De l’autogestion revendiquée à la nationalisation imposée (original) (raw)
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Une identité imposée, une identité revendiquée
Cahiers de la Méditerranée, 2009
et essaya lui-même d'apprendre cette langue. Les mudéjares l'appréciaient beaucoup, au point de le nommer « el santo alfaqui ». Cette politique, qui était lente et n'apportait pas de résultats immédiats, profita à la Couronne le temps de la repopulation du royaume. Une fois les vieuxchrétiens installés sur le territoire, il fallait passer aux choses sérieuses et accélérer le processus de conversion des infidèles. L'identité de l'Espagne passait alors, et avant tout, par son identité religieuse, et il était impensable de laisser des sujets dans l'erreur et le péché. En , Ferdinand et Isabelle arrivèrent à Grenade, accompagnés du cardinal Cisneros. Ce dernier commença son programme de conversion par les elches, ou renégats, c'est-à-dire les chrétiens convertis à l'Islam. Si, au début, la pression qu'il exerçait envers les mudéjares était modérée, il n'en est pas moins vrai que, très vite, ces derniers se virent menacés. De plus, les conditions accordées dans les Capitulations n'étaient pas respectées par les vieuxchrétiens. Les premiers conflits ne tardèrent pas, et en , les musulmans de l'Albaicín, quartier de Grenade, se révoltèrent. Le mouvement de rébellion s'étendit aux Alpujarras ; il fut vite étouffé, mais eut des conséquences tragiques pour les mudéjares : les autorités avaient désormais l'excuse et l'opportunité de rompre officiellement le pacte, puisque les musulmans venaient de le faire. Le décret du février mit fin à une attitude de tolérance ou du moins d'indulgence : les musulmans devaient se convertir à la religion catholique ou ils seraient expulsés du territoire. Si beaucoup choisirent le chemin de l'exil, plus nombreux furent ceux qui décidèrent de rester sur la terre de leurs ancêtres, dans leur « nation ». La figure du mudéjar avait disparue, du moins le vocable ne devait plus s'utiliser ; le statut juridique du musulman avait changé. En « acceptant » le baptême, le musulman espagnol passait à une autre réalité : il était nouveau-chrétien ou nouveau-converti, et on finira par l'appeler morisque. Je dis bien « on finira par l'appeler », car l'emploi de ce terme ne fut pas immédiat, et je pense important de le souligner. Lorsque l'on utilise le terme « nouveauchrétien » ou « nouveau converti », ce qui est mis en évidence est le concept de religion, la religion des chrétiens. Par le baptême, le nouveau chrétien est accueilli au sein de la religion et de la communauté chrétiennes. On croit à la conversion, on a effacé l'infidèle. D'après les recherches effectuées jusqu'à présent par le professeur Bernard Vincent, le terme « morisque » apparaîtrait pour la première fois dans un édit de la ville de Baza, daté du septembre. Mais ce n'est vraiment qu'au milieu du e siècle que le terme « morisque » est à l'apogée de son utilisation ; parallèlement, les autres termes tombent en désuétude. Si l'on consulte le Dictionnaire de la Real Academia Española, nous voyons que « morisco, ca » est un adjectif dérivant de « moro » auquel on ajoute «-isco ». Comment cet adjectif, employé à l'origine pour caractériser des objets de la culture
Démocratie contre capitalisme. Le retour de l'autogestion ?
Politique, Revue de débat, n° 43, Bruxelles, 2006
Une approche critique du capitalisme contemporain. Son point de départ est que sous le néolibéralisme, la démocratie perd chaque jour de sa substance. Faire face à la crise démocratique contemporaine, c’est promouvoir son élargissement, jusque dans la sphère économique. Car il n’est pas vrai que le régime actuel soit le seul où soient compatibles libertés démocratiques et efficacité économique.
Autodétermination interne et décolonisation
Le pivot du développement du droit international a été le principe de la souveraineté des États. Cette construction politique westphalienne de l'Étatnation envisage ce dernier comme un corps politique titulaire de l'intégralité du pouvoir décisionnel et s'opposant à toute démarche susceptible de remettre en cause son intégrité territoriale et politique. Les prémisses du droit international furent donc axées sur les droits et devoirs des États indépendants et uniquement au regard de leurs interrelations, sans considération pour « le visage de l'humanité qui se trouvait audelà ». Cependant, deux évolutions politicojuridiques sont venues altérer cette doctrine de la 1 souveraineté étatique. Le processus de décolonisation initié dès les années milleneufcentcinquante ( I ), puis le développement des droits de l'Homme ( II ) ont, par la même occasion, permis de remodeler le concept d'autodétermination.
De l'autocensure aux mobilisations
Revue Francaise de Science Politique, 2011
Prendre la parole en ligne en contexte autoritaire Séverine Arsène Presses de Sciences Po | Revue française de science politique 2011/5 -Vol. 61 pages 893 à 915 Distribution électronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po. © Presses de Sciences Po. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info -iep_paris --193.54.67.91 -18/10/2011 16h10. © Presses de Sciences Po Document téléchargé depuis www.cairn.info -iep_paris --193.54.67.91 -18/10/2011 16h10. Introduction : pour dépasser le déterminisme technique A près les manifestations en Iran en 2009, le renversement des présidents tunisien et égyptien de début 2011 a donné une actualité toute particulière à la question du rôle d'Internet dans les mobilisations en régime autoritaire. En effet, ces événements sont souvent qualifiés de « révolution Twitter » ou « Facebook ». Internet a pu apparaître au premier abord comme la cause principale de ces « révolutions ». Cette vision fait écho à de nombreux travaux publiés ces dix dernières années, qui sont fortement marqués de déterminisme technologique et imprégnés d'un idéal de démocratisation.
L'Ukraine et la question de l'autogestion
L'Ukraine et la question de l'autogestion, 2023
Dans son rapport d'activité de 2022, le Sotsialnyi Rukh (Mouvement social) soulignait que « La société civile a été contrainte de remplir le rôle de l'État et, au lieu d'attendre une assistance plus spécifique, d'assumer presque toutes ses fonctions sociales. ». Quelques mois plus tôt, en septembre 2022, lors de sa conférence de Kyiv, cette organisation expliquait que « la guerre a conduit à de nouvelles formes d'auto-organisation et de politique populaire. La mobilisation du peuple sur la base de la guerre de libération nationale a renforcé le sentiment d'implication populaire dans une cause commune et la conscience que c'est grâce aux gens ordinaires, et non aux oligarques ou aux entreprises, que ce pays existe. La guerre a radicalement changé la vie sociale et politique en Ukraine, et nous ne devons pas permettre la destruction de ces nouvelles formes d'organisation sociale, mais les développer ». Parmi les revendications mises en avant par la conférence, Sotsialnyi Rukh mettait en avant « En particulier, la nationalisation des entreprises clés sous contrôle ouvrier et public est nécessaire. Introduction de l'ouverture des livres de compte dans toutes les entreprises, quelle que soit la forme de propriété et d'implication des salariés dans leur gestion, création d'organes et de comités élus séparés pour la réalisation de ce droit. »1 De son côté, Katya Gritseva, membre de cette organisation, dans une interview donnée, lors de son passage à Paris, à la revue française Contretemps2, observait que « Beaucoup de gens sont volontaires, ils s'engagent dans l'aide mutuelle, créent des organisations extra-étatiques pour pallier les carences d'un État peu préparé à une telle situation. Cette dynamique d'auto-organisation est contradictoire avec le retour des conservateurs, voire de l'extrême droite. Pour la gauche il agit d'agir en faveur de cette dynamique, d'aider les travailleurs, les gens, sans prétendre leur donner des leçons à la manière des staliniens». Ksénia de QueerLab à la question sur l'autogestion en Ukraine nous répondait « Oui, la pratique de l'autogestion est généralisée. En Ukraine, ce sujet est discuté et est pertinent, car tout le monde est impressionné par le phénomène d'auto-organisation de diverses équipes, de volontaires, d'activistes, dont la montée est devenue perceptible avec le début d'une guerre à grande échelle ! Notre équipe est également autogérée, chacun s'engage et coordonne la direction. En outre, adhérant à la structure horizontale, nous n'avons pas de chefs » ou de patrons. »0 Ajoutons que de nombreux observateurs occidentaux surpris par la remise en route si rapide des chemins de fer ukrainiens après des bombardements russes, en concluaient que des entreprises privées n'auraient jamais pu réaliser ces exploits ni si efficacement organiser l'évacuation des réfugiés. L'association Autogestion remarquait (11 mars 2022) que « La guerre a confirmé pour les uns, révélé à d'autres, renforcé en tout cas, l'existence d'une solidarité nationale et surtout provoqué une auto-organisation populaire. À l'initiative des travailleurs, la reconversion de la production de nombreuses entreprises pour soutenir l'effort de guerre a été organisée… Municipalités, administrations locales, groupes d'habitants organisent ensemble la vie quotidienne, le ravitaillement, les soins, les évacuations. » Cette capacité d'auto-organisation de la société civile ukrainienne a été et reste une des clefs de sa résistance à l'agression impérialiste russe. Dans une situation de guerre, il peut apparaître surprenant que les exploités et dominés aient décidé de prendre leur vie en main, alors que leur situation pouvait apparaître désespérée et que la résignation ou la détresse pouvaient les tétaniser. Mais c'est souvent dans des situations de crise aigüe que les travailleurs décident de s'occuper de « l'administration des choses » (F. Engels) lorsque l'État est incapable de répondre à leurs besoins. Toutes proportions gardées, et sans tomber dans l'anachronisme, on peut penser aux travailleurs argentins, qui confrontés aux licenciements
L'autogestion. Une expérience qui n'a pas dit son dernier mot
2012
L'autogestion une expérience qui n'a pas dit son dernier mot par Alice croquet • 2012 P arler d'autogestion implique inévitablement d'en référer aux origines de ce mouvement social et politique qui, s'il connut l'échec dans sa forme originelle idéale, continue toutefois d'inspirer et d'alimenter bien des pratiques de fonctionnement. Commençons par replacer l'autogestion et ses fondements historiques dans la lignée de différents courants idéologiques pour aborder ensuite les contours et principes organisationnels actuels. Histoire d'une utopie et d'une prAtique Au xix e siècle : les fondements idéologiques L'idée d'autogestion émerge au xix e siècle comme un vaste mouvement social contestataire face à la montée en puissance du modèle industriel et des dégâts qu'il occasionne. Fondée sur des principes anti-hiérarchiques et égalitaires, elle traduit la lutte des travailleurs « pour l'amélioration des conditions d'existence de la classe ouvrière, pour la protection du travail, pour l'élargissement des droits démocratiques à l'homme dans l'entreprise à l'intérieur de l'État bourgeois 1 […] » et pour la réappropriation de la gestion de l'entreprise par ses travailleurs et de l'État par tous les citoyens.
Démocratie et nationalisme à l’heure de la mondialisation
Cahiers de recherche sociologique, 1995
Cet article examine certains des arguments antisouverainistes qui ont cours dans le débat référendaire de 1995. Contrairement à 1980, la démocratie et la mondialisation sont cette fois au coeur des discussions. L’un des arguments antisouverainistes les plus souvent invoqués a trait à l’antinomie irréductible entre la démocratie et l’état-nation, celui-ci exigeant une soumission complète des intérêts individuels au bon vouloir collectif. Un autre argument a trait à l’intensité des préférences pro-fédéralistes des antisouverainistes, une intensité plus grande que celles de leurs opposants et qui obligerait ces derniers à céder le pas. Finalement, l’article examine la proposition voulant que la mondialisation impose une pression à la fédéralisation.