La consécration du selfie. Une histoire culturelle (original) (raw)

Le selfie un portrait collectif

Quête de visibilité et mise en scène sur les réseaux socio-numériques. De la promotion de soi à la cyberviolence (Fabien Liénard et Samir Zlitni dirs.), Presses de l'université de Rouen et du Havre, pp. 11-28., 2022

Le selfie est très banalement considéré comme une photographie narcissique, qui porte à son paroxysme la relation de soi à soi de l'autoportrait et rencontre un désir de visibilité caractéristique du monde contemporain. On souligne aussi volontiers les récurrences de cette photographie, qui se concentre sur les objets et des paysages reconnus comme désirables, des objets d'une valeur sociale et des sites donc. Pourtant, reconnaître cette récurrence formelle, cette normativité, revient à reconnaître le caractère collectif de cette photographie. Comment le selfie peut-il concilier la représentation d'un « je » avec celle d'une communauté ? Je m'efforcerai de montrer qu'il n'y a pas de contradiction mais seulement un paradoxe. Non seulement, et comme tout portrait, le selfie met en évidence une relation interpersonnelle, mais le « je » dissimule un « nous » qui est à la fois un « nous d'énonciation » lorsque le selfie saisit la rencontre d'un ou de plusieurs amis, un « nous de communication » qui attend la confirmation d'un « j'aime » et un « nous de valeurs » qui saisit, dans l'image, tout ce qui importe à une communauté de même que le paysage qu'elle a construit.

Image du globe/image de soi : la pratique du selfie comme s(t)imulation géographique

Annales de géographie, 2018

Although conceptually and empirically the rounded form of the Earth's was no longer in doubt, aerial photography fundamentally transformed the representations of the world. The vertical shots produced for the first time allowed the Earth to be seen in its entirety and helped to forge a new global environmental consciousness. What Denis Cosgrove called "new global spatialities" also represents new modalities of subjectification. With this in mind and to celebrate the Earth Day in 2014, NASA broadcasted an image of the globe made up of tens of thousands of selfies sent by Internet users. By combining the two paradigmatic practices that delimit the field of geographical exploration (representation of the terrestrial globe and selfie), NASA perfectly illustrates the idea of a universal Earth, everywhere habitable and inhabited. On the basis of these elements, this article revisits both the historical links between photography and geography and what I would call vernacular geographical knowledge: the practice of taking selfies. It will then be necessary to show how the image produced by NASA is part of the new ideal of subjectification which makes the Earth object a kind of sovereign everyone is called upon to identify with.

Mémoire de M2 - Esthétique des cultures populaires

2017

Mon mémoire de M2 a porté sur les homologies esthétiques entre le grand chant courtois d'une part (et plus généralement la littérature médiévale en langue vulgaire), et les jeux vidéo d'autre part (et plus généralement la culture dite "de masse"). Il s'est agi, au croisement de l'esthétique et de l'histoire de l'art, d'explorer les implications contemporaines des critiques des esthétiques (ou conceptions des arts) moderne et romantique dans les années 60-70-80 par la nouvelle critique d'une part, et par la recherche médiéviste d'autre part. La culture de masse contemporaine a sans doute beaucoup plus à voir qu'il n'y paraît avec la littérature médiévale en langue vulgaire, la filiation se trouvant dans la notion (assez vaste il faut en convenir) de culture populaire, qui est moins ici un concept opératoire qu'un fil conducteur : j'ai tâché, pour arriver à ces conclusions, d'adopter une démarche et des analyses au plus proche du matériau empirique à ma disposition.

Joindre l’image à la parole pour comprendre le sens culturel des pratiques: ce que révèle la photo-élicitation

Research Papers in Economics, 2018

Située dans le champ des méthodologies qualitatives, la photo-élicitation (ou photo-interview) permet d'enrichir la compréhension des consommateurs dans le cadre de recherches portant sur le sens socioculturel des pratiques de consommation. Cet article vise à démontrer l'intérêt de l'usage de la photoélicitation lorsqu'il s'agit de décrire, questionner, compléter des expériences vécues par les consommateurs. Après avoir développé les principes de la méthode et ses principaux éléments de mise en oeuvre, nous reviendrons sur les différents domaines d'applications de la photo-élicitation. A partir du cas de la migration sénégalaise, une illustration des apports méthodologiques et thématiques sera enfin abordée en référence à une recherche concernant les registres socio-culturels et identitaires en jeu dans la consommation lors de phénomènes migratoires.

La France en fanfare, histoire d'une réappropriation culturelle

Cette chronique présente les pratiques culturelles contemporaines de la majorité des Français, celles qui existent le plus souvent en dehors de toute institution publique, une culture à zéro subvention, « marginalité d’une majorité » comme l’écrivait Michel de Certeau.

Le selfie une identite relationnelle

« Le selfie, une identité relationnelle », Identification de…/dé-identification. Entre trace(s) et fiction(s) (Maria Caterina Manes Gallo dir.), actes du colloque Identification/Dé-identification, Université Bordeaux-Montaigne, pp. 75-88. ISBN-13 9791030002942, 2018

This article, based on semiotics methods, strives to characterize a photography called selfie and the way it builds identity. This construction differs from that of the self-portrait because of its relational character and its links to enunciation, time, space and person categories. Cet article, fondé sur une méthodologie sémiotique, s'efforce de caractériser une photographie appelée selfie et son mode de construction de l'identité. Cette construction diffère de celle de l'autoportrait en raison de son caractère relationnel et de ses liens à l'énonciation, aux catégories du temps, de l'espace et de la personne. « On est toujours soit confondu, soit émerveillé, toujours étonné, devant sa propre photo. On a toujours plus d'irréalité que l'autre. C'est soi qu'on voit le moins, dans la vie, y compris dans cette fausse perspective du miroir, au regard de l'image composée de soi qu'on veut retenir, la meilleure, celle du visage armé que l'on tente de retrouver quand on pose pour la photo » (Duras 2014 [1994] 112-113).. Comme toutes les pratiques d'images actuelles, le genre du selfie hybride des genres stabilisés et des pratiques déjà institutionnalisées, ce qui autorise à en faire un sous-genre de l'autoportrait. Si l'on se fie à sa textualité, il se confond également avec cet autoportrait « classique » car il représente son auteur. C'est, suivant la définition de Calabrese (2006 :30), « un texte verbal ou visuel qui se trouve à la place de celui qui le produit et qui, par conséquent, le représente. Autrement dit, qui fonctionne comme une « représentation » (…) ou comme un « simulacre » (…) de son auteur ». Son fonctionnement sémiotique confirme la filiation puisqu'une instance d'énonciation y manifeste à la fois une réflexivité et une intention de communiquer son identité. Pourtant, c'est sur le dispositif de capture et de partage de l'image qu'insiste le dictionnaire Oxford lorsque le selfie y fait son entrée en 2013 1. Il y est alors défini comme une « photographie prise de soi-même, typiquement prise au moyen d'un smartphone ou d'une webcam et téléchargée par une plateforme sociale de partage » 2. Au-delà de la ressemblance superficielle, c'est donc ici la dimension communicationnelle qui le distingue de 1 Le néologisme anglais selfie (ou autoportrait photographique) a fait son apparition dans le dictionnaire Larousse en 2016. 2 « a photograph that one has taken of oneself, tipically one taken with a smartphone or webcam and uploaded to a social media website ». Nous avons traduit.

Seul avec son smartphone ? Les médiations culturelles et leurs traces dans l'usage

SUMMARY: The exploratory survey Cultural Practices and Usages of the Connected Computing (PRACTIC) relies on an analysis of traces of smartphone usage, associated with declarative data (questionnaire and interviews), to understand how the computer terminal affects at the same time the transformations in the forms of cultural consumption, of cultural mediation, and the study of these phenomena itself. Three approaches of cultural mediations are addressed here: socio-demographics of smartphone usage, analysis of cultural consumption routines and forms of application prescribed.

Sans retouche. Histoire d'un mythe photographique

Etudes photographiques, n° 22, octobre 2008, p. 56-77

. Anonyme, portrait de jeune femme, tirage moderne sur papier albuminé d'après négatif verre au collodion humide, 17,6 x 12,7 cm, vers 1875, coll. part.

Aux origines des usages sociaux de la photographie

Actes de la recherche en sciences sociales, 2004

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