Les sciences sociales à l’épreuve de l’expertise (original) (raw)

L’expertise comme équipement politique de la société civile

Questions de communication, 2002

L'article s'attache à montrer que l'expertise et la contreexpertise sont deux équipements relativement stabilisés de la société civile. À mesure que les sociétés dites « du risque », montrent leur grande capacité à « limiter la casse » en abaissant les seuils d'exigence pour l'entrée dans les dispositifs d'expression des pratiques sociales, elles montrent aussi qu'elles doivent accepter d'être des sociétés d'incertitude. Cette incertitude donne lieu, entre experts et entre experts et nonexperts, à de nombreux malentendus que l'on peut rapporter à l'ambiguïté des formes de réflexivité qui s'y développent. Au coeur de ce malentendu se trouve la revendication d'expertise des personnes ordinaires. Le succès croissant de cette revendication modifie en profondeur l'acte d'expertise et contraint de nombreux experts à des stratégies d'adaptation : dès lors, les experts tendent à manifester leur expertise en assurant la coordination de compétences distribuées, en transférant leurs compétences initiales sur de nouveaux terrains.

Les savoirs des sciences sociales

2015

Photo de couverture Collage-pastel (détail) d'Albert Dupin, 1993, coll. et photo d'A. Vidal. La loi du 1 er juillet 1992 (code de la propriété intellectuelle, première partie) n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article L. 122-5, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans le but d'exemple ou d'illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » (alinéa 1 er de l'article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon passible des peines prévues au titre III de la loi précitée.

L’analyse sociale au sein d’une société habilitante

Sociologie et sociétés, 2013

Les perspectives fondées sur les parcours de vie jouent seulement un rôle modeste dans l’élaboration des politiques sociales actuelles. Cependant, une fois que les concepts de « parcours de vie » seront utilisés sur une base régulière en statistiques sociales et que les outils analytiques de soutien seront entièrement développés, ces perspectives auront le potentiel d’améliorer de façon radicale l’analyse de politiques concrètes. Afin de donner une idée générale de la portée de ce changement, le présent article examine un ancien cadre de « comptabilité sociale », élaboré il y a environ trois décennies, afin d’appuyer la politique sociale de cette période préinformatique, axée sur le gouvernement et modelée sur la pensée de l’État-providence. L’article compare ce cadre avec le cadre « Olivia » actuel, créé pour appuyer le concept de société habilitante de la politique sociale en émergence axée sur le citoyen, en cette ère de l’information. La principale différence réside dans l’élarg...

Les phénoménologies à l’épreuve des sciences

In J. Leclercq et P. Lorelle (dirs.), Considérations phénoménologiques sur le monde, 2020

Depuis la volonté husserlienne d’instituer la phénoménologie comme « une science rigoureuse » jusqu’aux recherches contemporaines visant à « naturaliser la phénoménologie », la phénoménologie s’est toujours pensée dans son rapport aux sciences. Tantôt pour nourrir l’ambition d’une archi-science, tantôt pour corriger ou infléchir les méthodes des sciences positives, tantôt pour rejeter radicalement l’ambition scientifique en tant que telle, tantôt pour renouer un dialogue et négocier une répartition des tâches. Nous essayerons de dégager un bilan de ces relations et de voir dans quelle mesure les démarches phénoménologique et scientifique correspondent à des projets intellectuels compatibles. A notre sens, la phénoménologie n’est viable qu’en reconsidérant son rapport aux sciences ainsi qu’aux exigences propres à la pensée philosophique.

Deux points de vue de “ Sciences en Société ”

2009

Administateur général du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), au Musée des arts et métiers Mesdames, Messieurs, chers collègues, chers amis, cher Jean-Pierre, merci à toi et au président Jouzel de nous avoir demandé de vous accueillir à ces journées.

Cultiver d’autres expertises sur les sciences et les technologies

Les controverses touchant aux sciences et aux nouvelles technologies ont, bon gré, mal gré, démontré les limites d'une expertise scientifique qui se conçoit dans les termes trop étroits d'un positivisme rationaliste. Elles ont déstabilisé, au coeur d'une des institutions centrales de la modernité -la science -l'autorité de la « chose prouvée », au sens de ces faits objectifs qui s'imposent au collectif sans autre forme de procès, précisément parce qu'il devient de plus en plus compliqué de désenchevêtrer ces entités aux multiples facettes, ces « hybrides » . Dès lors, sous l'effet de cette déstabilisation, toute une série d'ouvertures des processus décisionnels ont vu le jour, à d'autres types d'expertise, ou encore de multiples initiatives de « participation du public ». À l'heure où la question de l'expertise et de ses limites devient centrale pour le devenir de nos sociétés démocratiques (voir Bastenier, ce numéro), l'occasion est belle de revenir sur les dynamiques de l'expertise dans le domaine des sciences et des technologies. Mais avec une mise en garde préalable: il faut se garder d'en faire prématurément le récit d'une success story, et ériger les tentatives participatives qui ont vu le jour jusqu'à présent en une panacée dont les vertus suffiraient, à elles seules, à éteindre les contestations -ce qui suppose déjà qu'atteindre un tel objectif d'extinction des controverses soit louable en soi. Cette contribution propose donc de revenir sur l'expertise « traditionnelle » et de situer, dans une perspective critique, les dispositifs conçus pour élargir le spectre de la décision politique, lorsqu'elle se rapporte aux sciences et aux technologies.

Expertise scientifique et gestion de la contestabilité sociale en présence d'acteurs à visées stratégiques

2005

Différents auteurs prêtent aux dispositifs d'expertise élargie aux différentes parties prenantes une capacité à réunir les conditions favorables à l'émergence d'états des savoirs partagés utiles pour le choix et la mise en oeuvre de stratégies de prévention de risques collectifs potentiels encore incertains et controversés. Sur la base du modèle de la Gestion contestable, l'article étudie les implications de l'hypothèse que certains agents engagés dans la contestation sociale, poursuivant un objectif d'action sur la collectivité, adoptent des comportements stratégiques dans la gestion de leur participation à l'expertise. L'un des buts alors envisagés est, pour ces agents, de parvenir à l'autonomisation du processus de contestation d'une activité, d'une technique ou d'un produit par rapport à la construction scientifique des faits et des repères. Cette situation doit être prise en compte par les autres agents pour déterminer s'ils ont intérêt à participer à l'expertise collective et a des implications pour l'organisation de l'expertise scientifique.