Recension de M. Mazzoco, F. Trémolières et G. Waterlot (dir.), L’unversité face à la mystique. Un siècle de controverses ?, Rennes, 2018, dans Revue de l'histoire des religions, 239, 2022, p. 168-171. (original) (raw)

« L'excès et la nouveauté. Le rôle des controverses dans le processus de sécularisation à la fin du XVIIe siècle chez Arnauld, Nicole, Simon et Le Clerc” (in Éthique, politique, religions, n° 8, 2016-1, La religion philosophique des Lumières, M. Lequan (dir.), Garnier, Paris, p. 69-84.

Cet article s'intéresse à la façon dont de nouvelles représentations de l'histoire surgissent entre la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècles. Le champ religieux, les controverses religieuses (portant sur le statut du texte biblique, sur la pérennité de la tradition) constituent un lieu paradoxal mais décisif de sécularisation. L'analyse de la querelle orientale permet de préciser les détails de cette sécularisation de l'histoire à partir du religieux. MOTS-CLÉS – Sécularisation, Port-Royal, Richard Simon, Jean Le Clerc

Review : « Sylvio Hermann De Franceschi, Daniel-Odon Hurel, Brigitte Tambrun (dir.), Le Dieu Un : Problèmes et méthodes d’histoire des monothéismes. Cinquante ans de recherches françaises (1970-2020) », CER.RI [En ligne], 25 | 2023, URL : http://journals.openedition.org/cerri/6230

Le Laboratoire d'Études sur les Monothéismes (LEM, UMR 8584), qui a succédé à partir de 1998 au Centre d'Études des Religions du Livre (CERL) créé en 1970, constitue une institution à part dans le paysage de la recherche française par son objet d'étude, l'étude des trois monothéismes, et par sa méthodologie, un travail collectif qui met en relation philologues, philosophes et historiens. De fait, les actes du colloque qui s'est tenu les 12 et 13 octobre 2020 sur le Campus Condorcet pour fêter les cinquante ans de la fondation du CERL non seulement nous donnent à lire un bilan méthodologique et prosopographique de la recherche française en sciences religieuses, mais, plus encore, nous invitent à réfléchir sur les enjeux méthodologiques et institutionnels des sciences religieuses dans un paysage de la recherche internationale en constantes évolutions. 2 Ces actes s'ouvrent sur une préface de Michel TARDIEU (« Un laboratoire pas comme les autres », p. 5-21), qui fut directeur du CERL de 1984 à 1991, qui évoquent ses souvenirs hauts en couleurs, mais aussi comment, dès sa création, le CERL tire ses racines de ses

Henri de Lubac, Révélation divine, suivi d'Affrontements mystiques et d'Athéisme et sens de l'homme.(Œuvres Complètes, 1re section, vol. IV). Note historique par Éric de Moulins-Beaufort, prés. Olivier de Berranger, Paris, Le Cerf, 2006, 592 p

Archives De Sciences Sociales Des Religions, 2006

« Au commencement étaient la religion, la métaphysique et la politique.» Avant-propos, Les Dieux cachés de la science-fiction française et francophone (1950-2010), écrit en collaboration avec Patrick Bergeron.

Héritière de l'anticipation, du merveilleux scientifique et des voyages extraordinaires, la science-fiction française et francophone devait se renouveler profondément à partir des années 1950, confrontée à des changements sociétaux irrépressibles, à l'irruption de la science-fiction américaine en France et dans le reste de l'espace francophone. Quelles sont donc les forces sous-jacentes, ces « dieux cachés » qui allaient présider à une créativité singulière dans tous les domaines science-fictionnels ? La politique, la métaphysique et le religieux semblent être les soubassements essentiels d'une science-fiction écrite en français, multipliant des ponts culturels entre littérature, cinéma et bande-dessinée, entre production artistique exigeante et succès populaire. La science-fiction en France est devenue un champ culturel autonome qui subirait de nombreuses évolutions, chaque génération produisant des écrivains à la créativité singulière, dont les réflexions critiques enrichiraient ce domaine de l'imaginaire. Explorant un large spectre de la science-fiction francophone en privilégiant des approches pluridisciplinaires, de Gérard Klein à Pierre Bordage, de l'utopie à la politique, de l'écologie à la révolte, de la poésie au cyberpunk, de Chris Marker à Luc Besson, Des pionniers de l'espérance à Enki Bilal, cet ouvrage ouvre le champ de la recherche universitaire à un domaine inédit et riche, la science-fiction d'expression française des années 1950 à aujourd'hui.

2020, avec S. Fink, « Avant-propos », What a God is not : The Early History of Negative Theology / Ce qu’un dieu n’est pas : les prémices de la théologie négative, Revue d’histoire des religions, 237, p. 179-193.

Ce qu'un dieu n'est pas : les prémices de la théologie négative Avant-propos La théologie est un discours dont l'objet d'étude porte sur le divin, le ou les dieux. Elle est un concept né en Grèce à l'époque classique et trouve son origine dans un dialogue de Platon (La République II, 379 a-383 c). Or l'objet de ce discours n'est pas comme les autres, puisqu'il s'agit d'une transcendance dont on pressent rapidement qu'elle est susceptible de dépasser tant la compréhension rationnelle qu'on peut s'en faire que les catégories du langage qui tentent de l'exprimer. Le ou les dieux semblent, pour une large part, échapper à l'entreprise humaine dans sa visée épistémologique et représentationnelle. Comment, en effet, pourrait-on exprimer au sein d'un discours ou encore figurer en images ce qui semble d'emblée les outrepasser par sa réalité même. Le ou les dieux déborde(nt) le cadre limité et fini tant de la conceptualisation que de la représentation. C'est à l'examen de cette question que ce collectif sur « la théologie négative » va contribuer 1. En effet, l'une des solutions qui a vu le jour consiste en l'émergence d'une théologie négative : à défaut de 2. Le chapitre IX des « Noms divins » illustre la méthode par quatre associations de concepts : grandeur / petitesse, identité / altérité, similitude / différence, stabilité / mobilité. Voir C. Wackenheim, « Actualité de la théologie négative », Revue des Sciences Religieuses, 59, 1985, p. 147-161, ici p. 152. 3. À comparer au livre des vingt-quatre philosophes (Liber XXIV philosophorum), dans lequel on peut trouver la proposition Deus est sphaera infinita cuius centrum est ubique, circumferentia nusquam.

La tragédie religieuse de la Renaissance et le mystère médiéval : l'attirance d'un contre-modèle, Seizième Siècle, n° 6, 2010, pp. 95-105.

Seizième Siècle, 2010

La première grande fracture qui marque l'histoire de notre théâtre ancien ne se situe pas à la fin du XV° siècle, au passage du Moyen Âge à la Renaissance, comme le veut la présentation admisse en histoire littéraire, mais plutôt au milieu du XVI° siècle. Des changements et des bouleversements considérables vont marquer plusieurs siècles de la vie théâtrale : on passe d'un théâtre européen, le théâtre de la chrétienté, à un théâtre national qui illustre la langue et la littérature française ; d'un théâtre destiné avant tout à la représentation et qu'on peut dire populaire, à un théâtre littéraire soucieux de théorie, mais qui peine à trouver son public ; d'un théâtre essentiellement religieux qui illustre une vision chrétienne (les mystères) ou, quand il est profane, à qui le christianisme sert de référence contestée (la farce), à un nouveau théâtre qui se dégage de la sphère chrétienne et biblique, va chercher ses sujets de tragédies dans l'Antiquité dite païenne, n'oppose plus le sacré et le profane mais, fidèle à ses sources antiques, en revient aux catégories du tragique et du comique. Les dramaturges qui écrivent à partir de 1550 se servent des nouvelles formes dramatiques. Pourtant, ceux qui s'attachent aux sujets religieux – au XVI° siècle, la tragédie religieuse est presque exclusivement une tragédie biblique – et qui sont très généralement des Réformés militants jusqu'avant dans les années 1560, ont vu des représentations de mystères et ont même pu lire certains textes édités ; ils connaissaient donc bien ce théâtre de forme médiévale. Cela explique sans doute que, malgré l'installation d'un nouveau patron de la tragédie, on sente chez eux quelque attirance pour la forme du mystère que la doxa littéraire du temps rejetait. Ce phénomène ne concerne guère plus de cinq dramaturges, qui publient entre 1547 et 1566 : de Marguerite de Navarre à Louis Des Masures, en passant par Théodore de Bèze, Joachim de Coignac et Antoine de La Croix – des plus originaux aux plus médiocres –, tous montrent qu'ils connaissent les mystères, se laissant parfois influencer par eux tout en les refusant de quelque manière 1. C'est à démêler cette contradiction que nous nous attacherons, en examinant, après avoir posé le contexte du passage du mystère à la tragédie, les reprises et les refus du mystère par la tragédie biblique. Entre mystère et tragédie Redisons-le : les mystères constituent un genre vivant pendant la première moitié du XVI° siècle. Liée à des représentations ou à l'impression, toute une activité littéraire se poursuit : des textes anciens sont corrigés, remaniés, compilés ; des textes nouveaux, d'intérêt inégal, sont composés, le plus souvent dans des formes anciennes. Quant aux mystères de la Passion, le genre n'est plus créateur, mais les fatistes reprennent, en les retouchant, les grands textes canoniques du XV° siècle – les Passions de Gréban et de Jehan

« Le miroir aux clercs. Les disputes théologiques entre catholiques et réformés au début des guerres de Religion », dans Vincent Azoulay, Patrick Boucheron (dir.), Le mot qui tue. Une histoire des violences intellectuelles de l’Antiquité à nos jours, Seyssel, Champ Vallon, 2009, p. 130-146.

Aussi l'inimitié religieuse persiste-t-elle avec la paix mais comme souterraine ou canalisée. Puisque le roi impose aux Français de ne plus rivaliser par les armes, les deux camps, qui ne renoncent en rien au triomphe, poursuivent la guerre par d'autres moyens. Ils cherchent alors à réduire l'adversaire en usant des instruments légaux prescrits par la paix : harcèlement judiciaire, compétition politique ou encore ségrégation spatiale 1 . Si la lutte continue dans l'espace urbain et dans l'arène politico-judiciaire, c'est sans doute la conversion intellectuelle des violences qui donne les résultats les plus spectaculaires : une véritable guerre de pamphlets s'engage entre les tranchées religieuses, qui suscite non seulement une accélération inédite de la production imprimée mais favorise aussi un essor remarquable de la connaissance érudite 2 . Les disputes, rencontre orales entre théologiens catholiques et protestants, sont un exemple de ces formes intellectualisées de la compétition. Les champions des deux fois prétendent y démontrer la supériorité de leur religion, rallier l'auditoire et pourquoi pas l'adversaire.