Albert Thomas, un ministre socialiste dans la Russie entre deux révolutions (avril-juin 1917) (original) (raw)

Albert Thomas, figure du socialisme réformiste

Albert Thomas, un des trois ministres socialistes pendant la Grande Guerre, veut faire de son ministère le laboratoire in vivo des idées réformistes théorisées avant-guerre. Une expérience reniée par la SFIO la paix revenue, marginalisant durablement la tendance réformiste au sein du socialisme français.

Octobre 1917, le Thermidor de la Révolution russe

Éditions du Monde libertaire, 2003

La révolution russe a longtemps été un enjeu politique ; elle a été« instrumentalisée », utilisée par les propagandes diverses, chacune ne retenant que les aspects qui confirmaient sa propre optique de l’histoire,ou qui convenaient à sa propre perspective du présent. Le mouvement libertaire n’échappe pas à cette tendance, dans la mesure où il axe son discours sur la révolution sur deux événements portés à un statut quasi mythique, le mouvement makhnoviste et l’insurrection de Kronstadt. Quoique nous y fassions mention à l’occasion, nous avons délibéré-ment choisi de ne pas insister sur ces deux événements, que nous ne sous-estimons évidemment pas, mais qui sont largement décrits et ana-lysés par ailleurs, et au sujet desquels nous ne saurions que conseiller au lecteur de s’informer auprès des sources détaillées accessibles. L’insistance mise par les libertaires sur le mouvement makhnoviste en Ukraine a abouti à occulter d’une part l’existence d’un important mouvement anarchiste dans les centres industriels d’Ukraine, et d’autre part l’activité du mouvement anarchiste en Russie même. Quant à l’insurrection de Kronstadt, en 1921, elle n’est que la conclusion d’un processus de plu-sieurs années de contre-révolution et ne saurait donc expliquer cette contre-révolution. Notre étude s’arrête à cette date, qui est aussi celledu Xe congrès du parti communiste russe.

1917. La Russie et les Russes en révolutions

L'histoire en général, et celle des révolutions en particulier, s'incarne paradoxalement dans des figures de proue. Les deux Révolutions russes, de février puis d'octobre 1917, sont ainsi happées par le rôle et les personnalités de Nicolas II, Lénine, Staline, Trotski, ou encore Kerenski. Pourtant, le grand absent du tableau en est l'acteur principal : le peuple. C'est à sa rencontre que part cette synthèse écrite à partir d'archives, notamment cinématographiques, totalement inédites. Citadins, paysans, ouvriers, monarchistes, socialistes-révolutionnaires, mencheviks ou bolcheviks, tous vivent une année sans pareille, où le chaos permanent le dispute aux difficultés du quotidien ; la propagande et les manifestations de masse aux manœuvres d'appareils conduites par une poignée de militants expérimentés. De Petrograd à Moscou, en passant par les régions éloignées, l'auteur analyse, raconte et explique un Empire en décomposition et une société confrontée à la plus grande crise de son histoire.

CHOPARD Thomas, Le Martyre de Kiev-1919. L'Ukraine en révolution entre terreur soviétique, nationalisme et antisémitisme, Paris : Vendémiaire, 2015 ; 285 p.

Connexe, Les espaces postcommunistes en question(s), 2017

À l'approche du centenaire de la Révolution russe, on ne peut que constater le retard persistant de l'historiographie française dans ce domaine et particulièrement en ce qui concerne la guerre civile. Pendant longtemps, la seule histoire disponible en français était celle du défunt militant d'extrême-droite Dominique Venner 1. Ultérieurement, Jean-Jacques Marie a fait mieux que de rééquilibrer le paysage éditorial. En brossant le tableau des conflits entre Rouges, Blancs mais aussi Verts (bandes paysannes) à partir de la documentation exhumée après 1991, il a fourni une introduction utile et vivante 2. Toutefois, l'aspect de la question qui a connu un véritable renouvellement historiographique est celui des violences, avec le courant initié par Nicolas Werth. Il reste qu'en intitulant sa contribution au fameux Livre noir du communisme « Un État contre son peuple », il présentait les événements de 1917 à 1922 moins comme des affrontements que comme un processus unilatéral de répression 3. Tout en s'inscrivant dans cette lignée, le livre de Thomas Chopard élargit la perspective en retraçant l'ensemble des antagonismes qui ont agité la région de Kiev en 1919. Travaillant à une thèse sur les violences contre les populations juives d'Ukraine de 1917 à 1924 (thèse qu'il a depuis soutenue avec succès), Thomas Chopard maîtrise les sources et s'appuie ainsi sur un vaste corpus d'archives soviétiques conservées à Kiev et à Moscou, complété par celles des organisations juives. Le choix d'évoquer Kiev est judicieux car la ville est à l'épicentre du conflit : elle change de mains neuf fois entre janvier 1918 et mai 1920. L'an 19 voit se succéder les nationalistes ukrainiens de Petlioura, les bolcheviks puis les troupes blanches de Dénikine, avant la victoire quasiment définitive des Rouges en décembre. En culminant avec une vague de pogromes d'une cruauté sans précédent 4 , cette année marque assurément le pire moment de la guerre civile. Après avoir fait le portrait d'une ville multiethnique, T. Chopard entreprend d'écrire une « histoire au ras du sol » de l'année terrible. La « ville convoitée » est un enjeu pour des belligérants qui entendent « conquérir et administrer » (p. 23). La conquête est le résultat d'opérations militaires qui terrorisent la population. Elle sera ensuite soumise aux exactions des troupes victorieuses, exactions prenant le caractère d'une vengeance sur les représentants des autorités déchues. La prise en main de l'administration locale, avec un subtil dosage d'épuration et de recyclage du personnel, est effective comme affirmation d'un pouvoir et elle permet la prise de mesures idéologiquement symboliques. Par contre, elle échoue à remettre en ordre de marche les infrastructures utiles à la population.

Violences et révolution sociale dans les campagnes russes de 1917

« Les violences avant la Shoah », n°189, 2008

The peasant revolution of the late imperial Russia exploded, between February and October 1917 – while hundreds of soldiers abandoned the frontlines. The main victims of the rural violence were not the expropriated great landlords, but the “separators”, i.e. peasants who had left the village communal organisation of agricultural work to develop their private farms. Other non-peasant villagers were also progressively expelled: the first consequence of the agrarian troubles was a “peasanisation” of the countryside. The second was the temporary triumph of the collective over the individual, however the February democratic revolution abolished social “estates” and made each peasant a citizen equal to the others. The simple economical violence (stealing) was perpetrated separately by soldiers or villagers. On the contrary, the looting of great proprieties often associated the whole community of peasants and outside soldiers in a quite organised attack completed by a fire. The last was not the symbol of a “brutalisation” caused by the war experience, but rather the final burst of ancient local hatred when authority collapsed. If psychological violence was frequent between peasants, murders were rare, almost always committed by soldiers. However, the ubiquity of soldiers appears to be a phantasm rather than reality; but fighters did encourage the more violent episodes and bring weapons to the countryside. The village members of the Socialist-Revolutionary Party did not lead the movement either. The political violence of 1905-1907 they had promoted was not related to the agrarian movement of 1917 by its location, actors or persons slogans. Less dangerous and deadly than the war itself, less brutal and radical than the Russian civil war (1918-1921), the violence of 1917 primarily intended to defend a disappearing social system, which lasted until the Great Turn of 1929-1930.

Pierre Pascal, Journal de Russie (1928-1929)

2018

Quatre volumes du journal de Russie de Pierre Pascal, couvrant les années 1916 à 1927, avaient été édités de son vivant. Le journal qu’il a tenu au cours des années 1928 et 1929, en revanche, était resté en l’état de manuscrit et n’avait pas été annoté ni commenté par l’auteur lui-même. Il est enfin publié, grâce à l’énorme travail fourni par Jacques Catteau, Sophie Cœuré et Julie Bouvard pour composer ce texte et rédiger les multiples notes indispensables au lecteur (sans oublier l’important..

Saint-Victor et le Carmel : le cas de Thomas de Jésus (1563-1627)

Omnium expetendorum prima est sapientia Studies on Victorine thought and influence (Bibliotheca Victorina, 29), Brepols: Turnhout , 2021

À deux époques d'un puissant renouveau de l'Église, les victorins et les carmes – deux écoles rarement comparées jusqu'ici – ont pourtant en commun de décrire les chemins de l'homme vers Dieu en se fondant sur l'expérience, dans des écrits qui de part et d'autre ont exercé une autorité durable. En approfondissant les sources historiques et doctrinales du Carmel réformé, et surtout de ses auteurs les moins étudiés, on peut se rendre compte que des dépendances littéraires et des assimilations doctrinales ont existé entre Saint-Victor et l'école carmélitaine. La biographie et l'œuvre littéraire de Thomas de Jésus (1563-1627) manifeste un curieux croisement entre ces deux traditions. Son large corpus littéraire, édité seulement en partie, s'avère un locus privilégié pour détecter des canaux de transmission et de l'ampleur de l'impact des maîtres de Saint-Victor sur les auteurs spirituels du Carmel espagnol. Le présent article n'en donne qu'un tout premier aperçu.