Louis-Georges-Gabriel de GALLOIS LACHAPELLE (original) (raw)
NOTICE N�CROLOGIQUE extraite des ANNALES DES MINES, 1826, pages 621 � 628 PAR M. DE BONNARD, Inspecteur divisionnaire, Secr�taire du Conseil g�n�ral des Mines
Louis-Georges-Gabriel DE GALLOIS-LACHAPELLE , ing�nieur en chef de premi�re classe au Corps royal des Mines, chevalier de l'ordre royal de la L�gion-d'Honneur, n�, en 1775, � Saint-L�onard, d�partement du Bas-Rhin, descendait d'une famille irlandaise , �migr�e en France avec le roi Jacques II.
Son p�re, capitaine au Corps de Royal-Bavi�re, avait servi avec distinction dans les guerres du r�gne de Louis XV. Destin� � entrer dans le Corps du G�nie militaire, M. de Gallois fit , � Strasbourg , des �tudes dirig�es vers ce but; le 16 d�cembre 1791, il fut re�u �l�ve de l'�cole du g�nie, o� l'atteignit la loi de la r�quisition militaire , et le 22 septembre 1794, on le nomma adjoint aux officiers de cette arme; mais, voulant perfectionner son instruction dans les sciences math�matiques , il entra, deux mois apr�s, � l'Ecole polytechnique, lors de la cr�ation de cet illustre Etablissement. Une maladie, caus�e par sa trop grande ardeur pour le travail et par la douleur qu'il �prouva de la mort de sa m�re, interrompit ses �tudes ; n�anmoins , � l'�poque des premiers examens de sortie de l'Ecole , il fut reconnu admissible dans les services publics, et nomm�, en cons�quence, �l�ve de l'Ecole des Mines. Sa sant� l'obligea encore � s'�loigner de Paris pendant plus d'un mois, et pourtant ses succ�s furent si rapides que, dix mois apr� son admission, il fut propos� par le Conseil des mines, pour �tre nomm� ing�nieur.
Les r�glemens exigeaient deux ans d'�tudes a l'Ecole des Mines, et le ministre de l'int�rieur refusait sa sanction � cette pr�sentation ; mais M. de Laplace , qui arriva � cette �poque au minist�re, jugea que le m�rite d'un �l�ve aussi distingu� permettait de passer par-dessus les r�gles ordinaires , et M. de Gallois fut nomm� ing�nieur le 26 novembre 1799, seul exemple que pr�sentent les fastes de l'Administration des Mines, d'une promotion aussi prompte. Dans cet intervalle, M. de Gallois, rappel� au service militaire , avait �t� forc�, par un arr�te du Directoire ex�cutif, d'entrer comme soldat dans un r�giment d'infanterie : quelques mois apr�s , il re�ut le brevet de lieutenant du g�nie militaire; mais , bient�t, une loi plus raisonnable lui permit de reprendre la carri�re qu'il avait choisie, et dans laquelle il se distinguait d�j� si honorablement.
En 1801, M. de Gallois fut envoy�, sur sa demande, avec M. Beaunier, aux mines de Poullaouen et de Huelgo�t, pour y perfectionner son instruction pratique. Quatre m�moires, ins�r�s dans les tomes 12 et 16 du Journal des Mines, sur la pr�paration des minerais de plomb � Poullaouen, sur les travaux des fonderies , sur la temp�rature des fourneaux � diverses �poques des op�rations , et sur les trompes, sont sans doute un t�moignage suffisant de la mani�re dont les deux jeunes ing�nieurs atteignirent le but de leur mission ; mais plusieurs autres travaux �galement int�ressans , qui en �taient aussi le r�sultat , ont �t� perdus. A cette �poque , M. de Gallois fut atteint d'une maladie terrible , dont il fut plus d'un an � se r�tablir. Il reprit son service en 1803 ; mais depuis lors, comme ant�rieurement, sa sant� fut constamment chancelante : presque chaque ann�e, des maux de poitrine plus ou moins graves le for�aient � interrompre ses travaux , qu'il reprenait ensuite avec une ardeur toujours trop grande pour ses forces physiques. En 1804, il fut envoy� � l'�le d'Elbe, pour surveiller l'ex�cution du d�cret qui conc�dait les c�l�bres mines de fer de cette �le ; ensuite, la d�ch�ance des concessionnaires ayant �t� prononc�e, il fut charg� du service de ces mines, qui firent partie de la dotation de la L�gion-d'Honneur. La mani�re dont il remplit cette fonction et les rapports dans lesquels il d�veloppa des vues sages et lumineuses sur les am�liorations dont ce grand �tablissement �tait susceptible lui firent obtenir d'honorables t�moignages de satisfaction de la part du gouvernement. Rappel� en France en 1807 , on le pla�a en Ligurie, en lui annon�ant l'intention de l'envoyer bient�t en Toscane, � l'effet d'introduire dans les op�rations des forges de ce pays des perfectionnemens dont elles avaient grand besoin. P�n�tr� de l'importance d'une semblable mission , M. de Gallois demanda l'autorisation d'aller �tudier l'art des forges dans tous ses d�tails, � l'Ecole pratique de Geisslautern et dans les autres usines des environs de Sarrebr�ck. Un s�jour de quatre mois et des travaux sans rel�che le mirent � m�me de pr�senter, � son. retour, un rapport accompagn� de dix-sept liasses de m�moires, notes et dessins , sur toutes les parties des usines � fer qu'il avait visit�es , grand et beau travail qui lui m�rita les �loges de ses chefs et ceux du ministre de l'int�rieur. Vers cette �poque, il publia , dans le tome 25 du Journal des Mines, deux m�moires sur les mesures � observer dans la disposition des foyers de forges , sur les instrumens qui servent aux ouvriers pour la d�termination de ces mesures, et sur d'autres instrumens plus exacts qu'il proposait de leur substituer.
Cependant le projet de mission en Toscane n'eut pas de suite : M. de Gallois fut plac� en station � G�nes , et, peu apr�s, � Savone, sur la demande de M. le comte de Chabrol, comme charg� du service des mines dans les d�partemens de Montenotte et de Marengo. L'am�lioration des proc�d�s des forges; l'exploitation des houill�res du revers m�ridional de l'Apennin; l'introduction de l'emploi de la houille dans un grand nombre de proc�d�s d'usines et d'usages domestiques; la publication d'une instruction en italien sur la recherche et la d�couverte des mines ; enfin , l'�tude du sol de la contr�e et sa description min�ralogique , furent les r�sultats des travaux assidus auxquels M. de Gallois se livra pendant deux ans. Le tome 25 du Journal des Mines renferme un m�moire de lui sur le d�partement de Montenotte. La statistique de d�partement, publi�e depuis peu par M. le comte de Chabrol, contient de nombreux docum�ns recueillis par M. de Gallois pour coop�rer � l'important travail d'un pr�fet qui l'honorait d'une ancienne et constante amiti�, et qui pr�ludait par ce beau travail aux travaux plus remarquables encore qu'il devait ex�cuter et d�crire dans la capitale.
En 1810, M. de Gallois fut envoy� en mission extraordinaire en Illyrie ; dans cette m�me ann�e , il fut nomm� ing�nieur en chef ; deux ing�nieurs ordinaires furent plac�s sous ses ordres , et il fut charg� de la surveillance g�n�rale de l'administration des mines dans la Carinthie et dans les provinces Illyriennes : il fit, � cette occasion, de longues tourn�es en Croatie avec M. le mar�chal duc de Raguse ; il transmit au gouvernement des m�moires int�ressans sur les mines et usines de ce pays , particuli�rement sur les mines de plomb du Bleyberg , et mit tous ses soins � obtenir, des administrations sup�rieures, les mesures de protection n�cessaires � la conservation de ces beaux �tablissemens. En 1811, il fut plac� comme directeur en chef sur les c�l�bres mines de mercure d'Idria en Carniole , qui avaient �t� assign�es en dotation, d'abord � l'Institution �ph�m�re de l'ordre des trois Toisons d'or, ensuite � la L�gion-d'Honneur , mines qui occupent douze-cents ouvriers, six cents pensionn�s , trois cents �l�ves , desquelles d�pendent 12 lieues carr�es de for�ts et une population de sept mille habitans, et qui livrent annuellement un produit brut de la valeur de 2 millions et un produit net de 6 � 7 cents mille fr. Malgr� les difficult�s des circonstances, les �tablissemens furent maintenus dans un �tat prosp�re : M. de Gallois fit construire , dans les vall�es qui les environnent , des �cluses de flottage d'une grande utilit� pour leur approvisionnement en combustible, et d'une beaut� d'ex�cution remarquable. Plusieurs autres am�liorations importantes eurent lieu � Idria sous sa direction, et il s'y concilia l'estime , l'attachement m�me des personnes plac�es sous ses ordres et des habitans du pays ; cependant, il y devint l'objet de l'animadversion d'un Fran�ais, qui l'accusa, en 1815, d'avoir mal g�r� les mines et usines. Un inspecteur des mines, M. H�ron de Villefosse, fut alors envoy� � Idria, en qualit� de commissaire g�n�ral, � l'effet d'examiner la gestion de M. de Gallois et les accusations dirig�es contre lui. La comptabilit� des mines et usines fut trouv�e parfaitement en r�gle et d�finitivement apur�e , et il fut reconnu que les d�nonciations �taient d�nu�es de fondement , mais que M. de Gallois m�ritait des �loges pour l'int�grit�, le talent et le z�le avec lesquels il remplissait les importantes Missions qui lui �taient confi�es. Des preuves frappantes le la justice de ces �loges se trouvent d'ailleurs dans les nombreux m�moires que M. de Gallois a transmis � l'Administration des Mines et au grand-chancelier de la L�gion-d'Honneur, sur toutes les parties d'art et d'administration du vaste �tablissement qu'il dirigeait. Lorsqu'en 1814 l'Empereur d'Autriche vint � Paris, MM. H�ron de Villefosse et de Gallois lui ayant �t� pr�sent�s avec le Corps royal des Mines, S.M. leur t�moigna sa haute satisfaction sur l'�tat dans lequel lequel les ing�nieurs fran�ais avaient laiss� les mines d'idria lorsqu'ils les quitt�rent.
En ao�t 1814 , M. de Gallois demanda et obtint d'�tre plac� dans le douzi�me arrondissement min�ralogique, dont Saint-�tienne est le chef-lieu. Il avait vu traiter dans les usines des environs de Sarrebr��k des minerais de fer extraits des couches du terrain houiller, minerais qui, confondus en France dans l'esp�ce du Fer oxid�, en Allemagne dans celle du Thoneisenstein ( fer argileux), avaient �t� reconnus, au laboratoire de l'Ecole des Mines, pour du fer carbonat� amorphe ou terreux, et d�crits comme tels en 1812 par M. Collet-Descostils, dans le Journal des Mines. M. de Gallois savait qu'en Angleterre on exploitait aussi dans divers terrains houillers des minerais de nature analogue, que la houille servait � fondre. Ses voyages et ses observations l'avaient conduit � reconna�tre une constance remarquable dans la composition g�n�rale des grandes formations g�ologiques. Fortement p�n�tr� de cette id�e, et de celle que les richesses min�rales ne sont point propres � certaines contr�es , mais qu'elles ne tardent pas � se montrer lorsque l'industrie s'applique � les chercher, M. de Gallois �tait persuad� que les terrains houillers de la France devaient aussi renfermer des minerais de fer semblables aux minerais anglais comme � ceux de Sarrebr�ck , et que leur aspect enti�rement pierreux , tout-�-fait diff�rent de celui des autres minerais m�talliques , avait sans doute emp�ch� jusqu'alors de reconna�tre comme tels ; il voulait procurer � sa patrie les immenses avantages que l'industrie anglaise retire de l'exploitation combin�e de la houille et du fer, et il d�sirait vivement v�rifier la justesse de ces pr�somptions, dans la contr�e du royaume la plus riche en bouille (M. l'ing�nieur Guenyveau avait reconnu l'existence des minerais de fer dans le terrain houiller de Saint-�tienne, et l'avait signal�e dans un rapport adress� au pr�fet du d�partement de la Loire en 1809 ; mais ce fait �tait enti�rement inconnu � M. de Gallois, et le rapport de M. Guenyveau, rest� dans les cartons de la prefecture de Montbrison, n'avait pas produit les effets qu'on aurait pu en attendre .) ; mais il avait une telle confiance dans le succ�s de ses recherches , qu'avant de partir pour le d�partement de la Loire, il passa plusieurs mois � pr�parer un travail sur cet objet, et � rassembler tous les documens qui pourraient l'aider � r�aliser le projet d'un grand �tablissement aliment� par le minerai qu'il allait d�couvrir. Il fit part de ce projet, � Paris, � plusieurs membres du Corps royal des Mines , entre autres � MM. H�ron de Villefosse et Berthier, qui lui communiqu�rent des renseignemens sur diverses localit�s o� le minerai de fer carbonate �tait associ� � la houille dans les pays �trangers et en France , et qui affermirent encore son esp�rance. Cette esp�rance ne fut point tromp�e : d�s le surlendemain de son arriv�e � Saint-Etienne, � la fin d'octobre 1814, il trouva, aux portes de cette ville, le minerai de fer qu'il cherchait ; il le trouva bient�t apr�s dans un grand nombre de localit�s du bassin houiller qui constitue la contr�e environnante; il entreprit alors de nombreux essais de laboratoire , pour reconna�tre la richesse de ce minerai ; mais les funestes �v�nemens de l'ann�e suivante retard�rent ses travaux, et ce ne fut qu'au mois de novembre 1815, qu'il put faire part � M. le Directeur g�n�ral des Ponts et Chauss�es et des Mines de ce qu'il regardait comme une d�couverte d'autant plus importante, que des d�couvertes semblables attendaient les observateurs dans les autres terrains houillers de la France , et qu'il manifesta le d�sir de fonder lui-m�me une grande usine, pour en faire la premi�re application � l'industrie. Plus tard, et apr� avoir visit� les riches exploitations de l'Angleterre, M. de Gallois ins�ra, dans les Annales des Mines ( t. 3) un m�moire d�taill� sur ce Minerai de fer des houill�res, qu'il d�crit et classe min�ralogiquement sous le nom de Fer carbonat� litho�de, dont il fait conna�tre les caract�res, les diverses vari�t�s, les relations g�ologiques, et l'emploi dans les usines anglaises.
Mais d�s 1814, et constamment depuis lors, la cr�ation de semblables usines en France fut et resta la pens�e dominante de M. de Gallois , et dans le cours des dix derni�res ann�es de son existence, cette pens�e occupa tous les momens qui n'�taient pas r�clam�s par son service. Nomm� , en avril 1816, professeur de docimasie et directeur du laboratoire � l'Ecole royale des Mines , il refusa d'accepter cette place, honorable t�moignage de la confiance que ses talens inspiraient � son chef, mais pour laquelle sa modestie lui fit penser qu'il ne poss�dait pas les qualit�s n�cessaires : il crut �tre plus utile � son pays , en dirigeant dans de grands ateliers, les premiers travaux du champ qu'il voulait ouvrir � l'industrie fran�aise. Il crut aussi devoir � sa famille de chercher � tirer un parti utile de ces travaux, pour r�parer les br�ches que des voyages nombreux , des missions �loign�es et faiblement r�tribu�es , enfin des pertes consid�rables , �prouv�es � son. retour d'Illyrie pendant la retraite de l'arm�e fran�aise, avaient faites � son modique patrimoine. Une compagnie, compos�e de notables capitalistes du pays, se forma pour exploiter les minerais de fer des houill�res de Saint-Etienne, et sollicita du gouvernement l'autorisation pour M. de Gallois de se charger de la direction de ses �tablissemens. D�sirant justifier la confiance qu'on mettait en lui , et croyant qu'il ne pourrait y parvenir compl�tement que lorsqu'il aurait �tudi� la pratique des proc�d�s anglais dans les usines m�mes , M. de Gallois demanda un cong� de trois mois pour se rendre en Angleterre ; mais, dans cette circonstance comme dans toutes les autres circonstances de sa vie, son z�le le porta � faire plus qu'il ne devait, plus qu'il ne pouvait m�me raisonnablement entreprendre. Il employa ces trois mois entiers � visiter les ateliers de Londres, � p�n�trer jusque dans les plus petits d�tails pratiques des arts nombreux qui emploient le fer et la fonte. Ayant ensuite obtenu une prolongation de cong� ind�finie, il passa six mois � Newcastle, en Northumberland, occup� sans rel�che � �tudier les mines, les usines, les chemins de fer de cette contr�e c�l�bre ; puis il parcourut les parties de l'Ecosse, de l'Angleterre et du pays de Galles les plus riches en �tablissemens d'exploitation de houille et de fer, et il ne revinten France qu'au bout de seize mois, apr� avoir encore d�pens� des sommes consid�rables pour son voyage et pour l'acquisition de nombreux et pr�cieux mod�les d'objets d'art et d'industrie min�rale. A son arriv�e � Paris , il r�digea un m�moire sur les mines et usines � fer d'Angleterre, que M. le Directeur g�n�ral communiqua au Conseil des Mines, et dont la lecture fut entendue avec un vif int�r�t ; il pr�senta � l'Acad�mie royale des Sciences un m�moire sur les chemis de fer anglais, qui lui m�rita les �loges de l'Acad�mie. Ce dernier travail a �t� imprim� dans le tome 3 des Annales des Mines.
M. de Gallois retourna � Saint-Etienne en juin 1818 : il fut nomm� professeur � l'Ecole des mineurs qui venait d'�tre �tablie dans cette ville , et il y professa la m�tallurgie en 1819. I1 fut aussi membre de la commission temporaire, institu�e � cette �poque par M. le Directeur g�n�ral des Ponts et Chauss�es et des Mines , pour pr�parer les grandes op�rations du partage du territoire houiller de Saint-�tienne en concessions, et il coop�ra d'une mani�re active aux travaux administratifs, qui, en r�gularisant et en rendant l�gale l'exploitation des houill�res de ce pays, ainsi que la perception des droits reconnnus par les usages locaux aux propri�taires de la surface , ont donn� � ces deux sortes de propri�t� une valeur consid�rable, et cr�� ainsi de grands capitaux pour l'industrie. Mais il �prouva beaucoup de difficult�s pour renouer l'entreprise importante, dont l'expectative lui avait fait entreprendre son p�nible et dispendieux voyage. Ce ne fut qu'au bout d'un an que la Compagnie des mines de fer de Saint-�tiene �tant form�e, il obtint l'autorisation.d'�tre directeur-administrateur de cette compagnie et fut d�charg� de toute fonction comme ing�nieur dans le d�partement de la Loire ; mais il continua d'�tre charg� en chef du service des d�partemens du Puy-de-D�me , de la Haute-Loire et du Cantal.
L'�tablissement, � Terre-Noire pr�s Saint-Etienne, de trois hauts-fourneaux pour fondre le minerai de fer au moyen du coke ; les exploitations de houille et de minerai n�cessaires � l'alimentation de ces grandes bouches � feu ; l'�tablissement ult�rieur des fourneaux et cylindres destin�s � convertir la fonte en fer forg� , tel �tait le but des travaux de M. de Gallois, comme directeur de la compagnie, travaux auxquels il se livra avec toute l'ardeur de son esprit. Ses projets, ses dessins, ses devis port�rent l'empreinte de son talent et de son z�le ; les constructions qu'il a dirig�es sont vraiment admirables, sous le rapport de la solidit� et de la convenance parfaite de toutes leurs parties, et elles offrent m�me, � cet �gard, une sorte de luxe , le seul qu'il se soit permis de leur donner. Mais bient�t des obstacles impr�vus vinrent retarder l'ex�cution de ses plans : il fut oblig�, en 1820, de faire un second voyage de trois mois en Angleterre, pour y presser la confection et l'envoi des machines qu'il y avait command�es, et la construction du premier haut fourneau ne fut achev�e que deux ans apr�s. Les approvisionnemens en minerai et en houille de qualit� convenable pr�sent�rent aussi des difficult�s tout-�-fait inattendues ; d'ailleurs, les m�langes des diverties sortes de minerais, et la forme pr�cise qu'il convenait, d'apr�s la nature de ces minerais et celledu coke , de donner � l'int�rieur du fourneau , n'avaient pu �tre assez �tudi�s. En m�tallurgie, les exp�riences sont lentes, et souvent la question commerciale emp�che la solution de la question m�tallurgique. Ces circonstances nuisirent au succ�s du premier fondage , qui produisit beaucoup moins de fonte qu'on n'esp�rait en obtenir, et elles accrurent les d�penses de la compagnie au-del� de ses ressources du moment. M, de Gallois, absorb� par la partie d'art de son entreprise , ne put pas donner tous les soins n�cessaires � toutes les branches de la partie administrative. Peu second�, sous ce rapport, par les personnes plac�es sous ses ordres, il souffrait vivement des retards, des obstacles qu'�prouvait le d�veloppement du projet auquel il s'�tait consacr� depuis huit ans avec un d�vouement si absolu ; il se r�solut, en 1823, � donner sa d�mission de directeur-administrateur de la compagnie , ne se r�servant que le bienveillante facult� d'aider son successeur de ses conseils. � Je crois avoir rempli ma t�che�, �crivait-il � cette �poque � M. le Directeur g�n�ral des Ponts et Chauss�es et des Mines ; � avec d'autres circonstances j'aurais fait mieux et plus vite. Je ne crois point qu'il ait d�pendu de moi d'obtenir imm�diatement un succ�s plus complet. L'�ducation des hommes et la disposition des choses qui se rattachent � une industrie nouvelle forment un probl�me tr�s-compliqu� , dont les �l�mens inconnus ne peuvent se r�soudre tous �-la- fois. Il a fallu un certain courage pour , le premier , oser le tenter seul ; et c'est tout le m�rite que je pr�tends avoir eu. Quels que soient les inconv�niens qu'on a rencontr�s, l'�tablissement subsiste , ses bases sont bonnes , et il ne peut mnquer de prosp�rer et de remplir le voeu des actionnaires. L'exemple ne tardera pas � �tre suivi par de nombreux imitateurs, et la France trouvera un grand ensemble de ressources qui manquaient jusqu' pr�sent � son industrie, etc. �
L'exp�rience a fait reconna�tre la justesse de ces pr�visions : un second haut-fourneau a �t� construit � Terre-Noire � c�t� du premier, et la machine soufflante de ces deux fourneaux suffira encore � l'�tablissement du troisi�me, pour lequel tous les travaux de fondation ont �t� ex�cut�s par M. de Gallois; d'autres usines du m�me genre se sont �lev�es depuis et s'�l�vent tous les jours, soit aux envorons de Saint-Etienne, soit ailleurs, et une fabrication d'une haute importance est acquise � l'industrie fran�aise.
Un r�sultat aussi pr�cieux des talens et du d�vouement d'un ing�nieur ne pouvait manquer d'�tre aper�u d'avance et appr�ci� par l'administrateur �clair� qui avait encourag� ses efforts. En juillet 1823, M. le Directeur g�n�ral des Ponts et Chauss�es et des Mines fit un voyage � Saint-Etienne , et visita l'usine de Terre-Noire : le haut-fourneau donnait peu de produit, le directeur �tait sur le point de quitter l'administration de l'entreprise; mais ces apparences facheuses n'emp�ch�rent pas que justice fut rendue � M. de Gallois, et le 23 ao�t 1823 il fut nomm� chevalier de l'ordre royal de la L�gion-d'Honneur ; l'ann�e suivante, il fut promu � la premi�re classe de son grade.
La sant� de M. de Gallois, toujours faible, souvent tout-�-fait d�rang�e, avait encore re�u une atteinte grave des fatigues et des chagrins que lui avait caus�s son entreprise : plusieurs fois, dans ses derni�res ann�es, il fut oblig� de demander des cong�s pour aller chercher � la r�tablir, soit dans son pays natal, soit en passant l'hiver en Provence. Dans un de ses voyages , il s�journa quelque temps � Vence et � Nice , et r�digea un m�moire sur la g�ologie des rives du Var. Plusieurs objets de service, et notamment l'instruction des demandes en concession des mines de houille de la Haute-Loire et du Puy-de-D�me, furent aussi pour lui l'occasion de travaux p�nibles et longs. Cependant l'�tablissement qu'il avait fond� commen�ait � prosp�rer : la marche et le produit du haut-fourneau �taient devenus conformes � ce que M. de Gallois, avait annonc� dans ses devis ; il jouissait d� ce succ�s, et les actions de la Compagnie avaient acquis une valeur sup�rieure d'un cinqui�me � leur valeur premi�re.
En juillet 1825, M. de Gallois alla prendre les eaux du Mont-Dore ; loin d'en �prouver de bons, effets , il en revint souffrant , faible, tourment� d'insomnies et d'une grande irritation nerveuse qu'augmentaient encore le d�faut absolu de r�gime et la continuelle tension de son esprit sur des objets s�rieux. II se disposait � entreprendre des courses de service dans le d�partement du Cantal , et voulut se reposer quelques jours � Clermont.... Le 25 ao�t il y est mort , loin de sa femme et de son fils , dans un violent acc�s de fi�vre, d�termin� par un bain froid qu'il avait pris imprudemment dans la matin�e.
Un semblable malheur n'avait pas besoin d'�tre aussi inattendu, pour plonger dans la d�solation la famille de M. de Gallois, et pour �tre d�plor� par toutes les personnes qui avaient avec lui des relations m�me �loign�es. Son caract�re essentiellement bon et inoffensif, sa moralit� scrupuleuse , ses sentimens empreints d'une candeur comparable � celle de l'enfance, attachaient � lui tous ceux dont il �tait connu. Son esprit, �tendu et p�n�trant, saisissait promptement l'objet qui le frappait , et l'approfondissait ensuite avec autant de vivacit� que de pers�v�rance. Il �tait un excellent homme et un ing�nieur tr�s-distingu� ; il a rendu � l'industrie de son pays un �minent service ; il a p�ri � l'�poque o� il allait jouir du fruit de ses talens et de ses travaux. Sa fin pr�matur�e laisse de profonds regrets dans le Corps auquel il appartenait, et o� il contait autant d'amis que de camarades.
Texte publi� initialement dans "Ecole Polytechnique, Livre du Centenaire (1794-1894), tome III, Gauthier-Villars, 1897
Louis-Georges-Gabriel DE GALLOIS-LACHAPELLE (promotion de 1794 de Polytechnique) est n� en 1775, � Saint-L�onard (Bas-Rhin), est mort Ing�nieur en chef � Clermont, le 25 ao�t 1825; apr�s avoir �t� occup�, de 1804 � 1814 , dans l'administration des �tablissements miniers et m�tallurgiques des pays conquis, il fut envoy� en service � Saint-Etienne, lors de sa rentr�e en France en 1814. Il s'adonna avec une sorte de passion � l'utilisation, dans la sid�rurgie , du fer carbonate des houill�res qui �tait alors � peu pr�s totalement inconnu en France. Ayant refus� la chaire de Docimasie de l'�cole des Mines de Paris, il alla passer seize mois en Angleterre pour y �tudier � fond ses mines, ses usines et ses chemins de fer. Il donna sur tous ces sujets, dans les Annales des Mines, des M�moires �tendus et tr�s complets. Revenu, en 1818, � Saint-Etienne comme professeur de M�tallurgie � l'�cole des Mines de cette ville, il fonda la Compagnie des Mines de fer de Saint-Etienne, dont il �tait le directeur-administrateur, tout en restant, suivant les habitudes du temps, Ing�nieur en chef de l'arrondissement du Puy-de-D�me, Haute-Loire et Cantal. Le but particulier de cette Soci�t� �tait d'exploiter le minerai de fer carbonate des houill�res et de le traiter dans trois hauts fourneaux au coke, � l'usine de Terrenoire, qui devait pendant un demi-si�cle avoir une existence non sans importance, bien qu'elle ait tristement fini. En 1828, de Gallois, rebut� par les difficult�s inh�rentes aux d�buts de pareilles organisations, donna sa d�mission de directeur-g�rant pour se consacrer exclusivement � son service administratif. Le succ�s de sa cr�ation n'allait pas tarder � s'affirmer; en 1825, les actions faisaient une prime d'un quart. Ing�nieur remarquable, dou� de connaissances techniques s�res et �tendues, de Gallois n'avait pas eu les qualit�s commerciales n�cessaires � la t�che qu'il avait entreprise.
De Gallois fut un des Ing�nieurs les plus m�l�s � l'administration des pays conquis. En 1804, il �tait d'abord envoy� � l'�le d'Elbe, pour surveiller l'ex�cution du d�cret qui avait conc�d� les mines de fer de cette �le ; la d�ch�ance des concessionnaires ayant �t� prononc�e, il organisa le service de ces exploitations, qui firent partie de la dotation de la L�gion d'honneur. En 1810, il fut charg�, comme Ing�nieur en chef, avec le concours de deux Ing�nieurs ordinaires, d'administrer les mines de la Carinthie et des provinces illyriennes; il prit en 1811 et garda jusqu'� la chute de l'Empire, en 1814, la direction des �tablissements d'Idria, dans la Carniole, qui avaient �t� affect�s �galement � la L�gion d'honneur. Cette vaste entreprise occupait 1200 ouvriers, donnait un produit brut de 2 millions et un produit net de 600000 � 700000 francs. De Gallois ex�cuta des travaux d'am�lioration consid�rables et organisa notamment le flottage des bois dans des conditions qui n'ont pas �t� modifi�es depuis.
Extrait des M�moires de J.B.Boussingault, �l�ve � l'Ecole des mines en 1818 :
M. de Gallois, Alsacien de Strasbourg, devait professer la m�tallurgie, mais il ne remplissait pas sa chaire. M. Thibaud, aspirant des mines, le suppl�ait. Thibaud avait ses id�es tourn�es vers les sp�culations lucratives, il �tait laborieux, mais brouillon et p�dant, il est mort ing�nieur en chef.
Voir aussi :
- Biographie de Louis-Antoine BEAUNIER, fondateur et premier directeur de l'Ecole des mineurs de Saint-Etienne
- Ordonnance du 2 ao�t 1816, portant cr�ation d'une Ecole de mineurs � Saint-Etienne, d�partement de la Loire
- L'Ecole nationale sup�rieure des mines de Saint-Etienne aujourd'hui
- La m�tallurgie pr�s de Saint-Etienne au XIX�me si�cle par R. MASSE
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