« Gleb Pavlovski, l’apprenti-sorcier au blouson vert », suite et fin (Feuilleton : "Ils ont fait le poutinisme") (original) (raw)

Malentendu à Moscou. Un nouveau chapitre détourné de l’autobiographie beauvoirienne ?

In 2013, L'Herne in Paris decided to publish Simone de Beauvoir's novella entitled Malentendu à Moscou as a separate book. This short story had previously been published in a French journal in 1992. This novella was to be part of the collection of short stories entitled La femme rompue (The Broken Woman), published in 1968; however, it was eventually excluded from the final volume. During a stay in Moscow in the mid-1960s, a married couple of left-wing intellectuals who have always been supportive of Socialism and the Soviet Union find themselves challenged on a personal level and in a political sense and attempt to find a solution to their private and ideological crisis. This novella, if it indeed makes references to autobiographical events in Beauvoir's existence, cannot simply be considered as an autobiographical fiction since the author ensures that all facts and characters are fictionally transposed, and that a true literary recreation is at work. However, it would be hasty to read this story as yet another example of the author's transpositional technique. Obvious parallels exist between the fictional story and the author's experiences. Can one therefore infer that Malentendu à Moscou should be read as another deviated chapter of the Beauvoirian autobiography? Can one also read it as a fake fictional work, as an autobiography in disguise? Or, could one consider it as a complex narrative which somehow transcends literary genres by echoing without imitating?

André Pavlovsky et les feux de Saint-Jean-de-Luz, la modernité aux accents néo-basques

Livraisons d histoire de l architecture, 2012

Au début des années 1930 la dangerosité de la baie de Saint-Jean-de-Luz et les accidents de navigation qui s'y produisent régulièrement, amènent les autorités locales à demander au ministère des Travaux publics de rapides modifications de l'ensemble du système d'éclairage et de balisage de la zone. Celui-ci se compose à cette époque de plusieurs éléments distincts : les deux feux d'alignement rouges situés sur les hauteurs de la colline de Sainte-Barbe au Nord-Est de la baie, les deux feux d'alignement verts de Saint-Jean-de-Luz et le feu fixe du port de Socoa à Ciboure (ill. 1). Ill. 1 : Extrait de l'état de l'éclairage des côtes de France au 1 er janvier 1930 concernant la baie de Saint-Jean-de-Luz, détail Carte imprimée avec ajouts à l'encre et au lavis, Arch. nat., F 14 20202 Cl. O. Liardet. 4 Ces feux, alimentés au pétrole, ne présentent qu'une portée relativement faible. Les feux verts d'alignement, destinés à guider l'entrée en rade de Saint-Jean-de-Luz, sont considérés comme l'une des priorités du nouveau dispositif. Depuis 1870, le feu aval, placé sur la jetée de Saint-Jean-de-Luz sur la rive droite de l'embouchure de la Nivelle, est protégé par une cabane en tôle de deux mètres de hauteur. Le feu amont, dit aussi feu de Ciboure, est situé à 410 mètres du précédent, en bordure de la route nationale n o 10. Un feu provisoire fut établi en 1870 sur un échafaudage en bois avant d'être remplacé en novembre 1872 par une tour en maçonnerie (ill. 2). André Pavlovsky et les feux de Saint-Jean-de-Luz, la modernité aux accents né...

Une histoire de la folie à l’Âge d’argent (le Démon mesquin de Fedor Sologub)

Modernités Russes

Une histoire de la folie à l'Age d'argent (le Démon mesquin de Fedor Sologub) Catherine Géry Jusqu'à ce que dans les années 1980 la vague de « чернуха » n'ait rendu ce type de caractère tristement banal, le professeur Peredonov, l'anti-héros du Démon mesquin de Fedor Sologub, était sans doute le personnage le plus radicalement mauvais de toute la littérature russe. Pour reprendre la formule d'un critique qui voyait en lui un ancêtre direct du Monsieur Ouine de Georges Bernanos, Peredonov est « la matrice parfaite de tous les petits bourreaux enfantés par la marâtre modernité » 1. En accord avec l'oxymore implacable du titre (« démon mesquin »), le mal passe ici par le prisme de la banalité et de la médiocrité 2. C'est d'un mal quotidien qu'il s'agit, un mal humain qui porte un nom dans la terminologie médicale: le délire. Démonisme et folie ordinaire ont en effet partie liée dans cette oeuvre exemplaire du décadentisme russe 3. En ce qu'il reprend les thèmes et l'esthétique du romantisme pour les pervertir ou les inverser, le décadentisme peut être défini comme un néo-romantisme. Aussi chez Sologub le diable est un vandale qui tente de convaincre le monde de son existence en cassant et en salissant les objets, ou en dénonçant et en sadisant les hommes ; quant à la folie, elle n'est plus le signe d'élection des maudits de la littérature ni la propédeutique d'une intériorité mise à mal par un réel bas et trivial par définition, car n'ayant d'existence que comme contre-modèle de l'idéal. Elle est ce réel bas et trivial. Dans un roman ou le délire est à la fois sjužet et fabula, matériau, intrigue et procédé littéraire, Sologub donne à voir à son lecteur un monde clos et autosuffisant, mais aussi un monde malheureux, dissocié et souffrant, un monde étranger à lui-même et privé de finalité, en d'autres termes un monde qui aurait revêtu les attributs complémentaires du solipsisme et de la psychose.

« Melmoth, l’homme errant » d’Elisabeth Kouzmina-Karavaeva : une tentative de mystère

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2006

La culture de l'âge d'argent russe est marquée à la fois par un fort sentiment eschatologique de fin du monde, par une soif de transfiguration de la vie et de l'art (ou de la vie par l'art, avec l'idée d'une fusion de l'art et de la vie), et enfin par une recherche de synthèse des arts. Le mystère réunit tous ces éléments, à l'image de la synthèse liturgique qui en est à l'origine et dans laquelle « toutes les muses se réunissaient dans un seul choeur », d'après l'expression de Viatseslav Ivanov. Il revient ainsi dans la culture russe du début du XX s. à travers divers arts : la musique (A. Scriabine, N. Rimski-Korsakov 1), la danse (« eurythmie » de Marguerite Volochine 2 , les ballets de Serge Diagilev 3), la peinture (N. Kandinsky intitule une de ses expositions « Parler du mystère en langage du mystère »). De multiples mystères littéraires attirent également l'attention : F. Sollogoub, La Liturgie pour moi (1907), les « mystère apocalyptique » de V. Brusov : Terre. Scènes de la vie future (1904) et de A. Belyi : Celui qui est venu (1903), ou encore le « néomystère » de A. Remizov l'Action diabolique (1907). A. Blok, après avoir traduit Le Miracle de Théophile de Rutebeuf (1907), propose sa propre vision du mystère dans la Rose et la Croix (1912). Dans ce contexte et parmi ces noms prestigieux, je voudrais évoquer un nom moins connu mais tout aussi caractéristique pour la culture russe de l'âge d'argent : celui d'Elisabeth Kouzmina-Karavaeva, qui a débuté comme poète-symboliste à L'Atelier des poètes de Serge Gorodetskij, qui a fréquenté les salons de Viatseslav Ivanov, et dont la correspondance avec Alexandre Blok, auquel la liait une grande amitié, porte la marque d'une profonde spiritualité. Dans les années 20 elle émigre à Paris où elle est deviendra moniale sous le nom de mère Marie et c'est dans le camp de concentration Ravensbrück, qu'elle trouvera la « fin de feu » (« конец огнепальный») qu'elle pressentait et attendait dès ses premiers recueils poétiques, Les vestiges scythes (Скифские черепки, 1912), Ruth (Руфь, 1916), et dont on trouve l'écho dans le texte sur lequel je me concentrerai aujourd'hui : Mel'mot le Vagabond. Ce poème, écrit dans les années 10, à l'âge de 20 ans environ, n'a été publié qu'en 1986 dans Pamiatniki koul'toury 4 , à partir d'un tapuscrit conservé. Plusieurs versions du texte récemment retrouvées dans les archives parisiennes de la poétesse permettent aujourd'hui de compléter cette édition.

Oleg de Normandie - 2 : le fantasme des Mérovngien et des Wisigoths défenseurs des païens

Les inventions identitaire de Pagan TV et de son auteur Oleg de Normandie, 2022

Dans une première partie, nous avons vu qu'Oleg de Normandie, et sa chaine Pagan;tv invente à des fins identitaires. Dans ce second volet, nous mettons en avant le fait que cet auteur invente une histoire du haut Moyen âge, dans lequel les Mérovingiens seraient les défenseurs des druido-odinique contre l'église de Rome. Ainsi, le baptême de Clovis serait une invention et l'arianisme une religion mélangeant odinisme et christianisme. Encore une fois, l'objectif d'Oleg de Normandie est de mettre en avant une vision identitaire du Moyen âge.