Un espace poétique (original) (raw)

Poésie et espace public

À quelles conditions la poésie peut-elle bien prétendre se mêler de problèmes publics ordinaires ? Christophe Hanna propose de démonter ce qui soustrait la poésie à l'espace public et de remonter un cadre approprié pour l'y inscrire activement. Il s'agit d'une poésie de dispositifs, qui livre des ressources critiques sur les discours et les représentations qui traversent l'espace public.

L’espace du poème : du livre à l’exposition

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2016

En 1973, lorsqu'il scénographie la première exposition d'ensemble de ses « livres de poète » au Centre National d'Art Contemporain, Pierre Lecuire inaugure une démarche singulière qui restera la sienne jusqu'en 2011 1 : celle qui consiste à concevoir sa création poétique comme une pratique continue de la spatialisation du texte dans l'espace de la page et du livre, à celle dans l'espace d'exposition. « Presque autant que les livres eux-mêmes », les expositions sont pour lui « une composante importante, indispensable de l'oeuvre » 2 , et ce autant par contrainte économique que par nécessité poétique. En effet, écrivant le poème, dirigeant les peintres auxquels il fait appel, tels Geneviève Asse, Raoul Ubac ou encore André Lanskoy, Pierre Lecuire est à la fois « maître d'oeuvre, architecte et éditeur de ses ouvrages » 3 , cette pratique de l'autoédition impliquant nécessairement une réflexion sur leur diffusion : Étant donné que je devais assurer, dit-il, en plus de la création, la diffusion de mes ouvrages, j'ai peu à peu constitué, grâce à des contacts et des rencontres faites lors de mes voyages, une liste d'amateurs et d'institutions susceptibles de s'intéresser à mes livres. Ce fut long, difficile, mais c'est en grande partie aujourd'hui ces institutions et ces amateurs pour les trois quarts situés à l'étranger, qui ont collectionné mes livres 4 .

Cosmo-poétique du refuge

Nous sommes la semence de la Terre La vie en perpétuel devenir. Octavia E. Butler, La Parabole du semeur « À São Tomé, les esclaves se révoltent, se réfugient dans les montagnes d'où ils opèrent de véritables raids sur les plantations quelques années après la mise en place de ce régime de culture. » i . Nous sommes en 1555, au large des côtes africaines, dans un des nombreux archipels portugais de l'océan Atlantique, lors d'une des premières insurrections marronnes d'envergure. Le marronnage sera désormais indissociable du système proto-industriel de la plantation dont l'île de Sao Tomé fut le principal laboratoire africain avant son transfert et son perfectionnement au Brésil. Tout comme l'esclavage colonial, le marronnage commence sur les terres africaines : il est d'emblée transatlantique. Mais c'est bien sûr dans les Amériquesdevenues le coeur du système esclavagisteque cette forme de vie et de résistance connaîtra son plus grand essor, jusqu'à devenir la matrice de véritables sociétés marronnes.

Lieux poétiques, espaces d'accueil d'Andrée Chedid

Sens Public, 2011

Une conscience poétique se manifeste, celle de l'être-là, de l'être-au-monde, proche de celle d'un Philippe Jaccottet, ou d'un Pierre-Albert Jourdan, conscience de l'éphémère de notre nature de « locataire », qui sera aussi l'occasion d'une élaboration narrative, avec le thème fantastique du passage d'une peau à une autre.

Fictions d’art : des espaces pensifs

Revue Critique De Fixxion Francaise Contemporaine, 2014

Depuis le début des années 1990, la vogue des récits dont le personnage ou le narrateur sont des peintres 1 , des critiques d'art ou des historiens 2 , les fictions où l'oeuvre plastique, réelle ou imaginaire, est l'objet de la diégèse 3 , où l'intrigue concerne les milieux de l'art à travers l'histoire 4 , ne faiblit pas. Des éditeurs et des collections leur font une place privilégiée, des écrivains s'en font une spécialité (Christian Garcin, Adrien Goetz, Patrick Roegiers) ou entretiennent la pratique comme un fil rouge de leur oeuvre (Pierre Michon, Gérard Macé, Pascal Quignard), tandis que des historiens de l'art accomplissent l'excursion fictionnelle avec conviction 5. Ces livres, romans, essais, proses imaginatives, qui traversent les genres, du polar à l'hommage en passant par la satire ou l'érotisme 6 , sont souvent l'occasion pour leurs auteurs de décrocher un prix. Cette tendance ne concerne pas seulement l'aire française et francophone, notamment pour ce qui est du genre des "art history mysteries" (Ian Pears, Jonathan Argyll series) et de l'usage de l'objet d'art dans la fiction 7. Ces ouvrages participent d'un goût pour le savoir-que l'on constate dans la fiction en général comme en témoigne le succès d'une collection comme "Fiction et Cie" et les nombreux échanges de la littérature contemporaine avec l'histoire, l'anthropologie, les sciences cognitives, les sciences de l'environnement, etc.

Écrivains et espaces du sacré

Écrivains, modes d’emploi. De Voltaire à bleuOrange (revue hypermédiatique), 2012

Laghouati S., Martens D., Watthee-Delmotte M. (dir.), Écrivains, modes d'emploi, version 9 mars 2012 -1

L’espace de l’œuvre

L'espace de l'oeuvre : De l'objet synoptique à l'objet systémique Depuis la fin des années quatre-vingt, l'ordinateur est devenu un élément incontournable du paysage quotidien. La miniaturisation considérable des composants a permis à la fois une réduction spectaculaire des appareils et, de ce fait, une industrialisation, et donc une commercialisation considérable en un temps relativement bref. D'outil réservé à des institutions ou à des entreprises de taille conséquente, ne serait-ce qu'à cause du volume que représentaient ces appareils (souvent des pièces entières), ils sont devenus partie intégrante de l'environnement domestique. Dans le même temps, la puissance de calcul et la capacité de stockage se sont accrues de façon exponentielle au point que la moindre machine domestique est actuellement bien plus puissante que les gros calculateurs des années soixante, soixantedix.

La littérature et l’espace

Arborescences: Revue d'études françaises, 2013

Le présent article se veut un survol — à la fois diachronique et théorique — d’approches littéraires axées sur l’étude de l’espace pour faire ressortir leurs méthodes, objectifs, divergences et convergences. Partant des études de Mikhaïl Bakhtine et de Youri Lotman sur le chronotope et la sémiosphère, l’auteure présente ensuite les travaux d’Henri Mitterand, Jean Weisgerber et Roland Bourneuf sur l’espace romanesque avant de se concentrer sur les approches émergées depuis les années 1990. Parmi ces approches dites géocentrées, se trouvent notamment la géographie de la littérature, la géocritique, la narratologie spatiale, la géopoétique, la pensée-paysage et l’écocritique. This article presents a diachronic and theoretical overview of spatial approaches to literature in order to highlight their methodologies, objectives, differences and similarities. Starting with Mikhail Bakhtin’s and Yuri Lotman’s seminal studies on the chronotope and the semiosphere, the author then turns to the work of Henri Mitterand, Jean Weisgerber and Roland Bourneuf on the question of fictional space in novels. The main focus, however, are the new so called geo-centered approaches that have emerged since the 1990: literary geography, geocriticism, spatial narratology, geopoetics, la pensée-paysage, and ecocriticism.

Lieux de poésie, poésie sans frontières

LittéRéalité

La valeur du texte litteraire (A moins qu'il ne s'agisse d'un simple document) r~side dans cette~trange alchimie qui allie la vision individuelle du Moi cr~teur (ce par quoi le litteraire diff~re essentiellement du mythique) aux codes les plus locaux et les plus universels Ala fois. Ce subtil m~lange de vision et de lieux prend toute sa resonance lorsqu'on est confronte, comme on l'est de plus en plus fr~uemment, Aune pOOsie qui part, pour lieux, de fragments de realite oclatee-qu'il s'agisse de Moi collectif d'un pays «rapail16) auquella pOOsie sert Aconf~rer une unite possible, ou d'un Moi individuel qui cherche une unite introuvable ailleurs qu'A l'horizon du texte. 1 Toute poesie, d' ou qu'elle vienne, a necessairement son lieu, mais celui-ci peut prendre des formes fort diverses: lieux de memoire, afftrmation d'un lieu-projet collectif, lieux precis ou la denotation acquiert une pertinence particuliere, lieux interieurs ou le paysage devient ftgure de questionnement, emergence du corps comme lieu de parole, questionnement du texte comme seul lieu, usage d'une tradition poetique comme son lieu propre. De ces lieux, le premier est par excellence celui du lyrisme, de toute pOOsie qui se veut expression de sentiments; il sufftt d'ouvrir la moindre revue de pOOsie pour s'apercevoir de la permanence de ce lieu-lA, au Quebec ou ailleurs; on le retrouve, au Quebec, tout particulierement chez certains poetes des annees 1980, comme Jean Chapdelaine Gagnon, Luc Lecompte ou~rald Gaudet, et il est probable que le lien entre quotidien, discours amoureux et intimit~de la voix lyrique restera toujours l'une des constantes de la poesie. Le second lieu represente bien la volonte deliMr~e d' une pOOsie queMcoise des ann~es 1960 de conf~rer Ala parole pOOtique une dimension nationale, de situer le Moi pOOtique dans un lieu quebOCois (anticipant d'une vingtaine d'annees le discours politique) pour echapper Ace que Gaston Miron appelait «la pOOsie dite universe!le des fleurs etdes petits oiseaux.» 2 Que l'on parte d' une continuit~dans 1'identite et le discours pOOtique, une action «anthropOOtique» (comme chez Miron), d' une volonte de~hanger le discours par l'espoir de transformation de la soci~te (comme chez Miche1e Lalonde), d'un desir d'incarnation de la forme pOOtique dans l'imagerie fluide du pays (comme chez Gatien Lapointe ou Pierre Perrault), on a ici l'essence du mouvement des