleksandra Kurzak se montre à la hauteur de l’enjeu, avec une voix homogène et bien timbrée qui couvre parfaitement l’ensemble de ces tessitures, plus claire que ne devait l’être celle de sa devancière, et laissant toutefois entendre un rien de tension dans l’extrême aigu. Bien que sans accent, son articulation dans les airs français n’est pas toujours parfaitement compréhensible ce qui est particulièrement sensible dans la mélodie de Berlioz et nuit un peu à l’agitato de la grande scène de La Vestale mais son style est varié d’un air à l’autre et l’expressivité est toujours au rendez-vous.
Notons qu’elle est fort bien accompagnée par le Morphing Chamber Orchestre dirigé par Bassem Akiki. Globalement c’est un disque très intéressant et particulièrement grâce à l’originalité du répertoire abordé. Il témoigne également de la maturation d’une voix qui à l’approche de la cinquantaine n’a rien perdu de ses qualités et de sa fraîcheur, et qui, d’abord connue comme soprano lyrique, aborde désormais des rôles plus corsés avec un certain bonheur.
Frédéric Norac 19 octbre 2024
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Vendredi 18 Octobre, 2024 22:16