Lacoue- Labarthe entre Benjamin et Heidegger : Dictamen et péril théologico-politique. À propos de Philippe Lacoue-Labarthe, Heidegger, la politique du poème, Galilée, Paris, 2002 (original) (raw)

Un lyrisme sans sujet -Lacoue-Labarthe et Celan

2010

C'est comme un au-delà du courage cette manière qu'a Lacoue-Labarthe d'affronter un problème immense qui en est en même temps un autre puis un autre, si bien qu'un immense noeud de problèmes se présente soudain. Il faudrait plusieurs vies pour dénouer ce qui s'est noué si vite. Il faudrait plusieurs vies solitaires, ou une seule vie, mais à plusieurs ; le lecteur se sent ainsi appelé à se mêler aux membres de cette communauté nouée, au-delà du partage d'une langue, par la seule nécessité de dénouer ; mais il l'ose à peine ; et s'il l'ose, c'est parce que Lacoue-Labarthe s'y présente lui-même comme un nouvel arrivant, précédé par bien d'autres. C'est aussi parce que parmi ces problèmes, l'un d'eux est plus repérable, plus mineur également, même s'il est élevé au-dessus de lui-même, s'il accède à une immensité qui le rend étranger, presque intriguant. Voici le noeud de Poésie et expérience : « La question que je me pose est donc bien celle du sujet : cancer du sujet, ego ou masses. Parce que c'est d'abord la question de qui pourrait, aujourd'hui (heute), parler une autre langue que celle du sujet et témoigner de-ou répondre à-l'ignominie sans précédent dont fut-et reste-coupable l' « époque du sujet ». Mais parce que c'est aussi, indissociablement, depuis au moins Schlegel et Hegel, la question du lyrisme : le lyrisme est-il ou non un genre « subjectif » ? Et c'est en somme la question de la singularité bannie du sujet, ou cela revient au même, la question de l'idiome, du pur idiome, si une telle chose peut exister… Une telle question, vous le pressentez-et je change à peine l'angle de visée-, n'est pas autre chose que la question du rapport entre poésie et pensée, Dichten und Denken, puisque c'est dans cette langue, justement, qu'elle s'est posée » 1 .

Renoncer le poème. Trois mots sur "Phrase" de Philippe Lacoue-Labarthe

Colloque "Contre la poésie, la poésie", 2021

« Phrase » n'en finit pas de renoncer. C'est, en effet, que non seulement les premières « Phrase » du livre de Lacoue-Labarthe ont paru d'abord dans un volume collectif au titre significatif : « Haine de la poésie » ; mais aussi que le livre - le livre et non pas le recueil, le livre et non pas l'œuvre, et non pas même le livre - pose explicitement, du début à la fin, la question du renoncement.

Heidegger, Benjamin, et l'élite des "penseurs"

2023

Extrait de "Malaises, remarques hérétiques sur Benjamin, Heidegger et le brun-rouge" (inédit) Il s'agit ici de proposer quelques pistes pour répondre à la question suivante : au-delà même du cas de Giorgio Agamben, par quels genres d'injonctions ces deux penseurs radicaux entendent façonner une élite philosophique? Quels critères s'imposent sourdement à ceux qui les lisent, et qui se verront vertement insultés et méprisé s'ils ne cèdent pas à ces tentatives plus ou moins feutrées d'intimidation?

Lacan avec Heidegger : le dépassement du paradigme linguistique

Exil – Transfer – Gedächtnis / Exil – Transfert – Mémoire

Lacan a fait partie des premiers lecteurs français de Heidegger. Il l'a peut-être découvert grâce au cours donné par Jean Wahl 1 en Sorbonne de janvier à juin 1946 : Jean Wahl y condensait ses notes sur le séminaire de Heidegger suivi à Fribourg en 1928; 2 peut-être aussi à l'occasion des quatre conférences d'Emmanuel Lévinas sur Le Temps et l'Autre, données en 1946-1947 au Collège philosophique. Lacan a voulu rencontrer Heidegger, l'a rencontré finalement. Lorsque Heidegger se rend en France, en 1955, pour ainsi dire incognito, à l'instigation de Jean Beaufret et de Maurice de Gandillac, pour prononcer sa conférence « Qu'est-ce que la philosophie ? », Lacan, qui s'était rendu à Fribourg quelques mois plus tôt, le reçoit dans sa gentilhommière de Guitrancourt : mais hormis quelques promenades et des conversations insignifiantes, ils n'ont pas d'échange intellectuel sérieux. 3 Que cherchait Lacan ? Heidegger apparaît dans la pensée lacanienne au moment où ce dernier se livre à une modélisation linguistique des théories de Freud. Mais Heidegger ne sert pas cette modélisation : tout au contraire, il ouvre à Lacan la possibilité d'une résistance à la

Discours de soutenance. "Baudelaire chez Walter Benjamin. Lecture allégorique du fétichisme de la marchandise"

2020

Avant sa disparition tragique en 1940, Walter Benjamin a confié à Georges Bataille les traces d'un travail sur Baudelaire qui seront oubliées pendant une cinquantaine d'années avant d'être découvertes par Giorgio Agamben. Cette trouvaille, et l'édition à laquelle elle donna lieu en France fin 2013, fut pour nous l'occasion de pénétrer dans un espace laissé vide par la critique benjaminienne qui s'en tient généralement au projet des Passages et n'a jamais tenté de ressaisir son travail philosophique à partir de son lien singulier avec le poète qui l'accompagna d'un bout à l'autre de sa vie. Réciproquement, les articulations du livre en construction devaient permettre de restituer l'entrecroisement des motifs benjaminiens, le plus souvent repris de manière isolée par la critique baudelairienne. Si dans les ramifications du Baudelaire résonnent les harmoniques de la pensée et des oeuvres de Benjamin et de Baudelaire, il y a là autre chose que la possibilité de juger de la pertinence d'une interprétation définitive du poète ou d'en archiver les restes. Ce corpus éclaté de références et de citations brutes déjà consignées dans le Livre des passages, d'ébauches et de notes parfois tracées sur des papiers publicitaires est avant tout une invitation à se perdre dans une architecture labyrinthique laissée en plans, dans un massif de fragments qui n'a au premier abord aucune armature solide, sinon la seule reliure du livre.

Représentation et phénoménalisation. Remarques sur le contexte problématique de la première lecture richirienne de Fichte "entre Heidegger et Platon"

Ce texte examine le contexte de la première lecture richirienne de Fichte, lorsque le jeune phénoménologue engageait une discussion serrée avec Heidegger et Platon à propos de la représentation comme vision. Dans un premier temps, on rappellera les grandes lignes de la critique heideggerienne de la représentation, qui constitue le point de départ de la discussion. Dans un deuxième temps, on examinera la lecture de Platon – et en particulier de l’allégorie de la caverne – que Richir oppose à celle de Heidegger sur cette question. Et enfin, on montrera en quoi la lecture de Fichte permet à Richir de trouver une voie moyenne, entre Heidegger et Platon. Abstract : This articles examines the context of Richir’s first reading of Fichte, when the young phenomenologist hold a debate with Heidegger and Plato about the concept of representation understood as vision. First of all, we will recall the outlines of Heidegger's critique of representation, which is the starting point of this debate. Secondly, we will examine the readigin of Plato’s Allegory of the Cave, that Richir opposes at Heidegger’s interpretation, about this question. And finally, we will expose how Fichte allows Richir to find a middle way, between Heidegger and Plato. Resumen: Este articulo examina el contexto de la primera lectura richiriana de Fichte, cuando el joven fenomenólogo inició una discusión estrecha con Heidegger y Platón, acerca de la representación como la visión. En primer lugar, recordaremos las líneas generales de la crítica heideggeriana de la representación, que es el punto de partida de esta discusión. En segundo lugar, examinaremos la lectura de la Alegoría de la Caverna que Richir opone a la interpretación de Heidegger, sobre esta cuestión. Por último, mostraremos cómo la lectura de Fichte es la que permite a Richir encontrar un camino intermedio, entre Heidegger y Platón. Palabras clave : Richir, Heidegger, Platón, Fichte, representación, visión.

Putains et Nazis, Walter Benjamin et Martin Heidegger - Fragments d'un logos érotique

Malaises. Walter Benjamin et Martin Heidegger, 2024

Putains et nazis selon Walter Benjamin et Martin Heidegger : la prostitution messianique au risque de la haine ( à partir de Mathias Giuliani, Histoire, langage et art chez Walter Benjamin et Martin Heidegger, « La discussion entre les jeunes Benjamin et Heidegger », Klincksieck, Paris, 2014) Le premier Benjamin semble vouloir célébrer dans "la prostituée" ce que le second Heidegger consacrera comme rôle à "l'esclave de la machination" que fut selon lui le nazisme : la possibilité d'une réappropriation de la Geschlecht (entendue comme sexualité ou comme souche) contre l'imposition par l'esprit et la culture d'une domination et d'une aliénation intime.