Les jardins de la Gara. Un domaine genevois du XVIIIe siècle avec des jardins d’Erik Dhont et un labyrinthe de Markus Raetz (table des matières et introduction) (original) (raw)

« De l’hortus conclusus au labyrinthe intérieur : promenade arcadique dans les jardins de la Renaissance/Vom hortus conclusus zum inneren Labyrinth. Ein arkadischer Spaziergang durch die Gärten der Renaissance », , 2022, p. 12-33.

Regards Croisés. Revue franco-allemande d'histoire de l'art, d'esthétique et de littérature comparée, 12, 2022

HÉRITAGES ANTIQUES ET MÉDIÉVAUX Étymologiquement, le mot « jardin » vient du francique « gart », « gardo », qui signifie clôture. En effet, il s'agit dès l'origine d'un espace délimité au sein d'un territoire rural ou urbain, qui, selon la célèbre définition de Michel Foucault, est « la plus petite parcelle du monde et puis c'est la totalité du monde. Le jardin c'est, depuis le fond de l'Antiquité, une sorte d'hétérotopie heureuse et universalisante ». 1 En d'autres termes, le jardin est un espace séparé de la vie quotidienne par une clôture et qui renvoie à d'autres espaces, réels ou irréels. Les jardins de la Renaissance sont de parfaits exemples de ces hétérotopies puisque, selon les cas, ils renvoient à des espaces sacrés mythiques et chrétiens, à des contrées géographiquement lointaines, à des temps du passé-Foucault parle également d'« hétérochronie »-, au cosmos platonicien. L'objet de cette étude est d'examiner les relations entretenues entre certains de ces jardins de la Renaissance et le lieu autre que constitue l'Arcadie et que, toujours selon la définition de Michel Foucault, l'on pourrait qualifier d'« utopie », c'est-à-dire un emplacement sans lieu réel mais qui entretient avec ce dernier « un rapport général d'analogie directe ou inversée ». 2 En effet, le monde poétique de l'Arcadie défini et raconté par les Idylles de Théocrite puis par les Bucoliques de Virgile, même s'il n'est pas physiquement clos ni géographiquement déterminé, malgré son nom, est détaché tant du monde réel et actif, que de l'Olympe mythologique. Ni Théocrite ni Virgile ne situent leur univers pastoral dans la région géographique aride et peu hospitalière de l'Arcadie, mais ils la transfèrent vers leur propre territoire-la Sicile pour Théocrite et la région de Mantoue pour Virgile-en lui conférant des caractéristiques topologiques largement idéalisées, plus aptes à exprimer l'enchantement du décor naturel. En outre, les croyances de l'Arcadie réelle laissent ici place à Pan, aux nymphes. 3 Des bergers peuplent également ce monde, et se consolent de leurs déboires amoureux ainsi que des disgrâces de la vie politique réelle, grâce à la contemplation de la nature, au lyrisme et au travail pastoral. Il s'agit donc d'un lieu amène ponctué de jalons bucoliques tels que la source fraîche, l'ombrage d'un arbre, la fraîcheur d'une grotte. Contrairement à l'Âge d'or ou au jardin d'Éden qui restent rêvés, inaccessibles (Virgile, Bucoliques, IV, v. 55-58), l'Arcadie maintient un lien avec le monde réel : la fragilité terrestre, les passions violentes, le passage du temps historique y sont soignés par le chant de Pan et la musique des sources, mais les personnages sont toujours

« Place du bassin et spectation dans le jardin de Gaule Narbonnaise au Haut-Empire : problèmes de typo-chronologie », dans Archéologie des jardins : analyse des espaces et méthode d’approche, sous la dir. de A.-M. Guimier-Sorbets et P. Van Ossel, ed. Monique Mergoil, janvier 2014, p. 35-46.

Les récentes découvertes de maisons à jardin en Gaule romaine, particulièrement en Narbonnaise, confirment l’imitation des modes italiennes dans l’architecture domestique urbaine. Mais souvent, faute de fouilles méticuleuses des espaces découverts ou d’analyses palynologiques systématiques, ce sont les bassins d’agrément qui le plus fréquemment font apparaître le jardin. L’analyse de leur apparition chronologique permet d’appréhender l’évolution des formes et des modes au sein d’une province, ainsi que leurs modalités de diffusion. L’élaboration de cette typo-chronologie a permis de constater une multiplication de la construction des pièces d’eau dans les espaces plantés des maisons urbaines, entre le Ier et le IIe siècle, ainsi que la diffusion du bassin rectangulaire à abside semi-circulaire en façade, ou celle du bassin à bras, surreprésenté en Narbonnaise, allant jusqu’au développement d’une mode locale à Vienne/Saint-Romain-en-Gal. Certaines des formes attestées dans d’autres provinces du monde romain restent absentes dans cette partie de l’Empire. L’utilisation de jeux d’eau, l’emploi de l’abside semi-circulaire sur un des côtés du bassin, ainsi que l’emplacement de celui-ci dans le jardin, sont autant de dispositifs qui outillent la manière dont on analyse le spectacle du lieu : les choix de mise en scène du jardin par les propriétaires gallo-romains en font un lieu de spectation, qu’il s’agisse d’attirer l’attention du visiteur par l’arrivée de l’eau dans le bassin ou par l’emplacement de ce dernier, en lien direct avec les pièces de réception. En dépit de la rareté de leur découverte in situ, des réseaux de tuyauterie spécifique mettent en scène les jeux aquatiques soit directement par des jets, soit à travers des sujets crachant de l’eau, participant ainsi au décor iconographique du jardin. L’emplacement des pièces d’eau dans l’espace du jardin est pratiquement toujours pensé en fonction de la salle de réception que le propriétaire cherche à mettre en valeur. Dans les plus belles demeures, la multiplication et la succession des pièces d’apparat permet donc une riche déclinaison des formes de l’eau dans le jardin, tandis que l’adaptabilité des modes italiques et les variétés qui en découlent, donnent naissance à des formes originales. Malgré une concentration des exemples en Narbonnaise, la permanence des modèles semble attestée pour toutes les maisons de l’élite de Gaule romaine, à travers la mise en scène du statut social des propriétaires, dont la place du bassin et l’image qu’il projette dans le jardin sont révélateurs. Les formes ornementales de l’eau dans l’architecture domestique des provinces de Gaule romaine ne sont pas sans rappeler celles que l’on rencontre dans le reste de l’Empire. Cependant elles attestent d’un riche éventail de styles et de spécificités locales.

CRANGA (Françoise et Yves), L'archéologie dans les jardins de Provence, Journées d'étude des 8 et 9 septembre 2022 Maison du Parc naturel régional du Luberon, Apt (Vaucluse) Bilan et perspectives par Yves Cranga, conservateur du patrimoine, Françoise Cranga, historienne

CRANGA (Yves et Françoise), L'archéologie dans les jardins de Provence, journée d'études, 8 et 9 septembre 2022, 2022

Le cycle des journées de réflexion consacrées à la connaissance et la mise en valeur patrimoniales des jardins de Provence, avait choisi cette année le thème de l'archéologie. Ces rencontres, orchestrées par la Direction régionale des affaires culturelles de Provence-Alpes-Côte d'Azur (Manon Hansemann, directrice du pôle patrimoines, architecture et espaces protégés, Jean-Baptiste Boulanger, conservateur régional des monuments historiques) et l'association Parcs et Jardins de Provence-Alpes-Côte d'Azur (Dominique Borgeaud, présidente), ont bénéficié de la collaboration scientifique de Robert Jourdan, conservateur général du patrimoine (h). Elles ont souhaité mettre en évidence, par la succession des intervenants et le choix de visites démonstratives, les espoirs et les limites d'une science renouvelée et prospective.

ALLIMANT-VERDILLON (Anne), Jardins historiques : de l’archéologie à la restauration, définition des protocoles, 2017

Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, 2017

Consultable en ligne ici : https://journals.openedition.org/crcv/15334 À la lumière des fouilles archéologiques menées depuis 1993 en France, le jardin dévoile sa vraie nature : celle d’un espace artificiel, véritable architecture de terre et d’eau, pensé et conçu en fonction du terrain qu’il occupe, doté de « fondations » et d’aménagements complexes destinés à assurer sa pérennité. Appréhender de tels concepts ne peut cependant se faire sans la mise au point de processus spécifiques. L’archéologie des jardins, de par les matériaux qu’elle traite – de la terre dans de la terre –, mise en œuvre autour d’un patrimoine vivant, inscrite au sein de protocoles dont l’étendue va du diagnostic jusqu’à la restauration, fait partie de ces domaines de recherche pour lesquels il a fallu dépasser les prérogatives de la seule discipline archéologique. Car, à la différence des fouilles préventives, effectuées préalablement à la destruction totale ou partielle des sites, l’archéologie appliquée à un projet de restauration de jardin revêt un aspect inversement constructif. Pour cela, l’archéologue se doit de fournir des contenus susceptibles non seulement de faire progresser la recherche, mais aussi d’aider les restaurateurs dans leur future intervention.

Pailler Y., Ferrette R., Maligorne Y., Simon L., Stéphan P., Bourhis E., Chaigne V., Duigou L., Le Meneah F., Boulinguiez P., Paitier H. et Delage R. (2014) - Hent Trégoné en Fouesnant (Finistère) : une maison rurale gallo-romaine

Aremorica, études sur l'ouest de la Gaule romaine, Centre de recherche bretonne et celtique, 6, p. 115-143, 2014

La découverte du bâtiment de Hent Trégoné vient confirmer, plus de trente après la reprise de la fouille de la villa du Cavardy, le potentiel en vestiges gallo-romains du secteur Saint-Evarzec-Fouesnant. Malgré des parallèles évidents avec certaines constructions de la pars rustica, à l’image de granges, le bâtiment correspond bien à un habitat organisé autour d’un couloir axial qui doit desservir un étage, au moins au-dessus de la salle D. Son plan le rattache aux maisons rectangulaires à galerie (A) et pièces symétriques aux angles (B et C) définies par C. Gandini. Ce type se retrouve sur de nombreuses résidences rurales de Bretagne et plus généralement du grand quart nord-ouest de la Gaule et du centre. L’utilisation de la pierre lors de la réalisation partielle ou intégrale des élévations, comme en témoignent les éboulis situés dans l’environnement du bâtiment, affirme aussi une certaine aisance financière au regard des petits fermes régionales du Haut-Empire aux architectures de terre et bois. Pour autant, la lecture critique montre que l’édifice ne peut, dans le contexte restreint du diagnostic, être considéré comme une villa, c’est-à-dire le siège d’une exploitation agricole et le lieu de résidence secondaire d’une famille de l’élite des Osismes. Sa superficie très réduite, l’absence de pièce de représentation, d’éléments de décor mural ou de pavage, trahissent en effet le caractère modeste de la composition. En l’état actuel de l’information, le qualificatif de ferme apparait plus adéquat. Il peut désigner une exploitation autonome, abritant sous le même toit habitat et partie productive. Une proposition plus positive intègre le bâtiment dans un ensemble plus vaste qui dépasse en superficie le cadre de l’intervention. L’édifice pourrait alors correspondre à la demeure d’un intendant et être rattaché à une villa dont la pars urbana resterait à découvrir. On terminera en précisant que, d’après les quelques fouilles effectuées, le plan à galerie de façade se diffuse en Bretagne à partir des Flaviens. On peut citer à titre d’exemple les bâtiments du Cavardy, du Valy-Cloistre et de La Guyommerais-phase 3. Ce terminus n’est pas incompatible avec les quelques jalons chronologiques fourni par le mobilier céramique.

« Et in Arcadia ego » Du lieu fantasmé au lieu vécu : Grignan, un locus amoenus dans le monde de l’après - guerre chez Ph. Jaccottet?

Conference at PARIS IV SORBONNE, JUNE 2016, available here : http://www.cellf.paris-sorbonne.fr/sites/default/files/articles/arcadia\_ego\_meydit.pdf Si le locus amoenusest presque toujours né d’un divorce avec l’histoire, cette notion de divorce prend une profondeur inédite après 1945. Le trouble sans précédent dans lequel se trouve le monde de l’après-guerre implique nécessairement pour le topos quelques changements de paradigme, qui me semblent s’incarner dans la poésie de Philippe Jaccottet. Comme l’écrit Renée Ventresque dans « Le locus amoenus: variations autour du paysage idéal », « sous quelle(s) forme(s) le locus amoenus est-il aujourd’hui capable de survivre aux images noires et blanches des plaines peuplées d’ombres, dans l’odeur des crématoires ou au spectacle des villes convulsées sous le feu tombé du ciel ? Utopie obscène ? Havre imaginaire ? Halte désillusionnée ? » Le poète, après 1945, peut-il encore s’offrir le luxe de l’inactuel et de la tranquille harmonie qu’il abrite ?