« Les problèmes, ils restent pas où ils sont, ils viennent avec toi »: Appartenance ouvrière et migration de précarité (original) (raw)

Appartenance ouvrière et migration de précarité (Agora, 2009)

La question de la mobilité géographique s'avère souvent piégée par un postulat très ethnocentrique : au sein d'une « société fluide » la mobilité serait aujourd'hui devenue une contrainte nécessaire à l'accès à l'emploi, mais aussi un garant « d'enrichissement », « d'épanouissement personnel », bref, une étape obligatoire mais formatrice pour la jeunesse dans le cadre de sa formation ou de son début de carrière professionnelle. Elle serait même devenue une nouvelle forme de capital social, d'emblée détenu par les catégories dominantes, et dont l'absence constituerait un « problème » pour les classes populaires. De tels postulats, importés de l'univers du management 1 et de politiques publiques étasuniennes visant à favoriser l'accès à la mobilité urbaine des individus « pauvres », conduisent à ne considérer les classes populaires qu'en termes d'« enclavement », d'« insularité » ou d'« immobilité forcée » -immobilité considérée comme « désastreuse 2 ». Ces questionnements autour des « manques » retraduisent des questions sociales en termes spatiaux 3 , et interdisent de fait de se donner la possibilité de comprendre le(s) sens que prend la mobilité géographique pour les populations les plus précaires. Nous souhaiterions au contraire ici contribuer à lutter contre une « tentation géographiste » souvent présente dans les analyses en termes de ségrégation sociale, en réaffirmant la primauté de la prise en compte de l'histoire et de l'évolution de groupes sociaux dans la compréhension de la réalité sociale présente.

« Les problèmes, ils restent pas où ils sont, ils viennent avec toi »

Agora débats/jeunesses, 2009

La question de la mobilité géographique s'avère souvent piégée par un postulat très ethnocentrique : au sein d'une « société fluide » la mobilité serait aujourd'hui devenue une contrainte nécessaire à l'accès à l'emploi, mais aussi un garant « d'enrichissement », « d'épanouissement personnel », bref, une étape obligatoire mais formatrice pour la jeunesse dans le cadre de sa formation ou de son début de carrière professionnelle. Elle serait même devenue une nouvelle forme de capital social, d'emblée détenu par les catégories dominantes, et dont l'absence constituerait un « problème » pour les classes populaires. De tels postulats, importés de l'univers du management 1 et de politiques publiques étasuniennes visant à favoriser l'accès à la mobilité urbaine des individus « pauvres », conduisent à ne considérer les classes populaires qu'en termes d'« enclavement », d'« insularité » ou d'« immobilité forcée » -immobilité considérée comme « désastreuse 2 ». Ces questionnements autour des « manques » retraduisent des questions sociales en termes spatiaux 3 , et interdisent de fait de se donner la possibilité de comprendre le(s) sens que prend la mobilité géographique pour les populations les plus précaires. Nous souhaiterions au contraire ici contribuer à lutter contre une « tentation géographiste » souvent présente dans les analyses en termes de ségrégation sociale, en réaffirmant la primauté de la prise en compte de l'histoire et de l'évolution de groupes sociaux dans la compréhension de la réalité sociale présente.

L'intégration, alibi de la précarisation

Plein droit, 2004

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Re-situer la précarité en temps de crise. Interdépendance et déplacements en espace(s) urbain(s) (Traduction)

Émulations - Revue de sciences sociales, 2018

The text, specially translated for this issue of Emulations, inscribes precariousness at the heart of a reflection on the failure of the presumed autonomy of the neoliberal subject. Through the experience of the economic crisis in Spain after 2008, the author describes how the ideology of the middle classes, rooted on a mirage of freedom, on a fictitious autonomy from social structures, has been shaken up. She advocates the development of ties both of interdependence and of codependence, ways of living which are well-known to subordinate populations. And she shows that the violent movement of downward social mobility entailed by the 2008 crisis may have had the advantage of weakening a myth that sees independence as the norm and dependence as the exception. The author thus defends an understanding of precariousness in terms of social reproduction rather than exclusively at the level of production relations to which some approaches have been limiting it. Ce texte, traduit pour ce dossier, inscrit la précarité au cœur d’une réflexion sur la faillite de l’autonomie présumée du sujet néolibéral. À travers l’expérience de la crise économique de l’Espagne après 2008, l’auteure décrit l’ébranlement de l’idéologie des classes moyennes, fondées sur un mirage de liberté, sur une autonomie fictive vis-à-vis des structures sociales. Elle défend le développement d’interdépendances et de codépendances, modes de vie bien connus des populations subalternes, et montre que le déclassement violent produit par la crise de 2008 aura peut-être eu l’intérêt d’affaiblir un mythe qui voit l’indépendance comme la norme et la dépendance comme l’exception. L’auteure défend ainsi une compréhension de la précarité en termes de reproduction sociale plutôt que de proposition dans les seuls rapports de production à laquelle l’ont en partie cantonnée certaines approches.

Des migrants et des squats : précarités et résistances aux marges de la ville

Revue européenne des migrations internationales, 2003

La question du logement des migrants 1 ne fait pas partie des interrogations qui se posent aujourd'hui dans le champ politique français. Si des dispositifs spécifiques d'accès au logement ont existé par le passé 2 , ils ont peu à peu été abandonnés au profit de dispositions de droit commun, au nom d'un « modèle d'intégration à la française » qui ne reconnaît aucune identité collective et refuse toute discrimination, serait-elle positive. Pourtant, les inégalités face au logement existent bien. Les migrants en provenance des pays pauvres, dont on a longtemps pensé qu'ils suivraient les trajectoires résidentielles des classes populaires françaises passées des HLM aux maisons individuelles dans les années 1970-1980, se retrouvent en réalité cantonnés aux étages les plus bas du marché du logement : le privé dégradé, et le locatif social 3. On connaît assez précisément les conditions de vie, les problèmes liés à la ségrégation, les formes de violence et de sociabilités des banlieues et cités que les migrants peuplent à présent, et que nombre de chercheurs ont pris comme terrains d'enquête et objets d'étude. On sait moins ce qu'il advient de ceux qui n'accèdent pas du tout au logement de droit commun. C'est à eux, et à la manière dont ils aménagent leur précarité, que l'on voudrait par conséquent réfléchir. Cet article propose une description des modes d'habitat d'individus inscrits dans des circulations transfrontalières, et dont les trajectoires résidentielles sont marquées par l'exclusion du logement standard. Les diverses situations rencontrées dans ce cadre peuvent être classées en trois types : l'exploitation, la précarité et l'illégalité. La construction de cette typologie, qui n'a rien d'exclusif ni de définitif, s'indexe essentiellement sur deux paramètres, qui sont le degré d'autonomie ou de dépendance des individus, et le coût psychologique et financier de leur mode d'hébergement. Des migrants et des squats : précarités et résistances aux marges de la ville Revue européenne des migrations internationales, vol. 19-n°2 | 2003 10 Il existe en effet une demande massive de logements inassouvie, un marché potentiel de la pauvreté que les « marchands de sommeil » ont saisi. Cette pratique est courante à Marseille, notamment dans les quartiers centraux populaires, et dans certaines cités périphériques. Le fonctionnement en est simple : des propriétaires font l'acquisition d'appartements ou d'hôtels qu'ils laissent se dégrader, et les louent à des individus ne pouvant accéder au logement standard, dans l'immense majorité des cas une Des migrants et des squats : précarités et résistances aux marges de la ville Revue européenne des migrations internationales, vol. 19-n°2 | 2003

Re-situer la précarité en temps de crise: Interdépendance et déplacements en espace(s) urbain(s

Émulations, 2018

Ce texte, traduit pour ce dossier, inscrit la précarité au cœur d’une réflexion sur la faillite de l’autonomie présumée du sujet néolibéral. À travers l’expérience de la crise économique de l’Espagne après 2008, l’auteure décrit l’ébranlement de l’idéologie des classes moyennes, fondées sur un mirage de liberté, sur une autonomie fictive vis-à-vis des structures sociales. Elle défend le développement d’interdépendances et de codépendances, modes de vie bien connus des populations subalternes, et montre que le déclassement violent produit par la crise de 2008 aura peut-être eu l’intérêt d’affaiblir un mythe qui voit l’indépendance comme la norme et la dépendance comme l’exception. L’auteure défend ainsi une compréhension de la précarité en termes de reproduction sociale plutôt que de proposition dans les seuls rapports de production à laquelle l’ont en partie cantonnée certaines approches.

Travail migrant temporaire et précarisation

2015

L’economie contemporaine se caracterise par la precarisation croissante des conditions de travail et du lien d’emploi. Cette precarisation est devenue un objet d’etude important depuis quelques annees. Toutefois, pour plusieurs, la precarite se termine avec l’obtention d’un emploi. En effet, on presuppose que l’obtention d’un emploi doit mettre fin aux problemes rencontres par les personnes. De plus en plus d’etudes remettent pourtant cette presupposition en question, une presupposition, bien qu’elle ne soit pas illogique en soi, reste associee a une idee du travail forgee depuis la fin de la Deuxieme guerre mondiale et qui est de moins en moins vraie dans les conditions presentes du neoliberalisme. Dans le passe, l’obtention d’un emploi donnait la possibilite de subvenir a ses besoins et certaines des conditions afin de s’epanouir en tant qu’etre humain, ce qui n’est plus necessairement le cas, de nos jours.

Transitions et précarité de l'emploi

Labour / Le Travail, 1993

LES PERSONNES ACTIVES expérimentent diverses formes de transitions entre états ou situations différentes: perte d'emploi, retour en emploi après une période de chômage, abandon volontaire d'un emploi afin de retourner aux études, retraite, mobilité entre différents employeurs, etc. Ces changements sont considérables: près de la moitié de la population active au Canada en fait l'expérience au moins une fois au cours d'une année donnée. Ces changements d'état, pour une bonne part, peuvent toutefois être analysés en tant que révélateurs de la précarité de l'emploi quand on retient les types qui s'y prêtent tel les que les transitions entre l'entrée et la sortie en emploi (ex.: emploi-chômage). Notre objectif ici ne consistera pas à revenir sur les interrogations théoriques relatives à la précansation de l'emploi, sur lesquelles de nombreux auteurs se sont penchés.' Notre intention est plus modeste et elle consiste, à partir d'une définition opérationnelle de la précansation de l'emploi et à l'aide des données de l'Enquête sur l'activité de Statistique Canada, 2 à cerner les contours d'un phénomène dont l'importance est de plus en plus reconnue tout en étant relativement peu analysé empiriquement. L'approche théorique implicite consiste toutefois à prendre pour acquis les effets combinés des divers facteurs structurels qui sont toujours invoqués eu égard aux modifications qui affectent le marché de l'emploi et les travailleurs depuis au moins le milieu des années 1970. 'David, Hélène, «La précansation de l'emploi: variations sur un même thème», in CEQ (Centrale de l'enseignement du Québec), Apprivoiser le changement. Actes du colloque sur les nouvelles technologies, la division du travail et la