Les ouvriers peuvent-ils penser ? Pour une histoire sociale des idées ouvrières au XIXe siècle (original) (raw)
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Les ouvriers peuvent-ils produire des oeuvres de pensée ? À regarder les travaux contemporains d'histoire intellectuelle -y compris dans ses versions renouvelées, comme l'histoire des idées « en contexte » de l'École de Cambridge -il est permis d'en douter : penseurs conservateurs et radicaux s'y succèdent et s'y affrontent, parlant parfois des travailleurs manuels, mais ceux-ci ne s'élèvent que rarement à la position de locuteurs. Cette absence a ses raisons. Comme l'écrit Pierre Bourdieu, « la compétence nécessaire pour parler la langue légitime » dépend du « patrimoine social » : les ouvriers, dominés dans le champ économique, sont exclus de l'univers de la production intellectuelle 1 . Et quand ils y entrent, comme les ouvriers étudiés par Jacques Rancière dans La nuit des prolétaires, c'est souvent par effraction, individuellement, hors de l'espace du travail 2 . Une opposition a priori semble ainsi à l'oeuvre entre le monde ouvrier, collectif, ancré dans l'activité de travail manuel, et celui de la production intellectuelle, peuplé d'hommes de lettres, auteurs individualisés exerçant leur raison dans les sphères abstraites de la pensée.
Histoire des pratiques intellectuelles ouvrières au XIXe siècle (projet EHESS 2014)
Les ouvriers peuvent-ils produire des oeuvres de pensée ? À regarder les travaux contemporains d'histoire intellectuelley compris dans ses versions renouvelées, comme l'histoire des idées « en contexte » de l'École de Cambridgeil est permis d'en douter : penseurs conservateurs et radicaux s'y succèdent et s'y affrontent, parlant parfois des travailleurs manuels, mais ceux-ci ne s'élèvent jamais à la position de locuteurs. Cette absence a ses raisons. Comme l'écrit Pierre Bourdieu, « la compétence nécessaire pour parler la langue légitime » dépend du « patrimoine social » : les ouvriers, dominés dans le champ économique, sont exclus de l'univers de la production intellectuelle 1 . Bien qu'il parte de postulats opposés, Jacques Rancière arrive à une conclusion étrangement proche, dans La nuit des prolétaires : en donnant la parole à des ouvriers marginaux, qui refusent de se laisser enfermer dans l'identité ouvrière, Rancière montre bien que les ouvriers peuvent parler ; mais ils ne le font qu'en s'arrachant, par la pensée, à leur condition de travailleurs manuels, pour revendiquer le droit de parler en tant qu'humains et non pas en tant qu'ouvriers 2 . Dans les deux cas, une opposition a priori est à l'oeuvre entre le monde ouvrier et celui de la production intellectuelle, qui renvoie à toute une série de partages caractéristiques de la modernité : entre le travail et le capital, entre le peuple et ses représentants, entre le monde des faits et celui des idées.
Les utopies socialistes au XIXe: avec ou sans travail ?
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Comment réorganiser la vie économique et plus particulièrement le travail lorsque la révolution industrielle ne tient pas ses promesses d’abondance et de progrès pour tous ? Cette interrogation est au cœur du courant socialiste en Europe au tournant du XIXe siècle. La pensée socialiste est plurielle et ne s’épuise pas dans le marxisme qu’elle précède et questionne tout à la fois. Les socialistes utopiques posent sur le travail un regard singulier : celui-ci est essentiel à la construction, ici et maintenant, de communautés qui préfigurent la société idéale ; dans le même temps, leurs conceptions du travail sont marquées par la critique qu’ils adressent à la réalité de leur temps, aux conditions matérielles qu’elle induit ainsi qu’à ses effets délétères sur les conditions de vie des ouvriers. Cette position ambigüe vis-à-vis du travail explique que les utopies socialistes déclinent un dégradé de positions, qui va de la fascination pour le travail à la diminution drastique du temps qui doit y être consacré.
Représenter le travail et les ouvriers aux XIX e et XX e siècles : des opérations idéologiques
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L'ouvrier héroïque ou alcoolique ? l'ouvrière impie ou révoltée ? La classe « fidèle à la France profanée », comme le disait Mauriac ? Ces assertions résument des représentations sommaires du monde ouvrier, des clichés qui ont abondamment circulé dans des textes et des images. Il s'agit d'en analyser les grandes évolutions depuis les stigmatisations du premier XIX e siècle jusqu'à aujourd'hui, en circulant à travers différentes figures ouvrières
Des savants en société : les penseurs du XVIIe siècle au travail
2011
6 ,4N1\iE STABUET .U. a" l'élégance du style de la languà visée par nombre d'écrivains d'alors. C,estcetteimagenuancéeetcontrastéedusiècle'centréesur l'histoite des idées, qoe le cycle de conférences organisé par l'Extension de l'université de Mons ert2070-2071 ^ tentê de donner à voir. Les textes présents dans ce volume sont une prolongation de ces conférences ; ils n'en constituent aucuoement les actes' Non sculement certaines conférences ne seront pas suivies dlun tex.te' ruais sLrrt()ut plusieurs cles articles ici présents approfondissent les the\rncs aix,r.jés lors cle ces cr;nfércnces ()u lcs tfaitent sous un ,rrr.r{i" qrt*lque peu clifférent' (lornmc pour les c<tnfércnces 'il a étê tlcrrrantléauxiluteufsclirflirirutreintr.,.lr.rctitxriilcutsuietplutôt .rtrc rle rÉsr"ttrtq,r ccltri-tli, afin de P{rtncttre ar"rx lecteurs d'aller ,i,i.l,,..,ori. lcs tcxtcs clc l'dp't1ttr, sttus trv,rir lles.in cle passer par.les i'{ttlllîtctltâtcrrrl, l"ctl ,,h,pirtrt tltt présent volume se veulent ainsi ;rlrt,rrliilrler l't;lr f(lrllii tnrris c:cla tt'inrpliclr"re nullement une slmptrlir'rtiorr tlcs irléçri ou tle l:l pettsÉc présentécs'
Petite histoire des idées de l’Europe du XIXe siècle à nos jours
L'Europe et ses intellectuels, 2019
Dans le cadre du programme général du réseau scientifi que « Cultures européennes-identité européenne » et dans l'esprit des directives thématiques retenues par tous les partenaires, l'Université de Varsovie s'est proposé d'organiser un congrès au sujet de L'Europe et ses intellectuels. Le thème de la manifestation reconnaît l'importance de la contribution du patrimoine culturel à l'identité de l'Europe. Ainsi, au centre du débat se trouve une vision culturelle/politique de l'Europe, élaborée par ses élites intellectuelles, envisagée sous des angles variés et au fi l des siècles, à partir du Moyen Âge jusqu'aux temps modernes. Il s'agira donc d'observer de près la naissance de l'identité européenne et la cristallisation de l'imaginaire européen sous l'impact de grandes personnalités et institutions, comme les universités, académies, bibliothèques, musées, etc. L'envergure de cette problématique ouvre de nombreuses pistes d'interrogation. L'Europe et ses intellectuels. Vingt-trois essais sortis de la plume de chercheurs issus de différents centres universitaires de Pologne, France, Allemagne, Italie, Espagne, Grande-Bretagne, Suisse et États-Unis d'Amérique ont été regroupés en quatre parties essentielles. La première d'entre elles, L'engagement pour l'Europe et ses formes, constitue une discussion sur la forme de l'Europe. Ainsi, Didier Alexandre décrit la position d'écrivains et intellectuels français de l'entre-deux-guerres face aux relations Est-Ouest, intenses à l'époque, et leur importance pour l'éveil de la conscience européenne. Henryk Chudak discute à son tour la vision de l'Europe postnationale dans le texte-projet de Julien Benda de 1933 où l'opposition Europe/ Nation et la mise en garde contre le danger du nationalisme occupent une place centrale. Et enfi n, Thomas Hunkeler propose une synthèse des opinions de Denis de Rougemont, écrivain et philosophe suisse, sur le monde de la culture occidentale, son identité et les dangers qui les menacent. La deuxième partie de cet ouvrage, L'Europe en perspective comparatiste, apporte tout d'abord une étude de Marthe Segrestin, consacrée à la vision de l'Europe actuelle, publiée dans Europe à l'entre-deux-guerres. Dans le chapitre Discours d'ouverture de M. Marcin Pałys Recteur de l'Université de Varsovie Messieurs les Recteurs, Mesdames et Messieurs, Chers Amis, C'est au moins à un double titre que j'ai l'honneur d'ouvrir cet important congrès : je le fais au nom de notre Université qui célèbre cette année son bicentenaire et je le fais au nom de la ville de Varsovie dont la culture est profondément ancrée en Europe. Qu'aurait été le patrimoine européen sans Frédéric Chopin qui a étudié à l'Université de Varsovie, sans Czesław Miłosz qui-avant d'obtenir le prix Nobel de littérature-y a étudié à la Faculté de Droit, sans Leszek Kołakowski, Bronisław Baczko, Krzysztof Pomian et tant d'autres, chassés de notre Alma Mater ou exilés de Pologne-pays longtemps dominé par les puissances étrangères. Il me semble que les villes d'Europe feraient quelque chose de précieux pour la culture commune et pour l'avènement de l'esprit européen si elles voulaient bien se souvenir ainsi, à tour de rôle, de tous les grands hommes qui-un jour-se sont arrêtés dans leurs murs. Permettez-moi de voir dans ce congrès un tel acte de mémoire collective. L'Europe et ses intellectuels fut d'abord une idée et un désir. Le désir de réunir des universitaires, des chercheurs hors du champ clos de leur spécialité. L'idée de leur proposer de réfl échir aux avatars historiques de ce qu'on peut appeler l'Homme européen. Par-delà la diversité des lieux (Pologne, France, Allemagne, Espagne, Italie, Belgique, Autriche, Suisse, Angleterre, États-Unis), par-delà l'éventail très ouvert des participations (huit universités), la règle du jeu est restée la même : il s'est agi, en chaque occasion, d'explorer à la fois l'émergence et la permanence d'une fi gure historique de l'humanité et sa contribution à l'identité et à la culture européennes. Je remercie mes collègues, les Recteurs M.
Cahiers d’Histoire, Revue d’Histoire critique, n°110, 2009, pp. 11-38, 2009
Les figures patronales dans les récits ouvriers en France au XXe siècle
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Un patron se trouve toujours un peu rassuré par l'ignominie de son personnel. L'esclave doit être coûte que coûte un peu et même beaucoup méprisable. Un ensemble de petites tares chroniques morales et physiques justifie le sort qui l'accable. La terre tourne mieux ainsi puisque chacun se trouve dessus à sa place méritée 1 .