Birds : les extravagants oiseaux de l'Ensemble Maja (original) (raw)
Athénée Théâtre Louis-Jouvet, 9 février 2024 — Frédéric Norac
Birds. Photographie © Aminata Beye.
Sous le titre « Birds » (Oiseaux), l’ensemble Maja a réuni deux pièces emblématiques du théâtre musical des années 1960. La première, Aventures/Nouvelles aventures de Gyorgy Ligeti (1962) se présente comme une sorte d’essai lyrique sans texte, utilisant bruitages, onomatopées, vocalises, cris et chuchotements, pour créer une sorte de bataille vocale entre trois solistes qui dialoguent, se querellent, s’excitent, miment la parole, gazouillent, crient, et s’emparent tour à tour d’un porte-voix pour mieux faire entendre leur incompréhensible baragouin. Bien sûr, le jeu d'acteurs supplée à l'absence de texte pour suggérer des situations, des propos et créer de véritables personnalités. De temps en temps la pianiste, Bianca Chillemi qui est également la conceptrice du spectacle, déguisée en chef d'orchestre, s'en mêle pour mettre un peu d'ordre et ramener à la raison les chanteurs et les huit instrumentistes gagnés par le délire ambiant. Si le comique a un peu tendance à occulter le tour de force vocal et la complexité de la composition, on reste admiratif devant la virtuosité des interprètes, Anne-Laure Hulin, Romie Estèves et Pierre Barret-Mémy ainsi que devant celle des huit musiciens très impliqués également dans l'aspect théâtral.
La seconde pièce, Eight Songs for a mad King (1969) (Huit chansons pour un roi fou) de Peter Maxwell Davies relève plutôt du monodrame et assume l'héritage du Pierrot Lunaire de Schoenberg. Elle met en scène, en huit séquences, le soliloque extravagant du Roi d'Angleterre George III sur un texte de Randolph Stow, inspiré, semble-t-il, de propos authentiques du monarque, lui-même fasciné par les oiseaux. Prisonnier d'une couronne descendue des cintres, comme d'une cage symbolique, le protagoniste exprime sans souffrance apparente des pensées vagabondes, entre rêve et réalité, avec des montées de colère ou d'angoisse que le rythme décousu, les syncopes et l'instrumentation concrétisent. Elles l'amèneront dans la dernière séquence à s'emparer du violon pour le briser tandis que la musicienne elle-même s'effondre, comme abattue par un tel coup. Plus déclamée que chantée, la partition réclame néanmoins de l'interprète une longue tessiture de cinq octaves dans laquelle le baryton Vincent Bouchot semble parfaitement à l'aise, jouant à la perfection son personnage égaré et maîtrisant sans faille la complexité rythmique de l'écriture.
Prochaines représentations les 9 et 10 février.
Frédéric Norac
9 février 2024
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