L'émancipation des Juifs de Suisse de 1866 ou la construction du national par l'international (original) (raw)

Discriminations et émancipation des Juifs dans le canton de Neuchâtel (1818-1944), In : Revue économique et sociale. – Lausanne.- N° 2(2017), p. 27-35.

Revue économique et sociale, 2017

Depuis plusieurs décennies, l'intégration des Juifs dans le canton de Neuchâtel est présentée comme un exemple de tolérance et d'ouverture. Or, ce fut un long processus qui permit d'aboutir à la situation actuelle. Au cours du XIXe siècle, l'antijudaïsme chrétien et un antisémitisme spécifique aux milieux horlogers ont combiné leurs effets pour maintenir des discriminations qui furent abolies peu à peu, en particulier à la suite de pressions étrangères. Mots-clés: antisémitisme, culte et cimetière israélite, communauté religieuse, égalité des droits.

Pas coupables, mais responsables. Construire la Suisse après la guerre civile (1847)

2004

La Suisse passe encore aujourd'hui pour un pays dont les citoyens, responsables et raisonnables, manifestent un calme enviable. En examinant les suites de la guerre civile de 1847, gagnee par le camp « du mouvement » et sur laquelle se fonde la democratie helvetique actuelle, on distingue trois spheres decisionnelles qui contribuerent au faconnement d'un tel Etat de choses ou d'esprit. En premier lieu, il s'avere que la resorption pacifique du conflit doit beaucoup au hasard ainsi qu'aux circonstances exterieures, dont les nouveaux dirigeants helvetiques n'etaient pas responsables et sur lesquels ils n'avaient aucune emprise. A cela s'ajoute une serie de mesures legales, destinees d'une part a deresponsabiliser les vaincus puis a contraindre tous les habitants du pays a se montrer responsables dans leur usage des outils politiques nouvellement mis a leur disposition. Pour mieux astreindre leurs concitoyens a faire montre de moderation civique, les...

Les Juifs, une tache aveugle dans le récit national

Les Juifs, une tache aveugle dans le récit national, 2021

Present since the Roman Empire on the t present-day France erritory, the Jews are most often relegated to a blind spot in historiography, and this “blind spot” in the national narrative is particularly evident in school textbooks, from the Third Republic to the present day. Why are the medieval expulsions never mentioned from the modern era onwards? And when the Jews are mentioned in French history, why is it that they are most often discussed in terms of the persecutions they suffered and not the originality of their contributions? In what way is the current writing of this history still dependent on archaic models? How should it be approached in secondary and university education? What perspectives does archaeology open? What role can museums play? Archaeologists, historians, sociologists, curators, and teachers, gathered at the Museum of Jewish Art and History in 2019, shed light on these questions, which also refer to the place of minorities in the nation. Présents dès l’Empire romain sur le territoire de la France actuelle, les juifs sont le plus souvent relégués dans un angle mort de l’historiographie, et cette « tache aveugle » dans le récit national est particulièrement manifeste dans les manuels scolaires, de la IIIe République à nos jours. Pourquoi les expulsions médiévales ne sont-elles jamais mentionnées à partir de l’époque moderne ? Et, lorsqu’on évoque les juifs dans l’histoire de France, pourquoi est-ce le plus souvent sous l’angle des persécutions qu’ils eurent à subir et non de l’originalité de leurs contributions ? En quoi l’écriture actuelle de cette histoire est-elle encore tributaire de modèles archaïques ? Comment l’aborder dans l’enseignement secondaire et universitaire ? Quelles perspectives l’archéologie ouvre-t-elle ? Quel rôle les musées peuvent-ils jouer ? Archéologues, historiens, sociologues, conservateurs et enseignants, réunis au musée d’art et d’histoire du Judaïsme en 2019, éclairent ces questions qui renvoient également à la place des minorités dans la nation.

Neutralité suisse et droit d'asile au temps du fascisme et de l'antisémitisme (1930-1939)

Matériaux pour l histoire de notre temps, 2009

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La Suisse et la construction du multilatéralisme Vol. 2 Documents diplomatiques suisses sur l'histoire de la Société des Nations 1918-1946

Quaderni di Dodis | 14, 2019

https://www.dodis.ch/fr/q14 Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, la Suisse est une cheville ouvrière de la construction du multilatéralisme, ainsi qu’en témoigne la création des premières organisations internationales à Berne et, par la suite, à Genève. Après la Première Guerre mondiale, les faiseurs de paix consacrent l’essor de l’ordre international du XIXe siècle en fondant une «Société des Nations», dont Genève deviendra le siège. La Suisse joue de ce fait un rôle prépondérant, favorisée par sa neutralité, qui n’est toutefois pas sans également causer des problèmes à la Société des Nations. C’est notamment le cas en 1938, lorsque la Suisse se soustrait à ses obligations de membre en ne participant pas aux sanctions économiques contre l’Italie, qui vient d’envahir l’Éthiopie, et se construit une neutralité «intégrale». Le volume présente cinquante documents-clés sur le rôle de la Suisse dans l’établissement du multilatéralisme dans et à travers la Société des Nations entre 1918 et 1946. Cette documentation est complétée par de nombreux autres documents et ressources numériques disponibles sur la base de données en ligne Dodis. Ainsi, ce volume sert de boussole pour s’orienter au milieu des nombreuses informations contenues dans la base de données.

La Suisse, les Suisses, la neutralité et le IIIe Reich (1941-1945), In : Revue d’histoire de la Shoah, N° 203, octobre 2015 (Numéro spécial sur Les neutres d’Europe face au génocide, 1941-1945), p. 51-86.

Revue d'histoire de la Shoah, 2015

Switzerland, the Swiss, the neutrality and the 3rd reich Switzerland is all at once a financial center, a neutral country, and a political asylum. Since World War I, Swiss authorities fight immigration, and more particularly the Jewish immigration. The economic crisis and World War II reinforce this official policy. There are three decisive moments: 1938: the negotiations between Switzerland and Germany resulted in the marking of passports of German Jews with the «J»-stamps; 1942: the Swiss federal executive decided the closing of the border. As these decisions were being made, information about the murder of the Jews was increasing in Switzerland; 1945: While maintaining the structural bases of previous policies, federal authorities sought to forge an image of the Confederation as a land of asylum. This renewal of the discourse idealize the Swiss humanitarian tradition. Concepts of « accomodation » (Philippe Burrin), « grey zone » (Primo Levi) allow us to analyze complex issues to which Switzerland is confronted.

L'histoire des Juifs de France en question(s) - III : UNE INTELLIGENTSIA REPUBLICAINE JUIVE ET UN RABBINAT FAVORABLES A L’IMPERIALISME FRANÇAIS, PATERNALISTES VIS-A-VIS DES JUIFS DU MAGHREB ET HOSTILES AU... SIONISME AVANT 1914 !

Ni patrie ni frontières, 2023

A partir de 1870, un nombre significatif de Juifs deviennent médecins, avocats, enseignants, fonctionnaires et connaissent une ascension sociale. Même s’ils se marient à la synagogue et s’y rendent de temps en temps, leur pratique religieuse est de plus en plus réduite. Comme l’explique Lazare Landau (1973), avec des formulations un peu lapidaires : «Là où les bûchers avaient échoué, les décrets de la Constituante et de Napoléon réussirent. Devenus citoyens français à part entière, des milliers de juifs n’eurent plus qu’une pensée : fuir le judaïsme, s’évader de la communauté, au plus vite, avec ou sans certificat de baptême. Le désir d’assimilation favorisa les conversions bien plus que les mesures de rigueur des siècles passés. Dès le début du XIXe siècle [...], la religiosité connut une chute ininterrompue dans les communautés juives de France [...]. Dans le passé, l’essentiel, aux yeux des juifs, était le maintien de la fidélité à la tradition juive ; désormais, l’essentiel est de ne pas se distinguer de la masse des Français.» S’ils sont de moins en moins religieux, les Juifs sont de fervents patriotes, et des centaines d’entre eux deviennent officiers dans l’armée française. «Ils partagent la devise consistoriale “ Patrie et Religion ” ravivée par le projet républicain et concrétisée dans l’israélitisme puisque, selon Hyppolite Prague, des Archives israélites : ‘C’est un fait d’expérience historique que le Juif, en général, a une prédilection marquée pour les institutions démocratiques, que c’est un libéral d’instinct, un républicain-né’ [Archives israélites, 20 avril, 1914].» Durant tout le XIXe siècle, «les rabbins prennent véritablement au pied de la lettre les décisions du Grand Sanhédrin qui leur font devoir d’enseigner l’amour de la patrie» (B. Philippe, 1997). «La France est identifiée avec Sion, avec le peuple élu, le drapeau tricolore à cet étendard sacré confié à Moïse.» (F. Melzi d’Eril, 2007). Dans un texte célèbre paru en avril 1889, le rabbin Felix Meyer établit un parallèle entre la sortie d’Égypte et le déclenchement de la Révolution française – «les deux points lumineux de notre histoire» selon lui. En 1884, Théodore Reinach enjoint aux Juifs – «dès qu’ils ont cessé d’être traités en parias» – de «s’identifier de cœur et de fait avec les nations qu’ils ont adoptées» et de renoncer «aux particularités qui tendraient à les isoler de leurs concitoyens, en un mot, cesser d’être une nation dispersée, pour ne plus se considérer que comme une confession religieuse». Les écoles juives délivrent un enseignement nettement plus républicain que celui des écoles chrétiennes , et les synagogues lancent des «appels enflammés» «à l’occasion des différentes expéditions et guerres menées par la France» (idem). «Le premier grand rabbin d’Alger, un Alsacien, déclare d’emblée que “sa ligne de conduite est tracée par le ministère de la Guerre”» (sic !) «et que son objectif est d’exercer “une mission religieuse et civilisatrice”» (idem). Si, au cours du XIXe siècle, les clergés catholique et protestant ont exprimé «des réserves à l’égard du pouvoir politique, du moins à certaines périodes de l’histoire» (idem), ce n’est pas du tout le cas de la majorité des rabbins : «les ministres du culte juif manifestent une totale allégeance» à l’État et à la République, ce qui fait du judaïsme un pilier de l’ordre social. «Soyez bons Français c’est la meilleure façon de devenir bons Juifs», tel est le conseil souvent répété par les rabbins. Et cette devise sera reprise par Adolphe Crémieux au moment de la naturalisation des Juifs d’Algérie. Les différences entre les Juifs français assimilés, les Juifs étrangers récemment immigrés et les Juifs algériens naturalisés français après le décret Crémieux sont très marquées. On est loin d’une «communauté» unie, même sur le plan religieux. Les Juifs français assimilés ont parfaitement intégré le logiciel républicain-universaliste-paternaliste et ils l’appliquent sans complexes à leurs «coreligionnaires» du Maghreb.