Jean-Louis Jeannelle | Sorbonne University (original) (raw)

Cinéma by Jean-Louis Jeannelle

Research paper thumbnail of De l’écran à la scène : "Dogville" de Lars von Trier et "Entre chien et loup" de Christiane Jahary

Intervention avec Estelle Ferrarese et Linda Guerry en contrepoint au spectacle de Christiane Jat... more Intervention avec Estelle Ferrarese et Linda Guerry en contrepoint au spectacle de Christiane Jatahy, "Entre chien et loup" (adaptation de "Dogville" de Lars von Trier) dans le cadre d'une séance « Genre et vulnérabilité » du séminaire Philomel, dirigé par Anne Tomiche et Frédéric Regard, salle Roger Blin (théâtre de l'Odéon), le 30 mars 2021.

Research paper thumbnail of « Un audioportrait : "Les Années déclic" de Raymond Depardon », "Revue des sciences humaines", n° 333, « La voix », dir. Stéphanie Genand et Françoise Simonet-Tenant, janv.-mars 2019, p. 75-89.

Research paper thumbnail of "Adaptability: literature and cinema redux", in "French film industry: funding, policies, debates", special issue of "Studies in French Cinema", vol. 16, n° 2, 2016, p. 95-105

This article opposes the notions of adaptation and adaptability, the latter understood here as a ... more This article opposes the notions of adaptation and adaptability, the latter understood here as a complex commercial, screenwriting and critical process. Following the sociological methods endorsed by Simone Murray in The Adaptation Industry, the author studies the concrete aspects of this process of evaluation, development and use of the adaptability of literary works through an examination of the case of a French company: Best Seller to Box Office, a company created to identify the ‘adaptability quotient’ of contemporary fiction and non-fiction works. The composition of adaptation spec sheets, with the purpose of measuring and highlighting adaptability potential, makes up one of the essential elements of this business, which is relatively new to France. This article examines the particular nature of the business, especially the interface between different facets of the adaptation process.

Research paper thumbnail of "Réadaptation" ("Critique", n° 795-796, dossier "Cinélittérature" ,  dir. Marc Cerisuelo et Patrizia Lombardo, août-septembre 2013, p. 613-623)

Là où en France, la notion d’adaptation a subi les tirs croisés venus de ses deux champs d’applic... more Là où en France, la notion d’adaptation a subi les tirs croisés venus de ses deux champs d’application privilégiés en raison de la rivalité disciplinaire grandissante entre études littéraires et études filmiques à partir des années 1980, côté anglo-saxon, son développement s’est fait sur le mode d’une crise endémique. Même si les travaux se sont accumulés jusqu’au vertige depuis "Novels into Films" de George Bluestone en 1957, les critiques se sont faites beaucoup plus radicales à partir des années 1980 : dans "Concepts in Film Theory" en 1984, Dudley Andrew s’était attaqué au critère de fidélité, qui obère l’ensemble des travaux menés jusqu’alors – le constat est repris et modulé par chacun de ses successeurs. Or malgré les innombrables procès qui lui sont faits (parfois au prix d’une certaine surenchère), on en est toujours à regretter la « persistance de la fidélité ». Mais qu’avons-nous à perdre à ne plus tenir compte de ce concept que rien ne semble pouvoir éradiquer tout à fait ? Et quel intérêt y a-t-il à vouloir malgré tout en proposer une approche renouvelée – somme toute une "réadaptation" ?

Research paper thumbnail of "Pour une étude des "inadaptations"" ("Poétique", n° 173, 2013, p. 47-61)

L’étude des rapports entre littérature et cinéma a très longtemps été accaparée par la question d... more L’étude des rapports entre littérature et cinéma a très longtemps été accaparée par la question de l’adaptation ; en France, celle-ci est désormais quasiment bannie aussi bien dans le champ des études littéraires que dans celui des études cinématographiques. D’un extrême à l’autre, c’est la question même du scénario, de son mode d’existence en tant qu’œuvre, qui a disparu, comme si cet immense domaine de production ne relevait ni de l’un ni de l’autre domaines et n’était digne d’intéresser que dans le cas, ponctuel, où le prestige d’un réalisateur, plus rarement celui d’un scénariste, justifient d’accompagner ou de faire suivre la diffusion d’un film au cinéma par la publication du texte. Mais le renouveau actuel des croisements entre littérature et cinéma implique précisément de s’interroger sur ce cas de déficit opéral. Un scénario n’est assurément pas un film – chacun s’accorde sur ce point – mais est-ce à dire qu’il n’est pas non plus une œuvre ? La question se pose en particulier dans le cas jusqu’ici largement délaissé, des scénarios irréalisés, n’ayant, pour une raison ou pour une autre, jamais donné naissance au film pour lequel ils avaient été rédigés.

Research paper thumbnail of “All the stories of films which were never made”: modalities of non-happening in cinema

A history-in-negative is only really of interest, not if it takes the form of a simple history of... more A history-in-negative is only really of interest, not if it takes the form of a simple history of absent works, but is capable of integrating a reflection on the modalities of absence in art – and in one particular art or another. Yet the history of invisible cinema usually unfolds in the form of lists: lists of blacklisted authors, lists of unmade masterworks, lists of dates which are all that remains of films which have disappeared, etc. There is a limit here of a sort which could invalidate the theoretical interest of such a project. Such an obstacle can only be overcome by taking account of the function attributed to screenplay writing in the cinema industry, and consequently the very particular status of this type of text. Here I wish to defend the idea not only that, in cinema, non-happening plays a more important and systematic role than in any other art, but further that it is precisely at the screenplay stage that the fate of most films is decided, and therefore their (in)completion. It remains that envisaging cinema in this way, from the point of view of non-happening, through the re-evaluation of the screenplay such an approach supposes, represents a historiographical challenge which collides directly with our habit of assimilating the ontological status of a cinematographic work with its visual medium.

Research paper thumbnail of « Toutes les histoires des films qui ne se sont jamais faits » : modalités de l’inadvenue au cinéma

Une histoire au négatif n’a de véritable intérêt que si elle prend la forme non d’une simple hist... more Une histoire au négatif n’a de véritable intérêt que si elle prend la forme non d’une simple histoire des œuvres absentes mais est capable d’intégrer une réflexion sur les modalités d’absence en art – et dans tel ou tel art plus particulièrement. L’histoire du cinéma invisible se déploie pourtant le plus souvent sous forme de listes : listes d’auteurs maudits, listes de chefs d’œuvres irréalisés, listes de dates devenues les seules traces de films disparus… Il y a là une limite de nature à invalider l’intérêt théorique d’un tel projet. Un tel obstacle n’est surmontable qu’à condition de prendre en considération la fonction attribuée à l’écriture du scénario dans l’industrie du 7e art et par conséquent le statut très particulier de ce type de texte. J’aimerais défendre ici l’idée que non seulement l’inadvenue joue, au cinéma, un rôle plus important et plus systématique que dans n’importe quel autre art, mais que de plus c’est précisément à ce stade du scénario que se décide le sort de la plupart des films et par conséquent leur (in)aboutissement. Reste qu’envisager ainsi le cinéma sous l’angle de son inadvenue représente, par la réévaluation du scénario qu’un telle approche suppose, un défi historiographique qui heurte de manière directe l’habitude que nous avons d’assimiler le statut ontologique de l’œuvre cinématographique à son médium visuel.

Research paper thumbnail of Pour une histoire du cinéma au négatif

Research paper thumbnail of "L’adaptation documentaire : oxymore théorique ou extension du domaine ?" ("Le Cinéma de la littérature", dir. Jean Cléder et Frank Wagner, Éditions nouvelles Cécile Defaut, 2017, p. 47-62)

A priori, la locution « adaptation documentaire » n'est attestée dans aucun ouvrage de référence ... more A priori, la locution « adaptation documentaire » n'est attestée dans aucun ouvrage de référence sur les rapports entre littérature et cinéma, et ni les théoriciens de l'adaptation ni ceux du documentaire ne semblent s'être demandé si cette pratique, si courante dans le domaine de la fiction, pouvait avoir un équivalent, d'une manière ou d'une autre, du côté de la non-fiction – ou même, si tel n'était pas le cas, pour quelle raison, étant donné que rien n'est supposé aller de soi en matière de théorie.

Research paper thumbnail of « Valéry et le “flux de la vie matérielle” : une lecture de L’Isle sans nom comme scénario », dans "« L’Isle sans nom », un projet dramatique inédit de Paul Valéry", dir. Franz Johansson et Benedetta Zaccarello, Paris, Classiques Garnier, coll. « La Revue des lettres modernes », 2018, p. 79-102

La diffusion ou la divulgation de ce document et de son contenu via Internet ou tout autre moyen ... more La diffusion ou la divulgation de ce document et de son contenu via Internet ou tout autre moyen de communication ne sont pas autorisées hormis dans un cadre privé. © 2018. Classiques Garnier, Paris. Reproduction et traduction, même partielles, interdites. Tous droits réservés pour tous les pays. © Classiques Garnier RÉSUMÉ -Le cas des scénarios abandonnés ne fait que redoubler le déficit statutaire initial, propre à tout texte scénaristique. Si l 'on admet que Valéry a envisagé, parmi d'autres solutions, de faire de L'Isle sans nom un scénario, on peut alors voir dans ce projet un cas exemplaire, inachevé en tant que texte et inabouti en tant qu'oeuvre cinématographique.

Research paper thumbnail of Filmer l’art avec André Malraux  (en collab. avec Jean-Claude Larrat, dans "Revue d’histoire littéraire de la France", no 1, 2012, p. 211-228)

Distribution électronique Cairn.info pour P.U.F.. © P.U.F.. Tous droits réservés pour tous pays.

Research paper thumbnail of "OEdipe Roi" de Pasolini

Research paper thumbnail of Powerpoint de la conférence sur "OEdipe roi" de Pasolini

Research paper thumbnail of Entretien avec Alain Cavalier (dans "Intus et in cute : Pour une histoire de l’intime et de ses variations", Revue "Itinéraires", no 4, dir. F. Simonet-Tenant et A. Coudreuse, 2009, p. 175-191)

Research paper thumbnail of L’industrie de l’adaptation : un new deal pour les études cinématographiques - CR sur  "The Adaptation Industry" de Simone Murray ("Critique", no 795-796, "Cinélittérature", dir. Marc Cerisuelo et Patrizia Lombardo, août-septembre 2013, p. 763-766)

Research paper thumbnail of La métamorphose du regard : Malraux et la relecture audiovisuelle des Écrits sur l’art ("La Relecture de l’œuvre par ses écrivains mêmes", t. III, "Se relire par l’image", dir. Mireille Hilsum et Hélène Védrine, Paris, Éditions Kimé, coll. « Les Cahiers de Marge », 2012, p. 127-152)

Théorie et histoire littéraire by Jean-Louis Jeannelle

Research paper thumbnail of Charles Péguy, "Clio. Dialogue de l'histoire et de l'âme païenne", édition annotée par Jean-Louis Jeannelle

GF. , 2023

« Prenez Homère. Faites comme il faut toujours faire. Avec les plus grands. Et surtout peut-être ... more « Prenez Homère. Faites comme il faut toujours faire. Avec les plus grands. Et surtout peut-être avec les grands. Ne vous dites pas : Il est grand. Non, ne vous dites pas cela. Ne vous dites rien. […] Prenez le texte. Et qu’il n’y ait rien entre vous et le texte. »
Dans un dialogue « à sauts et à gambades » où l’on rencontre aussi bien le théâtre de Beaumarchais que la poésie de Victor Hugo, Clio, muse de l’histoire, médite sur l’acte de création littéraire. Des premiers brouillons jusqu’au livre imprimé, qu’est-ce qu’écrire et qu’est-ce que lire ?
Œuvre méconnue, jamais publiée du vivant de Péguy et présentée ici dans une édition qui en revient au plus près du manuscrit original, Clio propose une réflexion d’une grande modernité, selon laquelle la lecture participe de la création d’un texte. L’essentiel, selon Péguy, est de lire, de bien lire, c’est-à-dire « de servir un texte, d’entendre un texte, (et d’entendre à un texte), de l’accueillir comme un hôte auguste et pourtant familier. »

Research paper thumbnail of "Texte et contexte en génétique (remploi et récupération)", "Littérature", n° 194, dir. Guillaume Bridet et Joël Loehr, juin 2019, p. 126-136,

Distribution électronique Cairn.info pour Armand Colin. © Armand Colin. Tous droits réservés pour... more Distribution électronique Cairn.info pour Armand Colin. © Armand Colin. Tous droits réservés pour tous pays.

Research paper thumbnail of Valeur et littérature : le point aveugle de la théorie (dans "La Case aveugle : théorie littéraire et textes possibles", revue "La Lecture littéraire", no 8, janvier 2006, Reims, Université de Reims, p. 105-127)

Research paper thumbnail of « Le mémorable des lettres » (dans "L’Histoire littéraire des écrivains", dir. V. Debaene, J.-L. Jeannelle, M. Macé et M. Murat, préf. d'A. Compagnon, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2013, p. 79-124)

Research paper thumbnail of De l’écran à la scène : "Dogville" de Lars von Trier et "Entre chien et loup" de Christiane Jahary

Intervention avec Estelle Ferrarese et Linda Guerry en contrepoint au spectacle de Christiane Jat... more Intervention avec Estelle Ferrarese et Linda Guerry en contrepoint au spectacle de Christiane Jatahy, "Entre chien et loup" (adaptation de "Dogville" de Lars von Trier) dans le cadre d'une séance « Genre et vulnérabilité » du séminaire Philomel, dirigé par Anne Tomiche et Frédéric Regard, salle Roger Blin (théâtre de l'Odéon), le 30 mars 2021.

Research paper thumbnail of « Un audioportrait : "Les Années déclic" de Raymond Depardon », "Revue des sciences humaines", n° 333, « La voix », dir. Stéphanie Genand et Françoise Simonet-Tenant, janv.-mars 2019, p. 75-89.

Research paper thumbnail of "Adaptability: literature and cinema redux", in "French film industry: funding, policies, debates", special issue of "Studies in French Cinema", vol. 16, n° 2, 2016, p. 95-105

This article opposes the notions of adaptation and adaptability, the latter understood here as a ... more This article opposes the notions of adaptation and adaptability, the latter understood here as a complex commercial, screenwriting and critical process. Following the sociological methods endorsed by Simone Murray in The Adaptation Industry, the author studies the concrete aspects of this process of evaluation, development and use of the adaptability of literary works through an examination of the case of a French company: Best Seller to Box Office, a company created to identify the ‘adaptability quotient’ of contemporary fiction and non-fiction works. The composition of adaptation spec sheets, with the purpose of measuring and highlighting adaptability potential, makes up one of the essential elements of this business, which is relatively new to France. This article examines the particular nature of the business, especially the interface between different facets of the adaptation process.

Research paper thumbnail of "Réadaptation" ("Critique", n° 795-796, dossier "Cinélittérature" ,  dir. Marc Cerisuelo et Patrizia Lombardo, août-septembre 2013, p. 613-623)

Là où en France, la notion d’adaptation a subi les tirs croisés venus de ses deux champs d’applic... more Là où en France, la notion d’adaptation a subi les tirs croisés venus de ses deux champs d’application privilégiés en raison de la rivalité disciplinaire grandissante entre études littéraires et études filmiques à partir des années 1980, côté anglo-saxon, son développement s’est fait sur le mode d’une crise endémique. Même si les travaux se sont accumulés jusqu’au vertige depuis "Novels into Films" de George Bluestone en 1957, les critiques se sont faites beaucoup plus radicales à partir des années 1980 : dans "Concepts in Film Theory" en 1984, Dudley Andrew s’était attaqué au critère de fidélité, qui obère l’ensemble des travaux menés jusqu’alors – le constat est repris et modulé par chacun de ses successeurs. Or malgré les innombrables procès qui lui sont faits (parfois au prix d’une certaine surenchère), on en est toujours à regretter la « persistance de la fidélité ». Mais qu’avons-nous à perdre à ne plus tenir compte de ce concept que rien ne semble pouvoir éradiquer tout à fait ? Et quel intérêt y a-t-il à vouloir malgré tout en proposer une approche renouvelée – somme toute une "réadaptation" ?

Research paper thumbnail of "Pour une étude des "inadaptations"" ("Poétique", n° 173, 2013, p. 47-61)

L’étude des rapports entre littérature et cinéma a très longtemps été accaparée par la question d... more L’étude des rapports entre littérature et cinéma a très longtemps été accaparée par la question de l’adaptation ; en France, celle-ci est désormais quasiment bannie aussi bien dans le champ des études littéraires que dans celui des études cinématographiques. D’un extrême à l’autre, c’est la question même du scénario, de son mode d’existence en tant qu’œuvre, qui a disparu, comme si cet immense domaine de production ne relevait ni de l’un ni de l’autre domaines et n’était digne d’intéresser que dans le cas, ponctuel, où le prestige d’un réalisateur, plus rarement celui d’un scénariste, justifient d’accompagner ou de faire suivre la diffusion d’un film au cinéma par la publication du texte. Mais le renouveau actuel des croisements entre littérature et cinéma implique précisément de s’interroger sur ce cas de déficit opéral. Un scénario n’est assurément pas un film – chacun s’accorde sur ce point – mais est-ce à dire qu’il n’est pas non plus une œuvre ? La question se pose en particulier dans le cas jusqu’ici largement délaissé, des scénarios irréalisés, n’ayant, pour une raison ou pour une autre, jamais donné naissance au film pour lequel ils avaient été rédigés.

Research paper thumbnail of “All the stories of films which were never made”: modalities of non-happening in cinema

A history-in-negative is only really of interest, not if it takes the form of a simple history of... more A history-in-negative is only really of interest, not if it takes the form of a simple history of absent works, but is capable of integrating a reflection on the modalities of absence in art – and in one particular art or another. Yet the history of invisible cinema usually unfolds in the form of lists: lists of blacklisted authors, lists of unmade masterworks, lists of dates which are all that remains of films which have disappeared, etc. There is a limit here of a sort which could invalidate the theoretical interest of such a project. Such an obstacle can only be overcome by taking account of the function attributed to screenplay writing in the cinema industry, and consequently the very particular status of this type of text. Here I wish to defend the idea not only that, in cinema, non-happening plays a more important and systematic role than in any other art, but further that it is precisely at the screenplay stage that the fate of most films is decided, and therefore their (in)completion. It remains that envisaging cinema in this way, from the point of view of non-happening, through the re-evaluation of the screenplay such an approach supposes, represents a historiographical challenge which collides directly with our habit of assimilating the ontological status of a cinematographic work with its visual medium.

Research paper thumbnail of « Toutes les histoires des films qui ne se sont jamais faits » : modalités de l’inadvenue au cinéma

Une histoire au négatif n’a de véritable intérêt que si elle prend la forme non d’une simple hist... more Une histoire au négatif n’a de véritable intérêt que si elle prend la forme non d’une simple histoire des œuvres absentes mais est capable d’intégrer une réflexion sur les modalités d’absence en art – et dans tel ou tel art plus particulièrement. L’histoire du cinéma invisible se déploie pourtant le plus souvent sous forme de listes : listes d’auteurs maudits, listes de chefs d’œuvres irréalisés, listes de dates devenues les seules traces de films disparus… Il y a là une limite de nature à invalider l’intérêt théorique d’un tel projet. Un tel obstacle n’est surmontable qu’à condition de prendre en considération la fonction attribuée à l’écriture du scénario dans l’industrie du 7e art et par conséquent le statut très particulier de ce type de texte. J’aimerais défendre ici l’idée que non seulement l’inadvenue joue, au cinéma, un rôle plus important et plus systématique que dans n’importe quel autre art, mais que de plus c’est précisément à ce stade du scénario que se décide le sort de la plupart des films et par conséquent leur (in)aboutissement. Reste qu’envisager ainsi le cinéma sous l’angle de son inadvenue représente, par la réévaluation du scénario qu’un telle approche suppose, un défi historiographique qui heurte de manière directe l’habitude que nous avons d’assimiler le statut ontologique de l’œuvre cinématographique à son médium visuel.

Research paper thumbnail of Pour une histoire du cinéma au négatif

Research paper thumbnail of "L’adaptation documentaire : oxymore théorique ou extension du domaine ?" ("Le Cinéma de la littérature", dir. Jean Cléder et Frank Wagner, Éditions nouvelles Cécile Defaut, 2017, p. 47-62)

A priori, la locution « adaptation documentaire » n'est attestée dans aucun ouvrage de référence ... more A priori, la locution « adaptation documentaire » n'est attestée dans aucun ouvrage de référence sur les rapports entre littérature et cinéma, et ni les théoriciens de l'adaptation ni ceux du documentaire ne semblent s'être demandé si cette pratique, si courante dans le domaine de la fiction, pouvait avoir un équivalent, d'une manière ou d'une autre, du côté de la non-fiction – ou même, si tel n'était pas le cas, pour quelle raison, étant donné que rien n'est supposé aller de soi en matière de théorie.

Research paper thumbnail of « Valéry et le “flux de la vie matérielle” : une lecture de L’Isle sans nom comme scénario », dans "« L’Isle sans nom », un projet dramatique inédit de Paul Valéry", dir. Franz Johansson et Benedetta Zaccarello, Paris, Classiques Garnier, coll. « La Revue des lettres modernes », 2018, p. 79-102

La diffusion ou la divulgation de ce document et de son contenu via Internet ou tout autre moyen ... more La diffusion ou la divulgation de ce document et de son contenu via Internet ou tout autre moyen de communication ne sont pas autorisées hormis dans un cadre privé. © 2018. Classiques Garnier, Paris. Reproduction et traduction, même partielles, interdites. Tous droits réservés pour tous les pays. © Classiques Garnier RÉSUMÉ -Le cas des scénarios abandonnés ne fait que redoubler le déficit statutaire initial, propre à tout texte scénaristique. Si l 'on admet que Valéry a envisagé, parmi d'autres solutions, de faire de L'Isle sans nom un scénario, on peut alors voir dans ce projet un cas exemplaire, inachevé en tant que texte et inabouti en tant qu'oeuvre cinématographique.

Research paper thumbnail of Filmer l’art avec André Malraux  (en collab. avec Jean-Claude Larrat, dans "Revue d’histoire littéraire de la France", no 1, 2012, p. 211-228)

Distribution électronique Cairn.info pour P.U.F.. © P.U.F.. Tous droits réservés pour tous pays.

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Research paper thumbnail of L’industrie de l’adaptation : un new deal pour les études cinématographiques - CR sur  "The Adaptation Industry" de Simone Murray ("Critique", no 795-796, "Cinélittérature", dir. Marc Cerisuelo et Patrizia Lombardo, août-septembre 2013, p. 763-766)

Research paper thumbnail of La métamorphose du regard : Malraux et la relecture audiovisuelle des Écrits sur l’art ("La Relecture de l’œuvre par ses écrivains mêmes", t. III, "Se relire par l’image", dir. Mireille Hilsum et Hélène Védrine, Paris, Éditions Kimé, coll. « Les Cahiers de Marge », 2012, p. 127-152)

Research paper thumbnail of Charles Péguy, "Clio. Dialogue de l'histoire et de l'âme païenne", édition annotée par Jean-Louis Jeannelle

GF. , 2023

« Prenez Homère. Faites comme il faut toujours faire. Avec les plus grands. Et surtout peut-être ... more « Prenez Homère. Faites comme il faut toujours faire. Avec les plus grands. Et surtout peut-être avec les grands. Ne vous dites pas : Il est grand. Non, ne vous dites pas cela. Ne vous dites rien. […] Prenez le texte. Et qu’il n’y ait rien entre vous et le texte. »
Dans un dialogue « à sauts et à gambades » où l’on rencontre aussi bien le théâtre de Beaumarchais que la poésie de Victor Hugo, Clio, muse de l’histoire, médite sur l’acte de création littéraire. Des premiers brouillons jusqu’au livre imprimé, qu’est-ce qu’écrire et qu’est-ce que lire ?
Œuvre méconnue, jamais publiée du vivant de Péguy et présentée ici dans une édition qui en revient au plus près du manuscrit original, Clio propose une réflexion d’une grande modernité, selon laquelle la lecture participe de la création d’un texte. L’essentiel, selon Péguy, est de lire, de bien lire, c’est-à-dire « de servir un texte, d’entendre un texte, (et d’entendre à un texte), de l’accueillir comme un hôte auguste et pourtant familier. »

Research paper thumbnail of "Texte et contexte en génétique (remploi et récupération)", "Littérature", n° 194, dir. Guillaume Bridet et Joël Loehr, juin 2019, p. 126-136,

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Research paper thumbnail of Valeur et littérature : le point aveugle de la théorie (dans "La Case aveugle : théorie littéraire et textes possibles", revue "La Lecture littéraire", no 8, janvier 2006, Reims, Université de Reims, p. 105-127)

Research paper thumbnail of « Le mémorable des lettres » (dans "L’Histoire littéraire des écrivains", dir. V. Debaene, J.-L. Jeannelle, M. Macé et M. Murat, préf. d'A. Compagnon, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2013, p. 79-124)

Research paper thumbnail of Avant-propos à "Fictions d'histoire littéraire" : “Comment diable l’histoire est écrite ?” (dans « Fictions d’histoire littéraire », "La Licorne", no 86, dir. Jean-Louis Jeannelle, Presses universitaires de Rennes, 2009, p. 7-28)

Research paper thumbnail of Perec et le divers de l’histoire littéraire : sur "Le Voyage d’hiver" (dans « Fictions d’histoire littéraire », "La Licorne", n° 86, dir. J.-L. Jeannelle, Presses universitaires de Rennes, 2009, p. 171-194)

Research paper thumbnail of Pré-histoires littéraires : qu’est-ce que l’histoire littéraire des écrivains ?  (dans "Les Écrivains auteurs de l’histoire littéraire", sous la dir. de Bruno Curatolo, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2007, p. 13-30)

Research paper thumbnail of Critique universitaire et critique journalistique : l’exercice de la valeur en littérature (dans "Les Facultés de juger : critique et vérité", dir. Évelyne Grossman, Jérémie Majorel, Martin Rueff et Elisa Sclaunick, Textuel, no 64, 2011, p. 91-103)

Research paper thumbnail of "L’unique et la série : comment classer l’inclassable ?" (Introduction à "L’Œuvre inclassable", dir. Marianne Bouchardon et Michèle Guéret-Laferté, Publications num. du CÉRÉdI, coll. « Actes de colloques et journées d’étude », n° 18, 2016)

La question de l’œuvre inclassable est bien l’une de celles que le post-structuralisme nous a lai... more La question de l’œuvre inclassable est bien l’une de celles que le post-structuralisme nous a laissées en héritage, l’une des plus inévitables et l’une des plus insolubles. L’une des plus inévitables, tant il est vrai que la poétique est, depuis son origine même, une affaire de classement – la "Poétique" d’Aristote débute ainsi : « Nous allons traiter de l’art poétique lui-même et de ses espèces, de l’effet propre à chacune d’entre elles, […] du nombre et de la nature des parties qui la constituent et pareillement de toutes les questions qui appartiennent au même domaine de recherche, en commençant d’abord par ce qui vient d’abord, suivant l’ordre naturel. » Et en même temps l’une des plus lancinantes, des plus insolubles, tant elle condense les tensions à l’œuvre dans le domaine de la théorie depuis les années 1980. D’une certaine manière, elle en résume les grands enjeux, et rien ne le montre mieux que la polémique à fleurets mouchetés qui eut lieu entre Gérard Genette et Jacques Derrida. Cet épisode n’est pas l’un des plus célèbres ou des plus marquants, et néanmoins il résume parfaitement les deux grandes tendances qui furent celle des débats en théorie littéraire depuis un peu plus d’une trentaine d’années, tendances entre lesquelles nous nous tenons toujours, incapables en quelque sorte de trancher.

Research paper thumbnail of Au-delà des guerres de mémoires : histoire du temps présent et mémoire “multidirectionnelle" - CR de "Multidirectional Memory de Michael Rothberg ("Critique", no 762, novembre 2010, p. 939-954)

Research paper thumbnail of « Le Kamtchatka patrimonial », "Critique", n° 805-806, « Le musée sous réserve d’inventaire », juin-juillet 2014, p. 494-507

Research paper thumbnail of « Portrait de l’historien par son archiviste », "Critique", n° 823, « Patrick Boucheron : l’histoire, l’écriture », décembre 2015, p. 980-987

Research paper thumbnail of La poétique de la mémoire selon Susan Suleiman ("Critique", n° 726, nov 2007, p. 842-853)

Distribution électronique Cairn.info pour Editions de Minuit. © Editions de Minuit. Tous droits r... more Distribution électronique Cairn.info pour Editions de Minuit. © Editions de Minuit. Tous droits réservés pour tous pays.

Research paper thumbnail of Note sur l’autorité chez Susan Suleiman ("L’Autorité en littérature", dir. Emmanuel Bouju, Rennes, PUR, coll. "Interférences", 2010, p. 489-504)

Research paper thumbnail of Claude Mauriac : une esthétique de la filiation (dans « Claude Mauriac ou la liberté de l’esprit », dir. Claude Leroy et Nathalie Mauriac Dyer, "RITM", no 28, Paris, Université Paris-X Nanterre, 2003, p. 39-51)

Research paper thumbnail of Julien Luchaire : coopération internationale et nationalisme littéraire (dans "La République des Lettres dans la tourmente (1919-1939)", dir. Antoine Compagnon, Paris, CNRS/Alain Baudry et Cie, 2011, p. 151-165)

Julien Luchaire est l'exemple même d'un homme qui consacra son existence à un rêve inabouti, le r... more Julien Luchaire est l'exemple même d'un homme qui consacra son existence à un rêve inabouti, le rêve après la première guerre mondiale d'une organisation internationale mettant la culture au service de la paix. L'Institut international de coopération intellectuelle (IICI), qu'il contribua à créer au sein de la Société des Nations et dirigea durant cinq ans, entre 1925 et 1930, est une structure étrange, récemment sauvée de l'oubli par Jean-Jacques Renoliet 1 . Mon propos ici ne sera pas de même nature : je repartirai pour l'essentiel des mémoires de Julien Luchaire, intitulées Confession d'un Français moyen, afin d'y chercher quelques-unes des raisons de l'échec de cette institution où s'articulent de manière unique enjeux politiques, culturels et littéraires. Le projet d'une institution vouée à la coopération intellectuelle s'inscrit-il dans l'histoire longue de ce que l'on a appelé, à différentes époques, la République des Lettres ? Cette communauté d'esprit et de destin semblait, en effet, avoir jeté ses derniers feux à l'époque romantique, dernier grand mouvement littéraire d'essence européenne, avant que les milieux lettrés se replient sur une sociabilité plus autonome et plus étroitement nationale ; à l'époque où triomphait le réalisme, le modèle de la République avait déjà fait place à celui du milieu, auquel s'est attachée depuis la sociologie littéraire. Paradoxalement, la réintroduction au centre du débat intellectuel de ce concept traditionnel (dont l'histoire avait déjà été reconstituée par Marc Fumaroli, Françoise Waquet et Hans Bots) est due en grande partie à une sociologue proche de Bourdieu, Pascale Casanova, qui intitula en 1999 sa somme sur l'espace littéraire international : La République mondiale des Lettres (Éd. du Seuil, 1999 ; éd. revue et corrigée, coll. « Points essais », 2008). Cette formule soulève d'intéressantes questions : en dépit de ce que pourrait laisser entendre le titre de l'ouvrage, son objet n'est pas la mise en circulation des savoirs reliant un corps de savants et d'auteurs entre eux selon une logique indépendante des pouvoirs politiques ou religieux, mais l'analyse des indicateurs socio-économiques et symboliques qui régissent les échanges littéraires internationaux -ce qui n'est plus du tout la même chose. La République des Lettres unissait des individus, pour l'essentiel européens, qui partageaient des habitudes et des valeurs. L'espace littéraire mondial s'impose plus ou moins violemment aux agents qui y

Research paper thumbnail of Le sexe des Mémoires (dans "Les Mémoires : une question de genre ?", dir. Anne Coudreuse, "Itinéraires : littérature, textes, cultures", n° 1, 2010, p. 13-28)

Everybody knows that since the beginning, women wrote memoirs. Why did so few women produce "egoh... more Everybody knows that since the beginning, women wrote memoirs. Why did so few women produce "egohistorical" narratives precisely from the moment they were granted a wide array of rights and achieved formal equality? Most of the time, the apparent disappearance of women writing memoirs during the twentieth century is explained by a natural evolution of the genres towards intimate forms of narratives. I would like to examine here if such a restriction -whether or not it is intentional -to the autobiographical model as opposed to those of "Souvenirs," memoirs, and other historical testimonies has diminished the place women should hold in field of self narratives, consequently confined them to a gynaeceum of life writings.

Research paper thumbnail of « Les "Antimémoires" : exemplarité de soi et inexemplarité générique », dans "Littérature et exemplarité", dir. Emmanuel Bouju et al., Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 313-329

Research paper thumbnail of « Les mémorialistes sont-ils de bons témoins de notre temps ? » : http://www.college-de-france.fr/site/antoine-compagnon/seminar-2009-02-03-17h30.htm

Research paper thumbnail of "L'Acheminement vers le réel" : pour une étude des genres factuels , le cas des Mémoires (dans "Poétique", n° 139, septembre 2004)

Jean-Louis Jeannelle « L'acheminement vers le réel » Pour une étude des genres factuels : le cas ... more Jean-Louis Jeannelle « L'acheminement vers le réel » Pour une étude des genres factuels : le cas des Mémoires

Research paper thumbnail of Entre genres littéraires et savoir des usagers : le concept de “dispositions génériques” (dans « Le Savoir des genres », "La Licorne", no 79, dir. Raphaël Baroni et Marielle Macé, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 73-83)

On sait qu'André Gide utilisait toujours la catégorie « mémoires » pour désigner le texte qu'il a... more On sait qu'André Gide utilisait toujours la catégorie « mémoires » pour désigner le texte qu'il avait écrit entre 1916 et 1921, Si le grain ne meurt, devenu à nos yeux un classique de l'autobiographie. Ses contemporains, comme Albert Thibaudet ou Jacques-Émile Blanche, parlaient eux aussi de « mémoires » 1 , puisqu'à cette époque, la catégorie d'« autobiographie », bien que parfaitement attestée, restait encore peu usitée. Alors qu'en Angleterre et en Allemagne, cette dernière avait très rapidement servi d'hyperonyme pour désigner les récits à la première personne, elle fut relativement peu utilisée en France jusque dans les années 50-60, certainement en raison de la légitimité dont bénéficièrent pendant longtemps d'autres noms de genre plus anciens, comme « mémoires » ou « souvenirs ». Il n'empêche que les essais de théorisation sur l'autobiographie ne datent pas des années 70, loin s'en faut, et que Gide avait déjà à sa disposition quelques textes de référence. Ainsi Gustave Vapereau avait-il rédigé dans le Dictionnaire universel des littératures publié chez Hachette en 1876 une entrée « Autobiographie », où tous les éléments requis aujourd'hui dans notre définition du genre étaient déjà présents. En voici les termes : « oeuvre littéraire, roman, poëme, traité philosophique, etc., dont l'auteur a eu l'intention, secrète ou avouée, de raconter sa vie, d'exposer ses pensées ou de peindre ses sentiments » 2 . Nous retrouvons bien là les trois grands éléments constitutifs de la définition que Philippe Lejeune livra de l'autobiographie en 1971 : le médium -ici « roman, poëme, traité philosophique » -, le sujet traité -la vie, les pensées et les sentiments d'un individu -et même le critère énonciatif, que Lejeune lia pour sa part à l'identité stricte entre l'auteur, le narrateur et le personnage, et qui chez Vapereau tenait à l'exact inverse, puisqu'il est explicitement fait référence à des oeuvres fictionnelles. Le critique ne prend-il pas soin de préciser que l'autobiographie « laisse une large place à la fantaisie, et [que] celui qui l'écrit n'est nullement astreint à être exact sur les faits, comme dans les mémoires, ou à dire la vérité la plus entière, comme dans les confessions » ? Ce sont bien là les termes du contrat que nous appelons aujourd'hui « pacte autobiographique » : aux yeux de Vapereau, ceux-ci s'appliquent simplement à deux autres modèles littéraires parfaitement identifiés, fondés sur un socle socioculturel justifiant un tel impératif de véracité : l'histoire dans le cas des mémoires et la religion dans le cas des confessions. Qu'il s'agisse d'établir les faits tels qu'ils se sont effectivement passés -« wie es eigentlich gewesen » 3 , selon la formule de Ranke -ou bien afin d'obtenir le pardon de ses fautes dans un souci d'amendement et de progrès spirituel, le respect de la factualité est un impératif d'ordre institutionnel dans le cas des mémoires et de la confession, où le cadre d'exercice décide de la nature des textes et du type d'exigence imposée, à savoir l'exactitude pour l'historien et la sincérité pour l'individu qui se confesse. À l'autobiographe sont réservés les délices de la « fantaisie » et la liberté de la transposition. Remarquons que l'autobiographie constitue bien, pour Vapereau, un genre nouveau, tout du moins en ce qui concerne sa « forme raffinée », qu'il décrit comme « moderne » et qu'il assimile aux oeuvres de « Rousseau », à qui revient, là aussi, la première place, « Goethe, Byron, Chateaubriand, Lamartine, Alfred de Musset ». Ces différents écrivains ont pour caractéristique d'être « tout entiers dans leurs ouvrages, aussi bien comme hommes que comme écrivains » 4 -manière, pour Vapereau, de souligner le caractère éminemment littéraire de ces textes dont quelques exemples sont cités : La Nouvelle Héloïse, Werther, René, Les Nuits ou La Confession d'un enfant du siècle. Autant d'oeuvres qui représentent, ainsi que le précise le critique, « dans divers genres, les modèles les plus achevés d'autobiographies ».

Research paper thumbnail of "Maumort" de Roger Martin du Gard : mémoire, histoire et travail du deuil (dans "Littérature", numéro « Biographiques », no 128, décembre 2002, p. 65-79)

Research paper thumbnail of Mémoires d’enfance : usages du récit d’enfance dans les récits de parcours politiques (dans "Récit d’enfance et romanesque", sous la dir. d’Alain Schaffner, revue "Romanesque", Centre d’études du roman et du romanesque de l’université de Picardie, 2004, p. 181-203)

Research paper thumbnail of Présentation du n° « Sartre-Beauvoir : genèses croisées » ("Genesis", n° 53, codirigé avec Jean Bourgault, 2021)

Genesis, 2021

Numéro présenté à la BnF, 15 mars 2022, dans la cadre du séminaire général de l'ITEM

Research paper thumbnail of Introduction de "Sartre-Beauvoir : genèses croisées", "Genesis", n° 53 (2021) : "Sartrébeauvoir"

Genesis, 2021

ENJEUX 19 Gilles Philippe et Michel Contat, Peut-on encore écrire, si l'on ne peut plus se relire... more ENJEUX 19 Gilles Philippe et Michel Contat, Peut-on encore écrire, si l'on ne peut plus se relire ? Sartre, le brouillon et le style 35 Hélène Baty-Delalande, L'architecture interstitielle des Mémoires ÉTUDES LES ÉCRITS DE SOI 47 Jean-Louis Jeannelle, « [M]on passé, l'Algérie, ça ne va pas ensemble » : le poids de l'histoire dans La Force des choses GENÈSES ROMANESQUES 67 Esther Demoulin, « Les tentatives seront des gestes brisés aussitôt qu'ébauchés ». Tentative d'existence et la réécriture de soi 79 Isabelle Grell, Les toboggans de La Dernière Chance INÉDITS 93 Des nouvelles sur Zaza, présentation par Éliane Lecarme-Tabone 121 « Dans mon humble superbe ». À propos d'une page des Mots, présentation par Jean-François Louette MATÉRIAUX 135 Genèse du problème de l'enfance chez Sartre et Beauvoir. Le manuscrit « L'Enfant et les groupes », 1948, par Gregory Cormann LES DIPLÔMES 149 Le concept chez Leibniz : diplôme d'études supérieure de Simone de Beauvoir, sous la direction de Léon Brunschvicg (1928-1929), par

Research paper thumbnail of « Le sexe des Mémoires », "Itinéraires : littérature, textes, cultures", n° 1, « Les Mémoires : une question de genre ? » sous la dir. d’Anne Coudreuse, 2010, p. 13-28

Everybody knows that since the beginning, women wrote memoirs. Why did so few women produce "egoh... more Everybody knows that since the beginning, women wrote memoirs. Why did so few women produce "egohistorical" narratives precisely from the moment they were granted a wide array of rights and achieved formal equality? Most of the time, the apparent disappearance of women writing memoirs during the twentieth century is explained by a natural evolution of the genres towards intimate forms of narratives. I would like to examine here if such a restriction -whether or not it is intentional -to the autobiographical model as opposed to those of "Souvenirs," memoirs, and other historical testimonies has diminished the place women should hold in field of self narratives, consequently confined them to a gynaeceum of life writings.

Research paper thumbnail of "Les ratées de la famille", intervention dans le cadre de la journée d'agrégation "Simone de Beauvoir, "Mémoires d'une jeune fille rangée"" du 6 octobre 2018, organisée par JL Jeannelle à l'université Paris III-Sorbonne Nouvelle, avec le soutien de la SELF XXe-XXIe, THALIM et le CEREdI.

Interrogée au sujet de son autobiographie par Madeleine Chapsal lors d'un entretien paru en volum... more Interrogée au sujet de son autobiographie par Madeleine Chapsal lors d'un entretien paru en volume, Les Écrivains en personne (Julliard, 1960), Beauvoir eut, au sujet de l'interprétation des Mémoires d'une jeune fille rangée, une réaction pour le moins inattendue lorsque l'intervieweuse suggéra que Zaza avait échoué là où l'écrivaine avait réussi : « Elle n'a pas échoué, elle est morte. » Aux yeux de tous les lecteurs, tel est pourtant bien le cas : la mort, quelle qu'en soit la cause, est bien un échec. Comment expliquer, sans cela, la culpabilité sur laquelle Beauvoir achève son autobiographie ? Plus étonnant encore, Beauvoir ajoutait : « mourir est la solution la plus absolue », et inversait l'interprétation la plus vraisemblable des Mémoires : « on pourrait dire que j'ai échoué dans la mesure où j'ai vécu et qu'elle a réussi dans la mesure où elle est morte. Qu'elle soit morte ou qu'elle ait vécu, cela ne change rien à la qualité qu'elle avait à 20 ans 1 ». Jouant avec l'idée sartrienne selon laquelle la mort transforme « la vie en destin » (selon une formule initalement malrucienne), Beauvoir suggérait, semble-t-il, que le sens d'un destin est indépendant de la mort. Mais peut-être sa relecture était-elle plus radicale, anticipant ici sur l'idée que la vie, quelle que soit l'authenticité des choix pris par un individu, est une série de renoncements, autrement dit est toujours en deçà des espoirs qu'une jeunesse a pu nourrir – « je croyais, quand j'étais jeune, que j'avais une vie devant moi ; mais une vie n'est jamais ni devant ni derrière soi, ce n'est pas quelque chose qu'on a, c'est quelque chose qui passe 2 … » Échec ou non ? La question reste posée. Plus encore, elle confère au récit une puissante tension narrative, autrement dit sous-tend les destins conjoints de Simone et de Zaza d'attente faite d'« anticipation » mais « teintée d'incertitude » et propre à conférer « des traits passionnels » à notre lecture.

Research paper thumbnail of « Simone de Beauvoir et Violette Leduc : retour sur un parallèle biaisé de l’histoire littéraire », "The Romanic Review", vol. 107, n° 1-4, janv.-nov. 2016, p. 153-172.

retour Sur un parallèle BiaiSé de l'hiStoire littéraire D ésireuse d'écrire durant l'été 1946 un ... more retour Sur un parallèle BiaiSé de l'hiStoire littéraire D ésireuse d'écrire durant l'été 1946 un « essai-martyr » semblable à L'Âge d'homme de Michel Leiris, Simone de Beauvoir pensa régler sans trop de difficulté la question de savoir ce qu'avait signifié pour elle le fait d'être une femme. Mais conduite à « y regarder de plus près », elle découvrit que « ce monde était un monde masculin » et que son « enfance avait été nourrie de mythes forgés par les hommes ». Aussi se lança-t-elle l'écriture du Deuxième Sexe 1 . Or cet essai paru en 1949 s'achève par un chapitre sur les créatrices, intitulé : « Vers la libération ». Envisageant l'art et la littérature comme forme ultime d'épanouissement, Beauvoir y décèle une impasse : si la femme, afin d'échapper au repli sur son monde intérieur, choisit de s'exprimer, la voici qui devient « écrivassière » -« elle s'épanche en conversations, en lettres, en journaux intimes. Il suffit qu'elle ait un peu d'ambition, la voilà rédigeant ses Mémoires, transposant sa biographie en roman, exhalant ses sentiments dans les poèmes » 2 . Bien que créatrice, la femme se condamne à l'inessentiel par incapacité à s'oublier soi-même ; chez elle, le désir de communication vise à la « révélation directe de sa sensibilité », et néglige les médiations que suppose le maniement du langage comme vecteur d'un « rapport inter-individuel » 3 . Sophie Tolstoï, Marie Bashkirtseff, Virginia Woolf, Colette . . . , aucune de ces femmes n'a pu, aux yeux de l'essayiste, surmonter la « spécification millénaire » qui la cantonnait dans sa féminité : C'est pourquoi il y a par exemple des autobiographies féminines qui sont sincères et attachantes : mais aucune ne peut se comparer aux Confessions, aux Souvenirs d'égotisme. Nous sommes encore trop préoccupées d'y voir clair pour chercher à percer par-delà cette clarté d'autres ténèbres 4 .

Research paper thumbnail of "Ecrire ses mémoires : récit de formation et "devoirs virils"", dans "Cahier de l'Herne Beauvoir", dir. J.-L. Jeannelle et E. Lecarme-Tabone, Paris, Editions de l'Herne, 2012, p. 234-240

Ni faits de résistance à détailler par le menu, ni fonctions publiques exercées durant les années... more Ni faits de résistance à détailler par le menu, ni fonctions publiques exercées durant les années que couvrent La Force de l'âge (1929)(1930)(1931)(1932)(1933)(1934)(1935)(1936)(1937)(1938)(1939)(1940)(1941)(1942)(1943)(1944) et La Force des choses (août 1944-automne 1962), ni actions décisives durant la guerre en Algérie que l'on puisse comparer à l'investissement d'un Pierre Vidal-Naquet (si ce n'est la présidence du « Comité pour Djamila Boupacha ») : Simone de Beauvoir ne présente, lorsqu'elle publie les deux tomes qui font suite à son autobiographie, aucune des garanties traditionnelles du mémorialiste -à savoir ce capital symbolique que confèrent à son auteur une position institutionnelle, des faits et gestes décisifs ou encore une oeuvre littéraire quasi achevée. Seule sa lutte pour la cause féministe répond directement à de tels réquisits, mais paradoxalement après coup, dans les années 1970. On a longtemps lu La Force de l'âge (1960) et La Force des choses (1963) comme les suites logiques du récit d'enfance de 1958, sans voir que la posture adoptée par Beauvoir évoluait profondément du simple fait de se déployer aux dimensions d'une génération et de se muer en récit « égohistorique ».

Research paper thumbnail of Les Mandarins de Simone de Beauvoir ou la crise du dialogue des intellectuels (dans "Le Débat d’idées dans le roman français", dir. G. Artigas-Menant et A. Couprie, Paris, PUPS, 2010, p. 103-132)

Je suis persuadée que, malgré sa légende, l'auteur des Mandarins n'est pas encore appréciée à sa ... more Je suis persuadée que, malgré sa légende, l'auteur des Mandarins n'est pas encore appréciée à sa juste valeur de chroniqueuse ayant su construire un événement culturel (Julia Kristeva, « Mémoire », L'Infini, n° , ).

Research paper thumbnail of "Simone de Beauvoir, "Mémoires d'une jeune fille rangée"", sous la dir. de Jean-Louis Jeannelle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. "Didact Concours", 25 octobre 2018, 360 p.

Premier volume en 1958 d’un cycle qui s’achèvera avec "La Cérémonie des adieux" en 1981, "Mémoir... more Premier volume en 1958 d’un cycle qui s’achèvera avec "La Cérémonie des adieux" en 1981, "Mémoires d’une jeune fille rangée" raconte l’histoire d’une libération et l’accomplissement d’un destin, confirmant ainsi l’intuition de la jeune Simone de Beauvoir qui notait dans son journal intime le 30 mai 1929 : « Quelle plus belle oeuvre que cette destinée que j’accomplis ? » De son éducation dans un milieu familial et scolaire étouffant, Beauvoir a tiré une analyse précise de l’arrangement des sexes, implacable police des genres dont résultait pour les jeunes filles de la bourgeoisie catholique une fausse alternative : le mariage « arrangé » ou le célibat forcé. Portée par un formidable goût de bonheur, la jeune Simone passe du Cours Désir aux amphithéâtres de la Sorbonne et conquiert son autonomie grâce à l’agrégation de philosophie : à chacune de ces étapes, ce sont dans les mots, lus et écrits, qu’elle trouve les ressources nécessaires à son parcours – au prix néanmoins d’un sacrifice : celui de son amie Zaza, morte de n’avoir pu s’arracher à son milieu, mais à laquelle l’autobiographie confère une nouvelle existence faites de mots. Au coeur de ce récit de vocation se trouvent les linéaments d’une pensée où l’existence s’appréhende à travers le corps et les aspirations d’un être sexué.

Synthèse des travaux les plus récents sur l’oeuvre autobiographique de Simone de Beauvoir, le présent volume rassemble les contributions des meilleurs spécialistes, parmi lesquels les artisans de l’édition des "Mémoires" dans la Bibliothèque de la Pléiade. Il a été pensé comme un ouvrage complet et incontournable pour permettre la réussite des candidats à l’agrégation de lettres.

Table des matières

Jean-Louis Jeannelle : « Introduction : Beauvoir aujourd’hui »

I. Arrangement / dérangement des genres

Hélène Baty-Delalande (Université de Rennes II) : « “On ne naît pas femme, on le devient” : comment échapper à la fabrique des filles ? »

Anne Strasser (Université de Lorraine) : « Simone et les jeunes filles rangées : l’art du contrepoint »

Pascale Fautrier (Lycée Victor Hugo) : « Autobiographie existentialiste et identité féminine »

Jean-Louis Jeannelle : « Beauvoir ou La fin du mélodrame »

Simon Bréan (Université Paris IV) : « Le premier sexe : regards sur le masculin »

II. Lire – Écrire : une enfance faites de mots

Delphine Nicolas-Pierre (Sorbonne Université ; collège Albert Camus) : « Les Cahiers de jeunesse, chambre secrète des Mémoires »

Françoise Simonet-Tenant (Université de Rouen) : « Mode d’emploi pour une lecture du récit d’enfance beauvoirien »

Esther Demoulin (Sorbonne Université) : « Les Mots des Mémoires »

Pierre-Louis Fort (Université de Cergy-Pontoise) : « Textes, prétextes et contextes : lectures d’enfance et d’adolescence »

Marie-Hélène Boblet (Université de Caen) : « Affinités électives, aventure et imaginaire romanesque : Le Grand Meaulnes à l’épreuve des Mémoires d’une jeune fille rangée »

Pierre Bras (University of California, Paris) : « Simone de Beauvoir et les immeubles »

III. Aux origines d’une pensée

Catherine Poisson (Wesleyan University) : « Le prix de la vie »

Aude Bonord (Université d’Orléans) : « Un récit de vocation »

Martine Boyer-Weinmann (Université Lyon II) : « Espace des possibles et formes de vie potentielles »

Cécile Decousu (Lycée J-J Rousseau) : « Des études en négatif »

IV. Du style

Claire Deslaurier (ENS de Lyon) : « L’unité dans la succession : temps, syntaxe et rythme »

Stéphanie Smadja (Paris Diderot) : « Écriture de soi et allongement de la phrase »

Stéphane Chaudier (Université de Lille) : « Un style modérément polyphonique »

V. Des femmes, de la philosophie, etc.

Entretien avec Michèle Le Dœuff (CNRS-EHESS)

VI. Simone de Beauvoir jusqu’à l’agrégation : lettres choisies (1927-1929)

Présentation par Sylvie Le Bon de Beauvoir

À Zaza (24 juillet 1927) ; À sa mère (22 septembre 1927) ; À Michel Pontremoli (30 juillet, 13 septembre 1927, 24 juin 1928) ; À Maurice Merleau-Ponty (6 décembre 1928) ; À René Maheu (1929) ; À Jacques Champigneulle (5 mai 1929) ; De et à Maurice Merleau-Ponty (12 et 13 juin 1929) ; À Zaza (1er août 1929); À Michel Pontremoli (4 août 1929) ; À Jacques Champigneulle (1er septembre 1929) ; À Zaza (3 septembre, 17 septembre, 11 octobre 1929

Research paper thumbnail of Littérature, n° 191 : "Beauvoir en ses mémoires" (J.-L. Jeannelle dir.)

LITTÉRATURE N° 191 (3/2018), "Beauvoir en ses Mémoires" Résumés : Éliane Lecarme-Tabone Genr... more LITTÉRATURE N° 191 (3/2018), "Beauvoir en ses Mémoires"

Résumés :

Éliane Lecarme-Tabone

Genres et genre

Suivant Simone de Beauvoir dans Le Deuxième Sexe, mais sans partager ses jugements négatifs, nous partons de l’idée que les autobiographies et les Mémoires écrits par les femmes présentent des caractéristiques spécifiques, reflétant leur condition à un moment donné de l’histoire. Nous situons Beauvoir autobiographe et mémorialiste par rapport à ses devancières afin de cerner les traits qu’elle partage (les questions qu’elle aborde aussi bien que certains aspects de son geste autobiographique ou mémoriel), et la manière dont elle s’en distingue par son autorité ou par les sujets qui lui sont propres. Nous avons ensuite essayé de montrer en quoi elle a pu influencer d’autres récits autobiographiques de femmes.

Laetitia Hanin

L’autobiographie au féminin, ou les codes de la distinction

Partant du constat de la forte sociabilité des autobiographies féminines et de leur rayonnement culturel – grand nombre d’écrivaines étant connues aujourd’hui par leurs amis, époux ou amants –, cet article se saisit de quelques autobiographies de femmes pour interroger les conditions sociales et les processus identitaires qui déterminent le devenir-écrivain des femmes aux XIXe et XXe siècles. Pour ce faire, il passe en revue les diverses modalités de filiation et montre comment la relation aux modèles féminins se dé- complexifie d’un siècle à l’autre.

Adélaïde Mokry

Division, valorisation, réappropriation : une lecture des Mémoires au prisme du Deuxième Sexe

Écrit moins de dix ans avant le cycle des Mémoires, Le Deuxième sexe propose, au moment où Beauvoir entame son autobiographie, une grille de lecture de son existence. Situant les valeurs créatrices du côté du masculin, les analyses socio-historiques de son essai sur la condition des femmes contribuent alors à diviser l’appréhension de son identité d’intellectuelle entre valorisation et sentiment d’illégitimité. L’entreprise à la première personne peut ainsi se comprendre comme une réappropriation de soi dans une démarche qui, par son effet performatif et grâce à l’écriture, construit son autorité de créatrice.

Jean-Louis Jeannelle

Être « au plus près des choses » : le mémorable dans La Force des choses

Devenue « mémorialiste » en partie par l’incidence de son geste d’écriture sur son existence, tout en renouvelant les coordonnées de ce genre, l’auteure de La Force de l’âge et de La Force des choses incarne aux yeux de l’opinion et de la postérité cette identité qui se soutient du mémorable liant une vie et une époque. Nous nous attacherons, afin de mieux saisir la portée de cette visée « mémoriale », à distinguer le projet beauvoirien des écrits de soi chez Sartre, ainsi qu’à la formule essentielle de « force des choses », qui circule à l’époque entre Malraux, Sartre ou Merleau-Ponty, et à laquelle la mémorialiste confère une portée particulière.

Manon Garcia

Vivre la philosophie : les Mémoires comme œuvre philosophique

Peu de travaux traitent de la portée philosophique de l’œuvre autobiogra- phique de Beauvoir. Il s’agira d’examiner le lien, propre à l’existentialisme, que Beauvoir établit entre la vie et la philosophie sous trois aspects : comme source documentaire pour comprendre ses essais et la position philosophique originale qu’elle y défend, mise en évidence du rapport réciproque entre la philosophie et la vie, sur les plans épistémique et pratique, enfin moyen de compenser les défauts inhérents à la philosophie lorsque celle-ci s’exprime en troisième personne – seul le témoignage littéraire permet de faire sur- gir un universel singulier capable de révéler par l’exemple la tension entre situation et liberté.

Marine Rouch

« Vous êtes descendue d’un piédestal » : une appropriation collective des Mémoires de Simone de Beauvoir par ses lectrices (1958-1964)

À partir des lettres encore inédites reçues par Simone de Beauvoir de la part de ses lectrices entre 1949 et 1963, l’article traite d’abord de la manière dont Beauvoir a été, grâce au Deuxième Sexe puis aux deux premiers volumes autobiographiques, investie comme modèle et représentante des femmes. Bien que La Force des choses et sa clausule, « j’ai été flouée », sont loin d’avoir fait l’unanimité dans la presse, il s’agit ensuite de montrer que ce troisième volume a paradoxalement renforcé et consolidé l’appropriation de l’écrivaine et de son œuvre par les femmes.

Hélène Baty-Delalande

Tout compte fait : comment finir ?

Tout compte fait a un statut singulier au sein de l’entreprise d’autoconsigna- tion de Beauvoir : correctif en forme de supplément à son autobiographie, autoportrait, suite des Mémoires, il se caractérise également par sa compo- sition thématique, qui brise la linéarité du récit de vie. Ce dispositif lâche témoigne à la fois d’un nouveau rapport à l’Histoire et à soi-même, contra- riant la clôture du sens revendiquée dans les premières pages du volume. Beauvoir y fait un pas de côté, s’écartant du grand récit des Mémoires, tout comme du grand récit de l’Histoire, et trouve dans la mélancolie de l’informe les ressources pour suggérer la suspension de l’expérience vécue, volontairement dégagée de toute tension vers une fin.

Julie Augras

La Cérémonie des adieux : le lecteur face au corps

Le 23 novembre 1981, un peu plus d’un an après la mort de Sartre, les éditions Gallimard publièrent La Cérémonie des adieux suivi des Entretiens avec Jean-Paul Sartre. Beauvoir y raconte les dix dernières années de son compagnon et y décrit sans fard la lente dégradation de son corps et de son esprit. Le livre fit scandale et suscita l’indignation d’une grande partie de la critique, qui vit dans La Cérémonie un texte transgressif et indigne. De fait, La Cérémonie confronte directement les lecteurs au corps : le corps d’un Sartre vieillissant s’enfonçant dans la maladie. Nous donnerons ici la parole aux dizaines d’entre ceux qui ont écrit à Simone de Beauvoir pour lui faire part de leur réaction et de leur jugement.

Pierre-Louis Fort

Annie Ernaux et Didier Éribon : retour(s) à Beauvoir

On a souvent rapproché Annie Ernaux et Didier Éribon pour de multiples raisons (leurs trajectoires de transfuges de classe ou la dimension auto-socio- biographique d’une partie de leurs écrits) : cela vaut également pour rôle que Beauvoir a joué dans leur vie. L’un comme l’autre ont en effet affirmé qu’elle les avait transformés. Au-delà de cette communauté d’attitude, Ernaux et Éribon sont-ils attachés aux mêmes œuvres ? Plus précisément : eux qui se rejoignent pour avoir placé certaines de leurs œuvres sous le signe du retour et de l’écriture à la première personne, que retiennent-ils de Beauvoir mémorialiste ?

Research paper thumbnail of Simone de Beauvoir, "Mémoires", I & II, Gallimard, coll. "Bibliothèque de la Pléiade", 2018

« Une journée où je n’écris pas a un goût de cendres », disait-elle. Simone de Beauvoir (1908-198... more « Une journée où je n’écris pas a un goût de cendres », disait-elle. Simone de Beauvoir (1908-1986) fut philosophe, romancière, théoricienne du féminisme, militante anticolonialiste, elle fut la moitié du « couple existentialiste » (et mythique) qu’elle forma avec Sartre, et elle fut aussi, bien sûr, une des grandes mémorialistes de notre temps.

L’écriture de soi a toujours été présente dans sa vie. Dès ses dix-huit ans, elle tint un journal intime. Elle continua sa vie durant, par intermittences. C’est la volonté de raconter son amie d’enfance, Zaza, et la douleur liée à sa disparition qui font se concrétiser son désir autobiographique. Commencés en 1956, les Mémoires d’une jeune fille rangée paraissent en 1958. Ce livre allait devenir le premier volume d’une vaste et ambitieuse entreprise mémoriale. Pourtant, à l’origine, il devait se suffire à soi-même : Simone de Beauvoir y avait assouvi son ambition de « totalité ». Mais il amorça un processus d’écriture qui allait se déployer sur un quart de siècle.

« On ne peut jamais se connaître mais seulement se raconter. » Des Mémoires à La Cérémonie des adieux (1981), six ouvrages couvrent pratiquement toute l’existence de Beauvoir, de sa naissance à la mort de Sartre en avril 1980. S’y succèdent toutes les modalités du récit de soi. L’autobiographie dans Mémoires d’une jeune fille rangée, où elle retrace la conquête de son autonomie et fait revivre son désir d’adolescente : « devenir un écrivain célèbre ». Les mémoires, récit d’une vie dans sa condition historique, avec La Force de l’âge (1960), qui suit le parcours du « Castor » de 1929 à 1944 — dix années de liberté et de bonheur brisées par la guerre, et par la prise de conscience d’une sorte d’aveuglement —, puis La Force des choses (1963), où le passé remémoré finit par rejoindre le moment de la rédaction et où l’écriture de soi rallie l’écriture du monde. L’autoportrait, dans Tout compte fait (1972), où la stricte chronologie le cède au thématique. Le témoignage enfin, dans La Cérémonie des adieux, où Beauvoir évoque les dix dernières années de la vie de Sartre. Au centre, Une mort très douce (1964), court et admirable récit consacré à la maladie et à la disparition de sa mère.

L’œuvre mémoriale de Simone de Beauvoir ne cessa d’enlacer l’Histoire. « Répertoire des rêves d’une génération », embrassant la presque totalité du XXe siècle, elle fut souvent lue comme un document, un précieux témoignage sur une époque. « Ses souvenirs sont les nôtres, disait François Nourissier ; en parlant d’elle, Simone de Beauvoir nous parle de nous. » Le temps est sans doute venu de la lire autrement, comme une œuvre littéraire. On a parfois reproché à Beauvoir sa sèche précision, la monotonie de son style ou bien encore une écriture trop « intellectuelle ». C’était ne pas voir que ce style, recherché par elle, relevait de la mise à distance du monde et de la volonté de faire entendre sa propre voix, vivante.

Édition publiée sous la direction de Jean-Louis Jeannelle et Éliane Lecarme-Tabone, avec la collaboration d’Hélène Baty-Delalande, Alexis Chabot, Jean-François Louette, Delphine Nicolas-Pierre, Élisabeth Russo et Valérie Stemmer. Chronologie par Sylvie Le Bon de Beauvoir. L’établissement des textes de Simone de Beauvoir a été revu par Sylvie Le Bon de Beauvoir d’après les manuscrits et les éditions parues du vivant de l’auteur.

Le tome I contient : introduction, chronologie, note sur la présente édition ; Mémoires d’une jeune fille rangée, La Force de l’âge, La Force des choses (première partie) ; Autour des œuvres de Simone de Beauvoir : extraits du Journal, notes et documents ; notices, notes et variantes. — No 633 de la collection.

Le tome II contient : chronologie ; La Force des choses (deuxième partie), Une mort très douce, Tout compte fait, La Cérémonie des adieux; Appendices : entretiens et conférence ; Autour des œuvres de Simone de Beauvoir : extraits du Journal, notes et documents ; notices, notes et variantes ; bibliographie, Index. — No 634 de la collection.

Research paper thumbnail of Journée d'agrégation du 6 octobre 2018 : "Simone de Beauvoir, "Mémoires d'une jeune fille rangée"", organisée par Jean-Louis Jeannelle, avec le soutien de la SELF-XX-XXI, THALIM et le CEREdI

Programme : Éliane Lecarme-Tabone : « À propos de la nouvelle (inédite) de 1954 sur la mort de ... more Programme :
Éliane Lecarme-Tabone : « À propos de la nouvelle (inédite) de 1954 sur la mort de Zaza »
Marie-Françoise Lemonnier-Delpy (Université de Picardie-Jules Verne) : « Fille(s) et mère(s) »
Isabelle Grellet (Auteure avec Caroline Kruse des Jeunes Filles exemplaires) : « Simone de Beauvoir et Élisabeth Lacoin : destins croisés »
Jean-Louis Jeannelle (Université de Rouen, CEREdI) : « Les ratées de la famille ».
Sandrine Vaudrey-Luigi (Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle) : « Unité et valeur stylistiques des Mémoires d’une jeune fille rangée ».
Simon Bréan (Sorbonne Université) : « Beauvoir, démocrate et romanesque »
Alain Schaffner (Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle) : « Le corps dans les Mémoires d’une jeune fille rangée »

Ressources complémentaires

Journée d’étude « Zaza, figure et traces »

Une journée doctorale « Zaza , figure et traces » a eu lieu le vendredi 9 avril 2010 à l’Université Paris Diderot -Paris 7 organisée par Cécile Decousu (UFRLAC) sous la direction de Julia Kristeva (Université Paris 7). À l’occasion de l’étude des Mémoires d’une jeune fille rangée, nous en présentons ici le texte des communications, avec l’aimable autorisation des auteurs et en accord avec Cécile Decousu. Nous vous invitons aussi à vous reporter au site de l’association Elisabeth Lacoin.

« Zaza ressuscitée : reconnaissance beauvoirienne et reconnaissance familiale », Philippe Devaux (Association Élisabeth Lacoin, PRAG de Lettres – Université de Poitiers)
« D’Anne à Zaza : une lente résurrection ,» Éliane Lecarme-Tabone
« “Qui n’a-t-elle pas été ?” L’impossible fiction », Cécile Decousu
« Figure de Zaza : écriture et réécriture », Anne Strasser (Maître de Conférences à l’Université de Lorraine, membre de LIS)
« Euphorion sans Théagène : Elisabeth Lacoin par elle-même », Valérie Stemmer, Enseignante, Lycée Mariette, Boulogne-sur-Mer
« Zaza en archives », Mauricette Berne (conservateur général honoraire des bibliothèques, Paris)

Research paper thumbnail of Simone de Beauvoir en ses Mémoires : une présentation des Mémoires de Beauvoir en Pléiade (Rouen)

Mercredi 30 mai 2018, 17h - 19h30 Jean-Louis Jeannelle (professeur à l’université de Rouen) et E... more Mercredi 30 mai 2018, 17h - 19h30

Jean-Louis Jeannelle (professeur à l’université de Rouen) et Eliane Lecarme-Tabone (Université de Lille) : « Beauvoir en Pléiade »

Danièle Sallenave (écrivain, membre de l’Académie française), interrogée par Françoise Simonet-Tenant (professeure à l’université de Rouen) : « Simone de Beauvoir : une vie »

Benedicte Duthion (Service régional de l’inventaire et du patrimoine – Docteur université de Rouen) : « Entre lieux de mémoire et controverses. Simone de Beauvoir à Rouen »

Musée national de l’éducation – Centre de ressources, 6 rue de Bihorel, 76000 Rouen – Entrée libre (Renseignements : Nicolas.coutant@reseau-canope.fr)

Research paper thumbnail of « Plus romanesque et intéressé qu’un romancier : "L'Homme foudroyé" de Cendrars », SELF XX-XXI, Journée d’agrégation « Cendrars » (M.-P. Berranger et M. Boucharenc dir.), 12 octobre 2019, Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle, publication en ligne

Research paper thumbnail of D’une gêne persistante à l’égard de l’autofiction (dans « Je & Moi », dir. Philippe Forest, "NRF", no 598, octobre 2011, p. 53-67)

Research paper thumbnail of Autofiction et poétique (dans "Le Propre de l’écriture de soi", dir. Françoise Simonet-Tenant, Paris, Téraèdre, 2007, p. 25-30)

Jean Cocteau rapporte, dans un très beau récit autobiographique intitulé Portraits-souvenir, une ... more Jean Cocteau rapporte, dans un très beau récit autobiographique intitulé Portraits-souvenir, une anecdote qui me servira de fil conducteur au cours de cette communication : « Un jour que je lisais à Picasso une lettre d'insultes, il me dit : "C'est une lettre anonyme", et comme je lui montrais qu'elle était signée, il ajouta : "Peu importe. La lettre anonyme est un genre". » 26 La réponse de Picasso paraîtra certainement décevante, car trop proche de la simple tautologie -un genre est un genre. Reste que, même si l'anonymat est une règle constituante du genre « lettre anonyme », il ne suffit pas qu'une lettre d'insultes soit signée pour que la valeur régulatrice de cette catégorie générique soit invalidée. Cocteau désigne la lettre en fonction de son contenu thématique ; Picasso, quant à lui, la subsume à une classe de textes répertoriée, qui en fournit une définition et en explicite le sens. Le terme « lettre anonyme » ne correspond à rien de matériel ; il appartient simplement au répertoire des cadres disponibles pour tout acte de communication, quotidien ou artistique, et même si l'un des critères qui lui sont associés fait défaut, il n'en subsiste pas moins en tant que genre à part entière. À vrai dire, les positions de Picasso et de Cocteau ne sont pas loin de refléter deux pétitions de principe, ou deux attitudes, dont on trouverait peut-être les origines lointaines en remontant à l'opposition entre l'idéalisme platonicien et le réalisme aristotélicien. Mais je n'ai mentionné cette anecdote que parce qu'elle permet de trancher, arbitrairement il est vrai, toute une série de réflexions menées autour des textes à la première personne : les genres existent en dépit des innombrables infractions dont il peuvent faire l'objet. C'est bien ce que laisse entendre Marion Steiner, dans Le Dernier Métro de François Truffaut, lorsqu'elle déclare à son mari Lucas Steiner, après avoir lu la critique assassine que Daxiat 26 J. Cocteau, Portraits-souvenir, dans Romans, poésies, poésie critique, théâtre, cinéma, présentation et notes de Bernard

Research paper thumbnail of Où en est la réflexion sur l'autofiction ? (dans "Genèse et autofiction", dir. J.-L. Jeannelle et C. Viollet, Louvain-la-Neuve, Academia-Bruylant, 2007, p. 17-37)

Research paper thumbnail of Le procès de l’autofiction (dans "Études", no 419, septembre 2013, p. 221-230)

Research paper thumbnail of Marc Nichanian : le témoignage malgré tout ("Critique", n° 826, « Un siècle de génocide : mémoire, histoire, témoignage », mars 2016, p. 205-219)

Research paper thumbnail of Pour une histoire du genre testimonial (dans "Littérature", no 135, septembre 2004, p. 87-117)

H JEAN-LOUIS JEANNELLE, université paris iv-sorbonne Pour une histoire du genre testimonial La qu... more H JEAN-LOUIS JEANNELLE, université paris iv-sorbonne Pour une histoire du genre testimonial La question du témoignage relève de domaines aussi divers que ceux de la religion, du droit, de la psychanalyse, de la philosophie, de la sociologie, ou de la poétique. S'y croisent des questions qui excèdent largement les dimensions de cet article. C'est pourquoi nous envisagerons ici le témoignage non comme un acte d'attestation au sens large mais comme un modèle d'écriture volontairement circonscrit, dans sa forme comme dans son extension historique, à la représentation que s'en font communément les lecteurs contemporains.

Research paper thumbnail of Témoignage et modalités d’accréditation (dans "L’Accréditation des discours testimoniaux", dir. D. Legallois, Y. Malgouzou et L. Vigier, Toulouse, Éditions Universitaires du Sud, 2011, p. 23-34)

Research paper thumbnail of « Le conquérant mélancolique : Aragon et l’histoire littéraire », dans « L’Histoire littéraire des écrivains », "Lieux Littéraires", no 11-12, dir. Marie Blaise et Sylvie Triaire, Presses universitaires de la Méditerranée 2009, p. 123-137

Research paper thumbnail of “Ne croyez pas ici que j’écris mes Mémoires…” : L’Œuvre poétique d’Aragon ou la “mise en œuvre”  (dans "Recherches croisées Aragon/Elsa Triolet", no 8, dir. Corinne Grenouillet et de Maryse Vassevière, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2002, p. 139-156)

_______________________________________________________________ Avec les années, j'ai vu tant de ... more _______________________________________________________________ Avec les années, j'ai vu tant de choses qui n'avaient d'abord pas grand sens. Quand elles s'expliquent, après coup, on se sent un peu niais, on ne peut pas se mettre à faire le témoin de ce qu'on n'avait pas compris.

Research paper thumbnail of « De Gaulle et le “mémorable” de la guerre », "Les Temps modernes", no 661, « De Gaulle, la France et la littérature », novembre-décembre 2010, p. 98-115

A quoi tient l'indifférence que les spécialistes de littérature manifestent à l'égard des Mémoire... more A quoi tient l'indifférence que les spécialistes de littérature manifestent à l'égard des Mémoires de guerre, texte emblématique de ce genre né avec Commynes et où se sont illustrés de Retz, Saint-Simon, Chateaubriand ou Malraux ? Le plus souvent absent des ouvrages consacrés aux écrits de soi 1 , le récit du général de Gaulle a même suscité des réactions de franche hostilité lorsqu'il s'est trouvé au programme du baccalauréat de français en 2010. Les raisons de critiquer un tel choix, il est vrai, ne manquaient pas : la lecture du « Salut », troisième tome des Mémoires de guerre, appelle des connaissances historiques dont ne disposent pas (ou pas assez) les élèves de Terminale ; elle fait de plus inévitablement écho à l'actualité politique au risque de brouiller la frontière entre littérature et débats d'opinion ; enfi n elle porte sur la période qui suit la libération de Paris, où l'épique laisse place à des préoccupations politiques nettement moins enthousiasmantes. Reste que le principal argument avancé fut celui de la discipline : le texte du Général concernerait en priorité les historiens. En 1954 Claude Roy reconnaissait d'emblée l'auteur du premier tome des Mémoires, « L'Appel », comme un grand écrivain, héritier d'une tradition mémoriale ayant joué un rôle central en France depuis plus de cinq 1. On notera toutefois les quelques pages consacrées aux Mémoires de guerre dans le chapitre VI, « L'inspiration nationale », de La Littérature en France depuis 1945, publiée par Jacques Bersani, Michel Autrand, Jacques Lecarme et Bruno Vercier (éd. revue et augmentée, Paris, Bordas, 1974, pp. 120-123).

Research paper thumbnail of Le bac d’abord ! (Introduction au dossier "De Gaulle, la France et la littérature", dans "Les Temps modernes", no 661, novembre-décembre 2010, p. 3-17)

Research paper thumbnail of “Pour moi” : de Gaulle et l’assomption de soi (dossier « Historiens de soi », dir. Marc Hersant, dans "Écrire l’histoire", no 6, automne 2010, p. 137-146)

Research paper thumbnail of Écrire ad usum Delphini : de Gaulle et le genre des “Vies mémorables” (dans "Les Supports de la mémoire dans la littérature française contemporaine", dir. E. Beltaïef et S. Souabni-Jlidi, Univ. de Tunis, Faculté des sciences humaines et sociales, 2012, p. 139-152)

Les Mémoires, notait Albert Thibaudet, sont « toujours faits pour arranger une vie ad usum Delphi... more Les Mémoires, notait Albert Thibaudet, sont « toujours faits pour arranger une vie ad usum Delphini, c'est-à-dire à l'usage de la génération qui pousse et à qui il faut rendre des comptes 1 ». Témoigner de son temps, livrer un testament et rendre des comptes : tels sont bien les trois principaux gestes auxquels s'engage celui qui prétend écrire ses Mémoires. Et cela depuis les origines de ce genre : il y a là une singularité, qui suffit à le distinguer des autres modèles de récit de soi, dont la pratique et les formes en usage s'avèrent circonscrites à des époques précises. À l'inverse, de Commynes à de Gaulle, et en dépit des variations liées au contexte historique de production, les Mémoires ont pour particularité d'exercer les mêmes fonctions, notamment de valoir comme l'une des voies officielles de consécration pour les représentants de l'autorité politique, militaire ou symboliqueque le récit soit écrit par l'intéressé lui-même ou par un proche qui se fait le témoin de ses faits et gestes. Les « Vies mémorables » mettent en scène le mouvement d'exhaustion du sujet : un individu s'y fige sous une apparence extrêmement policée, allégée très souvent des scories de la vie privée et ressaisie selon les lignes de force d'une existence.

Research paper thumbnail of "Signés Malraux : André Malraux et la question biographique", sous la dir. de Martine Boyer-Weinmann et Jean-Louis Jeannelle Paris, Classiques Garnier, coll. "Rencontres", 2015

Ces dernières années, de nombreuses publications ont éclairé d’un nouveau jour la puissance conte... more Ces dernières années, de nombreuses publications ont éclairé d’un nouveau jour la puissance contemporaine du « mythe André Malraux ». N’est-ce pas lui qui décela dans Néocritique que l’individu avait atteint son apogée au XIXe siècle (« de Rousseau à Napoléon, de Napoléon à Zarathustra, de celui-ci à Barrès et à Gide »), et diagnostiqua que, « soufflé par la bombe atomique », celui-ci se dissipait « en nous léguant la biographie » ? Cette réflexion collective est placée sous le signe intellectuellement complice de Jean-François Lyotard et de son Signé Malraux. Est ici interrogé le rapport éminemment contradictoire, fait de fascination et de répulsion, que Malraux entretint à la question biographique, et la passion plus ambiguë encore que sa propre existence n’a cessé d’alimenter, au risque souvent de masquer la complexité de son œuvre littéraire.

Research paper thumbnail of Ce que le cinéma fait à la littérature (et réciproquement)

Research paper thumbnail of Écrivains-cinéastes

Dans le dialogue entre arts, rares sont les créateurs appartenant à égalité à deux sphères différ... more Dans le dialogue entre arts, rares sont les créateurs appartenant à égalité à deux sphères différentes. Dans les années 1930, des dramaturges (Pagnol, Guitry) et des romanciers (Giono, Malraux) développent une double compétence, puis dans les années 1960 Marguerite Duras et Alain Robbe-Grillet (sous la tutelle d’Alain Resnais) amorcent un processus de fusion entre les genres ou les pratiques. Les années 2000 constituent-elles un nouvel âge d’or des rapports entre littérature et cinéma ? Et dans quelle mesure ce temps s’inscrit-il dans le paysage européen ?

Les contributeurs de ce numéro feront apparaître la complexité de l’œuvre des principaux représentants de ce renouveau : des cinéastes passant à l’écriture (Catherine Breillat, Paul Vecchiali, Christophe Honoré ; Dai Sijie, Éric Rohmer, Jean-Luc Godard) ; des écrivains passant à la réalisation (Jean-Philippe Toussaint, Virginie Despentes, Philippe Claudel, Camille de Toledo, Eugène Green) ; des auteurs de BD se tournant vers le 7e art (Schuiten et Peeters, Enki Bilal) ; des croisements entre arts plastiques et vidéo (Sophie Calle, Valérie Mréjen) ; des cinéastes ou acteurs publiant leurs scénarios ou leurs essais critiques ; des auteurs mêlant littérature, documentaires et écriture de scénarios (Jérôme Prieur, Jérôme Beaujour).

Research paper thumbnail of Films à lire. Des scénarios et des livres

Les Impressions Nouvelles, 2019

Pourquoi publier des scénarios ? L’essentiel, le but véritable n’est-il pas le film auquel ils on... more Pourquoi publier des scénarios ? L’essentiel, le but véritable n’est-il pas le film auquel ils ont donné vie ? Publie-t-on un scénario par défaut, lorsqu’un film est resté à l’état de projet, afin que le désir de cinéma dont il était porteur ne tombe pas dans l’oubli ? Et lorsque le film a bien été réalisé puis diffusé, quel scénario publie-t-on, autrement dit quelle version ? Certains se demanderont même quel intérêt on trouve à lire un scénario : s’agit-il de retrouver le souvenir d’un film aimé, de comprendre « comment ça marche », d’apprendre à écrire d’autres scénarios, ou d’imaginer des films qu’on n’a pas vus, certains parce qu’ils n’ont pas été tournés ?

Décidément, il n’y a rien d’évident à la publication de scénarios de films. Pourtant, presque depuis l’origine du cinéma, ils ont été lus sous diverses formes (du traitement au découpage, ou du ciné-roman à la novellisation) et dans des buts très différents. C’est autour de cette question peu étudiée que se sont réunis des scénaristes et des chercheurs. Autour de Louis Delluc, Jean Renoir, Marcel Pagnol, Sergueï Eisenstein, Bruno Dumont, Olivier Assayas, Jacques Rivette, Bertrand Bonello, c’est tout une autre expérience du cinéma qui se déploie ici.

Research paper thumbnail of Jean-Louis Jeannelle, "Films sans images : une histoire des scénarios non réalisés de "La Condition humaine"", Paris, Editions du Seuil, coll. "Poétique", 2015

Research paper thumbnail of Philippe Roger, "Malraux et la Résistance : le roman qui manque", dans "Critique", n° 798, 2013, p. 870-888

Distribution électronique Cairn.info pour Editions de Minuit.

Research paper thumbnail of Journée d'agrégation "Simone de Beauvoir, "Mémoires d'une jeune fille rangée"" du 6 octobre 2018, organisée par JL Jeannelle à l'université Paris III-Sorbonne Nouvelle, avec le soutien de la SELF XXe-XXIe, THALIM et le CEREdI.

Journée d'agrégation "Simone de Beauvoir, "Mémoires d’une jeune fille rangée"" Date : 6 octobre ... more Journée d'agrégation "Simone de Beauvoir, "Mémoires d’une jeune fille rangée""
Date : 6 octobre 2018
Responsable : Jean-Louis Jeannelle (Université de Rouen), coordination : Marie-Hélène Boblet et Alain Schaffner pour la SELF XXe-XXIe, avec le soutien de l’UMR THALIM (Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle) et du CEREdI (Université de Rouen)

Éliane Lecarme-Tabone : « À propos de la nouvelle (inédite) de 1954 sur la mort de Zaza »
Marie-Françoise Lemonnier-Delpy : « Fille(s) et mère(s) »
Isabelle Grellet : « Simone de Beauvoir et Élisabeth Lacoin : destins croisés »
Jean-Louis Jeannelle : « Les ratées de la famille ».
Sandrine Vaudrey-Luigi : « Unité et valeur stylistiques des Mémoires d’une jeune fille rangée ».
Simon Bréan : « Beauvoir, démocrate et romanesque ».
Alain Schaffner : « Le corps dans les Mémoires d’une jeune fille rangée »

Une journée doctorale « Zaza , figure et traces » a eu lieu le vendredi 9 avril 2010 à l’Université Paris Diderot -Paris 7 organisée par Cécile Decousu (UFRLAC) sous la direction de Julia Kristeva (Université Paris 7). À l’occasion de l’étude des Mémoires d’une jeune fille rangée, nous en présentons ici le texte des communications, avec l’aimable autorisation des auteurs et en accord avec Cécile Decousu. Nous vous invitons aussi à vous reporter au site de l’association Elisabeth Lacoin.

« Zaza ressuscitée : reconnaissance beauvoirienne et reconnaissance familiale » Philippe Devaux
« D’Anne à Zaza : une lente résurrection » Éliane Lecarme-Tabone
« “Qui n’a-t-elle pas été ?” L’impossible fiction » Cécile Decousu
« Figure de Zaza : écriture et réécriture » Anne Strasser
« Euphorion sans Théagène : Elisabeth Lacoin par elle-même »
« Zaza en archives » Mauricette Berne

Research paper thumbnail of DES SCÉNARIOS ET DES LIVRES

Research paper thumbnail of Affiche et programme de la journée d'étude « La mort de l'auteur » (Rouen, 4 février 2019)

Cinquante ans après « La mort de l’auteur » de Roland Barthes qui proclamait une symétrique « nai... more Cinquante ans après « La mort de l’auteur » de Roland Barthes qui proclamait une symétrique « naissance du lecteur », ce sont aux morts réelles et non métaphoriques des auteurs et autrices (tous arts confondus : bande dessinée, beaux-arts, chanson, cinéma, littérature, performance, télévision, théâtre, etc.), et à leurs conséquences sur la création et la réception des œuvres qu’entend s’intéresser ce numéro de Fabula-LhT.

Research paper thumbnail of L'auteur est mort. Vive l'auteur !

Jeannelle, J., & Bionda, R. (2020). L’auteur est mort : vive l’auteur ! Fabula-LhT : littérature, histoire, théorie, 22. https://doi.org/10.58282/lht.2320.

Cet article introduit le numéro de Fabula-LhT intitulé La Mort de l’auteur, qui s’intéresse aux c... more Cet article introduit le numéro de Fabula-LhT intitulé La Mort de l’auteur, qui s’intéresse aux conséquences de la mort réelle des auteurs et autrices (d’arts plastiques, de cinéma, de littérature et de théâtre) sur la production et la réception de leurs œuvres.
À la faveur de l’examen de deux cas récents — The Death of James Lee Byars (1994) de James Lee Byars et Riding with Death (1988) de Jean‑Michel Basquiat tel qu’exposé dernièrement à la Fondation Louis‑Vuitton à Paris —, il s’agit d’identifier quelques‑uns des enjeux herméneutiques posés par les œuvres ultimes et/ou par l’œuvre tardif, en tant que ces œuvres sont susceptibles de devenir le « lieu d’une remise en question de toute une vie et de toute une œuvre » (selon le mot du conservateur Jean‑Louis Prat). De fait, ce phénomène à dire vrai ordinaire conduit parfois à des réinterprétations spectaculaires à partir desquelles les limites de l’interprétation méritent sans doute d’être réinterrogées. En réactualisant la question de la « relation biographique », la mort réelle d’un auteur peut agir sur son œuvre à la manière d’un puissant levier herméneutique, en offrant l’occasion d’appréhender la vie et l’œuvre comme relevant d’une même poïesis ou d’une même praxis.
Lors de la phase de préparation du présent numéro, une nette et inhabituelle proportion des propositions de contribution reçues concernaient des œuvres postérieures aux années 1980. Cela invite sans doute à interroger l’importance, pour certains corpus contemporains, de la perception des auteurs moins comme « instance » ou « fonction » que comme des sujets fragiles, dont la disparition prévisible modifie à la fois l’élaboration et la signification des œuvres.

Research paper thumbnail of L'être en devenir : identité, sexualité et normes sociales : autour des œuvres de Marivaux, Balzac et Beauvoir

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Oct 17, 2018

Research paper thumbnail of L'invisible "Condition humaine d'André Malraux : pour une théorie de l'"inadaptation

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2021

Research paper thumbnail of La mort de l'auteur

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Jun 1, 2019

Research paper thumbnail of Nouer avec Michèle Le Dœuff

Presses universitaires de Rennes eBooks, Oct 1, 2020

Research paper thumbnail of Pourquoi faut-il être absolument moderne ?

Acta Printemps 2005

Cet article est un compte-rendu du livre : Les Arrière-gardes au xxe siècle. L’autre face de la m... more Cet article est un compte-rendu du livre : Les Arrière-gardes au xxe siècle. L’autre face de la modernité esthétique, sous la direction de William Marx, Paris : Presses Universitaires de France, 2004, 242 p., EAN 9782130543381.

Research paper thumbnail of Malraux et la "quatrième révolution culturelle" : temps et contremps de l'audio-visuel

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2018

Research paper thumbnail of Ecrits de soi : aux limites de l'adaptation

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2021

Research paper thumbnail of Michel Charles : A refuser le formalisme, on s'interdit de comprendre bien des émotions

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Oct 1, 2018

Research paper thumbnail of 1933, "La Condition humaine

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2018

Research paper thumbnail of Résistance du roman

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Apr 1, 2013

Research paper thumbnail of Entretien avec Catherine Coquio

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2018

Research paper thumbnail of Les Mouches" de Jean-Paul Sartre

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 1998

Research paper thumbnail of Beauvoir et le récit d'enfance : une lecture des "Mémoires d'une jeune fille rangée

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Dec 4, 2018

Research paper thumbnail of Le témoignage à l'âge de la décolonisation : Chronique d'un été, cinéma-vérité et émergence du survivant de l'Holocauste

Littérature, 2006

... Son histoire de déportation et de retour dans une famille brisée fait écho à de nombreux autr... more ... Son histoire de déportation et de retour dans une famille brisée fait écho à de nombreux autres témoignages sur les camps, notamment le troisième volume de la trilogie de Charlotte Delbo, Auschwitz et après, dans lequel Delbo réunit une série de courts récits de survivants ...

Research paper thumbnail of L'adaptation documentaire : oxymore théorique ou extension du domaine?

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2017

Research paper thumbnail of Un audioportrait : Les Années déclic de Raymond Depardon

Research paper thumbnail of « Frères du bourreau : Les Bienveillantes de Jonathan Littell comme Mémoires feints » dans Incidence (revue de philosophie, de littérature et de sciences humaines et sociales), n° 15, « Vérité, fiction : faire vrai ou dire juste ? », dir. Bernard Vouilloux, printemps, 2020, p. 181-213

Le Centre pour la Communication Scientifique Directe - HAL - Université Paris Descartes, 2020

Research paper thumbnail of Se réorienter dans la pensée : femmes, philosophie et arts, autour de l’œuvre de Michèle Le Doeuff

Qu’est-ce que « se réorienter dans la pensée », se demande Michèle Le Doeuff ? C’est « s’apercevo... more Qu’est-ce que « se réorienter dans la pensée », se demande Michèle Le Doeuff ? C’est « s’apercevoir qu’on est en train de se promener quelque part avec une carte qui n’est pas la bonne parce qu’on n’a pas pris en compte où l’on était ». Si s’orienter suppose un principe subjectif pratique et universalisable (distinguer sa droite et sa gauche afin de se situer dans l’espace), se réorienter implique à la fois une intention et une décision plus fondamentales afin, par le trajet fixé, de faire surgir l’espace de référence que l’on se donne. L’Étude et le Rouet est le récit d’un tel geste, à savoir reconnaître qu’en dépréciant les femmes, en les condamnant à n’être qu’un simple objet de réflexion, voire en les excluant, la philosophie « échoue à tenir sa promesse fondamentale de constituer une rationalité-en-commun ». Or s’être malgré tout voulue philosophe, plus encore, avoir fait de cette position marginale l’un des principaux objets de sa pensée, telle fut la réorientation décisive en...

Research paper thumbnail of Simone de Beauvoir, « Mémoires d’une jeune fille rangée »

Presses universitaires de Rennes eBooks, 2018

International audiencePremier volume en 1958 d’un cycle qui s’achèvera avec La Cérémonie des adie... more International audiencePremier volume en 1958 d’un cycle qui s’achèvera avec La Cérémonie des adieux en 1981, Mémoires d’une jeune fille rangée raconte l’histoire d’une libération et l’accomplissement d’un destin, confirmant ainsi l’intuition de la jeune Simone de Beauvoir qui notait dans son journal intime le 30 mai 1929 : « Quelle plus belle oeuvre que cette destinée que j’accomplis ? » De son éducation dans un milieu familial et scolaire étouffant, Beauvoir a tiré une analyse précise de l’arrangement des sexes, implacable police des genres dont résultait pour les jeunes filles de la bourgeoisie catholique une fausse alternative : le mariage « arrangé » ou le célibat forcé. Portée par un formidable goût de bonheur, la jeune Simone passe du Cours Désir aux amphithéâtres de la Sorbonne et conquiert son autonomie grâce à l’agrégation de philosophie : à chacune de ces étapes, ce sont dans les mots, lus et écrits, qu’elle trouve les ressources nécessaires à son parcours – au prix néanmoins d’un sacrifice : celui de son amie Zaza, morte de n’avoir pu s’arracher à son milieu, mais à laquelle l’autobiographie confère une nouvelle existence faites de mots. Au coeur de ce récit de vocation se trouvent les linéaments d’une pensée où l’existence s’appréhende à travers le corps et les aspirations d’un être sexué.Synthèse des travaux les plus récents sur l’oeuvre autobiographique de Simone de Beauvoir, le présent volume rassemble les contributions des meilleurs spécialistes, parmi lesquels les artisans de l’édition des Mémoires dans la Bibliothèque de la Pléiade. Il a été pensé comme un ouvrage complet et incontournable pour permettre la réussite des candidats à l’agrégation de lettres

Research paper thumbnail of De la poétique avant toute chose

Critique, Nov 5, 2018

International audienceDe la poétique avant toute chose... Toujours l'exception française ? Ta... more International audienceDe la poétique avant toute chose... Toujours l'exception française ? Tandis que les études littéraires, un peu partout dans le monde, succombent aux sirènes des cultural studies , la « poétique », chez nous, fait de la résistance. Certes, elle a ses détracteurs qui pointent du doigt dérives dogmatiques ou dommages pédagogiques. Ce qui frappe, cependant, c'est sa vitalité. L' un de ses pères fondateurs, Gérard Genette, nous a quittés au printemps dernier ; mais l'« aventure poétique » continue, comme l'atteste, en cette année 2018, une belle salve de publications. Critique n'a cessé d'accompagner l'oeuvre de Gérard Genette et Marc Cerisuelo le fait encore une fois, dans ce numéro, évoquant Postcript - l'ultime codicille. En présentant l'état le plus actuel d'un champ d'études qui lui doit tant, nous croyons lui rendre un hommage tel qu'il l'eût souhaité. Dans Composition, Michel Charles, directeur de la revue Poétique, boucle une entreprise théorique d'une rare cohérence, commencée il y a plus de quarante ans avec Rhétorique de la lecture : Andrei Minzetanu en rend compte et Michel Charles, dans un entretien, revient sur son par-cours intellectuel. Fictions à la chaîne de Matthieu Letourneux et Logique du genre dramatique de Jean de Guardia se situent aux pôles opposés du spectre littéraire. Matthieu Letourneux en explore les marges : la littérature sérielle des xix e et xx e siècles ; Jean de Guardia vise son centre tou-jours incandescent : le trio Corneille-Racine-Molière. Marie-Ève Thérenty et Jean-Louis Jeannelle nous présentent leurs ouvrages qui revendiquent et renouvellent tout à la fois la démarche poéticienne. Et si Michel Murat se réclame, quant à lui, de l'histoire littéraire, c'est pour en bousculer énergiquement l'épistémologie, y puisant de nouvelles ressources formelles, comme le souligne Christophe Pradeau. Les formes sont le point vif de notre intelligence des textes. Un sens « pur », indépendant de ce qui nous permet de l'appréhender (organisation, effets de répétition ou de variation, scansions, etc.), voilà précisément ce qui n'existe pas. La leçon de cet ensemble, conçu par Jean-Louis Jeannelle, est tonique : la poétique n'a pas dit son dernier mot. Et nous devrions non pas nous inquiéter, mais nous féliciter de cette exception française