Portraits de traductrices (original) (raw)

Portrait du traducteur en préfacier

« Palimpsestes », n° 31, 2018

What do translators do when they choose to write a preface to the text they have just translated? Among other things, such as presenting the author and explaining how and why they came to translate him/her, they usually pass a few remarks on their own translation—be it to excuse, in advance, some debatable linguistic or theoretical choices, to complain about difficulties in the text or indeed the foreign language, or to shed some light on a few particularly difficult passages. Mostly, they tend to justify their work. Drawing from a corpus of more than sixty prefaces by poetry translators, we will establish a short typology of translators’ prefaces.

La Fabrique des traducteurs

Traduire, 2019

Au printemps 2019, j'ai eu le plaisir de participer à l'atelier franco-japonais de la Fabrique des traducteurs, au Collège international des traducteurs littéraires, à Arles. Deux mois de réflexion intense en compagnie des cinq autres lauréats sous la houlette de merveilleux tuteurs, mais aussi deux mois de partage avec tout ce petit monde et celui, plus étendu, des nombreux résidents du CITL, venus des quatre coins du globe et travaillant, dans ce cocon privilégié au coeur de la vieille ville, sur des auteurs et des types de textes très variés, non sans s'autoriser quelques escapades (culturelles, bien entendu !). Sur ce microcosme veille une équipe de choc pilotée par son directeur, Jörn Cambreleng. Jörn, pourrais-tu revenir sur l'histoire de la Fabrique des traducteurs ? Jörn : Volontiers. Ce programme a été lancé en 2010. Il fêtera donc l'an prochain ses dix ans. L'idée initiale était de pallier le manque de renouvellement des traducteurs littéraires et d'édition du français dans le monde. En arrivant à la direction d'ATLAS en 2009 (ATLAS est l'association qui Entretien avec Jörn Cambreleng.

Rêverie d’un traducteur

Biens Symboliques / Symbolic Goods, 2018

La reverie serait-elle un bon instrument pour la connaissance de la traduction ? Une reflexion sur le travail de la traduction implique qu’on interrompe le travail pour observer ce que l’on fait en le faisant. Ainsi, puisant dans son experience de traducteur de la correspondance de Walter Benjamin, l’auteur montre comment une part de reverie – associations spontanees de l’inconscient, faculte de constituer un monde separe de la realite selon Freud – entre dans les operations concretes de la traduction. Il propose ainsi de reformuler l’adage « traduire, c’est trahir » : traduire, c’est faire entendre une chose dans une langue, c’est-a-dire la faire reconnaitre dans cette langue aux personnes qui la parlent, tout en trahissant la maniere dont l’autre langue la fait reconnaitre. La reverie serait alors le mode de perception de cette difference, dont la restitution concrete est, de fait, impossible.

Les traducteurs dans l'histoire

1995

400 pages Extrait Extrait de l'avant-propos La publication du présent ouvrage est l'aboutissement d'un long cheminement au sein de la Fédération internationale des traducteurs. L'idée initiale de ce projet remonte au début des années 1960. La Fédération n'avait alors qu'une dizaine d'années. Lors de son IVe Congrès mondial, à Dubrovnik (1963), il fut acquis qu'une histoire universelle de la traduction devait être écrite. L'un des principaux promoteurs du projet, le Hongrois György Radó (1912-1994), se porta volontaire pour inviter les historiens de la traduction à rédiger des études préparatoires et des monographies sur ce sujet, jusqu'alors assez peu étudié. «Il convient d'ouvrir la voie, écrivit-il, de poser des jalons, en un mot de créer le cadre et de trouver le fil qui guideront par la suite et faciliteront la rédaction définitive de l'oeuvre prévue» (Radó, 1964 : 15). Trois ans plus tard, au congrès de Lahti, en Finlande, György Radó présenta aux délégués la forme que devait prendre à ses yeux cette histoire universelle. Devant la réaction enthousiaste des participants, le Conseil de la FIT créa le Comité pour l'histoire de la traduction. L'ampleur de la tâche à accomplir était colossale : le travail projeté devait couvrir pas moins de vingt-cinq siècles, englober tous les continents et porter sur des centaines de langues. Selon cette vision des choses, «[é]tudier l'histoire de la traduction équivaut en quelque sorte à reprendre l'histoire du monde, l'histoire des civilisations, mais par le biais de la traduction» (Van Hoof, 1991 : 7). Compte tenu du travail à accomplir, de l'état des recherches en histoire de la traduction et des ressources financières et humaines limitées de la FIT, certaines personnes exprimèrent leur scepticisme sur les possibilités de mener a terme un projet aussi ambitieux. György Radó exposa néanmoins dans Babel le plan détaillé de l'ouvrage tel qu'il le concevait (Radó, 1967 : 4-8). Et les années passèrent. Bien qu'un nombre sans cesse croissant de publications soient depuis lors venues enrichir la bibliothèque de l'histoire de la traduction, il faut reconnaître que la grande synthèse historique dont rêvaient les traducteurs il y a quarante ans reste encore à écrire. Verra-t-elle jamais le jour cette «encyclopédie mondiale et exhaustive de la traduction» contenant toutes les dates et tous les faits de la «route glorieuse que l'art de la traduction a parcourue» (Radó, 1964 : 15) ? Chose certaine, l'ampleur d'un tel projet est de nature à refroidir l'ardeur des historiens les plus enthousiastes et à faire reculer les plus audacieux. Dans le même esprit qui a animé les instigateurs de ce projet initial, Jean Delisle, président du nouveau Comité pour l'histoire de la traduction, constitué lors du XIIe Congrès mondial de la FIT (Belgrade, 1990), proposa un projet de publication de moindre envergure, mais pouvant atteindre le même but : valoriser la profession de traducteur dans le monde en faisant connaître l'apport des traducteurs dans l'histoire intellectuelle et culturelle de l'humanité. Pour reprendre les mots du président fondateur de la FIT, Pierre-François Caillé, il s'agissait de montrer «le rôle immense des traducteurs, de ces soldats isolés, de ces estafettes dans la grande mêlée des idées et des cultures», lettrés qui sont souvent «des agents de profonds bouleversements idéologiques et sociaux» (Caillé, 1955 : 3). Bref, il fallait rappeler «l'éminente dignité des traducteurs dans la République des Lettres» (Larbaud, 1946 : 9). L'histoire de la traduction suscite un intérêt grandissant, en particulier depuis les années 1980. Les traductologues ont pris conscience de son importance et commencé à doter ce domaine d'études de règles méthodologiques et de modèles théoriques qui lui sont propres. Dans des communications, des articles ou des livres entiers, ils ont abordé le sujet de divers points de vue, délimité différemment les frontières du territoire à explorer, scruté le passé avec différentes lunettes. Le Comité pour l'histoire de la traduction a voulu lui aussi apporter sa contribution. L'une des premières tâches à laquelle il s'est attelé a été de recenser le plus grand nombre possible d'historiens de la traduction à travers le monde et de recueillir des renseignements sommaires sur leurs recherches. Ce travail préliminaire a

Les traducteurs, artisans de l’histoire et des identités culturelles

Ma culture n'est pas une chose fixe et à l'extérieur de moi, mais intérieure et liée à mon voyage et à mes rencontres, mes échanges, mes rapports avec le monde. Jean Marc DALPÉ 1 L'art de traduire, au sens plein de ce terme, doit devenir une science destinée à rendre plus supportables les frontières qui séparent les langues et les cultures pour faciliter une communication inter et transdisciplinaire respectueuse des caractères propres à chaque culture. André CHOURAQUI 2 En intitulant ma présentation « les traducteurs, artisans de l'histoire et des identités culturelles », je risque de me voir accusé de surestimer le rôle des traducteurs et la place qu'ils occupent dans la société. Est-ce que je ne fais pas de ces humbles serviteurs -c'est l'image qu'ils projettent individuellement -de puissants maîtres capables d'infléchir le cours de l'histoire et de remodeler les sociétés? Précisons que ce ne sont pas les traducteurs eux-mêmes qui se proclament les artisans de l'histoire et des identités culturelles, ce sont les historiens de la traduction qui leur attribuent ces nobles missions. C'est donc à l'historien de la traduction que je suis qu'incombe le fardeau de la preuve. L'histoire de la traduction, comme vous le savez, recoupe l'histoire politique, linguistique et littéraire d'un pays, l'histoire des religions, des sciences et des techniques, l'histoire des civilisations. Elle suit chez un peuple l'évolution de ses goûts et de ses intérêts et révèle une ouverture ou une fermeture aux autres. On peut difficilement apprécier l'oeuvre civilisatrice, culturelle et identitaire des traducteurs à partir de l'analyse de traductions isolées. L'examen doit porter sur de vastes ensembles de traductions 1 Poète, romancier, traducteur et homme de théâtre franco-ontarien né à Ottawa en 1957. 2 Écrivain, poète et traducteur des textes sacrés, né en 1917 et mort en 2007.

Trois portraits de traductrices polonaises. "Trzy tłumaczki" [Trois traductrices], par Krzysztof Umiński, Wydawnictwo Marginesy, Warszawa 2022, 333 pp.

Romanica Wratislaviensia, 2022

L'ouvrage "Trzy tłumaczki" de Krzysztof Umiński, publié aux éditions Marginesy, esquisse trois portraits de traductrices éminentes qui ont rendu en polonais une partie considérable des oeuvres canoniques de la littérature française et anglo-américaine. Les trois femmes auxquelles le titre sobre et succinct renvoie sont Joanna Guze, traductrice de la littérature française, connue surtout pour ses traductions des romans et essais d'Albert Camus, Anna Przedpełska-Trzeciakowska, tra, traductrice des romans de Jane Austen, de William Faulkner et de Charles Dickens, et Maria Skibniewska, auteure de la version polonaise de la trilogie de J.R.R. Tolkien "The Lord of the Rings".

Cherchons « traducticien » : De l'amateurisme au professionnalisme

Nous vivons une situation paradoxale : les nouvelles technologies sont omniprésentes mais leur aspect utilitaire n'est pas toujours bien perçu par nos étudiants qui appartiennent pourtant à la génération Y. Cet article se propose d'engager une réflexion sur l'impact actuel du numérique. Il met aussi l'accent sur la nécessité de repenser l'approche pédagogique car enseigner et apprendre à l'ère du numérique nécessitent un changement de référentiel. Et pour cause : aux multiples compétences que les apprentis-traducteurs doivent acquérir s'ajoute la compétence technologique susceptible de les aider à mieux s'adapter aux conditions de plus en plus exigeantes du marché du travail. Un mariage de raison entre traduction et informatique s'impose désormais pour donner naissance à une nouvelle catégorie de traducteurs : les « traducticiens ». « Les nouvelles technologies nous ont condamnés à devenir intelligents. Puisque nous avons le savoir et les technologies devant nous, nous sommes condamnés à devenir inventifs, intelligents, transparents. L'inventivité est tout ce qu'il nous reste. » (Serres, 2007 ; 133)  Professeur associé à l'École de Traducteurs et d'Interprètes de Beyrouth (ETIB).