Mikhaïl XIFARAS | Sciences Po. (original) (raw)
Papers by Mikhaïl XIFARAS
Dictionnaire des communs, Séverine Dussolier, Judith Rochfeld, Marie Cornue (dir.), Paris, PUF, 2017
Les expressions « propriété sociale » ou « fonction sociale de la propriété » circulent à partir ... more Les expressions « propriété sociale » ou « fonction sociale de la
propriété » circulent à partir de la seconde moitié du XIXe siècle dans la littérature juridique et
dans les sciences sociales. En France, ces formules deviennent centrales à la Belle Epoque et se
trouvent associées aux travaux d’Alfred Fouillé (1884), Emile Accolas (1885), Léon Duguit
(1920), Emmanuel Lévy (1896), Louis Trotabas (1930) ou George Gurvitch (1932). Ces
expressions désignent avant tout un projet politique, en l’espèce la critique d’une idéologie qu’on
peut qualifier de « libérale » selon laquelle la propriété est un droit subjectif absolu, par quoi il faut
entendre que l’ensemble des prérogatives ordinairement associées à la propriété sont concentrées
dans les mains d’un titulaire unique. Cette critique prend parfois la forme de la recherche et de la
promotion d’une conception alternative de la propriété.
The expressions social property of social function of property are circulating during the second half of the 19 th C in the legal litterature and the social sciences. In France, they become a central theme during the Belle Epoque and are often associated with of work of Fouillé, Accolas, Duguit, Lévy Trotabas or Gurvitch. These expressions are designating a political project, that of a critique of the proprietarian ideology according to which property is an absolute right. This critique takes the form of a quest for alternative forms of property.
Penser l’ancien droit privé, volume II (N. Laurent-Bonne et X. Prévost dir.), Paris, LGDJ, 2018
Cet article est conçu comme une intervention dans le débat contemporain sur le rôle que doit joue... more Cet article est conçu comme une intervention dans le débat contemporain sur le rôle que doit jouer l’histoire du droit et ses rapports avec le droit et la doctrine juridique. J’y défends la nécessité de cartographier nos conceptions contemporaines de l’histoire et leurs soubassements, de recouvrer l’historicité de l’histoire en sortant l’enquête historienne du giron de la dogmatique juridique, de préférer l’approche généalogique aux approches historiennes classiques. Je conclus en affirmant qu’on ne rend pas le passé contemporain en s’occupant du passé en tant qu’il est déjà passé comme le fait l’histoire antiquaire. Ni en liant le passé au présent par le postulat d’un temps identique et homogène. Ni en concevant ce passé comme perpétuellement disponible. On rend le passé contemporain en créant, à travers l’enquête historienne, les valeurs à venir à partir desquelles il devient possible d’évaluer le présent. Cela suppose de tracer la carte de la conscience juridique de notre temps, comme un appel à ne pas se contenter de faire ce que nous faisons parce que nous l’avons toujours fait, ou parce que c’est ce que nos maîtres nous ont appris à faire, ou parce que c’est ce qu’il faut faire pour avoir un poste. Un appel à embrasser la diversité des approches historiennes contemporaines, à nous demander comment nous les évaluons et comment nous nous situons vis-à-vis d’elles. C’est un appel encore à émanciper intellectuellement l’histoire du droit de son objet – le droit et la pensée juridique. Ou encore à désindexer l’enquête historienne des différentes déclinaisons du régime d’historicité dogmaticien. Peut-être est-ce là la condition pour sortir enfin la discipline de sa condition ancillaire. Un appel enfin à faire de l’histoire non pas pour légitimer le droit, ni pour faire du droit, mais pour que le récit historien aide à penser le droit. Ou encore, rendre le passé contemporain suppose qu’on assume tranquillement que l’enquête historienne n’a pas pour objet de dire le passé, mais de le produire en sorte qu’il serve à la critique des valeurs dominantes de notre temps par l’invention de valeurs à venir.
Colorado Law Review, 2021
For decades, we took for granted that jurists just “spoke the law.” This was good news: the law, ... more For decades, we took for granted that jurists just “spoke the law.” This was good news: the law, thanks to the continuous efforts of legal science to systematize it in a coherent manner, was rational after all. Yet, legal realism has been there along the way, raising along the way ideas of partial or absolute indeterminacy, associated or not with a thesis of the predetermination of law by sociological or ideological factors. Finally, post-realist approaches convinced us that jurists do not just “speak the law.” Better said, if “the law” is what jurists say, and if what they say cannot be known until it is said, the jurists do not “speak the law” at all. From there, understanding that the legal material was only a small part of the story, legal theory—once only busy with ontologies of norms—went to study legal actors’ behaviors.
Many chose to formalize these behaviors with economic models, whether classical or behavioral, in search of a high degree of certainty. But this approach comes at the cost of excluding actors’ motivations from the analysis. Therefore, it fails to explain why the jurists felt constrained to do what they did and the precise way they did it. And if, as Foucault says, acts of interpretation and formalization have become the two main forms of analysis of our time,” only focusing on the second can hardly be satisfactory. On the path to smoother, less formal accounts of the legal actors’ behavior, one soon encounters the metaphor of “personae” or “characters.” This Article aims to take the metaphor seriously by proposing a Theory of Legal Characters (“TLC”).
propriétés intellectuelles , 2021
Une conversation amicale à propos de la définition et des usages de la propriété intellectuelle a... more Une conversation amicale à propos de la définition et des usages de la propriété intellectuelle aujourd'hui
Droit et Philosophie , 2022
Cet article voudrait, sans prétendre à l’originalité, proposer une lecture du Conflit des faculté... more Cet article voudrait, sans prétendre à l’originalité, proposer une lecture du Conflit des facultés, dont on sait le rôle central dans l’institution d’un dispositif des savoirs qui porte son nom (le « conflit des facultés »). Ce dispositif structure encore aujourd’hui les savoirs du droit et distribue les positions épistémiques qui permettent d’en parler savamment. Cette lecture n’est pas guidée par le désir de restituer la « cohérence conceptuelle » de la pensée de Kant, ni même « ce que Kant a vraiment dit », mais plutôt d’exposer le projet à la fois épistémique et politique qui la meut. Je vais commencer par présenter ce que je comprends du projet politique de Kant (I), en exposant les gestes théoriques qui le constituent (II) et certaines des ambivalences qui l’animent (III), pour m’intéresser ensuite au conflit des facultés proprement dit, compris comme un « projet dans le projet » (IV), en sorte d’en tirer quelques conclusions exotériques (V).
This article aims at proposing a reading of the Conflict of the Faculties, a very important text which role in the institution of the dispositive of knowledges about the law has been so central its name derives from it (the conflict of the faculties without capital C). This dispositive is still structuring today the knowledges about the law and still distribute the epistemic positions from which it is allowed to talk about it learnedly. This reading is not guided by the desire to restitute the “intellectual coherence” of Kant, nor even “what Kant really said” but rather to expose the political and epistemic project which animates it. I will start by presenting what I understand Kant’s political project to be (I), by exposing its constitutive theoretical moves (II), but also some of its core ambivalences (III), to then turn to the conflict of the faculties properly speaking, which I will present as a “project within the project” (IV) in order to provide some broader conclusions (V).
Law and Critique, 2024
This paper discusses the role of Law and Legal Thinking in Critical Theory with specific referenc... more This paper discusses the role of Law and Legal Thinking in Critical Theory with specific reference to the arguments that Michael Hardt and Antonio Negri offer in their book Commonwealth. The core idea is that Critical Theory is no less radical, but much more concrete, when it is performing not only an external, but also an internal critique of the Law. It shows that the role of the law in critical theory emerges as a problem when the latter claims that 'there is no outside' and that 'the legal base of the system structures our lives.' It then discusses optimistic and pessimistic strategies to overcome the problem, and argue for a demanding strategy which consist in articulating the external and the internal critique of the law. To make this point, the paper goes back to the epistemic context in which critical attitudes are deployed (the 'Conflict of the Faculties'), describes the four theoretical moves constitutive of the historical moment in which, at the end of the 18th Century, modern law as we know it was conceived of and founded; and sketches the key moments of the history of the internal critique of the law. It then illustrates the demanding strategy with examples taken from the field of Intellectual Property, and concludes that the Law is malleable and open enough to allow the thinking and practicing of radical alternatives from within the legal system and also that alternatives spoken in the language of the law are no less radical, but certainly, more concrete than others.
Cet essai propose au lecteur un voyage à travers des thèses et des arguments philosophiques, un p... more Cet essai propose au lecteur un voyage à travers des thèses et des arguments philosophiques, un parcours de territoires conceptuels. C'est pourquoi l'ordre d'exposition est celui de la découverte, ou encore l'ordre des raisons. Il n'est peut-être pas vain de le préciser avant, de sorte que ne nous soient pas attribuées certaines positions que nous adoptons, à titre strictement provisoire, et de manière à les réfuter. Au demeurant la brièveté de l'ouvrage nous enhardit jusqu'à oser demander cet effort de retenue qui consiste à ne juger nos intentions qu'après. Nous avons en effet croisé sur· notre route pléthore de clichés -ce que Hegel appelle le bien connu, qu'il considère pour cette raison mal connu.
… pour ma part, je ne crois pas qu'il soit possible de faire comme si nos formes de représentatio... more … pour ma part, je ne crois pas qu'il soit possible de faire comme si nos formes de représentation pouvaient avoir été bouleversées de fond en comble dans le domaine de l'art, de la philosophie ou de la morale sans qu'il soit nécessaire, ou même simplement utile, d'en tirer la moindre conséquence dans le domaine du droit. » (1) NORD COMPO -Editions du Juris-Classeur 149880RQU -LA DOCTRINE EN DROIT ADMINISTRATIF -COLLOQUE Rappel p. 176 -Z49880$$$1 -31-12-09 12:20:10
C omme toutes les enquêtes sérieuses, une enquête sur les ctions juridiques doit commencer par pr... more C omme toutes les enquêtes sérieuses, une enquête sur les ctions juridiques doit commencer par préciser ce dont on parle, quel est lobjet de len-quête. La tâche est particulièrement redoutable, non seulement parce quaucune dénition de la ction juridique nest unanimement acceptée (ce qui est le destin partagé de tous les concepts intéressants) mais parce quil pourrait savérer impossible de parler sérieusement des ctions juridiques si par sérieuse-ment on entend « sans feinter ». Dans le cas des ctions juridiques, l'objet ne se contente pas d'être dicile à cerner dans une dénition, il ne cesse littéralement de se dérober. On a beau chercher dans la littérature juridique, on ne trouve aucun procédé dont on puisse dire avec certitude : « cest une ction ». On rencontre certes de nombreux exemples de ctions juridiques célèbres mais, pour chacun de ces exemples, il se trouve aussi des juristes sérieux qui refusent de considérer que ces procédés sont ctionnels. Ce nest pas seulement la dénition, cest le matériau même qui se dérobe. 1. Une première version de cet article a été écrite en 2008, au cours dune année de recherche passée dans le cadre enchanteur et accueillant de lInstitut de Recherches en Humanités de lUniversité de Kyoto, où mavait conduit la généreuse hospitalité du professeur Oura que je nai pas assez de mots pour remercier ici. Cette première version a été publiée dans la revue Zinbun (n°43, 2011). Des expo-sés publics en ont été proposés au cours du séminaire du professeur Oura au Centre des Humanités (2008), à lUniversité de Kwansei Gakuin (2008), à linvitation du professeur Hirotsugu Yamajo, puis au séminaire doctoral de lÉcole de droit de Sciences Po (2009). À chacune de ces occasions, jai eu la chance de proter de la très grande richesse des remarques et critiques des participants. Je remercie A. Kubo pour son aide très précieuse dans la préparation du premier de ces séminaires, Manuela Hesse et Didier Boyer pour leur amical soutien. Je suis particulièrement reconnaissant à Louis Assier-Andrieu, Denis Baranger, Benoît Frydman, Duncan Kennedy et Guillaume Tusseau qui ont bien voulu lire et relire, commenter et critiquer des versions antérieures de ce texte, maidant ainsi à le purger de nombre derreurs et maladresses. Celles qui ont échappé à la purge me sont imputables.
Distribution électronique Cairn.info pour Assoc. Multitudes. © Assoc. Multitudes. Tous droits rés... more Distribution électronique Cairn.info pour Assoc. Multitudes. © Assoc. Multitudes. Tous droits réservés pour tous pays.
Distribution électronique Cairn.info pour Editions Picard.
DE LA PROPRIÉTÉ AU DROIT ADMINISTRATIF § 1. Le Code civil représente bien plus, dans la tradition... more DE LA PROPRIÉTÉ AU DROIT ADMINISTRATIF § 1. Le Code civil représente bien plus, dans la tradition française, que le corps des règles applicables au droit civil l • Il a pu prétendre constituer le socle du droit français, un véritable droit commun, ce que le doyen Carbonnier a appelé la (4 constitution civile de la France .>. Par ailleurs, la propriété se pré-sente comme la clef de voûte de ce monument, son principe, l' « âme univer-selle de la législation .>2. Aussi n'est-on pas surpris de constater le triomphe incontesté, y compris chez les publicistes, de Popinion selon laquelle le régime actuel de la propriété publique résulte d'une «(transposition) dans le domaine du droit administratif des biens de la conception civiliste de la propriété, arché-type unique et incontesté de l'institution. Certes, la propriété est reconnue par la Constitution et relève à ce titre du domaine matériel de la science constitutionnelle 3 • On sait de plus qu'il incombe au juge administratif de protéger une liberté qu'il qualifie de fondamentale 4 • Surtout, la propriété publique des personnes publiques sur leurs domaines est reconnue et protégée à l'égal de la propriété des personnes privées. Pourtant, lorsqu'on en vient à se demander quels sont la nature et les caractères fonda-mentaux de la propriété, sans adjectifs et pour ainsi dire sans phrases, c'est inva-riablement vers l'article 544 du Code civil que se tournent les regards. En conséquence, la propriété publique n'est jamais conçue qu'en référence à la propriété du droit civil.
1 § 1. Paradoxes. -Bien qu'il s'en soit toujours défendu, Rousseau avait le goût du paradoxe et p... more 1 § 1. Paradoxes. -Bien qu'il s'en soit toujours défendu, Rousseau avait le goût du paradoxe et peut-être même de la contradiction. Cela n'a certes pas facilité la tâche de ses commentateurs, en tout cas de ceux qui lui ont fait crédit d'être, malgré les apparencés, un penseur rigoureux. Ajoutons que s'il est un point où l'on a pu douter de la cohérence de ses théories, c'est bien à propos du problème de la propriété, où se joue pourtant pour une large part la signification politique de l'ensemble de l'oeuvre.
2010/2 -n° 41 pages 50 à 64 ISSN 0292-0107 Article disponible en ligne à Distribution électroniqu... more 2010/2 -n° 41 pages 50 à 64 ISSN 0292-0107 Article disponible en ligne à Distribution électronique Cairn.info pour Assoc. Multitudes. © Assoc. Multitudes. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info -Institut d'Etudes Politiques de Paris --193.54.67.91 -30/08/2013 14h05. © Assoc. Multitudes Document téléchargé depuis www.cairn.info -Institut d'Etudes Politiques de Paris --193.54.67.91 -30/08/2013 14h05. © Assoc. Multitudes
Dictionnaire des communs, Séverine Dussolier, Judith Rochfeld, Marie Cornue (dir.), Paris, PUF, 2017
Les expressions « propriété sociale » ou « fonction sociale de la propriété » circulent à partir ... more Les expressions « propriété sociale » ou « fonction sociale de la
propriété » circulent à partir de la seconde moitié du XIXe siècle dans la littérature juridique et
dans les sciences sociales. En France, ces formules deviennent centrales à la Belle Epoque et se
trouvent associées aux travaux d’Alfred Fouillé (1884), Emile Accolas (1885), Léon Duguit
(1920), Emmanuel Lévy (1896), Louis Trotabas (1930) ou George Gurvitch (1932). Ces
expressions désignent avant tout un projet politique, en l’espèce la critique d’une idéologie qu’on
peut qualifier de « libérale » selon laquelle la propriété est un droit subjectif absolu, par quoi il faut
entendre que l’ensemble des prérogatives ordinairement associées à la propriété sont concentrées
dans les mains d’un titulaire unique. Cette critique prend parfois la forme de la recherche et de la
promotion d’une conception alternative de la propriété.
The expressions social property of social function of property are circulating during the second half of the 19 th C in the legal litterature and the social sciences. In France, they become a central theme during the Belle Epoque and are often associated with of work of Fouillé, Accolas, Duguit, Lévy Trotabas or Gurvitch. These expressions are designating a political project, that of a critique of the proprietarian ideology according to which property is an absolute right. This critique takes the form of a quest for alternative forms of property.
Penser l’ancien droit privé, volume II (N. Laurent-Bonne et X. Prévost dir.), Paris, LGDJ, 2018
Cet article est conçu comme une intervention dans le débat contemporain sur le rôle que doit joue... more Cet article est conçu comme une intervention dans le débat contemporain sur le rôle que doit jouer l’histoire du droit et ses rapports avec le droit et la doctrine juridique. J’y défends la nécessité de cartographier nos conceptions contemporaines de l’histoire et leurs soubassements, de recouvrer l’historicité de l’histoire en sortant l’enquête historienne du giron de la dogmatique juridique, de préférer l’approche généalogique aux approches historiennes classiques. Je conclus en affirmant qu’on ne rend pas le passé contemporain en s’occupant du passé en tant qu’il est déjà passé comme le fait l’histoire antiquaire. Ni en liant le passé au présent par le postulat d’un temps identique et homogène. Ni en concevant ce passé comme perpétuellement disponible. On rend le passé contemporain en créant, à travers l’enquête historienne, les valeurs à venir à partir desquelles il devient possible d’évaluer le présent. Cela suppose de tracer la carte de la conscience juridique de notre temps, comme un appel à ne pas se contenter de faire ce que nous faisons parce que nous l’avons toujours fait, ou parce que c’est ce que nos maîtres nous ont appris à faire, ou parce que c’est ce qu’il faut faire pour avoir un poste. Un appel à embrasser la diversité des approches historiennes contemporaines, à nous demander comment nous les évaluons et comment nous nous situons vis-à-vis d’elles. C’est un appel encore à émanciper intellectuellement l’histoire du droit de son objet – le droit et la pensée juridique. Ou encore à désindexer l’enquête historienne des différentes déclinaisons du régime d’historicité dogmaticien. Peut-être est-ce là la condition pour sortir enfin la discipline de sa condition ancillaire. Un appel enfin à faire de l’histoire non pas pour légitimer le droit, ni pour faire du droit, mais pour que le récit historien aide à penser le droit. Ou encore, rendre le passé contemporain suppose qu’on assume tranquillement que l’enquête historienne n’a pas pour objet de dire le passé, mais de le produire en sorte qu’il serve à la critique des valeurs dominantes de notre temps par l’invention de valeurs à venir.
Colorado Law Review, 2021
For decades, we took for granted that jurists just “spoke the law.” This was good news: the law, ... more For decades, we took for granted that jurists just “spoke the law.” This was good news: the law, thanks to the continuous efforts of legal science to systematize it in a coherent manner, was rational after all. Yet, legal realism has been there along the way, raising along the way ideas of partial or absolute indeterminacy, associated or not with a thesis of the predetermination of law by sociological or ideological factors. Finally, post-realist approaches convinced us that jurists do not just “speak the law.” Better said, if “the law” is what jurists say, and if what they say cannot be known until it is said, the jurists do not “speak the law” at all. From there, understanding that the legal material was only a small part of the story, legal theory—once only busy with ontologies of norms—went to study legal actors’ behaviors.
Many chose to formalize these behaviors with economic models, whether classical or behavioral, in search of a high degree of certainty. But this approach comes at the cost of excluding actors’ motivations from the analysis. Therefore, it fails to explain why the jurists felt constrained to do what they did and the precise way they did it. And if, as Foucault says, acts of interpretation and formalization have become the two main forms of analysis of our time,” only focusing on the second can hardly be satisfactory. On the path to smoother, less formal accounts of the legal actors’ behavior, one soon encounters the metaphor of “personae” or “characters.” This Article aims to take the metaphor seriously by proposing a Theory of Legal Characters (“TLC”).
propriétés intellectuelles , 2021
Une conversation amicale à propos de la définition et des usages de la propriété intellectuelle a... more Une conversation amicale à propos de la définition et des usages de la propriété intellectuelle aujourd'hui
Droit et Philosophie , 2022
Cet article voudrait, sans prétendre à l’originalité, proposer une lecture du Conflit des faculté... more Cet article voudrait, sans prétendre à l’originalité, proposer une lecture du Conflit des facultés, dont on sait le rôle central dans l’institution d’un dispositif des savoirs qui porte son nom (le « conflit des facultés »). Ce dispositif structure encore aujourd’hui les savoirs du droit et distribue les positions épistémiques qui permettent d’en parler savamment. Cette lecture n’est pas guidée par le désir de restituer la « cohérence conceptuelle » de la pensée de Kant, ni même « ce que Kant a vraiment dit », mais plutôt d’exposer le projet à la fois épistémique et politique qui la meut. Je vais commencer par présenter ce que je comprends du projet politique de Kant (I), en exposant les gestes théoriques qui le constituent (II) et certaines des ambivalences qui l’animent (III), pour m’intéresser ensuite au conflit des facultés proprement dit, compris comme un « projet dans le projet » (IV), en sorte d’en tirer quelques conclusions exotériques (V).
This article aims at proposing a reading of the Conflict of the Faculties, a very important text which role in the institution of the dispositive of knowledges about the law has been so central its name derives from it (the conflict of the faculties without capital C). This dispositive is still structuring today the knowledges about the law and still distribute the epistemic positions from which it is allowed to talk about it learnedly. This reading is not guided by the desire to restitute the “intellectual coherence” of Kant, nor even “what Kant really said” but rather to expose the political and epistemic project which animates it. I will start by presenting what I understand Kant’s political project to be (I), by exposing its constitutive theoretical moves (II), but also some of its core ambivalences (III), to then turn to the conflict of the faculties properly speaking, which I will present as a “project within the project” (IV) in order to provide some broader conclusions (V).
Law and Critique, 2024
This paper discusses the role of Law and Legal Thinking in Critical Theory with specific referenc... more This paper discusses the role of Law and Legal Thinking in Critical Theory with specific reference to the arguments that Michael Hardt and Antonio Negri offer in their book Commonwealth. The core idea is that Critical Theory is no less radical, but much more concrete, when it is performing not only an external, but also an internal critique of the Law. It shows that the role of the law in critical theory emerges as a problem when the latter claims that 'there is no outside' and that 'the legal base of the system structures our lives.' It then discusses optimistic and pessimistic strategies to overcome the problem, and argue for a demanding strategy which consist in articulating the external and the internal critique of the law. To make this point, the paper goes back to the epistemic context in which critical attitudes are deployed (the 'Conflict of the Faculties'), describes the four theoretical moves constitutive of the historical moment in which, at the end of the 18th Century, modern law as we know it was conceived of and founded; and sketches the key moments of the history of the internal critique of the law. It then illustrates the demanding strategy with examples taken from the field of Intellectual Property, and concludes that the Law is malleable and open enough to allow the thinking and practicing of radical alternatives from within the legal system and also that alternatives spoken in the language of the law are no less radical, but certainly, more concrete than others.
Cet essai propose au lecteur un voyage à travers des thèses et des arguments philosophiques, un p... more Cet essai propose au lecteur un voyage à travers des thèses et des arguments philosophiques, un parcours de territoires conceptuels. C'est pourquoi l'ordre d'exposition est celui de la découverte, ou encore l'ordre des raisons. Il n'est peut-être pas vain de le préciser avant, de sorte que ne nous soient pas attribuées certaines positions que nous adoptons, à titre strictement provisoire, et de manière à les réfuter. Au demeurant la brièveté de l'ouvrage nous enhardit jusqu'à oser demander cet effort de retenue qui consiste à ne juger nos intentions qu'après. Nous avons en effet croisé sur· notre route pléthore de clichés -ce que Hegel appelle le bien connu, qu'il considère pour cette raison mal connu.
… pour ma part, je ne crois pas qu'il soit possible de faire comme si nos formes de représentatio... more … pour ma part, je ne crois pas qu'il soit possible de faire comme si nos formes de représentation pouvaient avoir été bouleversées de fond en comble dans le domaine de l'art, de la philosophie ou de la morale sans qu'il soit nécessaire, ou même simplement utile, d'en tirer la moindre conséquence dans le domaine du droit. » (1) NORD COMPO -Editions du Juris-Classeur 149880RQU -LA DOCTRINE EN DROIT ADMINISTRATIF -COLLOQUE Rappel p. 176 -Z49880$$$1 -31-12-09 12:20:10
C omme toutes les enquêtes sérieuses, une enquête sur les ctions juridiques doit commencer par pr... more C omme toutes les enquêtes sérieuses, une enquête sur les ctions juridiques doit commencer par préciser ce dont on parle, quel est lobjet de len-quête. La tâche est particulièrement redoutable, non seulement parce quaucune dénition de la ction juridique nest unanimement acceptée (ce qui est le destin partagé de tous les concepts intéressants) mais parce quil pourrait savérer impossible de parler sérieusement des ctions juridiques si par sérieuse-ment on entend « sans feinter ». Dans le cas des ctions juridiques, l'objet ne se contente pas d'être dicile à cerner dans une dénition, il ne cesse littéralement de se dérober. On a beau chercher dans la littérature juridique, on ne trouve aucun procédé dont on puisse dire avec certitude : « cest une ction ». On rencontre certes de nombreux exemples de ctions juridiques célèbres mais, pour chacun de ces exemples, il se trouve aussi des juristes sérieux qui refusent de considérer que ces procédés sont ctionnels. Ce nest pas seulement la dénition, cest le matériau même qui se dérobe. 1. Une première version de cet article a été écrite en 2008, au cours dune année de recherche passée dans le cadre enchanteur et accueillant de lInstitut de Recherches en Humanités de lUniversité de Kyoto, où mavait conduit la généreuse hospitalité du professeur Oura que je nai pas assez de mots pour remercier ici. Cette première version a été publiée dans la revue Zinbun (n°43, 2011). Des expo-sés publics en ont été proposés au cours du séminaire du professeur Oura au Centre des Humanités (2008), à lUniversité de Kwansei Gakuin (2008), à linvitation du professeur Hirotsugu Yamajo, puis au séminaire doctoral de lÉcole de droit de Sciences Po (2009). À chacune de ces occasions, jai eu la chance de proter de la très grande richesse des remarques et critiques des participants. Je remercie A. Kubo pour son aide très précieuse dans la préparation du premier de ces séminaires, Manuela Hesse et Didier Boyer pour leur amical soutien. Je suis particulièrement reconnaissant à Louis Assier-Andrieu, Denis Baranger, Benoît Frydman, Duncan Kennedy et Guillaume Tusseau qui ont bien voulu lire et relire, commenter et critiquer des versions antérieures de ce texte, maidant ainsi à le purger de nombre derreurs et maladresses. Celles qui ont échappé à la purge me sont imputables.
Distribution électronique Cairn.info pour Assoc. Multitudes. © Assoc. Multitudes. Tous droits rés... more Distribution électronique Cairn.info pour Assoc. Multitudes. © Assoc. Multitudes. Tous droits réservés pour tous pays.
Distribution électronique Cairn.info pour Editions Picard.
DE LA PROPRIÉTÉ AU DROIT ADMINISTRATIF § 1. Le Code civil représente bien plus, dans la tradition... more DE LA PROPRIÉTÉ AU DROIT ADMINISTRATIF § 1. Le Code civil représente bien plus, dans la tradition française, que le corps des règles applicables au droit civil l • Il a pu prétendre constituer le socle du droit français, un véritable droit commun, ce que le doyen Carbonnier a appelé la (4 constitution civile de la France .>. Par ailleurs, la propriété se pré-sente comme la clef de voûte de ce monument, son principe, l' « âme univer-selle de la législation .>2. Aussi n'est-on pas surpris de constater le triomphe incontesté, y compris chez les publicistes, de Popinion selon laquelle le régime actuel de la propriété publique résulte d'une «(transposition) dans le domaine du droit administratif des biens de la conception civiliste de la propriété, arché-type unique et incontesté de l'institution. Certes, la propriété est reconnue par la Constitution et relève à ce titre du domaine matériel de la science constitutionnelle 3 • On sait de plus qu'il incombe au juge administratif de protéger une liberté qu'il qualifie de fondamentale 4 • Surtout, la propriété publique des personnes publiques sur leurs domaines est reconnue et protégée à l'égal de la propriété des personnes privées. Pourtant, lorsqu'on en vient à se demander quels sont la nature et les caractères fonda-mentaux de la propriété, sans adjectifs et pour ainsi dire sans phrases, c'est inva-riablement vers l'article 544 du Code civil que se tournent les regards. En conséquence, la propriété publique n'est jamais conçue qu'en référence à la propriété du droit civil.
1 § 1. Paradoxes. -Bien qu'il s'en soit toujours défendu, Rousseau avait le goût du paradoxe et p... more 1 § 1. Paradoxes. -Bien qu'il s'en soit toujours défendu, Rousseau avait le goût du paradoxe et peut-être même de la contradiction. Cela n'a certes pas facilité la tâche de ses commentateurs, en tout cas de ceux qui lui ont fait crédit d'être, malgré les apparencés, un penseur rigoureux. Ajoutons que s'il est un point où l'on a pu douter de la cohérence de ses théories, c'est bien à propos du problème de la propriété, où se joue pourtant pour une large part la signification politique de l'ensemble de l'oeuvre.
2010/2 -n° 41 pages 50 à 64 ISSN 0292-0107 Article disponible en ligne à Distribution électroniqu... more 2010/2 -n° 41 pages 50 à 64 ISSN 0292-0107 Article disponible en ligne à Distribution électronique Cairn.info pour Assoc. Multitudes. © Assoc. Multitudes. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info -Institut d'Etudes Politiques de Paris --193.54.67.91 -30/08/2013 14h05. © Assoc. Multitudes Document téléchargé depuis www.cairn.info -Institut d'Etudes Politiques de Paris --193.54.67.91 -30/08/2013 14h05. © Assoc. Multitudes
Cet essai propose au lecteur un voyage à travers des thèses et des arguments philosophiques, un p... more Cet essai propose au lecteur un voyage à travers des thèses et des arguments philosophiques, un parcours de territoires conceptuels. C'est pourquoi l'ordre d'exposition est celui de la découverte, ou encore l'ordre des raisons. Il n'est peut-être pas vain de le préciser avant, de sorte que ne nous soient pas attribuées certaines positions que nous adoptons, à titre strictement provisoire, et de manière à les réfuter. Au demeurant la brièveté de l'ouvrage nous enhardit jusqu'à oser demander cet effort de retenue qui consiste à ne juger nos intentions qu'après. Nous avons en effet croisé sur· notre route pléthore de clichés -ce que Hegel appelle le bien connu, qu'il considère pour cette raison mal connu.
Le droit, entre théorie et critique, sous la direction de Julie Saada et Mikhaïl Xifaras, décembr... more Le droit, entre théorie et critique, sous la direction de Julie Saada et Mikhaïl Xifaras, décembre 2016.